Final Fantasy VII: Remake
7.5
Final Fantasy VII: Remake

Jeu de Square Enix (2020PlayStation 4)

Is this the Real Life? Is this just Final Fantasy?

J’aime beaucoup Final Fantasy 7. C’est un de mes Final Fantasy préférés mais ce n’est pas un de mes JRPG préférés pour autant. Cloud est mon Main dans Super Smash Bros Ultimate mais je n’ai pas pour autant des posters de lui dans mon appartement. Le Fan Service d’Advent Children me saoulait déjà à l’époque mais j’arrive tout de même à trouver le film sympathique. Cela vous donne un aperçu de ma tolérance personnelle envers Final Fantasy 7.


Tout ça, vous vous en foutez ? Pourtant, vous devriez vous poser la même question d’entrée de jeu : à quel point aimez-vous Final Fantasy 7 ? Quel est votre seuil de tolérance par rapport à cet univers ? Car croyez-moi, quoiqu’il arrive, votre patience sera mise à rude épreuve, d’une manière ou d’une autre, lorsque vous serez confrontés à ce Remake.


Nous sommes en effet en présence d’une étrangeté. D’une anomalie qui n’arrive pas à rentrer dans les cases préexistantes de cette industrie. J’ai toujours considéré le Remake de Final Fantasy 7 comme le Joker que SquareEnix se gardait en réserve si la situation commençait à empirer pour la licence. Et la situation a empirée.


Après le désaveu critique de la trilogie FFXIII, la première version calamiteuse de FFXIV et le développement Hell de FFXV, la licence vit des heures sombres. Des Nier Automata, des Persona 5 sont passés entre temps pour voler le cœur des amateurs de JRPG. Mais pourtant, en dépit de ses divers camouflets, SquareEnix a toujours porté en lui un atout pour subsister auprès des fans, l’assurance que l’héritage de SquareSoft était toujours aussi vivace auprès de la communauté, malgré les nombreux échecs de SquareEnix qui ont dénaturés la licence depuis.


Ainsi, Final Fantasy 7 Remake n’est pas un jeu qui essaie véritablement de conquérir un nouveau public mais bien une œuvre qui tente de reconquérir un public qui aurait été perdu en cours de route. Un titre qui n’essaie pas de s’embarrasser de clarifier son univers auprès des nouveaux venus mais tente au contraire de forcer le capital sympathie d’un univers déjà ancré dans la Pop Culture.


A ce titre, il représente l’une des expériences interactives les plus déroutantes auxquels j’ai joué durant ces dernières années et sur ce point-là, ce Remake aura au moins le mérite d’offrir une aventure atypique, comme chaque Final Fantasy avant lui.


Mais quant à savoir s’il est digne de l’héritage prestigieux dont il est censé assurer la pérennité, rien n’est moins sûr. Car plus que jamais, Final Fantasy 7 Remake est bien la preuve que l’héritage de SquareSoft s’est quelque peu perdu au sein de SquareEnix.


L’arrivée du train en gare de la Shinra…


Plus que le passage à la 3D, plus que les cinématiques bouleversantes, Final Fantasy 7 a représenté en son temps un impact significatif sur la narration dans les jeux vidéos, représentant pour beaucoup de gamers le premier jeu qui les sensibilisa à la puissance émotionnelle de la narration interactive, à tel point que le terme de jeu ne sembla soudain plus si approprié.


Et le moins que l’on puisse dire est que ce Remake semble parfaitement conscient de cet attachement émotionnel puisqu’il affiche une confiance totale et absolue dans la force de sa narration, avec même bien plus d’appoint que les précédents opus linéaires qu’étaient le dixième et le treizième volet.


Ainsi, Final Fantasy 7 Remake est parfois à la limite d’être un film interactif avec son Level Design désespérément linéaire, ses Force Walk à tous les étages pour camoufler les temps de chargements, ces personnages qui ne cessent de déblatérer des banalités toutes les trois secondes, sa caméra soudainement contrôlée par le jeu pour montrer le chemin à suivre (comme si on allait le louper…) et bien sûr, ces inévitables portes que seuls nos compagnons pourront déverrouiller à notre place.


Autrement dit, la narration vous allez la subir de plein fouet que vous l’attendiez ou pas dans ce Remake. Et c’est là que les choses commencent d’entrée de jeu à se gâter. Car pour légitimer le prix élevé d’un Remake qui se contente d’adapter à peine un dixième de l’œuvre originale, cette nouvelle version de Final Fantasy 7 se veut davantage une réinterprétation qu’un véritable remake à proprement parler, souhaitant ainsi apporter ces propres éléments narratifs au récit originel et imposant ainsi au nouveau venu de multiples passages inédits dont le principal intérêt, à première vue, semble clairement de rallonger artificiellement la durée de vie.


Et ces moments inédits, ces multiples rallonges à l’intrigue originelle, il y a fort à parier que même un novice saura les distinguer facilement tant ils tranchent en permanence avec le ton de l’univers que ce Remake est censé transposer.


Pourquoi cela ? Bah parce que…Comment dire les choses poliment ?


Bah, parce que c’est tout simplement nul à chier la plupart du temps.


Entre les méchants de la Shinra à peine dignes du Donjon de Naheulbeuk, les chapitres inédits qui ressemblent à des épisodes Fillers de Naruto et le Gros Comique de Service d’Avalanche qui ferait passer Jar Jar Binks pour un modèle de sobriété, n’en jetez plus, la coupe est pleine. Si vous étiez déjà allergiques à la manière dont Advent Children défigurerait parfois l’univers de FF7, c’est la crise d’urticaire assurée avec ce Remake.


Et pourtant, pourtant…Tout comme un animé Japonais, il y a aussi ces moments de grâce. Comme ces épisodes dans lesquels l’équipe d’animation a triplé le budget pour magnifier un moment particulièrement important de l’intrigue. Les combats de Boss de ce FF7 Remake constituent ainsi sa principale réussite car ils débordent de générosité épique et de mise en scène grandiloquente. Lorsqu’on pense que ce Remake a déjà donné tout ce qu’il avait à offrir à ce niveau-là, il fait pourtant des efforts stupéfiants pour galvaniser chaque affrontement principal avec une nouvelle intensité. Ainsi, même l’aspect Sac à PV des Boss parvient à être compensé par cette démesure épique qui donne le sentiment de vivre les grands affrontements des Animés Shonen qui étaient censés ne durer que « cinq minutes ».


Oui, tout comme un animé, car en réalité, FF7 Remake c’est exactement cela. C’est la version originale de DBZ, l’animé de Naruto dans la période Shippuden, ces moments où vous allez vous taper des tonnes d’intrigues secondaires inintéressantes, du remplissage de vide qui n’essaie même pas de camoufler son inutilité, le temps de vous endormir profondément après autant d’emmerdement avant de vous réveiller à coups de pied dans la gueule devant des moments d’Epicness absolu, ces affrontements épiques tant fantasmés , ces moments qui, dans le meilleur des cas, ne vous feront pas regretter de vous être autant fait chier précédemment.


Ainsi, je pense n’avoir jamais autant ressenti une expérience en dents de scie avec ce Final Fantasy 7 nouvelle génération. Lorsque ce Remake fait le boulot qu’on attend de lui, à savoir retranscrire l’œuvre originelle, il y a parfois quelques maladresses mais aussi beaucoup de belles réussites. Lorsqu’il tente de rallonger artificiellement l’expérience du jeu initial, il y a tout le temps des maladresses et de très rares réussites.


Au moins, le jeu a le mérite d’être assez clair sur ses intentions dès les premières heures de jeu. Nous sommes bien en présence de l’adaptation animée du Shonen à la mode qui prendrait inutilement son temps pour ne pas rattraper la publication du manga en cours. Ce qui est tout de même un peu risible pour le Remake d’un jeu culte qui a plus de vingt ans d’ancienneté mais il faudra faire avec.


Je suis vieux, Gandalf. Je sais que je n'en ai pas l'air, mais je commence à le sentir au fond de mon coeur. Et je... je me sens desséché, un peu comme du beurre qu'on aurait étiré sur une tartine trop grande.


Maintenant, qu’en est -il de ce Remake lorsqu’il ne s’écarte pas du droit chemin ? Lorsqu’il s’efforce enfin de faire un travail de modernisation d’une œuvre culte au lieu de s’éparpiller inutilement ?


Eh bien, il est alors confronté à un autre problème qui était malheureusement prévisible : celle du temps qui passe inexorablement. Comme mentionné précédemment, le jeu affiche une confiance absolue dans la force de sa narration mais aussi une conviction naïve qu’un script de 1997 peut être toujours aussi impactant avec les graphismes et la mise en scène d’un JRPG de 2020.


Et cela ne surprendra finalement personne mais il en découle un véritable problème de ton dans ce jeu. Tout est toujours poussé à l’extrême, que ce soit les démonstrations héroïques de nos héros (même quand l’enjeu est insignifiant puisque rappelons le, il ne s’agit que du début de l’histoire), les tentatives d’humour qui tombent souvent à plat ou les moments d’émotion qui forcent principalement le capital sympathie envers ces personnages qui nourrissent l’imaginaire collectif depuis plus de vingt ans. Bref, il y a toujours un décalage aussi prononcé entre des protagonistes qui agissent littéralement comme des personnages de dessin animé et des graphismes photoréalismes qui voudraient au contraire les inscrire dans une réalité.


Bref vous l’aurez compris, entre fidélité maladive et originalités grossières, le script de ce Final Fantasy 7 Remake peut sembler calamiteux à première vue et constamment tiraillé entre des aspirations contradictoires.


Cela ne veut pourtant pas dire que l’histoire soit elle calamiteuse pour autant. La force du matériau originel est toujours palpable et la puissance évocatrice de ses thématiques est toujours vivace. Les considérations écologiques du récit sont bien évidemment toujours d’actualité (on fait difficilement plus approprié par les temps qui courent) mais ce Remake a également le mérite de pousser davantage ses réflexions sur le terrorisme et comment le peuple de Midgar se retrouve pris en tenaille dans le rapport de force qui oppose Avalanche avec la Compagnie Shinra.


Et puis, il y a aussi ces moments où la mise en scène fonctionne, où le ton Over The Top fait mouche et provoque de sincères éclats de rire mais ils concernent principalement le passage du Wall Market, de loin le plus réussi de ce Remake car la tonalité de ce chapitre correspond justement au ton très exubérant de ce Remake.


Mais s’il fallait toutefois reconnaître un véritable mérite spécifique à ce Remake, c’est celle de soigner aux petits oignons son quatuor de personnages jouables.


Final Fantasy XV était déjà parvenu à rendre attachant son quatuor de personnages qui n’étaient pas franchement intéressants pris individuellement mais dont la force de leur amitié était l’un des rares piliers tangibles d’une expérience éparpillée et chaotique.


Ici, nous sommes presque dans une logique inverse, il n’y a pas réellement d’alchimie de groupe puisque les personnages ne cessent de se croiser et de se séparer mais ils ont pourtant tous le temps de briller individuellement, d’asseoir leur personnalité, de prouver que leur réputation n’est pas usurpée.


La mise en scène y est évidemment pour beaucoup et n’hésite pas à iconiser à outrance ses personnages car c’est bien de cela qu’il s’agit, au final. Cloud, Aerith, Tifa et même ce pauvre Barrett sont plus que des personnages de JRPG, ils sont devenus des icones de la Pop Culture Japonaise et ils sont véritablement traités comme tels. Alors certes, nous sommes plus dans une logique de fan service dont on pourrait contester la facilité mais à l’heure où tant d’icônes de la Pop Culture se sont retrouvées désacralisées durant ces dernières années, principalement du côté cinématographique, il est bon de voir au moins des protagonistes cultes qui ne donnent pas envie de se faire des Facepalm de consternation mais plutôt de célébrer leur retour en fanfare.


Le constat est toutefois plus mitigé en ce qui concerne Sephiroth puisque SquareEnix cède complètement à l’engouement des fans pour le mettre en scène à outrance quitte à dénaturer sa subtilité. Oubliez l’introduction progressive du jeu originel qui distillait le mystère inquiétant autour de ce personnage avant d’y être enfin confronté. Aux chiottes sa véritable première apparition en tant que Mentor Idéalisé dans le Flashback sur Nibelheim. Sephiroth est tellement ancré comme un méchant emblématique dans l’inconscient collectif que SquareEnix le met directement en scène en tant que tel…A ceci prêt, qu’à ce stade de l’histoire, Sephiroth ne fait rien de spécialement maléfique et un nouveau venu se demanderait presque pourquoi les protagonistes lui en veulent à ce point, au-delà de son iconisation machiavélique. Bref, un traitement qui n’est pas sans rappeler celui de Dark Vador dans Rogue One et ce ne sera d’ailleurs pas le seul parallèle à dresser avec le Star Wars Made In Disney.


Comme vous le voyez, il y a beaucoup à redire mais néanmoins, en dépit de son ton anachronique et de ses nombreux rajouts parasites, l’intrigue de ce Final Fantasy 7 Remake n’est pourtant pas dénuée d’intérêt. Il serait même possible de dire que ce Remake prouve une fois de plus la force de l’intrigue initiale dont l’attrait parvient à subsister malgré les multiples tentatives de ce Remake de le dénaturer ! Mais s’il fallait juger uniquement le travail de ce Remake dans sa transposition du récit original, le résultat n’est souvent guère reluisant et témoigne une fois encore de la confusion créative qui parasite les productions de SquareEnix.


La Petite Fille aux Matérias.


Maintenant, il faut parler de l’éléphant au milieu de la pièce. De l’élément qui a réussi à mettre toutes les critiques d’accord, même celles excessivement dithyrambiques envers ce Remake. Mais dont la gravité du problème a été toutefois largement sous-estimée dans les écueils qui ont été mentionnés sur cette étrangeté qu’est FF7 Remake.


Je veux bien sûr parler de la nullité intergalactique des quêtes secondaires.


Alors oui, c’est nul. Mais en réalité, c’est pire que nul. C’est le meilleur outil que ce Remake met à la disposition du joueur pour flinguer non seulement l’immersion dans son univers mais également pour enterrer définitivement un rythme qui était déjà bien laborieux et décousu rien que dans sa campagne principale. C’est le moyen idéal pour vous dégoûter définitivement de ce monde pourtant si fantasmé en traversant inlassablement les mêmes décors insipides pour y accomplir les mêmes objectifs insignifiants.


Alors, je veux bien comprendre que ces quêtes aient été réalisées avec un budget minimaliste, la majorité de l’argent étant vraisemblablement investi dans la mise en scène de la quête principale. Je veux même bien croire qu’elles aient été rajoutées à la dernière seconde, pour gonfler artificiellement la durée de vie et que les Quest Designers allaient devoir se débrouiller avec les sempiternels « Vas sauver tel PNJ ! », « Vas tuer tel ennemi ! » ou « Vas cueillir ces trois fleurs ! ».


Maintenant, on parle quand même d’un jeu culte qui a nourri l’imaginaire collectif depuis plus de vingt ans. Donc si après tout ce temps, SquareEnix n’est pas capable de nous sortir d’autres prétextes narratifs plus intéressants qu’aller chercher les trois chats du quartier ou retrouver les cinq enfants perdus dans les bidonvilles, je leur suggère vivement de changer de scénaristes. Les quêtes secondaires sont ainsi une incroyable occasion manquée d’approfondir un peu plus la Lore de Final Fantasy 7 (dont le background n’est pourtant pas toujours si limpide) et se complaisent dans la médiocrité la plus paresseuse et absolue.


Le problème étant que puisque les chapitres inédits de la quête principale ressemblent eux-mêmes à des quêtes secondaires foireuses de l’aventure originelle, si vous perdez en plus du temps à faire ces missions de mercenaires, vous allez avoir le sentiment pendant dix heures de jeu de faire du remplissage laborieux et des missions sans aucun enjeu émotionnel ou scénaristique.


Et qu’on ne vienne pas me dire que les quêtes secondaires des JRPG sont tout le temps merdique de toute façon. Je ne considère pas en 2020 que cela doit être considéré comme une fatalité, encore plus pour un Remake d’un titre aussi emblématique que celui-ci.


Généralement, je ne m’attarderais pas à ce point sur un élément à priori anodin mais ces quêtes secondaires ont vraiment représenté une perte de temps absolue, encore plus dans la mesure où elles n’occasionnent aucun Reward véritablement intéressant, donc il est inutile de faire preuve de bonne volonté à leur égard.


Donc sans déconner, NE FAITES PAS CES QUÊTES SECONDAIRES. Ça va vous foutre en l’air le plaisir de jeu, comme ça a été mon cas durant le quart de mon expérience avec ce Remake.


[Et d’ailleurs à ce titre, un petit aparté :


Attendez une seconde ? Une exploration dans des quartiers qu’on revisite sans cesse ? Des combats de Boss géniaux mais des quêtes annexes cheapos? Des cinématiques soignées avec des QTE dedans ? Un ton Over The Top Japonais et une emphase presque dirigiste sur la narration ? Ça me rappelle quelque chose. Non, c’est pas possible, ça n’a rien à foutre là.


Et pourtant…


Les amateurs de jeux vidéos Japonais l’auront peut-être déjà devinés mais nous sommes bel et bien en présence d’un Final Fantasy sous l’influence directe de la célèbre franchise des Yakuza. Que ce soit dans ses qualités (la mise en scène des combats de Boss et de certains évènements semble très clairement s’en inspirer) mais également ses innombrables écueils (exploration rébarbative, contenu allongé artificiellement, quêtes annexes inintéressantes). Quant à savoir si cette influence était vraiment appropriée dans le cadre d’un Final Fantasy, rien n’est moins sûr étant donné la structure très laborieuse de ce Remake.]


This Is Not The Midgar I Was Looking For


Mais qu’à cela ne tienne ! Si SquareEnix était de toute façon déjà réputé pour une narration laborieuse dans ses récentes productions estampillées Final Fantasy, la réputation qualitative de l’enrobage visuel et sonore associée à ce studio n’est également pas usurpée.



  • Hé oui, techniquement, le jeu impressionne. Particulièrement dans la modélisation des personnages principaux qui est tellement réussie qu’on se surprend à s’étonner en permanence des transitions fluides entre Cinématiques et Gameplay (encore une fois, le Quatuor est vraiment chouchouté dans ce Remake et constitue sa principale réussite). Ce qui met malheureusement en évidence la médiocrité des autres éléments en parallèle avec une modélisation de certains PNJ complètement larguée, des textures en retard et des défaillances visuelles dès que le joueur s’attarde un peu sur des détails, lorsqu’il essaie de ne pas suivre le fil conducteur dirigiste de l’intrigue (qui donne ainsi parfois le sentiment d’être aussi un effet cache misère sur la technique très inégale du jeu).


Mais au-delà de ces considérations techniques, ce Remake démontre surtout des failles en matière de Direction Artistique. En effet, le jeu effectue le choix assez contradictoire mais malheureusement pas très étonnant de la part de SquareEnix de tendre vers un photoréalisme parfois inapproprié. Ainsi, ce Midgar version Réaliste semble parfois se tourner vers une fusion improbable entre Londres et Tokyo mais sans parvenir à dégager de véritable spécificité propre.


C’était déjà un écueil largement décrié concernant le quinzième volet mais au moins, ce dernier avait -il toujours eu l’honnêteté de vendre sa « fantasy basée sur la réalité » et d’adopter tous les éléments de son univers en conséquence, même si on n’échappait déjà pas à des ruptures de ton assez étranges en matière d’ambiance.


Ici, pour l’une des cités les plus emblématiques de la saga Final Fantasy, quelque chose semble s’être véritablement perdu en chemin et à nouveau, le problème se situe dans le ton donné à ce Remake. Pourquoi s’acheminer ainsi vers un tel réalisme quand l’intention de l’œuvre originale était déjà de lorgner vers le Cyberpunk et le Film Noir ?


Quelques fulgurances de l’œuvre originelle sont pourtant toujours palpables, principalement lorsque le joueur contemple des immenses cités de néons, une fois la nuit tombée. Le passage en 3D de ce nouveau Remake a d’ailleurs le mérite de permettre au joueur de mesurer véritablement l’ampleur de la cité, le ciel étant quasiment en permanence obstrué par les contours de cette cité titanesque dont l’architecture évoquerait presque le labyrinthe écrasant de Blame !


Mais dans ce cas, pourquoi diable avoir mis en place ce cycle jour / nuit, complètement contre-productif en matière d’ambiance ?


C’était peut-être une extrapolation liée aux limitations techniques de l’époque mais le Midgar du FF7 originel donnait le sentiment d’être plongé dans une nuit perpétuelle, comme si cette cité titanesque obstruait même la lumière du ciel, plongeant les bidonvilles dans une obscurité permanente. Ce qui rendait d’ailleurs d’autant plus palpable le sentiment de respiration lorsque le joueur parvenait enfin à quitter Midgar pour rejoindre la World Map, découvrant le monde qui l’entourait après cette entrave Cyberpunk.


Dans FF7 Remake, tout semble paradoxalement plus terne dès que le jour commence à pointer le bout de son nez, le joueur n’a alors l’impression de n’évoluer qu’au milieu des ruines et des bidonvilles, véhiculant ainsi la même impression de redondance artistique qui avait déjà plombé l’expérience de FFXV (pourtant développé sur un moteur différent).


Bref, malgré la fulgurance de nombreux décors héritiers de l’œuvre originelle, Midgar ne semble pas autant briller de sa superbe qu’elle le devrait, surtout pour ce qui s’apparente comme le seul véritable décor central de ce Remake.


Il est d’ailleurs d’autant plus regrettable que les multiples chapitres inédits de ce Remake n’aient pas été l’occasion de découvrir de nouveaux quartiers inédits de la cité et d’approfondir un peu la diversité visuelle de ce lieu emblématique. Mais à nouveau, c’est surtout bel et bien un manque d’imaginaire auquel nous sommes confrontés.


PS : Bon par contre pour une raison qui m’échappe complètement, les chats sont incroyablement bien modélisés dans ce jeu. :p



  • Il est toutefois inutile de faire la fine bouche, en ce qui concerne la bande sonore. Je pourrais être un peu plus pointilleux que la moyenne en rappelant que certains Remix essaient tellement de proposer une réinterprétation originale que la force du thème musical initial s’en retrouve parfois un peu trop diluée. Mais après plus de vingt ans de réinterprétations musicales de FF7 en tout genre, il est remarquable que ce Remake ait réussi à imposer sa marque, musicalement parlant, même si tous les remix ne sont pas du même acabit et que certains nouveaux thèmes fassent quelque peu pale figure en comparaison des musiques originelles.


La VF ayant eu son lot de détracteurs, je me suis rabattu sur le doublage original Japonais, même s’il y a fort à parier que je donnerais un jour sa chance au doublage français (ne serait-ce que pour profiter de ce spectacle pyrotechnique sans sous titres et ayant toujours apprécié Bruno Choel en Sephiroth). Mais évidemment, le doublage Japonais demeure une valeur sûre, particulièrement pour les Seiyuus du quatuor principal et pour l’aspect encore une fois très Animé Shonen qui se dégage de cet étonnant Remake.


Ghost In The Cloud



  • En ce qui concerne les quelques autres points à aborder, il est temps d’évoquer un peu plus concrètement la question du gameplay à proprement parler. S’il y a bien un aspect sur lequel les productions SquareEnix ont du mérite par rapport à l’époque SquareSoft, c’est bien d’avoir essayé de dynamiser leurs systèmes de jeu pour s’émanciper du traditionnel Tour par Tour, dont je n’ai jamais été un très grand amateur, à titre personnel. Ce Remake de Final Fantasy 7 n’en démérite pas moins en essayant de proposer un système de combat hybride qui trouve un équilibre plutôt réussi entre Stratégie et Action RPG.


Dans la mesure où les combats occuperont tout de même une partie non négligeable de votre expérience de jeu, les affrontements de Final Fantasy 7 Remake constituent une de ses principales réussites, en réussissant à s’émanciper de l’aspect No Brain qui avait un peu parasité les combats de FFXV. Toutefois il serait encore là aussi possible de trouver à redire en ce qui concerne le bestiaire qui n’offre finalement pas un challenge extrêmement intéressant, en dehors des affrontements contre les Boss, et semble là aussi frôler parfois le manque d’inventivité propre.



  • Malheureusement, il est également difficile d’être enthousiaste en ce qui concerne la structure du jeu dans son ensemble. Comme mentionné précédemment, l’expérience dans sa globalité se présente régulièrement comme une sorte de film interactif mais qui n’assumerait pas toujours sa véritable nature, causant ainsi de nombreuses frustrations sur son cheminement désespérément linéaire et dirigiste.


Une frustration qui trouve son écho le plus attristant dans la présence de ses multiples Donjons, aussi peu inventifs qu’ennuyeux à parcourir. Malheureusement, c’est encore une impression exaspérante de Fillers qui se dégage de l’expérience de ce Remake, nous obligeant la moitié du temps à ralentir le rythme pour parcourir des Donjons insipides là où le joueur voudrait directement accéder à la suite de l’histoire.


Une durée de vie artificielle que ne parvient pas à compenser une avalanche de mini jeux, pas franchement inspirés pour la plupart, ce qui me rappela d’ailleurs pourquoi j’avais décroché aussi rapidement de Kingdom Hearts 3 et peut être ne suis-je finalement pas réellement réceptif à la démarche de Tetsuya Nomura en tant que Game Director.


La structure de ce FF7 Remake participe en tout cas autant à cette expérience en dents de scie que les nombreux rajouts narratifs dispensables de cette « réinterprétation » et confère au final le sentiment d’avoir affaire à une expérience qui aurait gagnée à assumer sa brièveté et son intensité épique, plutôt que rallonger désespérément sa durée de vie pour plaire aux actionnaires. Final Fantasy 7 Remake, un jeu de trente heures qui n’aurait jamais dû en durer plus de quinze.


Des Hommes et une Planète


Bref, il y a énormément à dire en ce qui concerne ce Final Fantasy 7 Remake mais quel est le sentiment qui prédomine lorsque le générique de fin fait enfin son apparition après une aventure qui se vit comme un ascenseur émotionnel, montant et descendant en permanence ? Hé bien, le constat qui prédomine est celui que nous sommes tout simplement en présence d’un manque d’imaginaire que ne parvient pas à camoufler la réalisation impressionnante du titre. Dès que le Remake essaie de sortir des sentiers battus, d’enrichir l’univers dont il avait déjà la charge de moderniser, il y a un effet maladroit, cahoteux, indécis qui se dégage de ce Remake tourmenté.


Que ce soit dans la médiocrité des quêtes secondaires, le niveau abyssal des chapitres inédits façon Fillers ou le Chara Design complètement largué sur les personnages inédits, tout transpire un manque d’imagination et d’inventivité. Tout transpire SquareEnix qui ne parvient jamais à se hisser au sommet de la créativité de SquareSoft.


Concernant la suite des évènements, il aurait été préférable que SquareEnix choisisse de se limiter plutôt au Remake et non à la Réinterprétation car ce n’est clairement pas dans l’émancipation qu’ils sont le plus à leur avantage. Malheureusement, la fin de ce « Remake » semble bien prouver le contraire en se prenant les pieds dans le plat concernant la mythologie qu’il était censé sublimer et en cédant très clairement aux fantasmes d’une génération qui a grandi avec le jeu originel.


Final Fantasy a souvent été comparé au Star Wars du JRPG et ce Remake pourrait finalement être à Final Fantasy 7 ce que Force Awakens était face à A New Hope. Une œuvre trop engluée dans sa nostalgie pour aller véritablement de l’avant et pour réellement enrichir l’univers dont il avait la charge d’assurer la pérennité.


Car oui, même s’il s’agit au bout du compte d’un Remake convenable dont les fulgurances épiques parviennent à ne pas trop entacher l’héritage qu’il ne parvient jamais réellement à sublimer non plus, il y a malgré tout une véritable forme d’aveu échec dans cette réinterprétation inattendue.


L’aveu que SquareEnix ne sait tout simplement plus raconter des histoires et ne sait plus mettre en place des mondes imaginaires qui resteront dans la mémoire des joueurs. Ce qui était justement les deux piliers de Final Fantasy de l’époque SquareSoft. Grâce à leur maitrise technique et le perfectionnement de leurs systèmes de jeu, leurs productions ne sont pas mauvaises pour autant mais elles ne sont ni de grands Final Fantasy ni d grands RPG.


Et malgré son importance indéniable dans la Pop Culture Japonaise, FF7 n’est plus le porte étendard du JRPG qu’il devrait être.


Ce qui entache ces retrouvailles tant attendues.

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le 19 avr. 2020

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Leon9000

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