Final Fantasy XII par ifrael
Allons droit au but : Final Fantasy 12 est l'un des plus grands RPG japonais de la Playstation 2. S'éloignant du point de vue adolescent et naïvement empathique de la mise en scène du précèdent épisode mené par Kitase, et extrêmement ambitieux dans sa volonté de capter son monde par l'angle double de ses conflits géopolitiques (à l'échelle "planétaire") et de leur conséquence au niveau affectif (à l'échelle intime du personnage), le jeu a pu en larguer plus d'un.
En effet, aux combats-spectacles et aux récits à la gloire d'un héros adolescent sur fond de romance typique, on a préféré adopter ici une distance de vue qui, constamment, replie les enjeux du monde, de la guerre, de la politique, sur le parcours et le vécu d'un groupe de personnages qui doivent composer avec leur façon d'être sans transiger; c'est à dire, sans "forcément" devenir les meilleurs amis "par magie" ni sombrer dans une sotte romance stéréotypée et attendue. La finesse de regard et la disponibilité des game-designers aux personnalités de leur héros contribue à rendre le jeu largement plus consistant et honnête que la majorité de la production du même genre. Déjouant les attentes scénaristiques, la trame narrative s'avance avec discrétion et parcimonie, dans cette volonté d'économie qui est aussi un refus de l'excès de zèle. La mise en scène de chaque moment clé est ainsi marquée par une retenue à l'égard des sentiments et des enjeux individuels, comme s'il s'agissait de saisir la véritable échelle de valeur des évènements, entre le niveau du singulier et l'Histoire globale. Cette préoccupation de la prééminence des enjeux politiques sur les petits tracas affectifs des personnages, comme déniaisage des enjeux des jeux vidéos traitant de guerre, tranche radicalement avec ce que l'on a l'habitude de voir dans la série, sauf bien sur dans les autres productions de Matsuno (FF Tactics en tête). Mais cette retenue et ce caractère clairsemé de la narration, peut être un peu trop espacée parfois, laisse au joueur de grands intervalles d'exploration spontanée du monde ouvert de FFXII : ce manque de lien entre les décors et la narration se fait parfois sentir et l'on peut se sentir un peu "en errance", dans l'attente d'une mise en perspective scénaristique. C'est peut être le défaut le plus sensible de ce jeu.
De façon plus évidente, le système de combat et d'exploration du jeu, héritée des MMORPG, est une petite révolution dans le cadre hiératique des RPG nippons. Pour une fois dans un jeu de rôle classique, la phase d'exploration n'est plus entrecoupée par les phases de combats, les monstres se déplaçant et se combattant à même le décor du jeu sans changement de séquence. C'est tout un ensemble de nouveaux concepts qui s'invitent pour la première fois dans un jeu de rôle japonais (gestion de l'aggro, du positionnement, nécessité de la mobilité en combat...) concourant à la mise en tension de l'espace. A la fois plus mature et plus moderne sur tous les plans, ce Final Fantasy, pour être un épisode exigent, est également l'un des plus gratifiant et des plus intègres.