Final Fantasy XV
6.5
Final Fantasy XV

Jeu de Square Enix, Hexa Drive et Xeen (2016PlayStation 4)

Il y aurait beaucoup de rapprochements à faire entre Metal Gear Solid V et Final Fantasy XV. Deux jeux au développement pour le moins chahuté, deux jeux sortis parce qu'ils devaient sortir et que les sirènes critiques n'auraient pu souffrir de nouveaux reports. Deux jeux très différents des sagas cultes desquelles ils sont tirés et donc... clivants. Différent, Final Fantasy XV l'est c'est certain. La série s'autorise une première incartade dans le domaine du "monde ouvert" et sort de dix ans de développement (même si le terme développement n'est pas juste - gestation conviendrait mieux), passant de versus XIII à ce XV à coup de trailers E3 et autres bandes annonces survitaminées qui finalement nous en auront bien trop montré.


Mais que vaut-elle cette nouvelle itération d'une saga cher dans le cœur de nombreux joueurs et au mien. Ne m'étant jamais vraiment remis de ma découverte de Final Fantasy VII dans une adolescence qui ne connaissait pas le J-rpg, de mes trop nombreuses parties, de ma découverte du farming contemplatif pour vaincre les armes émeraudes et rubis, de cinématiques me décrochant une rétine usée par des polygones mal texturés et trop sommaires, de musiques, de Séphiroth et d'une traduction incompréhensible laissant tout le champ libre à l'implicite... Oui, j'aime cette série, trop peut-être... Et du coup, chaque épisode est attendu, telle une madeleine de Proust, pour raviver des souvenirs enfuis, une flamme brûlant plus d'un souvenir ému que d'une véritable objectivité. Voilà comment le vieux con parfois un peu blasé que je suis devenu a accueilli ce nouveau Final.


Et tout commence pour le mieux, une bande de potes poussant leur voiture sur une route désertique, sur fond de Stand By Me... Fichtre que ce monde paraît beau, que les étendues semblent attirantes... C'est décidé, une fois arrivé au premier objectif (Hammerhead et sa vulg-sensuelle! Cindy) je pars à l'aventure à travers plaines et montagnes à la recherche de la moindre quête annexe. Le monde ouvert de ce Final Fantasy est beau, magnifique même. Si le désert des débuts ne laisse pas un souvenir impérissable, les paysages de Duscae sont pour leur part sublimes et artistiquement irréprochables. De jour surtout... Les nuits partagent l'obscur danger de celles de Dragons Dogma et dans les ténèbres les daemons rodent, rappelant aux aventuriers aussi naïfs qu'intrépides qu'une bonne nuit de sommeil vaut mieux qu'un bon coup d'épée avant le niveau 30... C'est pourtant beau de voir le soleil se lever sur ce monde vaste... mais vide... Si quelques créatures parcourent bien l'unvivers, il est par contre totalement déshumanisé, certes cela est plus ou moins justifié scénaristiquement par le fait que les gens se réfugient dans les villes pour éviter les menaces de la nuit tombée, mais tout de même, on se sent seul. Et ce ne sont pas les insipides quêtes de sauvetages d'automobilistes en détresse (prévoyez des kits de réparation) ou de randonneurs effrayés (prévoyez de potions) qui modifieront cette impression. Les villes justement sont au nombre de... deux dans ce Final Fantasy... lestallum où seules les femmes ont le droit de travailler dans la centrale éléctrique (hum) et Venis...-Altissia, sublime et pourtant trop restreinte... Tout cela résume assez bien cet univers, d'apparences grandioses mais dont on perçoit bien vite les limites une fois les voiles de l'illusion dissipés. Que ce soit clair, cela n'enlève rien au plaisir de s'y perdre à dos de chocobos (la régalia restera fixée sur ses routes), aux découvertes des donjons, caves et tombeaux labyrinthiques et tous vraiment différents et aux chasses aux monstres prenant une tournure épiques dès que l'on atteint le rang de chasseur 4.


Final Fantasy XV érige l'inabouti, les promesses non tenues et la frustration au rang d'art. Chaque émerveillement, chaque espoir de grandeur et d'absolu sont étouffés par l'étroitesse des possibilités. Une ambition démesurée et trop grande pour une réalité étriquée. FF XV est malade et à de nombreux niveaux, mais il est également malade de générosité. Les quêtes, même si elles sont loin d être toutes inoubliables, réservent parfois de belles surprises et des aventures épiques au sein de cavernes, donjons ou forêts peuplées de créatures immenses et magnifiques (il y a même des dédales qui font suite aux donjons une fois l'aventure bouclée). Il y a de nouveau du Dragons Dogma dans certains affrontement contre des ennemis aussi immenses que sublimes vous obligeant à utiliser l'étendue des possibilité d'un système de combat maitrisé et plaisant. Abuser des assauts éclipses, attaques par derrière et combinées, magies et modifier son équipe à l'aide du sphérier (réussi, mais pas aussi parfait que celui de FFX) s'avère plaisant. FF XV est un jeu d'à-côtés, non pas que son scénario soit totalement inintéressant, mais son coeur réside dans ces égarements qui nous permettent de partir en recherche des armes royales ou d'affronter des créatures toujours plus démesurées sur des orchestrations incroyables. C'est pourquoi, il serait absurde de vouloir 'rusher' cet épisode. Oui, c'est faisable et oui, le jeu peut se terminer en une vingtaine d'heures mais dans quel intérêt? La critique faite au jeu à ce sujet est d'ailleurs bien une des seules qu'il ne mérite pas, on ne peut pas lui reprocher nos attitudes de joueur (la quête principale de Skyrim est-elle longue si l'on décide de la traverser sans se soucier du reste?), si vous souhaitez établir un record de temps pour le compléter, mieux vaudra alors pour vous économiser quelques dizaines d'euros. Mention spéciale à certains tests de sites spécialisés (ah-ah) prétendant avoir fait presque tout l'annexe en 27 heures... Plus c'est gros...


Et puis, il y a les admirables réussites, la bande son, formidable et magnifiant chaque instant vécu (même si le combat -raté- contre le Léviathan est un hommage un peu trop appuyé à Skyrim), la bande d'amis qui fonctionne à merveille, bien loin du boys band qu'on nous laissait craindre, leur relation, leurs interactions sont justes et crédibles, la vraie prouesse de cet épisode. Le personnage de noctis, prince héritier d'un royaume dont il ne veut pas, qui se révèle bien plus sensible et fragile que la plupart des héros fades du jeux video actuel. Le système de combat, encore, les chasses aux monstres, toujours, et ce monde qu'on ne demande qu'à aimer... Et ces invocations éblouissantes de mise en scène dont le joueur est pourtant totalement dépossédé et qu'il ne verra peut-être jamais pour certaines d'entre elles.


Final Fantasy XV est un produit brisé dont les imperfections font parfois toute la beauté. Son scénario semble fait de moments maladroitement bricolés (on apprend pendant les chargements que les daemons viennent d'un virus transmis à l'homme par les moustiques...) et pourtant pas inintéressant. Ses 14 chapitres étranges, 8 nous permettant de profiter de la nouvelle ouverture de la saga et 6 nous mettant sur des rails lancés à tout allure, métaphore de ces 4 héros dans leur train au chapitre 10,11 et 12 vers un final halluciné et hallucinant -la scène la plus forte se trouvant au milieu du générique de fin- bien plus bouleversant que ce que l'on aurait pu croire au vu de ce qui précède... À condition de passer par un chapitre 13, audacieux mais idiot et raté dans sa conception, maniant l ellipse avec tranchant (Raven, mais que t'est-il arrivé?). Etrangement, on sort de FFXV rempli de souvenirs telles les photos prisent par Prompto tout au long de l'aventure. Le jeu marque, il laisse des images, semblables à une longue soirée entre potes. Il est triste et beau à la fois, parfait et profondément agaçant, abouti et déchiqueté; Final Fantasy XV est une œuvre pour le moins bouleversante et malgré toutes les déceptions, il fait partie désormais des jeux qui m'ont le plus marqué au même titre que Metal Gear Solid V. Au final, il ne laisse pas indifférent et posera une empreinte profonde sur qui lui donnera sa véritable chance.

jeds
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le 11 déc. 2016

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