À ne pas mettre entre toutes les mains !
Une excellente surprise.
Ce jeu propose une immersion incroyable. Graphiquement à la hauteur (parfois même impressionnant), bénéficiant d’une animation très naturelle (MoCap), d’une musique réussie, de doublages convaincants, d’une narration exemplaire et d’une mise en scène de qualité, Heavy Rain est une aventure qui se joue seul dans le noir. Le but n’est pas forcément d’avoir peur, mais tout comme un bon film, mieux vaut y jouer de longues périodes et dans de bonnes conditions, car le jeu repose principalement sur votre faculté à vous identifier aux protagonistes que vous aurez l’occasion de diriger, et d’un regard extérieur, le jeu perd toute sa saveur.
C’est un Thriller qui repose sur des décisions à prendre, sur des choix loin d’être évidents à faire, sur de la torture émotionnelle à certains moments, de l’action, du frisson, du suspense. Tous vos choix ne sont pas forcément importants, et l’histoire s’articule autour d’une trame globale, sur laquelle vous influez sans jamais la révolutionner. Vous jouez selon ce que vous vous sentez capable de faire, et selon ce que votre morale vous dicte. Le jeu est vicieux, car il tente de retranscrire les états émotionnels des personnages au joueur. Résultat, alors que vous êtes déjà stressé, et que votre personnage se met à stresser également, les actions à réaliser (sous forme de boutons/directions à presser, maintenir, relâcher, ou cumuler que l’on appelle QTE) deviennent de plus en plus difficiles. Il arrive par exemple que le personnage soit tellement confus que ses pensées deviennent troubles, et que donc les mots associés aux boutons à presser ne soient plus suffisamment lisibles pour faire un choix pertinent durant le court laps de temps imposé. Alors, comme dans la vraie vie, vous faites de mauvais choix à cause du stress ou par manque de temps, et vous vous en voulez. Si vous êtes réceptif au genre, si vous y jouez dans de bonnes conditions, autant vous dire que c’est une expérience qui vaut vraiment le coup d’être vécue.
Au niveau du rythme, cela se rapproche énormément de celui des jeux d’aventure. Sauf dans de très rares occasions, votre personnage n’a pas d’autre possibilité que de marcher (lentement ou normalement selon la pression exercée sur la gâchette, à la manière d’un Shenmue). L’équilibre est alors apporté par des scènes d’action interactives très pêchues, permettant de captiver l’attention des moins détectives d’entre nous, et de sanctionner par une bonne dose d’adrénaline certains de nos choix peu pertinents. Il y a beaucoup d’actions contextuelles sans conséquences ou de commentaires ne faisant pas spécialement avancer l’enquête, tout comme dans tout bon jeu d’aventure. Et c’est un plaisir de découvrir cet aspect descriptif et d’investigation dans du jeu vidéo console, car c’est quelque chose d’extrêmement rare. Si l’envie vous venait de vous y essayer, tentez le plus possible de vous préserver des moindres informations dessus : en effet, le mécanisme du jeu repose sur une trame scénaristique bien ficelée, sur ce que vous savez, et surtout sur ce que vous ne savez pas. Vous réduiriez la participation personnelle à la passivité si vous étiez amenés à trop en savoir.
Pour terminer, je dirai juste qu’il faut faire attention aux détracteurs de ce jeu. La plupart d’entre eux n’y ont pas joué, ou n’ont pas joué le jeu lorsqu’ils ont eu la manette en main. Beaucoup ont tout simplement été agacés par des déclarations maladroites ou un marketing peut-être trop insistant sur ce titre. Alors plutôt que de prendre le jeu comme une curiosité, comme une nouvelle expérience, il a été par certains parcouru superficiellement avec la ferme intention de, au choix, découvrir la huitième merveille du monde, ou d’en déduire que ce jeu était une sombre merde sans intérêt. Ce jeu étant très bon, mais n’étant pas parfait (ah la scène des allumettes…), et demandant une implication émotionnelle volontaire de la part du joueur, les forums croulent sous les avis négatifs (accompagnés de propos alarmistes, orduriers, voire condescendants) de joueurs blasés, non ciblés par le jeu, criant au scandale.
C’est dommage pour eux. J’ai vécu une aventure hors du commun, alors que je suis joueur depuis plus de quinze ans maintenant. Et c’est quelque chose de vraiment très rare. La dernière fois que j’ai été autant impliqué émotionnellement dans un jeu, c’était pour Shenmue II il y a dix ans de ça. Non pas que les autres jeux n’y soient pas parvenus, c’est juste qu’ils ne se risquent tout simplement pas à le faire.
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