La suite de trop

Quand j'ai fini Hellblade premier du nom, j'en suis ressorti avec une bonne impression. Le jeu n'était pas extraordinaire dans son gameplay mais avait le mérite d’avoir une histoire et une représentation de la psychose intéressantes, le tout servi par de bons graphismes. La fin se suffisait aussi largement à elle-même et l'arc de personnage de Senua semblait être terminé.

Pour capitaliser sur le succès du premier, Microsoft, qui a racheté Ninja Theory, décide malgré tout de faire une suite à cette histoire en essayant de reprendre ce qui avait marché. Hellblade II se loupe lamentablement sur presque tous les plans.

Le jeu est beau, on ne peut pas lui enlever cela. L'animation des personnages est réaliste, aucun clipping à l'horizon. Les jeux de lumières, notamment ceux de la torche sur les parois rocheuses, sont très bons. Les environnements sont magnifiques avec une véritable ambiance qui leur est propre. Et on sent vraiment pour certaines scènes une volonté de donner un rendu cinématographique et épique. Malheureusement, un jeu vidéo ça a aussi besoin de fond en plus de la forme.

Dans ses mécaniques, on retrouve tous les défauts du un en pire en plus d’en avoir de nouveaux :

• L’impression de simulateur de marche avec des chemins très linéaires avec des barrières invisibles et dont on ne peut pas dévier alors qu’on se trouve le plus souvent dans un environnement ouvert et naturel. Pas aidé par une Senua très lente même avec la marche rapide.

• Les énigmes avec des symboles à retrouver dans le décor sont ennuyeuses, incroyablement simples et rallongées de manière artificielle par la lenteur du personnages. Les autres, où il faut faire apparaître et disparaître des éléments de décors pour avancer, sont encore moins intéressantes.

• Les collectibles à retrouver sont encore plus nombreux qu'avant et complètement oubliables. Ils disparaissent aussi du jeu environ une heure avant la fin sans aucune raison.

• Les combats ont reçu le traitement assassin's creed 2.0, on affronte les ennemis à la chaîne alors qu’ils attendent chacun leur tour pour apparaître à l’écran en attaquant Senua dès qu’on a fini de trucider le dernier. Tout cela donne une impression de longues cinématiques interactives qui se répètent ad nauseam tout au long du jeu. Les types d'ennemis différents éveillent brièvement l'attention avant que les combats qui se répètent en boucle n'enlèvent tout intérêts.

• Tous les "boss" à part le premier sont des plaisanteries. Mention spéciale aux deux premiers géants où il faut juste arriver suffisamment près d’eux pour déclencher la cinématique pour vaincre. Avant l'affrontement, une longue scène d'exposition pour expliquer leur passé s'impose.

Narrativement, ce n’est pas mieux. Le plus gros point faible par rapport au premier jeu c’est la suppression de tout doute sur ce qu’on voit vraiment. Les hallucinations de Senua qui faisaient d’elle une narratrice peu fiable perdent de leur sens initiale puisque l’existence du surnaturel est tangible et avérée dans l’univers du jeu maintenant. Les autres personnages voient et connaissent les créatures surnaturelles et sa psychose finit recontextualisée comme étant une sorte de capacité magique et fait d’elle une sorte d’élue. Le récit se voit d’emblée retiré l’une de ses forces.

Le nouvel ajout du deuxième volet, les personnages secondaires, finit également par devenir un fardeau de plus. Il faut environ cinq heures pour terminer le jeu, il y a trois personnages secondaires qui vont nous accompagnés, chacun avec leur propre histoire en plus de celle de Senua, le jeu n’a tout simplement pas le temps de tout traiter. Leur développement est insuffisant et on ne s’y attache pas le moins du monde, en plus de prendre du temps qui aurait pu être dédié à Senua. Le développement qui lui est donné est mal géré. La fin ne résout d’ailleurs pas grand chose puisque l’on a aucune idée de ce qui arrive finalement à Senua et aux autres personnages après avoir battu le boss final sauf un.

Au final, Hellblade II rejoint la longue liste des suites ratées totalement dispensables.