Ce quatrième épisode de la célèbre série Heroes of Might & Magic est certainement celui qui a le plus fait parler de lui à sa sortie, fait couler le plus d’encre et animé le plus de débats. Boudé par son public habituel, il s’agit en réalité de l’épisode à part, l’épisode différent et qui fait tâche à côté de ses semblables. Un mauvais jeu donc ? Pas forcément, non. Mais un jeu qui laisse malgré tout un goût amer, loin de ce à quoi on s’attendait. Un jeu qui nous rend perplexe car on ne sait pas vraiment quoi en penser.
Le principal problème de HM&M IV, c’est d’être sorti après le III. Comme chacun sait, il est difficile de passer derrière la quasi-perfection sans avoir l’air ridicule, et c’est à ce quatrième opus qu’incombait la lourde tâche d’égaler son aîné. Et cela, New World Computing l’avait bien compris. Comment ne pas décevoir alors ? Quel choix faire dans ce genre de cas ? L’originalité. Il fallait créer un jeu novateur, surprendre pour espérer conquérir le cœur des fans de la première heure. C’était probablement un risque à prendre, mais qui ne s’est hélas pas révélé payant, car c’est en bouleversant les codes de la série que la licence a finalement fait fuir son public.
En effet, HM&M IV a introduit une foule de nouvelles mécaniques, toutes plus surprenantes les unes que les autres. Le principe des caravanes permettant de recruter les troupes à distance, les créatures qui pouvaient se déplacer sans faire partie d’une armée alors que les héros prenaient désormais part au combat, pouvant ainsi être tués lorsqu’ils n’étaient pas démesurément puissants. Parmi les nombreux changements il y avait également le système d’initiative complètement changé, les tirs à distance ne traversant plus les unités, la riposte simultanée, la suppression des améliorations des unités au profit d’un système de permutation nous poussant à faire un choix entre deux créatures pour chaque niveau, les unités neutres pouvant patrouiller sur la map, et bien d’autres que je ne saurais énumérer. Qu’on ne s’y trompe pas, HM&M IV reste un des meilleurs jeux de stratégie au tour par tour avec un gameplay de qualité et qui fonctionnent à merveille, une durée de vie quasi-infinie et une bande-son spectaculaire qui s’inscrit parmi les plus réussies du jeu vidéo.
Mais malgré ces qualités, on ne peut se voiler la face bien longtemps : cet opus dénature la série. Les factions se retrouvent mixées les unes aux autres, le design a changé du tout au tout, l’univers n’est plus le même et ça se voit. Et avec ce gameplay qui est à des années-lumière de ce que proposait la franchise auparavant, c’est la désillusion la plus totale car on n’a simplement pas l’impression de jouer à un Heroes. Où est passé le Donjon, cette cité caverneuse et oppressante, la Tour et ses contrées enneigées ? Que sont devenus les dragons d’or, les manticores, etc. ? Avec cet opus, on a perdu cette magie qui caractérisait jusqu’alors la série.
En conclusion, HM&M IV fait figure de vilain petit canard au sein de sa fratrie toujours plus nombreuse. Victime du succès de ses prédécesseurs, il se voulait novateur pour éviter de tourner en rond, une intention louable. Mais on demeure mitigé. Car HM&M IV reste un bon jeu, voir un des meilleurs du genre pour ceux qui ne connaitraient pas la franchise ou qui sont prêts à passer outre, mais un mauvais Heroes car la magie caractéristique de l’univers auquel on nous avait habitué s’est évaporée.