Temps de jeu : 10 heures
Mon quatrième League of Legends
Mon deuxième A League of Legends Story
Test rédigé pour Nintendo-Difference [#87]
Le 16 novembre 2021, le Nintendo eShop accueillait deux nouveaux jeux estampillés Riot Forge. Fers de lance de cette nouvelle branche du studio Los Angélien (jusqu'alors essentiellement connu pour le mastodonte eSport qu'est League of Legends), il s'agit ici d'une gamme centrée sur des expériences solo et créées par des développeurs tiers. Avec Ruined King, façonné par Airship Syndicate, Riot Forge proposait un RPG au tour par tour dans la plus pure veine de leur Battle Chaser : Nightware. Cette fois-ci, c'est au tour de Choice Provisions de proposer un titre mêlant runner et jeu de rythme avec Hextech Mayhem, pour la modique somme de 8,99 €. Réputé pour leur série Bit.Trip, les joueurs avertis attendent du studio un jeu particulièrement difficile, comme souvent avec les Bit.Trip Runner. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'ils ont visé juste.
On explose d'abord, on parle après
Hextech Mayhem : A League of Legends Story met en scène les aventures de Ziggs et Heimerdinger, deux scientifiques de génie dont le but et les méthodes employées diffèrent grandement. Les amateurs d’Arcane, la série animée tirée de League of Legends, reconnaîtront le petit professeur précautionneux de Piltover. Affublé de ses lunettes reconnaissables entre mille, il s’agit ici du rival des joueurs. En effet, c’est bel et bien dans la peau de Ziggs, un autre Yordle, qu’ils parcourront la trentaine de niveaux. Moins académique, pour ne pas dire plus explosif, Ziggs adore tout faire sauter. Sa spécialité ? Les bombes et autres dynamites en tous genres. Que les amoureux de lore ne s’attendent pas à une histoire développée ou une mise en scène particulièrement recherchée, puisque le titre de Choice Provisions est essentiellement axé sur son gameplay. Il n’empêche, ce récit proche du gendarme et du voleur lancés dans une course poursuite sans fin, est entièrement doublé dans plusieurs langues. En français, ceux-ci sont excellents et collent parfaitement à l’aspect cartoon qui se dégage de l’univers, notamment avec ses nombreuses chamailleries ou le sarcasme inhérent au personnage de Ziggs.
Pour le reste, le jeu se déroule uniquement dans la fameuse région de Piltover, là où le quotidien bien rangé des aristocrates et autres privilégiés sera troublé comme rarement il l’aura été. C’est forcément dommage, car cela signifie un manque évident de variété dans les environnements du jeu, à condition de pouvoir admirer ces derniers. Il faut dire que le titre est particulièrement ardu et demande une concentration de tous les instants sur les obstacles se dressant ici et là. Pour la majeure partie du public, pas le de temps de scruter les décors donc, mais il faut admettre que la direction artistique, plutôt plaisante, apporte un autre regard sur la cité du progrès. Au-delà de la ville en elle-même, Ziggs devra échapper à la milice locale, mais aussi à son professeur lors d’un combat de boss (trois au total, mais impliquant toujours Heimerdinger et un automate inventé par ses soins) ; rien de bien folichon, ni de très étendu au niveau du bestiaire, mais comme toujours, ce n’est pas là le point fort attendu dans un jeu de rythme, ni même dans un runner.
Hé, mais où est passée cette bombe ?
Au cours d’un niveau, Ziggs devra récupérer de nombreux rouages dorés, trois rouages cyans et un rouage en argent. Pour cela, il devra sauter, effectuer des charges vers le sol, mais aussi envoyer ses bombes signatures. Dans cette symphonie d’explosions, prendre un coup ne signifie pas la mort. En effet, après avoir été touché et transformé en esprit durant quelques secondes, le joueur devra effectuer la bonne commande pour revenir en chair et en os et ainsi espérer atteindre la fin du stage sans trop d’encombres. Il est donc possible de finir un niveau entier sans le jouer, mais cela signifie ne rien récupérer et ne pas débloquer la suite de l’aventure. Chaque stage demande un certain nombre de rouages dorés, tandis que les boss requièrent un minimum de rouages cyans. Enfin, les rouages argentés, plus difficiles à obtenir que les autres et uniques dans chaque niveau, peuvent être échangés contre des costumes pour Ziggs ; certains sont inédits, d’autres issus de League of Legends.
Autant le dire tout de suite : le titre de Choice Provisions est particulièrement exigeant, et ce dès le premier niveau. Pour les néophytes, le premier contact peut se montrer glacial. Même pour un joueur de niveau moyen, atteindre la complétion totale d’un niveau au-delà du premier relève de l’exploit, tant le niveau d’exécution requis est élevé. Il faut dire qu’Hextech Mayhem : A League of Legends Story cache bien son jeu… et ses règles ! En plus des rouages à collecter, les niveaux sont également bourrées d’actions cachées, secrètes, bonus, etc. Appelez-les comme vous le désirez, elles n’en demeurent pas moins particulièrement déstabilisantes tant qu’on n’avance pas dans le jeu et les différents tutoriels. Une technique consiste à tirer une bombe dès que l’on récupère un rouage doré, puisque placé en amont d’une action cachée. Le mieux reste encore de finir l’aventure une fois pour débloquer le mode Action totale, dans lequel toutes les invites de commande sont affichées, notes cachées comprises. À partir de là, et à force d’entrainement, la progression personnelle du joueur sera inévitablement perceptible.
Comment ça, ça a l'air dangereux ?
C’est bien là le principal défaut du jeu : Hextech Mayhem ne laisse pas la place à la détente, mais encourage au contraire à une concentration de tous les instants, ainsi qu’à essayer encore et encore pour atteindre le plus haut des rangs. Allant de Fer à Challenger, comme les rangs classés dans League of Legends, les plus hauts se méritent réellement, Choice Provisions ne cherchant jamais à complimenter pour rien le joueur. Les premières heures seront les moins amusantes, mais dès lors que le déclic se fait et que notre exécution s’améliore, difficile de nier le plaisir total que procure le jeu. On a tout simplement l’impression de marcher sur l’eau, à enchainer les commandes comme jamais on ne s’en saurait cru capables, le tout sur le rythme de la bande-son et les explosions dynamitant les rues tranquilles de Piltover. Comptez environ quatre heures en ligne droite, et beaucoup plus si vous cherchez les 100 %, la faute d’un mode Impossible dans lequel aucune invite de commande n’est affichée. Un mode réservé aux plus masochistes, s’il fallait le spécifier.
Côté technique, rien à redire, tant en mode téléviseur qu’en mode nomade, malgré une lisibilité bien moindre dans le second usage. C’est davantage au niveau de sa bande-son qu’Hextech Mayhem nous déçoit, et plus encore lorsqu’on prend en compte qu’il s’agit d’un jeu de rythme. Pas foncièrement mauvaise, cette dernière se révèle surtout répétitive, ou tout du moins trop homogène. On en retient aucun éclat, pas même lorsqu’on enchaîne correctement les notes et qu’on entre dans un mode « fever » où s’ajoutent des nappes sonores et une nouvelle balance des sons. Pire encore, la présence de trois DLC répondant au doux nom de Boombox, lesquels comprennent trois niveaux et trois chansons tirées de l’univers étendu de League of Legends. Du K/DA avec POP/STARS, MORE ou THE BADDEST, mais aussi le thème musical de Jinx, GIANTS de TRUE DAMAGE ou encore les thèmes officiels des championnats du monde de League of Legends (Rise, Legends Never Die et Phoenix), rien que ça. Autant de bangers auditifs qu’il faudra payer au prix du jeu de base si on désire prendre la totale.
Conclusion
Hextech Mayhem : A League of Legends Story est et restera sous de nombreux radars, la faute de l'univers dont il est tiré, mais également aux genres qu'il explore. Pire encore, les quelques curieux risquent de détourner leur regard dès lors qu'ils devront faire face à la difficulté sans pitié du titre, pourtant pétri de qualité. Les mécaniques de jeu y sont géniales, les doublages de haute volée, sans oublier l'enrobage visuel plaisant, tout en étant suffisamment discret pour ne pas gêner la traversée des niveaux. Le prix riquiqui incite lui aussi à sauter le pas, quitte à ne pas accrocher au délire élitiste du soft. Pourtant, il faut bien avouer que pour les amoureux du lore ou tout simplement de bonne musique, le titre de Choice Provisions ne semble faire aucun effort ou presque. La relation professeur-élève entre Heimerdinger et Ziggs se contente du strict minimum, comme la mise en scène, tandis que la bande-son se montre redondante, à moins de passer à la caisse et de doubler le montant de la note en échange des meilleures musiques du jeu. Bref, si vous êtes un try-harder de l'extrême, que les Runner de Choice Provisions vous plaisent et que l'univers de League of Legends est un plus pour vous, il n'y a véritablement aucune raison de bouder ce bon titre. Pour les autres, on vous recommande chaudement de passer votre chemin.