Hitmarathon : 4/6
Après l'expérience en demi-teinte proposée par Contracts, je mettais beaucoup d'espoir dans Blood Money. Il s'agit non seulement du jeu dont Contracts faisait la promotion, mais aussi de l'épisode préféré des fans si j'en crois plusieurs avis glanés sur le Net.
Et ouf, la franchise repart dans une bonne direction !
L'agence pour laquelle bosse 47 est victime de plusieurs attaques de la part d'une agence de tueurs à gages rivale, tandis qu'un débat sur le clonage déchire l'Amérique et attire l'attention sur lui. L'histoire du jeu est assez dense et pas forcément très bien expliquée, puisqu'on multiplie les flashbacks qui ne sont pas toujours très bien liés entre eux. Rien de trop grave en soi, mais le potentiel narratif de la série reste assez mal exploité au bout de ce quatrième jeu, c'est dommage. Malgré les ambitions de cet épisode, Hitman 2 reste mon scénario favori de la franchise pour l'instant.
Bon point en ce qui concerne les coupures de journaux en revanche. Chaque mission est en effet conclue par la une d'un journal décrivant la mort de notre cible, mais aussi des petites blagues dans des encarts séparés (genre chiens écrasés) et une actualité plus nationale qui aide à comprendre les enjeux géopolitiques du moment. Pas mal, mais en plus le contenu de l'article principal est modifié en fonction de votre résultat ! Si vous avez été repérés par un témoin par exemple, une description physique sera donnée par l'article, et si vous avez été très mauvais au tir, le journaliste vous traitera d'amateur. Une manière amusante de juger le joueur, au-delà du score.
Car oui, c'est le retour de la mécanique de scoring/argent, absente après Hitman 1. 47 peut de nouveau utiliser sa thune pour acheter des armes ou des améliorations qui l'aideront dans la mission, et c'est beaucoup mieux fait que dans le jeu original. Les améliorations coûtent très cher, donc les dollars amassés par notre alopécié favori ont une réelle utilité.
On peut même utiliser la thune pour supprimer des preuves de son passage, ce qui influe sur le système de réputation globale de 47 (une réputation trop élevée le rend facilement repérable). Bref, une belle amélioration d'une mécanique que je ne pensais plus revoir.
Et ce n'est pas la seule avancée, car Blood Money apporte beaucoup de nouveautés qui révolutionnent la série. On peut ainsi prendre un otage pour s'en servir de bouclier humain, lancer certaines armes comme des couteaux, mais c'est surtout la première apparition de la pièce de monnaie, objet désormais culte de la série qui permet de distraire des gardes.
Autant de nouveautés m'a même un peu déboussolé, et j'ai finalement utilisé peu de ces éléments lors de ma partie (en particulier la prise d'otage, assez peu intuitive à sortir). Le jeu reste parfaitement jouable sans ces artifices, mais il mériterait que je m'y repenche après avoir regardé quelques vidéos de joueurs aguerris.
Ces mécaniques sont pourtant bien introduites dans un niveau tutoriel très linéaire, faisant apparaître une boîte de dialogue à chaque étape pour vous indiquer quoi faire. J'ai eu très peur car j'ai pensé que tout le jeu allait être autant sur rails, mais heureusement c'est limité à ce tuto (qui n'est d'ailleurs que le deuxième de la série, après celui d'Hitman 1). Ouf !
Les niveaux du jeu sont plus ouverts que jamais, sans forcément être aussi labyrinthiques que dans les précédents opus. C'est un très juste équilibre, permettant beaucoup d'approches pour le joueur tout en le désarçonnant rarement. Certaines solutions sont toutefois loin d'être évidentes, et il y a quelques niveaux comme l'opéra ou le casino que j'ai passés en mode bourrin pour certaines cibles, étant bien infoutu de comprendre comment le jeu espérait que je les atteigne discrètement.
Blood Money introduit également les morts accidentelles, qui n'éveillent la suspicion de personne. Par exemple, saboter le gaz dans la cuisine d'une cible permet de créer une explosion qui n'attirera pas l'attention sur vous, alors que l'exécution se fait à la vue de tous. Pratiques et spectaculaires, ce sont de petits puzzles qui ne sont pas toujours évidents à réaliser mais très gratifiants une fois accomplis.
Quelques missions proposent même des objectifs originaux, comme droguer un allié pour faire croire à sa mort, puis aller le récupérer à la morgue. Je sais bien qu'on est dans une série qui se nomme littéralement "tueur à gages", mais j'adorerais voir plus de missions où on ne tue personne dans le futur et où on doit juste se servir de notre discrétion.
Graphiquement, le jeu est très beau. Sans atteindre les plus belles productions de la PS2 (on est en mai 2006, donc c'est la toute fin de vie de la console), on sent le bond graphique par rapport aux trois premiers épisodes et je ne peux qu'être enthousiaste à l'idée de voir la série passer à la HD, car les décors et personnages sont vraiment soignés dans celui-ci et n'ont plus la vibe Half-Life que je trouvais charmante dans Hitman 1 mais qui a vite vieilli. Des niveaux bourrés de PNJ comme celui de la Nouvelle-Orléans m'ont vraiment mis une bonne claque et fait réaliser le chemin parcouru depuis 2000.
L'OST est très sympa, peut-être la meilleure de la série grâce à sa qualité orchestrale. Le jeu nous accueille sur un Ave Maria de toute beauté avec un visuel d'église ensoleillée, ça en impose forcément. D'autres morceaux renouent avec la bande-son héroïque de Hitman 2, je valide totalement.
Je suis moins fan du nouvel agencement des boutons par contre. On a désormais deux boutons d'action, ce qui complexifie pas mal les choses pour rien. Le menu déroulant des premiers épisodes me semblait bien plus adapté, surtout sur PC. Le bouton pour dégainer a aussi été placé sur le même bouton que l'inventaire, ce qui n'est pas franchement pratique. Bref, même si quelques améliorations sont bienvenues (l'augmentation de la vitesse accroupie, enfin !), j'admets n'avoir jamais été totalement à l'aise avec les commandes, ce qui n'était pas le cas auparavant.
L'IA ennemie a quant à elle fait un énorme bond en avant. Les PNJ ne sont pas en permanence sur la défensive et on peut désormais avoir un comportement inapproprié sans qu'ils ne dégainent immédiatement leurs flingues. Dit comme ça, ça a l'air d'une bête casualisation, mais si vous pensez ça, vous n'avez clairement jamais été repéré par un garde dans les précédents jeux en n'ayant strictement rien fait de suspect, ce qui créait une alerte générale dans la zone.
Et autant le scénario du jeu n'est pas fou, autant sa conclusion est incroyable. On doit infiltrer la Maison Blanche pour tuer le Vice-Président, rien que ça, et la mission se conclut par de faux crédits qui vous mènent au Game Over. Mais si vous brisez le script, vous aurez droit à une ultime mission ! Pour le coup, celle-ci n'est pas très bonne et consiste en une fusillade assez nulle où vous êtes en position d'infériorité et sans les upgrades achetées au préalable, mais vraiment, quel incroyable quatrième mur !
J'ai déjà vu de faux crédits dans des jeux comme Donkey Kong Country ou Kid Icarus Uprising, mais ici ils sont parfaitement vrais et n'ont pas du tout l'air d'une blague, ça rend la bad ending d'autant plus surprenante.
Revenons tout de même un instant sur cette séquence de fusillade pour évoquer un problème présent depuis Contracts et que je ne comprends pas : le fait que 47 mette trois plombes à crever quand sa vie tombe à zéro. L'écran se teinte de rouge et l'action ralentit, ça met bien 15 secondes avant que sa mort ne soit validée par le jeu et on n'a même pas accès au menu pour relancer sa sauvegarde dans ce laps de temps.
Contracts ne proposait pas de mission de fusillade donc cette situation m'est rarement arrivée, mais j'ai bien dû la subir à une dizaine de reprises rien que dans cette mission de Blood Money, donc c'était chiant et je ne comprends vraiment pas le projet.
Bref, quelques détails mis à part (et un nombre de missions relativement bas par rapport à Hitman 2), ce quatrième épisode est une perle, qui réunit tous les avantages de ses prédécesseurs et peaufine la formule sur laquelle bosse IO depuis 6 ans. C'est un très chouette jeu d'infiltration qui permet à la série de quitter la génération PS2/Xbox la tête haute, avant un rachat par Square Enix qui semble n'avoir pas été du goût de tout le monde. Nous verrons cela !