Réputé très difficile, parfois même comme un modèle de difficulté pour tout gamer se prétendant gamer. I Wanna Be The Guy, comme son nom l'indique, c'est le sacro-saint parcours initiatique de celui qui veut devenir un true, et être accepté dans le club très fermé des true gamers tavu. Sur le papier ça se présente en tout cas comme ça, mais en soit c'est plus une séance de bizutage qu'autre chose.
Fers de lance des jeux indépendants et amateurs, les jeux de plate-forme 2D pullulent, et IWBTG fait partie de ceux-là, sûrement l'un des précurseurs du mouvement sur cette gen , puisque sorti en 2007, développé par un gars dans une cave, Michael O'ReDilly, a.k.a. Kayin. Par contre moi je ne suis venu à bout que de IWBTG Gaiden, apparemment plus court et moins atroce, mais j'ai joué un moment par la suite au jeu original, et maté quelques speedruns, et ma critique reste plus ou moins la même que ce soit pour l'un ou pour l'autre.
On contrôle donc The Kid, dont le but est de gagner le titre de The Guy, en gros le big boss de son petit monde improbable. Nous de notre côté on veut, en bons gamers ultraskilled en manque de reconnaissance virtuelle, se prouver qu'on peut mener The Kid vers son objectif, au travers d'une quête initiatique sinueuse et qui s'annonce atroce, et c'est peu dire. Au niveau des contrôles c'est facile à comprendre, c'est Megaman, le bâton au cul en moins : On peut sauter plus ou moins haut et loin, et on peut tirer des petites balles de pixels avec son petit gun de bonhomme qui font pas bien mal contre des ennemis qui, eux, nous one shot inexorablement, sans l'espoir de pouvoir encaisser ne serait-ce qu'un seul coup. [Dans Gaiden on a un grappin en plus, qui apporte un peu plus de variété dans le gameplay, mais une purge à manier] Simple, simpliste.
Mais ce qui spécifie IWBTG, c'est qu'il s'agit d'un die & retry, avec tout ce qu'il y a des codes du genre, dans le peu qu'il y a de bien dans le genre, et dans le beaucoup qu'il y a d'inintéressant surtout – attendez avant de mettre un pouce rouge, lisez la suite –. Même au niveau de difficulté le plus bas, puisqu'on a le choix de la difficulté, on a donc droit à une pelletée incommensurable de pièges retors et létaux, impossibles à déceler sur la route sans être tombé dedans au moins une fois, même si on se doute bien qu'il y a un truc de louche. Un genre qui a eu sa période de gloire injustifiée du temps où les maso s'adonnaient en surnombre aux jeux vidéo. Ce qui sauve un die & retry – puisque en soit, en prenant les mécaniques de ce type de jeu tout seul, c'est vraiment con et abrutissant au possible, au mieux on développe sa paranoïa et rien de plus, ou laissez-moi un commentaire pour défendre le genre – c'est ce que le jeu a à proposer à côté pour capter et investir le joueur. Je pourrais prendre Limbo par exemple – attendez avant le pouce rouge... –, où on est confronté à un univers glauque et morbide, où l'aspect die & retry dessert l'ambiance du jeu, et impose des situations tout aussi dérangeantes que l'univers lui-même, en impliquant le joueur à chacune d'elles, sans réel temps mort dans la ballade qui suit son court dans les Limbes.
Dans IWBTG, à lier avec ses mécaniques de jeu, il n'y a quasiment rien qui fait un bon jeu à jouer : Un level design totalement quelconque, et pas fin pour un sou, des ennemis qui ne le sont pas plus, et placés un peu n'importe comment aussi, une progression qui elle est complètement hachée – à chier aussi ? –, à l'ouest et incohérente, comme le level design en fait aussi. IWBTG est développé avec du néant, et flotte dans l'absurdité. Et c'est bien pour ça qu'il est bien quand même, et côtoie le génie.
Parce qu'en outre, IWBTG reprend tout l'univers 8-bits et 16-bits des jeux vidéo, de quoi satisfaire une autre castes de true : les nostalgiques (à inclure les scatophiles et nécrophiles). Le jeu est en effet bourré à ras de bord de références de jeux d'époque, allant jusqu'à reprendre des décors tels quels pour le level design, mais aussi des sprites et ennemis bien connus de tous, On notera aussi quelques clins d'œil de fin connaisseur de la part de Kayin puisqu'il y a même des glitchs et des bourdes incluses dans les jeux référencés qui ont fait le voyage au passage. Et le traitement fait la dessus est tout juste hilarant.
Si en soit, le jeu est pas bien intéressant à jouer, toute la subtilité de sa difficulté, à lier avec le débile de cette difficulté, se révèle dans le fait qu'elle se base sur la logique d'un joueur. Toutes nos bonnes habitudes deviennent des mauvaises habitudes à absolument oublier. Là-dessus le jeu gère très bien, et on sent que son auteur connaît un minimum son sujet pour desservir des situations qui font affreusement chier, mais qui sont à mourir de rire tant elles sont surréalistes, en tirant parti de tout ce que je citais un paragraphe plus haut, même si la finesse manque toujours au rendez-vous dans IWBTG et dans IWBTG Gaiden. Et c'est bien dommage en somme. L'infamie du jeu va jusqu'à simuler un plantage, ou nous crever dans ce qui s'apparentait à une cutscene où on pouvait calmer ses nerfs jusqu'à se rendre à l'évidence. On rage mais on se marre tout de suite après tellement ce jeu nous pousse loin devant le gouffre qui nous sépare de la sanité d'esprit, et à péter les plombs. Alors forcément mentalement, y a des séquelles. Et je parle même pas des checkpoints qui sont placés pour nous avoir à l'usure.
Visuellement sinon, c'est ignoble, entre le moteur du jeu franchement pas terrible, plus mauvais que celui de RPG Maker, et les patchworks des univers de tous les jeux réunis, ça devient l'absolu du n'importe quoi, mais ça soutient tout l'absurde du reste. Et au niveau des musiques, Kayin a choisi de reprendre des thèmes de jeux bien connus et bien pêchus pour saupoudrer le tout d'un ton IWBTGesque en fait. Je me marrerai toujours devant ce riff qu'on entend quand on meurt tellement c'est tout bonnement stupide, délicieusement déplacé par rapport à l'image et déboussolant les premières fois.
Pour conclure, IWBTG c'est vraiment à chier. Le seul mérite que je lui donnerais honnêtement, c'est cet « humour de gameplay » présent que dans une infime poignée de jeux. Et comme le jeu tourne non stop autour de cet aspect, au final on se marre tout de même bien, et il devient au final amusant, tant qu'on ne bloque pas. Une pure parodie des jeux vidéo en somme. Il aurait peut-être mérité la finesse d'un bon Kaizo Mario World, mais c'est surement trop demander pour un jeu amateur sorti de nulle part et parti de nulle part. Je recommande tout de même aux joueurs de la période NES / SNES qui ont du temps à perdre en jeu, ça leur parlera forcément. Puis c'est gratuit, encore bien heureux que ce soit le cas. Rien à y perdre, et sinon c'est cadeau pour les masos qui ont la corde nostalgeek, et qui la réclament goulûment sur le derch... IWBTG ne demandera aucun consentement.
6 – Y a un bien truc, mais...
(Mais si l'aigreur et l'inculture vidéo-ludique m'animaient : 3.)
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