Une conclusion satisfaisante après une suite audacieuse

Après le tournant opéré par Jak & Daxter 2 et son accueil critique mitigé, on pouvait s’attendre à ce que Naughty Dog conclue sa trilogie d’une autre manière mais il n’en est rien. Jak 3 s’inscrit dans la continuité de son prédécesseur, ce qui me va très bien, et ça saute aux yeux très vite. La question est plus à mon sens s’il est trop dans la continuité au point de constituer une suite un peu trop facile ou s’il s’en démarque suffisamment pour avoir de l’intérêt en soi. À noter que le jeu est un moment de transition important pour le studio puisqu’il est co-dirigé par l’emblématique Jason Rubin, que l’on retrouvait sur tous les Crash et Jak, et Amy Hennig qui reprendra le flambeau pour toute la trilogie Uncharted. Je vous propose l’écoute de Monk Glider pendant la lecture, une musique bien planante (comprendra qui pourra).

GAMEPLAY / CONTENU : 7 / 10

Jak & Daxter 3 est donc une suite très directe au deuxième épisode dans son game-design. Il y a une remise à niveau des compétences et des armes de Jak mais on reprend très vite ce qu’on avait déjà dans l’épisode précédent pour arriver aux nouveautés assez nombreuses. On a toujours les 4 armes précédentes mais avec cette fois-ci deux variantes chacune qui peuvent vraiment proposer une nouvelle arme à elle-seul. Ces dernières peuvent être assez originales par ailleurs avec des ondes de choc au sol, des arcs électriques...

Même avec ses 12 armes, le jeu arrive à trouver des moyens de nous les faire utiliser à tour de rôle avec par exemple des missions où on en a qu’une seule de façon aléatoire avant de passer à la suivante, ce qui est plutôt bien vu. Quant aux compétences, le jeu n’est pas avare en nouveautés non plus avec de nouvelles capacités pour Dark Jak et une nouvelle forme avec Light Jak qui s’accompagne de ses propres capacités bien utiles. Peut-être un peu trop utile d’ailleurs, le challenge a été revu à la baisse.

C’est sans doute en réponse aux critiques, amateures comme professionnelles, qui se sont plaint de la difficulté de Jak 2 qui selon moi était tout à fait justifiée et bien calibrée la plupart du temps. Je regrette un peu ce retour en arrière mais d’un autre côté ils n’ont fait qu’écouter les joueurs donc ça se comprend. Par contre, j’ai constaté une légère mais pénible régression dans la maîtrise du game-design à quelques rares moments avec des petites mécaniques inédites assez mal expliquées qui m’ont bloqué à plusieurs reprises inutilement, ce qui ne m’était pas arrivé dans les deux autres Jak.

Sinon, pour revenir sur du positif on a également un mélange de montures animales et de véhicules qui se distinguent encore plus les uns des autres avec l’inertie, la vitesse, le type d’attaque, le type de saut… Je relie ça à la grande diversité des situations de jeu qui nous sont proposées, non seulement le gameplay de base est très étoffé et offre plein de possibilités mais en plus il y a plein de séquences originales qui viennent s’y rajouter, à la manière d’un Crash Bandicoot 3 dans sa saga, Jak 3 s’enrichit de cette façon et ça le rend très fun.

De façon moins attendu, les améliorations facultatives à débloquer sont plus nombreuses et si dans l’idée c’est très bien, ça se mêle mal avec le challenge revu à la baisse qui fait que ces améliorations rendent le jeu encore plus facile et quand on peut spammer des attaques ultra-puissantes qui mettent un terme au combat dès son début, il y a quand même un petit soucis. Enfin, le jeu est légèrement plus court que son aîné avec un troisième acte clairement précipité mais la durée de vie d’une bonne douzaine d’heures reste très honorable.

RÉALISATION / ESTHÉTISME : 8 / 10

Sans surprise, Jak & Daxter 3 propose à nouveau un monde ouvert assez vaste à parcourir avec les mêmes qualités (taille, observation…) et les mêmes limites (unique point d’entrée et sortie, distance d’affichage nette…) que d’habitude. On se rend bien compte de cette réussite quand on a la possibilité de survoler tout le désert qui m’a vraiment impressionné pour le coup même si la distance d’affichage nette n’est pas terrible bien évidemment. L’esthétique s’y différencie pas mal du reste de la saga avec ce côté un peu tribal dans les armes, les tenues, les véhicules...

Cela dit le désert comme nouvelle thématique environnementale principale n’exclut pas d’autres types d’environnements (volcaniques, forestiers...) et cet environnement majeur inédit, là encore réponse aux joueurs se plaignant de l’environnement jugé trop grisâtre d’Abriville au début de Jak 2, se complète par ailleurs avec pas mal de recyclage d’environnements bien connus avec ses variations assez surprenantes. C’est plutôt bien foutu même si je pense qu’il y a un recyclage d’assets un peu trop prononcé par moment par rapport à l’épisode précédent, mais c’est pas bien méchant non plus et le fait de redécouvrir sous un autre jour des environnements familiers est même plutôt sympa.

C’est dommage par contre que les deux grandes zones du jeu ne soient pas interconnectés en temps réel, au moins vers la fin du jeu. Je suis sûr que ça aurait été faisable avec une séance de vol en temps réel ou quelque-chose du genre et ça aurait apporter beaucoup à l’immersion je pense, dommage mais j’avoue être assez exigeant là pour un jeu de 2004 et le monde ouvert en tant que tel est très réussi techniquement. Il est aussi mieux servi par le cycle jour / nuit que dans l’opus précédent, ce qui ne gâche rien.

Le sens de la mise en scène lors des cinématiques s’inscrit dans la continuité de Jak 2 en ce sens qu’elle est souvent assez poussée, ce qui est toujours bon à prendre même si on ne retrouve pas le bon significatif de Jak & Daxter The Precursor Legacy au deuxième évidemment. Sinon, on retrouve toujours un certain soin du détail qu’on était en droit d’attendre au niveau des animations par exemple, plus quelques ajouts mineurs sympathiques comme l’apparence de Jak qui évolue petit à petit au cours du jeu.

Enfin, la composition musicale est peut-être celle que je préfère de la trilogie mais honnêtement c’est pas non plus un gros point fort, elle est juste pas mal la plupart du temps et de temps en temps bonne, jamais excellente, inoubliable... Josh MANCELL, compositeur quasi attitré de Naughty Dogs depuis le premier Crash Bandicoot, a profité de la présence de deux autres compositeurs et c’est peut-être ce qui explique ce petit gain de qualité qui contribue à cette réalisation et à cet esthétisme non sans défaut mais qui reste de très bonne qualité à mon sens.

SCENARIO / HUMOUR : 6 / 10

Le scénario démarre comme une suite scénaristique à Jak 2 dans lequel nos actions n’auraient pas tout résolu et le jeu s’emploie à le rendre cohérent très vite pour que ça ne fasse pas trop étrange ou frustrant. Rien ne laissait présager de ces difficultés à la fin du 2 mais j’associe ça aux nombreux défauts de cette fin qui expliquait très mal la transition avec Torn et les grenagardes, les conséquences de la défaite du chef des Metal Heads… ça savonnait d’emblée le travail de Jak 3 pour son début.

L’univers renégat avait tout de même été subtilement introduit avec le personnage de Sig dans Jak II donc c’est pas non plus un changement WTF et mal amené, mais la transition d’un épisode à l’autre reste un peu brutale. Certains parmi vous me diront sans doute qu’on s’en fout on est pas là pour l’histoire, mais je suis désolé il y en a une, elle a de l’importance dans l’aventure, donc elle en a pour ma critique et si elle ne démarre pas super bien, elle se rattrape quand même un minimum par la suite.

La personnalité de Jak continue d’évoluer, s’il était plutôt en quête d’amusement dans le 1 en sauvant le monde au passage, en quête de vengeance dans le 2 en ayant ses bons sentiments le rattrapant in fine, ici il est plutôt blasé de sauver le monde et de manquer de reconnaissance mais il va quand même le faire pare que c’est l’élu, il est gentil dans le fonds… rien d’extra-ordinaire bien sûr mais je trouve que ça marche bien parce qu’il a son caractère et une évolution cohérente au fil de ses aventures et surtout de ses mésaventures.

Il y a un petit manque par contre d’antagonistes charismatiques en face et de rebondissements inattendus par rapport à un Jak 2 particulièrement réussi dans ce domaine, qui encore une fois ne foirait véritablement que sa fin. De plus, le jeu combine assez maladroitement ses efforts pour donner par moment dans le mélancolique avec des morts supposément émouvantes et dans l’humour déjà beaucoup plus efficace mais arrivant juste avant ou après les moments plus sérieux, ce qui est un peu idiot.

Sinon, l’humour lui est en effet toujours efficace et même quand on va regarder les bonus facultatifs débloqués je continue de sourire, voire de me marrer franchement, devant certains gags ou devant certaines façons de briser le quatrième mur, notamment quand il parle du futur de la saga, donc il n’y a pas de soucis à ce niveau-là. Il y en a pas non plus au niveau du doublage français même si les nouveaux doubleurs ne sont pas aussi marquants que ceux du 2 je dirais pour chipoter, mais là c’est vraiment un détail.

CONCLUSION : 7 / 10

Très proche du deuxième opus, Jak 3 ne manque pourtant pas d’intérêt ou d’identité mais un peu moins complet, un peu moins maîtrisé, un peu moins bien scénarisé... le rendent légèrement inférieur au grand frère qui reste selon moi le meilleur de la saga même si Jak 3 est aussi bon dans son registre et que je l’ai parcouru et reparcouru avec plaisir. Il réussit à bien conclure sa trilogie et c’était sûrement là l’essentiel. Enfin, n’en oublions pas Jak X.