Knuckles' Chaotix par Manga
Depuis l'apparition de la mascotte de SEGA aux débuts des années 90, près de 150 jeux estampillés Sonic ont vu le jour. A la base héros d'un jeu de plateforme, le hérisson s'est tour à tour grimé en pilote émérite ou sportif infatigable. Tout comme la firme de Haneda, et nous en sommes les premiers à le déplorer, la création de Naoto Ôshima s'est quelque peu égarée, apparaissant aux côtés d'une quantité astronomique de protagonistes plus ou moins charismatiques. Heureusement, certains personnages sont sortis du lot, comme Tails, Amy ou encore Knuckles. Comme son compère renard, l'échidné a eu droit à sa propre aventure avec le jeu vidéo Knuckles Chaotix. Voici la présentation de cette production hors-norme, le tout enrobé d'une multitude d'anecdotes.
Sorti en 1995, Knuckles Chaotix est ce qu'on peut appeler le fer de lance de la 32X, cette machine hybride venant se greffer à notre bonne vieille Mega Drive. Cette production, très originale, est passée par différents stades de conception qui font qu'il est difficile de l'oublier. C'est au cours de l'année 93 qu'un prototype nommé "Sonic Crackers" (parfois appelé Sonic Stadium) voit le jour. A l'époque, les programmeurs n'hésitent pas à créer différentes bases de travail, servant de support pour de futures productions. Si la plupart terminent généralement aux oubliettes, certaines profitent d'idées originales, comme c'est le cas ici. Sonic Crackers, qui serait, selon certaines sources, une ébauche à un Sonic the Hedgehog 4 (qui n'a finalement vu le jour que très récemment via les plateformes de téléchargement de la Xbox 360, Wii, Apple Store et Playstation 3), est donc un prototype mettant en scène Sonic et Tails. A la différence des autres jeux "classiques" du hérisson, nos deux héros sont cette fois liés par un anneau. C'est ce travail réalisé en amont qui va donner vie à Knuckles Chaotix.
Une taupe verte
Avant de se concentrer sur le jeu en lui-même, il est intéressant de revenir sur le cas de ce cher Knuckles, héros racé représentant à merveille le dynamisme de SEGA à l'époque. Comme pour la création de Sonic, un grand concours d'illustrations a été lancé dans les locaux de SEGA Technical Institute (STI, société américaine rattachée à SEGA dont sont sortis des jeux de grande qualité comme Sonic 2, Sonic 3, Sonic Spinball, Comix Zone, Kid Chameleon...) et c'est un certain Takashi Yuda qui a remporté le "prix" des hautes instances de la firme. De l'aveu de son créateur, il ne s'agit en rien d'un hérisson mais plutôt une taupe à épines, avec des piques disposés vers l'arrière. Si la vitesse est la spécialité de Sonic, Knuckles puisse son charisme de sa force. Il peut également planer à l'instar de Tails. Ce que l'on sait moins en revanche, c'est que le personnage était vert au préalable, mais il est devenu rouge au cours du développement, sans doute pour créer une véritable démarcation avec le bleu de Sonic. Très apprécié du public américain, il a fait son apparition dans Sonic 3 et a perduré dans le temps. Un gage de qualité.
Un pour deux, deux pour tous
Convaincu du potentiel du 32X, SEGA of America souhaite lancer une production digne du support, et matérialisant à merveille la puissance de l'add-on technique. A l'aide du prototype Sonic Crackers, les développeurs se mettent au travail sur le futur Knuckles Chaotix, alors appelé Knuckles Ring Star (ou Ringstar), son ancien nom de code. Considéré comme la suite directe de Sonic & Knuckles au Japon - là-bas, il s'appelle Chaotix tout simplement -, c'est en 1995 que le soft débarque sur les trois continents (à quelques mois d'intervalle). Le jeu met en scène Knuckles aux prises avec les robots de Robotnik, désormais appelé Eggman dans nos contrées, comme c'est le cas au Japon depuis son apparition. Comme tout jeu Sonic qui se respecte, il s'agit de terminer le niveau en dix minutes tout en évitant les pièges de l'affreux moustachu. Pour se faire, ce spin-off reprend le gameplay de Sonic Crackers, à savoir un anneau élastique liant deux protagonistes. Ou quand la réflexion se marie à la vitesse... Ce qu'il intéressant de savoir, c'est qu'une légende urbaine affirme que Yuji Naka aurait refusé d'apporter son soutien à Knuckles Chaotix, estimant que celui-ci faisait de l'ombre à la Saturn. Le 32X étant un projet américain, il a alors refusé que Sonic & Tails soient utilisés dans la production de STI. Si cette version des faits n'a jamais été confirmée, on peut raisonnablement penser qu'il s'agit de la réalité. Il suffit de se remémorer l'épisode du moteur de Nights into Dreams qui devait être utilisé pour Sonic X-Treme (un jeu Saturn qui n'a jamais vu le jour) mais dont l'accord fut refusé par Yuji Naka. Dire que les relations entre les équipes occidentales et japonaises étaient tendues est un doux euphémisme.
Mon précieux
Pour mener à bien son enquête (le scénario occidental diffère de la trame japonaise), notre taupe à épines peut compter sur des compagnons de fortune, aux caractéristiques bien distinctes. C'est ainsi que, tour à tour, les niveaux s'enchaînent en compagnie d'Espio, de Mighty, de Vector ou encore de Charmy (ils sont rejoints par la suite par Heavy & Bomb). Tous ces protagonistes sont soit des créations originales (Espio), soit des resucées de travaux préparatoires ou de productions déjà existantes, mais le résultat est sympathique. La présence de l'anneau élastique demande un certain temps d'adaptation, la plupart des réactions étant parfois incontrôlables. Vous pouvez ainsi bloquer l'anneau pour relâcher la pression, ce qui a pour effet de vous faire partir comme une fusée, ou alors attraper votre compère afin de le balancer sur une plateforme surélevée. L'idée d'interaction avec le second personnage, si elle est plutôt intéressante, peut devenir énervante, et on a parfois envie que notre pot de colle nous lâche les basques. La présence d'items n'y change pas grand-chose, le jeu alternant sans cesse vitesse et réflexion. L'archétype du soft qui a le fondement entre deux chaises, mais qui immerge dès lors qu'on se penche sur son cas.
Délires psychédéliques
Bien que jouable à deux, Knuckles Chaotix n'a rien d'un foudre de guerre, car on a plutôt tendance à s'emmêler les pinceaux. Il n'en demeure pas moins assez fun, grâce notamment à la présence de bonus stages en 3D très bien fichus. Le jeu profite également d'une réalisation d'orfèvre, avec des environnements très colorés et une 2D impeccable. La 32X n'est pas exploitée à sa quintessence mais le travail rendu par les développeurs est satisfaisant. Le tout est servi par des musiques de grande qualité et une durée de vie assez importante (30 stages dispatchés en 6 environnements).
Par son aura originale, Knuckles Chaotix est l'un des titres les plus recherchés sur 32X et il n'est pas étonnant que son prix tourne, en moyenne, aux alentours de la centaine d'euros. Nombreux sont les fans à adorer le jeu et c'est vrai que cette cartouche a tout de la pièce de collection, à garder précieusement. Il tente de s'extirper du syndrome Sonic et il le fait plutôt bien. Il faut simplement savoir à quoi s'attendre...
Article publié sur Total-Manga.com