League of Legends, et c'est sans doute ce qu'il faut lui reprocher, est bien plus qu'un jeu: c'est une communauté fermée, réunie tout à la fois par une langue - qu'elle partage - et par un système d'élo - qui la départage -. Un système compétitif extrêmement bien rodé, un gameplay nerveux, renforcé par des règles qui interdisent au joueur de partir avant la fin, exploitent les circuits de la récompense dans une boucle sans fin. On ne voudra pas rester sur une défaite: on ira perdre davantage; on ne voudra pas rester sur une victoire; on voudra encore gagner davantage.
Dans tous les cas, les émotions sont exacerbées, et on ne sait où donner de la tête : quel champion jouer ? quelle stratégie adopter ? y aura-t-il ou n'y aura-t-il pas pentakill ? Une fois pris dans la boucle, le temps passe, la carotte recule à mesure qu'on avance, et un sentiment de dégoût prend finalement le pas sur le fun. Le jeu devient sa propre fin, et il ne reste au joueur, plutôt qu'un sentiment de plénitude dû au souvenir de (réels) bons moments de jeu, qu'un sentiment de vide, de scrupule, un sentiment de honte provoqué par l'intuition de s'être laissé rouler et de ne pouvoir s'en prendre qu'à lui-même.