Je vous ai parlé de ce pote à moi. Ce pote chez qui le jeu vidéoludique, la dégustation de curly et le fumage intensif de moquette verte à fleurs étoilées était devenu un art de vivre, un véritable projet artistique. http://www.senscritique.com/jeuvideo/Resident_Evil_2/critique/23118330
C'est en passant le prendre, il y a déjà quelques années de ça, pour aller faire quelques courses:
Faire le plein de Curly, d'apéricubes et autres minizza. Un vrai régime de "Gamer".
Faire le tour du rayon alcools, béats, en quête de nouveauté éthylique, pour tenter d'étancher cette soif de découverte; et passer chez notre pépiniériste aux yeux rouges faire l'achat de quelques plaques de ce gazon biologique qui rend content.
C'est ce jour-là que je fis la connaissance du "Metal Gear Solid" de Maître Kojima.
Me voilà devant sa porte, cette porte taguée de sens interdit discriminatoires où facteurs, voisins et cons en tout genre étaient formellement proscrits.
Seule certaines catégories bien spécifiques avaient la chance de pénétrer l'antre de la bête, comme par exemple:
Les amis de longue date accompagnés d'un pack de bières, ces fameux pépiniéristes rastas aux yeux rouges et aux mains pleines et des gonzesses aux seins énormes, à la virginité douteuse, dont la pudeur se serait perdue sur le chemin en même temps que leur petite culotte (Une catégorie, hélas pour lui, beaucoup moins représentée devant sa porte).
Je frappe... Rien... J'entre. J'aperçois mon vieil ami.
Il se tourne vers moi l'air inquiet, le regard dur, me faisant signe de la main de ne surtout pas parler et de me déplacer avec la plus extrême prudence.
Rampant sur la moquette percée de trous de boulettes et maculée de liquides douteux, j’atteins péniblement le canapé et grimpe dessus sans le moindre bruit.
Mon ami est nerveux, tendu, en éveil comme il ne l'a sans doute jamais été.
Je lui demande à mi-voix ce qu'il se passe; vif comme l'éclair, il met sa main devant ma bouche en regardant méfiant autour de lui et me montre l'écran de sa télévision d'un signe de la tête.
Un homme. Un homme seul à l'assaut d'un cargo bourré jusqu'à la gueule de "motherfuckers" de première.
Largué pour foutre le rifle sur un tanker qui abriterait un nouveau prototype de Metal Gear développé par l'US Marines.
Mais le piège vient de se refermer sur le joli petit cul de Solid Snake.
Seul contre tous. Mon pote me regarde, la peur se lit sur son visage.
Ne dis rien ma couille, j'ai pigé ! A toi de jouer cowboy !!
Planquer des plombes derrière un pylône attendant une saloperie de garde pour le shooter en pleine tronche, ne pas oublier de planquer sa carcasse encore fumante dans ces casiers de rangements pour ne pas alerter la garde.
Surprendre ces enfoirés qui veulent faire péter notre bonne vieille planète, en leur lançant un "Freeze !" d'outre-tombe avant de leur tirer un coup de pistolet hypodermique dans les roubignoles.
Se planquer sous des caisses, se faufiler à la vitesse de l'éclair, devenir un fantôme, une ombre.
Un putain de ninja avec la gueule de Kurt Russel.
Il est là son devoir !!
C'est une aventure extraordinaire. C'est l'immersion complète dans le virtuel et l' "infiltration game" à son apogée.
La révélation que le jeu vidéo n'est pas que ce triste chemin balisé que l'on suit bêtement jusqu'à la révélation finale aussi fade qu'un épisode de "Joséphine Ange Gardien".
Kojima ne crée pas que des jeux, Kojima est un créateur d'émotions, un inventeur de mondes.
Un alchimiste manipulateur qui transforme ta manette de "Play" en fusil mitrailleur, ton canapé crasseux en pétrolier infesté de mercenaires de tout poils et ton ami bedonnant et "bédo" nnant en un soldat d'élite surentraîné.
Je me levais et partis discrètement, laissant mon ami aux prises avec l'odieux Revolver Ocelot.
Je me retournais avant de fermer sa porte d'entrée et je le vis. Un ventre tendu et rond comme un ballon où trônait fièrement un reste de curly entre les plis de son tee-shirt "Megadeth", des yeux rouge sang mi-clos fixant cette lumière cathodique et ce joint, ce bédo, ce merveilleux trois-feuilles en train de s'éteindre paisiblement entre ses lèvres séchées par la concentration. Un héros.
T'es un héros mon pote ! Tout simplement.