Un truc cool avec les jeux gratuits sur l'Epic Game Store c'est qu'en plus on peut les acheter chacun de son côté. Ainsi, après une partie catastrophique de Crusader Kings II (dans laquelle j'ai littéralement été éliminé en 45 minutes) je me suis aperçu que ma copine avait lancé de son côté Mutazione, un jeu que j'avais aussi pris parce qu'il était gratuit. Aucun de nous n'en avait entendu parler auparavant.
Nous voilà donc parti à jouer au jeu, chacun de notre côté, elle sur le canapé, moi sur le bureau, de 1h à 4h du matin, en train de jouer tranquillement les aventures d'une jeune fille sur une ile tropicale. Ce qui restera sans doute l'un des meilleurs moment de ce pénible confinement. Elle, ayant une avance d'un ou deux chapitres sur moi me teasait sans arrêt : "Hors bordel" "Qu'est ce qu'il y a ?" "Je peux pas te le dire, tu verra quand tu sera au chapitre 5 !"
Mutazione ne réinvente rien de fondamental : c'est un point & click très simple (ici pas d'énigmes, et de combinaison d'objets improbables) qui raconte l'arrivée de Kai, une jeune fille sur Mutazione, une ile sur laquelle cohabite des mutants et des humains. Tous forment une petite communauté dans laquelle Nonno, le grand père de Kai est un pillier. Le rencontrant pour la première fois, celui-ci est mourrant et cherche à lui transmettre son pouvoir permettant de faire pousser des plantes.
On est dans du pur narratif, mais ça n'est jamais ennuyeux : même si on sent bien que les embranchements dans les dialogues sont assez artificiels, on se sent très vite impliqué dans l'histoire. Ça fonctionne surtout parce que la dizaine de personnages de la petite communauté sont tous assez attachants. On sympathise avec eux, on apprend à connaitre leur passer et on a le coeur brisé quand la communauté commence à se déchirer .
Pour avoir connu des communautés de gens s'étant mis en marge, vivant à la campagne ou dans des trucs un peu hippie, je connais cette ambiance : tout le monde s'adore, tout le monde a appris à vivre ensemble mais il existe des tonnes de non-dits et de secrets qui une fois révélé pètent violemment. (Et souvent c'est l'arrivé d'une personne extérieure qui va causer ça....)
Un truc qui les rend vivant, c'est qu'il y a une sorte d'emploi du temps. Dans les points et clics les personnages restent à la place où vous les avez laissé et ne se mettent à s'animer que si vous leur passer l'objet (ou la ligne de dialogue) dont ils ont besoin. Ici, le jeu est séparé en journée et chaque journée est séparée en période (Matin, midi, après midi, soir, nuit) et à chaque période les personnages font quelque chose de différent : ils bossent des trucs dans leur coin, se baladent, débattent.
A vrai dire, une grande partie de ces moments sont optionnels : pour chaque période de la journée vous avez deux, voire trois actions à faire grand maximum. Ce qui fait qu'on peut très bien rusher le jeu en 5 heures si l'on est pressé. Mais le jeu nous invite justement à flâner, à prendre des initiatives on se retrouve face une conversation animée à laquelle on aurait jamais pris part si on était pas entré dans le restaurant à ce moment là u de se balader sur un chemin à la recherche de graine et de croiser un personnage qu'on ne pensait pas voir.
Bon, après, ça a eu tendance à devenir une obsession chez moi : a chaque nouvelle période, je faisais le tour du village, histoire de voir s'il y avait pas un élément de dialogue ou une scène sur laquelle tomber et je me suis limite maudit pour ça, là où ma copine l'a fait en mode pépère sans forcément chercher à tout regarder. Mais ça lui est arrivé de regarder le jeu derrière mon épaule et de faire "quoi, mais j'ai jamais vu cette scène là" ou que je lui apprenne des trucs sur un personnage qu'elle ignorait. A vrai dire chacun fait comme il l'entend.
Ce qui caractérise Mutazione c'est qu'il est ultra-généreux dans la mise en scène de son pourtant petit univers : chaque scène de dialogue est scriptée avec l'animation qui va avec et l'expression corporelle ou faciale qui change. Le fait que la direction artistique soit assez simple a tendance à nous faire oublier tout le travail d'animation de fou qui est derrière parfois pour des passages auquel le joueur passera à côté. (Je pense à tout un passage où l'on peut trainer avec Tung et regarder la télé avec lui.)
La direction artistique est sublime : c'est beau, c'est fluide, on a l'impression de se balader dans des tableaux. Le tout pour un jeu qui ne pompe pas trop de ressource, ce qui est un plus. Alors oui, le design de certains personnages est parfois bizarre : je me suis gratté la tête devant le fait que certains personnages étaient des petits pois ou des saucisses qui parlent... mais au fur et à mesure ça s'intègre bien à l'univers où monstre et humains cohabitent. Le tout avec une atmosphère assez mystique sur la fin.
Ha, et la B.O. est somptueuse entre musique atmosphérique et musique d'ambiance (avec parfois de la guitare rapellant le côté "tropical" de l'île.) En même temps le jeu a tout une partie basé autour de la musique liée aux plantes que tu vas jardiner. Je crois qu'on est dans le genre d'OST que je vais réécouter.
Bon, tout n'est pas parfait non plus : il y a des trucs auquel je n'ai pas accroché, le jeu secondaire permettant de faire pousser ses propres plantes est lassant au bout de 5 minutes et le début du jeu nous offre une encyclopédie des plantes du jeu. (Enfin d'une bonne moitié.) On se dit que les descriptions qui sont dedans vont servir plus tard, et j'ai parcouru une partie des pages consciencieusement... alors qu'en fait, non, c'est juste une encyclopédie de la flore écrite par le grand père de la protagoniste.
Après avoir fini le jeu ma copine à fait : "Ok, c'était vachement bien, y a un autre jeu dans le même genre" et j'ai eu un gros coup d'hésitiation.
Jeu fini en 12 heures