New Super Mario Bros. U par Angel

Une nouvelle console de Nintendo sans Mario, c'est un peu comme la mer sans l'écume, comme l'écume sans le sel, comme le sel sans le poivre, bref c'est un chagrin d'amour. La firme de Kyoto ne l'a que trop bien compris avec la 3DS puisqu'il a fallu que le moustachu vienne déboucher le port cartouche de la portable pour que les ventes s'envolent. C'est pourquoi la Wii U mise de suite sur les bons chevaux en proposant son itération 2D estampillée "New" quelques mois à peine après le décevant volet 3DS. Mais peut-on bouder notre plaisir d'être présent lors de l'accouchement du premier Mario produit en HD ? Evidemment, tout dépend du sursaut d'orgueil et si la luxure trône à nouveau aux côtés de la gourmandise et de l'envie après avoir trop côtoyé la paresse...

Hello ! Is that Mii you're lookin' for ?

A l'heure où l'on se pose la question en France de savoir si l'on quitte ou non sa patrie pour éviter le fisc fucking, le Royaume Champignon est lui aussi chamboulé par un événement majeur. Au moment-même, et comble du hasard, où la Princesse Peach convie tous ses amis et n'a pas peur d'avoir des champignons à sa table, Bowser et sa bande de sbires mononeuronaux décident de prendre d'assaut le château. Malgré la trêve hivernale, Mario et toute sa clique se font tout simplement éjecter du château. Pas de pitié pour les croissants ni pour les plombiers. De cette entame scénaristique capable de faire passer Marc Lévy pour Barjavel naîtra votre nouvelle quête à travers la carte et ses diverses zones.

Evidemment, on ne change pas (trop) une formule qui gagne mais, remarquant l'essoufflement de la série des "New", Miyamoto a décidé d'aller piocher certaines aspects qui avaient su fédérer Roger à l'époque. Exit donc la map plate et sans saveur et retour à quelque chose capable de nous renvoyer 20 ans en arrière et proche de la référence Super Mario World sur Super Nintendo. Dans le même esprit, la cape qui permettait de voler et de donner une verticalité aux niveaux fait place au costume d'écureuil, omniprésent dans le jeu. Pas de jauge de course ici pour atteindre les sommets puisque les ailes de la combinaison s'apparentent plus à ce que l'on peut voir dans le base-jumping actuel et ne servent qu'à flotter, voire prendre un élan supplémentaire. Ici, il sera aussi possible de s'accrocher à un mur ou un rebord. Terminons les similitudes avec la présence de Yoshi, fidèle destrier et toujours apte à filer un coup de langue ou de main quand il faut.

On l'aura compris, c'est dans les vieilles marmites qu'on est censés faire les meilleures soupes et avant de voir un Mario tirer pleinement parti de la jouabilité asymétrique et des spécificités de la console, on risque de voir quelques centaines de Goombas foncer droit dans le vide au préalable. Là où Galaxy réussissait le pari de renouveler la saga, ici la prise de risques est limitée afin, je pense [peut-être], de ne pas perdre trop de monde en route au lancement d'un support qui reste encore à apprivoiser. Preuve en est, l'écran tactile du GamePad n'est au final que très peu usité, voire pas du tout en solo, et sa seule fonction réside dans l'affichage simultané du flux vidéo principal. On appréciera donc cette fonction, surtout qu'elle s'exécute sans perte de fluidité, pour la fameuse partie hors-TV pendant que Madame (ou Monsieur, ne soyons pas misogyne) regarde tranquillement son programme télévisé.

Malgré les airbags de sécurité encadrant chaque parcelle du mode histoire, le principal attrait réside dans le passage au monde de la HD pour Mario et consorts, un univers où l'on imagine Nintendo tâtonner tel un Capitaine Kirk dans des univers inconnus. Il est évident qu'une vie longue et prospère est en ligne de mire, et justement celle-ci est bien souvent savamment réglée. Bien que n'étant pas un exceptionnel tour de force technologique et graphique, New Super Mario Bros. U reste plus que régulièrement très plaisant à l'oeil, voire même bluffant lorsque BigN s'aventure vers des contrées inexplorées comme ce niveau aux élans de Van Gogh nous enivrant de plaisir tant il est beau. La 2D a décidément de très beaux jours devant elle lorsque finesse de trait et bon goût s'enlacent jusqu'à la déraison.
Quant au reste des environnements, on reste majoritairement dans le convenu avec un monde aquatique, un autre de glace, un dans le désert, sans oublier le classique tutoriel dans les vastes plaines. La seconde zone apporte ceci dit quelques légères nouveautés, également synonymes d'une difficulté qui augmente progressivement. On pense notamment aux fameux châteaux de mi-monde et de fin de parcours ou encore les maisons fantôme assez roublardes dans leur progression.

En revanche, ce qui fait "grave" frissonner de plaisir le vieux geek, c'est le retour des warp zones et mondes secrets bigrement bien cachés. Chaque environnement dispose de son petit coin perdu, à vous de vous en sortir avec cet indice.

D'ici et d'ailleurs

Ce qui faisait le plus peur au moment de débuter l'aventure, c'était que ce Mario ne soit au final présent que pour traîner sur les têtes de gondole et ne se révèle un jeu dont on aurait vite fait le tour avec une sale impression de s'être fait duper par un possible sous-produit. C'est précisément ce qui s'est passé au mois d'août avec New Super Mario Bros. 2 sur 3DS et, bonne nouvelle, on ressent autre chose sur Wii U.
La force des jeux de plateforme Tendo réside depuis des années dans le level design toujours aux petits oignons et qui réussit à surprendre lorsqu'on refait les niveaux. Ce fignolage est accentué par la volonté de proposer un challenge plus acceptable que récemment, mais aussi porté par la quête des trois pièces Etoiles cachées par niveau et qui occupe la pensée de tous les numismates. Celles-ci seront par exemple bien utiles pour parfaire et boucler pleinement le voyage, mais on vous laisse cette (minime) surprise même si Miiverse pourrait faire ce boulot de sape au préalable.
Mission réussie pour ce Mario U puisqu'on ne ressent pas à un seul moment l'ennui qui nous avait gagné sur 3DS. Certes, on aurait plus qu'aimé que le Wii U GamePad fasse pleinement partie de l'aventure, mais visiblement, ce sera pour plus tard. Collecter la triplette dorée se révélera être un défi plus qu'acceptable y compris pour les rodés à l'exercice qui devront souvent faire et refaire les niveaux pour deviner où se cache la petite coquine qui nous manque.

Mario aurait pu être travesti dans une autre vie, mais grâce à Miyamoto, il assume son goût pour les costumes. Visiblement, il freine de plus en plus ses envies puisque l'armoire semble réduire comme peau de chagrin à chaque opus. Le costume d'écureuil volant est ici la seule nouveauté vestimentaire puisqu'on retrouve trois autres bonus conventionnels : la fleur de feu pour balancer les boules de feu, celle de glace pour faire du congelé (en deux mots, ça peut fonctionner aussi) et enfin le champignon bleu histoire de muer en Minipouss capable de courir sur les murs, marcher sur l'eau et passer par des chemins insoupçonnés. On regrettera par exemple que ce dernier soit si peu utilisé au gré des niveaux puisque seule une poignée de stages tirent parti de la transformation. Le costume de pingouin présent sur Wii n'est ici qu'un invité surprise dans l'un des défis annexes du mode aventure, et autant dire qu'on oubliera rapidement sa pige.
Ceci dit, une version améliorée du costume d'écureuil qui permet de voler à l'envi au cours d'un seul niveau peut être glané lors des courses poursuite avec Carottin. Ce nouveau personnage est en fait un petit cleptomane qui se plaît à piller les maisons Toad du Royaume Champignon. En bon samaritain que vous êtes, il arrive parfois que vous deviez le rattraper avant un temps imparti. En cas de réussite, Toad vous offre une version boostée du gland qui rejoint votre réserve d'objets car, à l'instar de Super Mario Bros 3, vous avez la possibilité de garder sous le coude une dizaine de bonus pour vous en équiper avant d'amorcer l'expédition d'un stage. Cela évite notamment de garder en réserve un boost et de pouvoir s'en servir en cours de niveau, ce qui avait pour effet de faciliter grandement l'aventure, notamment dans Super Mario 3D Land sur 3DS.

Pour ceux qui jugeraient la difficulté trop élevée sur certains passages du jeu, Nintendo propose une fois de plus son fameux Super Guide maison avec un bloc surprise d'où sortira le frangin de Mario et qui déambulera jusqu'à la fin du niveau. Attention cependant, l'utilisation de l'aide aura pour effet de ne comptabiliser aucune pièce cumulée lors du passage. Mais on doute que vous y fassiez régulièrement appel, cette roue de secours étant clairement plus destinée aux plus jeunes ou aux plus vieux. Si, si.

Yoshi mise tout...

Contrairement aux idées préconçues, chaque Mario inédit apporte malgré tout quelques nouveautés bien qu'elles ne soient pas souvent suffisamment mises en avant. La Wii U ne déroge pas à la règle et ce sont donc les mini Yoshi - au nombre de trois et disposant chacun d'une couleur - qui proposent une approche différente de gameplay lorsqu'ils sont au coeur d'un niveau. Le bébé dino rose se mue en ballon de baudruche auquel s'accroche le plombier en chantant du Plastic Bertrand, le jaune a tout de la parfaite lampe de poche et permet d'éclairer les zones plongées dans le noir et enfin le bleu embulle vos ennemis et les transforme en pièces d'or. C'est rigolo sur le coup, mais la préférence ira logiquement vers le premier cité pour ses capacités volantes. Ah, l'utopie humaine de pouvoir planer demeure une valeur sûre ! Sachez en outre que chaque bébête n'est pas chevauchable, mais à porter délicatement. Cependant, ils n'en gardent pas moins leur talent de gobeur de flamby. Notre président peut continuer à se faire du souci donc.

La dernière mouture sur 3DS avait commencé à arpenter le chemin des modes annexes, New Super Mario Bros. U y gambade gaiement en chantonnant tel un Schtroumpf heureux. C'est ainsi que la durée de vie initiale du mode aventure voit se greffer quelques heures supplémentaires pour qui aimeles défis et si c'est votre cas, on peut vous le dire clairement, vous allez être servi. Divisés en diverses catégories (contre-la-montre, collecte de pièces, obtention de 1Up ou plus divers), les défis mettent à l'épreuve n'importe quel joueur pourtant habitué à de la plateforme. Citons plusieurs exemples concrets...
On retrouve ainsi le mode rush de la portable mais ici remanié puisqu'il faut collecter le maximum de pièces pour que le défilement horizontal soit de plus en plus rapide et vous fasse donc gagner du temps. Vous disposez de vies, des costumes en cours de route et même des raccourcis des niveaux. Bref, autant bien connaître le parcours pour réaliser le meilleur score possible. Selon la valeur de ce dernier, et quelle que soit la catégorie d'ailleurs, vous sera attribuée une médaille d'or, d'argent ou de bronze.
La difficulté sera proportionnelle à votre progression dans les défis et des étoiles vous aiguilleront sur ladite adversité.
Par contre, ne pas permettre le partage des scores en ligne ou avec ses amis reste une aberration à l'aube de 2013. Pourquoi se tirer une balle dans le pied aussi facilement, BigN ? Il y a vraiment des gens qui sont payés pour omettre ces points précis et ô combien cruciaux dans l'implémentation d'une communauté. Certes, Miiverse facilite les échanges, mais au lieu d'inonder de suggestions sur la world map, il aurait mieux fallu que l'on puisse se défier grâce au réseau social... Bref, passons mais on n'en garde pas moins l'arête bloquée en travers de la gorge.

Enfin, si vous aviez aimé le bazar ambiant du jeu à quatre simultanément sur Wii, il fait son grand retour avec la possibilité pour celui qui tiendra le Wii U GamePad d'intervenir avec le stylet pour créer des plateformes supplémentaires, bloquer des ennemis, faire taire des plantes cracheuses de feu ou encore pour aider à obtenir des pièces et des bonus. Si cela parait complètement obsolète vu comme ça, c'est totalement différent une fois mis en pratique et ce pseudo "god mode" s'avère des plus plaisant si vous envisagez de seconder par exemple votre rejeton. Testé et approuvé à la maison avec beaucoup de fun, de rires et de communion. On revient une fois de plus vers le fameux slogan "Play together" si cher à Nintendo.


A l'ancienne

Mais l'avènement de la Wii U et ses spécificités permettent également de voir débarquer divers petits ajustements. Outre le mode coup de pouce évoqué à l'instant, ce qui risque de plaire le plus reste cette faculté de pouvoir jouer intégralement au titre sans allumer sa télévision. Tout peut se passer sur l'écran tactile du pad. Certes, de cette satisfaction naît la frustration du manque de jouabilité asymétrique, mais il y a de toute façon de sérieuses pistes à creuser de ce côté-là. Comment se fait-il par exemple que les pièces "embullées" ne soit pas récupérable via un coup de stylet ou un doigt bien placé sur l'écran entre les mains ? On se serait rapproché de ce petit bijou qu'est Rayman Origins sur PS Vita. Si copier n'est pas jouer, s'inspirer reste permis et conseillé.

Etre totalement dépaysé dans un Mario, ce n'est donc pas encore au programme du jour. Que ce soit au Wii U GamePad ou bien encore à la Wiimote, le jeu reste parfaitement jouable et notre préférence va vers le gros contrôleur. On regrette en revanche que le Pad Controller Pro ne soit pas pris en charge pour qui aurait voulu éviter l'archaïsme d'une télécommande Wii ou l'encombrement relatif de la mablette. Là encore on se pose des questions quant à la politique de Nintendo et les fesses pas réellement posées sur une chaise ou une autre. Précisons ceci dit que le triple saut est de retour et même souvent au coeur du gameplay des défis.

Musicalement parlant, on s'inscrit là aussi dans la continuité avec des thèmes bien connus et rien qui ne nous retourne réellement au niveau de la nouveauté. Il est toujours sympathique d'entendre l'accompagnement aux bongos lorsqu'on chevauche Yoshi, mais le reste reste plus que conventionnel, y compris la voix de Charles Martinet pleine d'entrain. Ceci dit, une bonne bande-son doit savoir allier discrétion, symbiose et cohérence. La triplette est réunie ici.

Quant à la durée de vie, comptez une huitaine d'heures pour retrouver votre chemin vers le Château de Peach, ajoutez-en quelques-unes si vous avez comme dessein de regrouper toutes les pièces Etoiles et faites encore plus gonfler grâce aux défis et modes annexes. Ceci dit, on imagine bien Nintendo céder aux sirènes des DLC pour ces derniers et il y a fort à parier que l'on pourra ressortir à l'occasion le jeu pour une bonne petite session. Par contre, là où d'autres Mario ne m'ont donné que très peu envie de refaire rapidement et intégralement l'aventure, celui-ci reste suffisamment varié et entraînant pour ne pas avoir cet aspect répulsif immédiat. C'est toujours ça de pris.

Note finale
7 / 10

Il n'y a pas à tortiller du popotin en salopette, un Mario réalisé en haute définition donne envie. La 2D fait toujours son petit effet, même s'il est depuis atténué par le passage de Rayman qui se révèle être un concurrent de poids au plombier. Plaisant à parcourir, disposant d'un challenge bien plus acceptable que lors des plus récentes itérations, toujours jouable les yeux fermés, New Super Mario Bros. U a toutes les cartes de son côté pour collecter les pièces d'or et le plébiscite d'une large frange de joueurs. Les plus vieux regretteront la frilosité de l'éditeur quant à la mise en avant des spécificités de la console et de la jouabilité asymétrique et d'un esprit communautaire bien plus présent via Miiverse qu'ailleurs. On pense notamment à l'impossibilité de se défier en ligne alors que cela aurait pu faire exploser la durée de vie et le fun procuré. Mais une fois de plus, le level design aux petits oignons réussit à ce que l'on retienne que la part visible de l'iceberg. Il faudra donc plonger plus profondément la prochaine fois !