Il partait bien Night in the Woods. Il faut dire que visuellement ça m'a plutôt attiré, le choix d'art-design avec ces animaux anthropomorphes. Le jeu est narratif, semble dans un premier temps porté sur l'exploration et nous laisse suivre l'histoire dérangée et onirique de Mae, une jeune chatte de 20 piges revenant vers sa lointaine maison après des événements scolaires que l'on imagine mouvementés. Le jeu, surabondant de procédés narratifs, jouant sur les faux choix, sur les événements et les relations sociales, s'étoffe durant de long dialogues, évoquant progressivement les éléments qui interviennent fondamentalement lorsque l'on évolue vers le stade d'adulte. Celui ou on veut être soi-même mais ou ,amèrement, on se rend compte qu'être adulte ce n'est pas faire ce que l'on veut quand on veut pour manifester sa liberté, mais fixer ses propre limites et ses propre responsabilités pour trouver un équilibre auprès des uns et des autres. Ceux qui nous entoure, ceux qui forment un tout ,ceux auxquels on tient et ceux auxquels on ne tient pas.
Night in the Woods est probablement assez juste dans ses propos, appuyé par une écriture poussant vers des embruns nostalgiques et une surabondance d'éléments oniriques lors des nuits de rêve. Night in the Woods révèle aussi, un peu d'un coup sec, des événements inquiétants sur fond d'histoire de fantômes. Et articule l'ensemble avec une routine quotidienne qui rappellera peut-être à certain la saga des Persona d'Atlus ou on ressentirait presque ce gout doux-amer caractéristique du quotidien du jeune adulte qui fait face.... à la vie et à la mort.
Tout cela fonctionne plutôt bien mais..... il y a des manques.
Le plus évident je pense est un manque de rythme dans la narration. Night in the Woods est parfois et même souvent très très ennuyant. ça passe par des interactions faméliques bien sûr mais surtout par une assez mauvaise gestion de cette mécanique narrative de routine. On a vraiment l'impression d'attendre et de répéter sans cesse les mêmes choses jusqu'à ce que enfin l'histoire décolle arrivée au jour d’ Halloween. Le jeu prend un peu trop son temps pour organiser les relations et rapports qui animent les différents personnages principaux (et secondaires), le côté "petite vie dans une petite ville mais en fait il y a anguille sous roche" vous voyez ? A la Diamond is Unbreakable , pour ceux qui ont lu Jojo. Mais à la différence d'un récit rythmé et palpitant comme celui d'Araki ou d'un Persona, plus posé certes mais ou les interactions sociales sont véritablement mérités, difficiles à construire et même (force de Persona) impactantes sur le gameplay du jeu, Night in the woods prend le parti pris d'étaler sa vie de ville tranquille sans en faire quoi que ce soit d'intéressant. Pire encore, la seconde partie du titre, plus spooky, aux teintes Stephen king, tombe un peu en lambeaux arrivé la fin du jeu. Fin bâclée, et pas qu'un peu. On découvre plein de petites choses sympathiques, retournement de situation, mais tout ça est si mal amené et si vite expédié.... déception.
Le second manque vient davantage du game-design. Je n'attend pas d'un jeu narratif qu'il offre la complexité d'un Beat'em all bien sûr mais j’attends au moins que les éléments de gameplay aient un intérêt narratif ou, à défaut, parviennent à instaurer des mécaniques de jeu intéressantes. Dans Night in the Woods les quelques éléments de gameplay ajoutés sont juste... gadget. Alors ouais c'est bien gentil la version Liddl de Guitar Hero, le cache cache des musiciens, ou le délire de la choure mais ça n'apporte rien. Ni en terme d’interactions ludiques ni en terme de profondeur narrative. Bref, c'est là histoire de rappeler que c'est quand même un jeu vidéo et je trouve ça franchement naze.
Night in the woods finit ainsi comme il commence, dans un écho de solitude et d'amertume. Attirant visuellement, au dessus de la vague, il reste néanmoins cadenassé par ses enclins narratifs et par une surabondance de séquences inutiles. Vendant comme bien d'autres son discours du choix et du passage à la vie d'adulte, il ne peut s’empêcher de retomber dans les travers classiques du genre (que dire de ce journal qui se remplit tout seul ? ) et de ne donner au choix qu'un semblant illusoire (les retombées scénaristiques sont les mêmes). Délaissant ses procédés interactifs mais sans toutefois oublier de se foutre de votre gueule avec des gros plans sur des mains qui attrapent des parts de pizza, Night in the Woods fait ce que d'autres jeux ont fait avant et feront plus tard, en racontant une histoire, plutôt tendre, plutôt juste, plutôt belle, plutôt progressiste mais qui peine, qui peine tant à trouver un écrin ludique. Dommage.