No Man's Sky
5.7
No Man's Sky

Jeu de Hello Games (2016PlayStation 4)

Paradoxalement, mon expérience dans No man’s sky (NMS), ou mon histoire devrais-je dire, est aussi ressemblante à celles des autres joueurs que singulière. Pour arriver au même endroit, nous en serons tous passés par des épreuves et mécaniques communes. Pour autant, chaque voyage aura été différent. Difficile alors de ne pas y voir une métaphore de la vie.


Les mauvaises langues diront que la vie est moins ennuyeuse que le jeu. Pourtant, l’expérience pondue par la petite équipe de Hello Games ne l’est pour le joueur que s’il attend plus du jeu que ce qu’il a toujours prétendu offrir, à savoir : une « simulation » d’exploration spatiale où l’unique but est de se faire un chemin jusqu’au centre de l’univers composé de billions de planètes, en explorant chaque astre sur notre route si on le souhaite, en passant du sol desdites planètes à l’espace sans transition et en découvrant un biome original sur chacune d’elles ainsi que quelques extraterrestres.


À ce titre, le studio britannique a livré un jeu qui respecte chacune des promesses faites à son annonce, et cela mérite d’être souligné.


Techniquement, sur PS4, comme attendu, le studio n’a pas fait de miracles. Le jeu tourne plutôt bien, en restant à peu près stable à 30 images par seconde, mais il fait cracher ses tripes à la console. Le ventilateur tourne à plein régime pour la soulager et malgré cela, l’effet de popping est horrible. On s’habitue à tout, mais l’apparition soudaine d’astéroïdes à quelques dizaines de mètres du vaisseau ou l’apparition crasseuse de la végétation et des minéraux sur la planète à l’atterrissage fait toujours mauvais effet.
En se déplaçant à pied, le jeu est beaucoup plus joli et certains panoramas éblouissent. La direction artistique n’y est pas pour rien, de même que l’aspect sonore du jeu (bruitages et musiques) qui a été sacrément bien fignolé et contribue remarquablement à l’immersion.
Plusieurs bugs plus ou moins bloquants peuvent être rencontrés. Qu’il s’agisse d’une expulsion pure et simple du vaisseau hors de l’atmosphère en décollant ou encore le vaisseau qui se coince dans des arbres sans pouvoir s’en dépêtrer, le joueur est parfois malmené par un moteur physique qui peine.


D’autres l’auront mieux résumé, les mécaniques de jeu consistent en la récupération de ressources partout où vous passerez pour pouvoir continuer votre voyage. Je me garderai bien de vous dire quelles ressources rapportent le plus, à vous de les trouver. Je me contenterai d’apporter quelques précisions relativement à certains reproches formulés dans des avis lus çà et là et qui ne donnaient que la moitié des informations.


En tant qu’explorateur, vous allez devoir veiller au bon fonctionnement de votre équipement. Tout comme votre téléviseur ou votre ordinateur ne fonctionne pas sans électricité, vous allez devoir collecter des ressources pour permettre à votre multi-outil de fonctionner (pour tirer sur d’éventuels assaillants ou collecter des ressources), pour garantir votre survie dans votre combinaison et pour voyager avec votre vaisseau. Contrairement à ce que vous pourrez lire, il n’y aura pas lieu de recharger ce matériel toutes les cinq minutes. Un minimum d’organisation (tout recharger en même temps, par exemple) vous évitera de multiples allers-retours dans les menus. De la même manière, les ressources comme les isotopes qui sont nécessaires pour ces rechargements sont disponibles en grande quantité et partout. Un coup de laser de temps en temps pour en collecter vous garantira d’en avoir toujours sur vous. Bref, rien de bien complexe ni de réellement contraignant si le joueur y met un peu du sien.


L’inventaire limité semble avoir causé la colère de beaucoup de joueurs également... Sans vous révéler où, notez qu’il y a des endroits où vous pourrez acheter des slots supplémentaires pour votre combinaison. De la même manière, le jeu va vous inciter à régulièrement changer de multi-outil, à trouver des épaves de vaisseaux ou à en acheter un nouveau de temps à autre pour augmenter le nombre de slots dans ceux-ci.


Il faudra du temps, cela ne se fera pas dans la première heure de jeu, mais c’est aussi cela un sentiment de progression.


Par ailleurs, certains ne l’ont visiblement pas remarqué, un slot dans le vaisseau permet de stocker deux fois plus de ressources qu’un slot de la combinaison. Encore une fois, avec un peu d’organisation et de bonne volonté, il est possible de grandement se faciliter la vie et de s’éviter de pester contre le manque de place. À bon entendeur.


Pour le reste, il s’agit d’exploration pure en ce sens que vous déciderez où aller et quand vous y rendre. Chaque joueur est amené à vivre une expérience différente. Rien que le point de départ est hallucinant de variété. Certains ont eu des planètes apparemment mignonnes, calmes, chatoyantes et paisibles. C’est juste l’exact opposé de ce que j’ai eu à subir les premières heures : un monde aussi désolé que déprimant, soumis aux radiations, dénué de toute vie faunistique. Après quelques heures à rafistoler mon vaisseau, j’ai pu rejoindre une lune sur laquelle j’ai croisé une végétation dense et des formes de vie. Impossible de ne pas afficher un sourire béat d’émerveillement et de soulagement.
Autant dire qu’on ne naît pas tous égaux dans NMS. Certains vont démarrer à la cool quand d’autres vont devoir se fendre le cul en quatre pour réussir à s’extirper de leur condition originelle.


N’attendez pas de l’action frénétique. Tout au plus, le joueur aura à dégommer un vaisseau ou deux dans l’espace de temps à autre, à fuir des sentinelles énervées lorsqu’il aura puisé un peu trop de ressources devant ces dernières, voire à calmer un animal un peu trop agressif. Et c’est tout.
Si vous voulez des quêtes et de l’action, ne vous imposez pas NMS. Regardez quelques vidéos qui vous conforteront dans l’idée que ce jeu n’était de toute évidence pas fait pour vous.


Hello Games a réussi à plonger chaque joueur dans un état de solitude absolu où ce dernier a presque tout à apprendre par lui-même. L’interaction sociale n’étant pas au cœur du jeu, il ne faut pas non plus s’attendre à explorer la galaxie avec des amis. L’intérêt de NMS, tel que je l’ai perçu en tout cas, en aurait été sacrément salopé.


À ce stade, après de nombreuses heures de jeu, sans toutefois m’être mis en direction du centre de l’univers, j’ai du mal à bouder mon plaisir. Aucun sentiment de lassitude ou d’ennui ne pointe son nez à l’horizon.


Je survole les planètes en quête de monolithes pour apprendre de nouveaux mots de cet étrange langage extraterrestre. Je m’arrête pour observer les curiosités géologiques, les formations rocheuses improbables, je guette les gisements de certains métaux. Par chance, parfois, j’obtiens un nouveau multi-outil plus performant, je découvre de nouvelles technologies qui facilitent les combats ou l’exploration. J’observe la faune variée, je m’amuse des curiosités comme un « herbivore cruel », un animal volant qui serait la fusion parfaite entre un cachalot et une anguille ou encore ce qui ressemble étrangement à un loup mais qui ne se nourrit que de végétaux et couine docilement à mon passage.


C’est aussi cela NMS, un jeu paisible qui garantit un voyage unique, où chaque rencontre peut être marquante.


Même les planètes semblant hostiles de prime abord ne me font pas fuir. Elles ont en général beaucoup de ressources à offrir.


Au-delà de la conception aléatoire des planètes et biomes, le plus frappant dans NMS reste la relative crédibilité des créations du moteur. Je me suis surpris à me perdre dans une grotte, dès les premières minutes de jeu. Je n’étais pas méfiant et me suis aventuré trop loin, sans jamais réussir à retrouver le chemin de la sortie. Convaincu qu’il devait y avoir une sortie parce qu’il y a toujours une sortie dans un jeu vidéo, je suis allé trop loin et me suis perdu.


J’ai du mal à saisir comment autant de joueurs ont pu s’attendre à un RPG ou une simulation de dogfights. Je n’ai pas la sensation d’avoir été trompé ou floué durant la phase de promotion du jeu, ni par les développeurs, ni par Sony, ni par qui que ce soit. NMS est un simulateur de ballade cosmique. N’y cherchez rien d’autre.


À ce stade, je me demande si les développeurs n’ont pas réservé quelques surprises comme l’infime possibilité de trouver une ville ou les vestiges d’une cité sur une planète paumée. Peut-être que rien de cela n’a été envisagé, j’aime toutefois garder en tête l’idée qu’un truc étrange peut m’attendre sur chaque planète, au détour de chaque colline.


Impossible enfin de ne pas noter la ressemblance frappante entre les mécaniques de jeu de NMS et celles du jeu mobile Out There sorti il y a quelques années. Si vous aviez aimé Out There, il y a de fortes chances que NMS vous comble.


Cet avis sera peut-être amené à évoluer, au gré de mes futures sessions de jeu. Toujours est-il que NMS m’a convaincu que le procédural peut encore avoir du sens dans le jeu vidéo.


Expérience non personnalisée mais grandement personnalisable, NMS garantit un voyage unique, sans le moindre équivalent de par son ampleur. L’appréciation de l’expérience dépendra du joueur, de sa capacité à s’émerveiller et à se laisser porter, de son envie d’en profiter et d’attendre le bon moment pour sauter dans une autre galaxie plutôt que de se précipiter. L’erreur serait d’en attendre trop ou autre chose que ce qu’il propose.


Je n’ai pas la moindre idée d’où je suis, tout là-haut, ni où je vais réellement et ce que j’y trouverai à la fin. Je savoure juste pour le moment un périple qui m'est propre, qu’aucun autre ne fera, qui cristallise ma conception du jeu vidéo puisque je suis le maître du chemin que je suis et parce que je conçois mon aventure seconde après seconde, en fonction de ce que j’aime faire dans les jeux vidéos. Sean Murray et son équipe ne m’ont rien imposé, ils m’ont juste fait une proposition : celle de trouver mon chemin tout en écrivant mon histoire.

FlibustierGrivois
8

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Terminés (ou abandonnés) en 2016 et Les meilleurs jeux vidéo des années 2010

Créée

le 16 août 2016

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