Pariah
4.3
Pariah

Jeu de Digital Extremes et Hip Interactive (2005PC)

Il y a des titres qui échouent à trouver leur public pour des raisons parfois difficiles à cerner. Ainsi, Pariah. Pourtant développé par les canadiens de Digital Extremes, à l'aide de la technologie Unreal que ce studio contribua beaucoup à parfaire, sur des mécaniques de jeu bien assez classiques pour plaire à tout le monde et autour d'un univers qui présente malgré tout certaines originalités – notamment à travers un récit inhabituel, ce qui n'étonne pas de la part de James Schmalz, mais aussi sur les plans artistique en général et architectural en particulier : l'ensemble rappelle d'ailleurs souvent Doom 3 (id Software ; 2004). En dépit de toutes ces qualités, ce titre reçut un accueil pour le moins tiède, voire franchement indifférent, à la fois de la critique spécialisée et des joueurs. Les raisons invoquées par les uns et les autres pour ce manque d'enthousiasme varient beaucoup.


Les professionnels, par exemple, lui reprochèrent une absence flagrante d'originalité dans les mécaniques de jeu, ainsi que d'un nivellement par le bas de la difficulté que certains mirent sur le compte d'un développement simultané sur PC et sur console Xbox. Si ce dernier point reste tout à fait valide mais tout aussi assurément indépendant de la volonté des développeurs, du moins dans une certaine mesure, le premier me semble beaucoup plus discutable. D'une part parce que le classicisme demeure une valeur sûre, c'est-à-dire par définition apte à charmer un vaste public, et ensuite parce que le classicisme n'empêche pas un titre de s'imposer : il suffit de voir comment la plupart des jeux à succès contemporains de Pariah étaient tous plus ou moins des copies quasiment carbone les uns des autres – inutile de citer des exemples...


Les joueurs, quant à eux, se plaignirent du manque de subtilité du gameplay, trop violent et trop simple selon eux, et de la complexité de l'intrigue qui apparut incompréhensible à beaucoup. Le premier point semble difficile à prendre au sérieux : ceux qui lancent un FPS en espérant y trouver un niveau quelconque d'intellectualisme ou de réflexion n'ont de toute évidence pas très bien saisi ce qui est l'essence même d'un First Person Shooter ; mais il est vrai que cette mode, qui semblait à l'époque le nouveau standard du genre, je parle des FPS dits « réalistes », pouvait brouiller les pistes et faire voir des choses qui n'existaient pas – ce qui d’ailleurs ne va pas sans rappeler un autre débat, tout aussi crucial, que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître : c’est bien connu de toutes façons, les jeunes d’aujourd’hui ne savent rien….


Le dernier point, celui qui concerne l'opacité du récit, s'affirme par contre bien plus tangible. Car Pariah se montre assez obscur dans la présentation de son univers pourtant bien travaillé et original sous plusieurs aspects. Hélas, le titre se contente de précipiter le joueur dans l'histoire après une cinématique d'introduction certes assez longue mais malgré tout peu informative. Pour cette raison, je ne peux que souligner la nécessité de lire le manuel en détail, ce qui constitue une faute de la part des développeurs puisque le joueur aguerri sachant par expérience qu'il n'y a rien d'intéressant dans ce type de document se lancera dans le jeu sans le consulter, comme l'ont d'ailleurs fait la plupart... Digital Extreme n'a-t-il pas eu le temps de peaufiner les cinématiques du jeu, ou bien cette obscurité faisait-elle partie de ses plans ?


On ne le saura peut-être jamais, mais toujours est-il que Pariah souligne bien cette difficulté caractéristique du média jeux vidéo dans la présentation d'intrigues peu simples au sein d'univers relativement complexes, ou du moins inédits. Problème qui rencontrera bien des difficultés pour s'arranger car une telle exposition de background demande une certaine place alors que, justement, les durées de vie des jeux se raccourcissent toujours plus... En d'autres termes, l'imaginaire, dans les jeux vidéo, semble condamné à se cantonner toujours aux mêmes clichés, sans aucun réel espoir de véritable nouveauté ou du moins d'originalité – et alors, pourtant, que les progrès technologiques permettent d'illustrer et de représenter des univers toujours plus détaillés et approfondis : en fait, tout porte à croire que la complexité des titres à venir restera une façade.


Reste Pariah lui-même. En dépit de l'accueil assez froid qu'il dut subir lors de sa sortie, il demeure un titre tout à fait recommandable bien qu'un peu déstabilisant au premier abord. S'il ne propose aucune révolution, de même que la plupart des autres titres de son temps, ceux dont on se souvient comme des autres, il n'en présente pas moins certaines subtilités, notamment dans l'évolution que le joueur peut donner à l'arsenal de son personnage, ou bien dans la gestion de sa santé. Et si son récit reste assez longtemps obscur, force est de constater que très rares sont les joueurs qui lancent un FPS pour son scénario...


Voilà pourquoi, en fin de compte, Pariah mérite une place sur votre disque dur, au moins pour vous faire votre propre avis au lieu de laisser les autres vous imposer le leur.

LeDinoBleu
7
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le 22 mai 2011

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