L'art russe de vous en mettre plein la gueule...

... et putain qu'est-ce que c'est bon!
Pathologic 2 n'a soulevé à sa sortie que mépris de la part des grandes institutions journalisto-vidéo-ludiques, laissant une impression déplaisante à quiconque lit l'un des -rares- papiers qui le ciblent. Et il faut que cela change. Non pas parce que je déteste ces pseudos journalistes inutiles, mais bien parce que vous, camarades gamers et gameuses, méritez de savoir la vérité. Il est nécessaire que quelqu'un vous convainque d'ajouter ce petit bijou à votre bibliothèque steam/gog et, s'il est fort navrant que ce quelqu'un soit moi, parce que je n’excelle pas vraiment dans l'art de la persuasion, je vais pourtant le faire, pour trois raisons :
- ce jeu est VRAIMENT bien. Je veux dire, objectivement
- les devs' sont en galère de blé, et se battent pour maintenir la tête hors de l'eau
- j'ai un besoin pressant d'exprimer mon transport, et je n'ai pas de fleur sous la main. Comprenne qui pourra.

Commençons par démystifier un peu les critiques acerbes qui ont fait tant de mal à ce jeu : oui, il est dur, et non, dire que c'est fait pour n'est pas une excuse lâche pour camoufler un manque d'équilibrage dans le gameplay. C'est vraiment fait pour. Les jeux sont faits pour vivre une expérience, ne vous déplaise, et la beauté de ce jeu réside entre autre dans sa complexité. Vous n'êtes pas dans un simulateur de marche dans la forêt landaise, vous êtes dans une ville désorganisée en proie à une épidémie de PESTE. Les temps sont durs, très durs pour tout le monde, et vous, protagoniste, n'y échappez pas. Le gameplay nécessite de réfléchir, de recommencer, de vous battre contre le jeu. Vous devrez jauger de l'intérêt de chacune de vos actions... d'autant que le temps vous manque. Faire des provisions. Échanger avec les gens. Entretenir vos armes et vos vêtements. Sacrifier vos ressources pour avancer. Tenir un jour de plus. Sauver des vies. La survie est un aspect délicat du jeu, et vos besoins en nourriture, eau et repos seront un problème de premier ordre, mais le pire, c'est le temps. Le temps est ici un ennemi terrifiant, parfois bien plus encore que la maladie elle-même. Devez-vous prendre deux heures pour fouiller une maison et récupérer les rations et l'équipement dont vous avez un besoin urgent, au risque de rater une rencontre importante, ou de laisser mourir quelqu'un? Ou faut-il aller à cette rencontre en surveillant avec angoisse vos barres de survie qui s'étiolent, au risque de mourir? Il n'y a pas de bonne réponse. Vous n'aurez pas le temps de tout faire. Vous ne pourrez pas être à chaque fois au bon endroit au bon moment. Vous ne pourrez pas sauver tout le monde, et même, lors de votre toute première partie, il serait surprenant que vous réussissiez à vous sauver vous-même -et dieu sait que la mort dans ce jeu est pénalisante. Mais le sentiment d'accomplissement que l'on a en terminant le jeu en vaut largement la chandelle. Selon les succès steam, seuls 12% des joueurs sont arrivés au onzième jour, le dernier jour avant le rideau de fin. Terminer Pathologic 2 de la manière qui vous convient est un exploit personnel dont on peut tirer de la fierté. Ainsi, vous l'aurez compris, ce jeu n'est pas accessible aux moins de douze ans... et apparemment pas non plus aux reporters du monde du jeu-vidéo.

Maintenant, si vous êtes toujours là, à me lire, c'est que vous ne considérez pas la difficulté d'un jeu comme une tare, et cela signifie que nous sommes désormais amis, vous et moi. Et le moment est venu pour moi de vous donner envie de jouer à Pathologic 2.

Tout d'abord, ce jeu est beau.
Graphiquement, dans un premier temps, les dévs' ont su mettre en place une ambiance parfaitement adaptée à son sujet, à l'époque, au lieu, au background. On est happé par cette Russie profonde, cette ville au fin fond des steppes, en pleine industrialisation et pourtant fermement enracinée dans un folklore local aussi captivant qu'étrange, et qui s'enfonce dans l'insanité. Les graphismes ne sont pas réalistes, mais stylisés, et c'est du plus bel effet (surtout pour un petit studio indé). Que dire de plus, sinon qu'un bon pc vous garantira de magnifiques screenshots.
Ce jeu est beau dans son histoire, aussi. Son histoire principale, bien sûr, qui ne manque dans son écriture ni d'intelligence ni d' une sensibilité très particulière, mais surtout dans tout le background, toutes les petites quêtes, qui apportent une profondeur malheureusement rare, surtout dans les jeux qui sortent aujourd'hui.
Si je devais résumer, je dirais que ce jeu est surtout beau de par l'attention qui est portée aux détails. Ceux qui ont fait ce jeu voulaient créer un monde tangible, palpable, crédible. Ils voulaient que le joueur tombe amoureux de leur univers, et ça se sent. Pathologic 2 est un travail d'orfèvre. Un orfèvre seul, croulant sous les dettes, et obligé de rendre rapidement un travail qu'il aurait pu d'avantage peaufiner, mais dont l’œuvre ne laisse nul doute sur le fait que son créateur soit un véritable maître.

Bien entendu, je ne suis pas objectif. Le jeu a des ralentissements, parfois des bugs - même s'ils sont rares, ce serait mentir que de dire qu'il n'y en a pas. Certaines choses ont été implémentées trop vite, notamment au niveau des animations des pnj, parfois très inégales. Mais l'ambiance, l'histoire et la tension sont telles que l'on oublie vite tous les petits problèmes pour se concentrer sur l'important : on est en train de prendre son pied, parce que ce jeu est génial.

Fin du pavé!