Une énigme spatiale génératrice de peurs que seul le savoir peut résoudre...

C'est en ce début de mois de mai 2022, soit pile 5 ans après sa sortie officielle, dans une période troublée par les crises pandémiques, technologiques, écologiques et économiques...que je me suis laissé tenté par ce fameux "Prey" via le gamepass, autant animé par mon amour envers Arkhane Studios, mon kiff généré par "Deathloop" et "Dishonored", ma passion pour la science-fiction qu'apeuré par son titre evocateur malsain, son ambiance étrange, et son genre...un Metroidvania, genre propice à la claustrophobie, une des rares productions émanant de nos chers frenchy n'ayant pas fait l'unanimité...donc pas idéal mais provoquant chez moi comme une furieuse envie de comprendre, de savoir, de maîtriser et de surpasser mes craintes, mes peurs, mes a priori....alors courage...allons-y...

Une peur, une anxiété parfaitement incarnée par notre seul et unique terrain de jeu, Talos 1...qui après une introduction énigmatique, au combien engageante et posant de manière viscérale et directe les bases de sa démarche artistique...station spatiale, utopie scientifique, fantasme technologique, aux relents et inspirations issues de l'art déco, autant dans ses codes architecturaux, picturaux, artisanaux...de l'imaginaire, de la littérature, du cinéma des années 60 que des connaissances techniques, des faits historiques inhérents à cette époque révolutionnaire, anticipatrice, foisonnante...tout en gardant la vision et le design propre à ce studio...via des graphismes chatoyants, colorés...un chara-design volontairement rondouillet et exagéré...une technique qui même aujourd'hui fait encore son petit effet, donnant à l'ensemble un caractère intemporel...véritable labyrinthe morbide, dénué de toute vie, inhospitalier, agressif, donc provoquant chez nous une envie de s'en échapper...mais qui par un level-design intelligent, riche, cohérent...demandant analyse, compréhension, maîtrise et pratique...se voit tout d'un coup plus permissif, accessible, ouvert et malléable...à l'instar d'un rubik's cube à échelle humaine...qui par de subtiles et éphémères rencontres qu'elles soient humaines, biologiques ou robotiques...se voit tout d'un coup plus vivant et humanisé...à l'instar d'une île isolée cachant tout un monde insoupçonné...qui par l'acquisition d'outils, d'objets, de documents, de codes et de réparations, d'actions en tout genre...se voit tout d'un coup plus personnalisable et agréable...à l'instar d'un logement fraîchement loué, évoluant au fil de nos achats décoratifs...qui par la diversité des oppositions, des activités, des énigmes environnementales...se validant de manière libre et non-linéaire...se voit tout d'un coup plus ludique et amusante...à l'instar d'une immense boîte de Lego, permettant de se créer, d'imaginer notre propre session de jeu...le tout sublimé par un sound-design misant énormément sur les sonorités environnementales, les bruitages propres à nos équipements...extrêmement immersif mais s'autorisant par moment quelques envolées musicales...donnant un côté mélancolique et crépusculaire...c'est donc une vision artistique singulière, mystérieuse mais qui au fur de notre accumulation de savoir et de connaissances s'éclaircit, se révèle et s'apprécie au point de délaisser nos peurs et craintes du début...

Une peur, une anxiété liée à la complexité volontaire de son gameplay, un FPS survie immersive-sim poussé et dense, via un arbre de talent riche et non dévoilé, via de nombreuses statistiques limitantes et bridantes, via la rareté des armes et des munitions, via la fragilité et la lenteur du personnage, via la puissance et résistance de nos diverses opposants, via un équipement précaire et basique, via une carte vierge...et pas bien aidé par une prédilection pour l'obscurantisme par moment, l'abondance d'informations par d'autre et l'amnésie du personnage et son mutisme...un truc confus, labyrinthique, à la limite prise de tête...mais qui au fur de nôtre parcours, notre accumulation de connaissances, notre goût pour le loot...et là bien aidé par le système de recyclage, apportant une touche de gestionnaire ou d'économe...le système d'analyse, apportant une touche de chercheur ou de naturaliste...le système d'augmentation, apportant une touche généticien...le système d'artisanat, d'agriculture...apportant une touche de fabricateur ou botaniste...le système d'interaction environnementales...apportant une touche de bricoleur ou de technicien...le système d'informatique centralisée...apportant une touche de programmeur ou d'investigateur...le système d'I.A diverses...apportant une touche de manager ou administrateur...le système de transport d'objets...apportant une touche de tacticien ou d'architecte et j'en passe tant les possibilités, les combinaisons, les libertés sont nombreuses...se comprend, se maîtrise et s'apprécie, rendant nos diverses perenigrations, oppositions, défis, activités bien plus digestes, personnalisés, intelligents, intéressants, légèrs, gratifiants, cassant tout sentiment de redondance, d'usure, de limitation, d'insatisfaction donc un gameplay misant sur l'apprentissage, la libre pédagogie, la progression personnelle, la créativité et l'ingéniosité, le rendant amusant et ludique...au point d'évacuer nos premières inquiétudes et peurs....

Une peur, une anxiété liée à l'obscurantisme de son scénario de départ...à savoir être la proie d'étranges créatures hostiles...son allégorie de départ...à savoir la science et ses dérives...sa métaphore...à savoir survivre seul confiné dans l'espace...ce qui est vrai au début de notre parcours...mais qui au fil des heures, des actions, des missions qu'elles soient principales ou secondaires, des interactions, de nos choix, des documents égrenées ça et là...se transforme, se modifie, évolue...de manière non-linéaire, libre, cohérente...à l'instar d'un puzzle que l'on construit, d'une enquête que l'on résout...nous engageant constamment, nous suprenant à chaque instant, nous troublant en permanence...nous permettant même à un instant clé de nous libérer de cette aventure...mais gardant une structure narrative étrange, labyrinthique donc fascinante...nous poussant à poursuivre, à continuer afin d'obtenir son histoire, son récit, son incarnation...une tension scenaristique, un rythme lent et doux, un équilibre émotionnel...nous poussant à rester, à résider dans cette station qui au final devient notre station...devenant notre écrin, notre éden que l'on se plaît à admirer, à aimer, à réhabiliter, à défendre...une relation unique et singulière...malgré son goût pour nous défier gentiment, de jouer avec nous tout en se laissant jouer, nous guider tout en nous perdant...un véritable concept narratif intelligent et rarement vu ou osé, misant sur l'écoute, la lecture, l'observation...véritable roman à tiroir psychologique...véritable film interactif non-manichéen...nous offrant multiples interprétations...diverses métaphores...plusieurs allégories...autour du thème de la connaissance, du savoir...à travers son apprentissage, sa maîtrise, son application...offrant au joueur un monde, un univers où chaques choses à du sens, où chaques actions à une conséquence, où chaques informations à une nécessité,  où chaques éléments à une justification, mais où chaques problèmes à plusieurs solutions, où nous devons faire un choix et l'assumer...le tout dans une cohérence ludo-narrative intouchable brisant, depassant ainsi toutes nos peurs, nos a priori des premières minutes...

C'est donc heures après heures, connaissances après connaissances, choix après choix, déductions après déductions...que ma peur personnelle c'est transformée en plaisir, en jouissance...faisant basculer cet hybride FPS/Metroidvania/Survival en Walking-simulator/Puzzle narratif...prenant mon pied à errer, à me perdre dans Talos...dans le passé de Morgan...dans le présent de ces rares habitants...dans les ramifications scenaristiques...d'y créer des routines, des habitudes tout en me laissant volontairement surprendre...d'imaginer mes conclusions, mes retournements de situations, mes prises de tete, mes nouvelles rencontres...de construire mon héro, mon environnement, mon parcours...d'entrevoir mes concepts, mes idées, mes propositions, mes possibilités et qui au final aura plutôt créé chez moi la peur, l'anxiété de rater une information, de mal faire, de mal entreprendre, de devoir quitter cette station...de devoir finir ce jeu...de devoir faire mon ultime choix...lourd de consequences....

C'est donc encore une réussite de la part de ce studio...qui pièces après pièces....se construit une vision singulière de ce média, de cette industrie...une identité à part...et nous gratifie d'œuvres vidéos ludiques intemporelles, intelligentes et marquantes...et qui avec "Prey" m'aura fait franchir une nouvelle étape dans mon parcours de joueur, de passionné...donc merci à eux...et dans l'attente de les revoir sous de nouveaux horizons...mais jouez-y...sans aide...sans spoil...juste en misant sur votre instinct et votre intelligence....