La première difficulté pour Capcom avec ce remake (qui n'en n'est pas vraiment un dans le fond, mais nous y reviendrons) était d'être à la hauteur de leur premier essai en la matière, à savoir le Rebirth de 2003, qui reste encore aujourd'hui un cas d'école du jeu refait de fond en comble parfaitement réussi car parvenant à sublimer le jeu de base pour en offrir une expérience similaire mais malgré tout plus forte et plus haletante. La seconde difficulté, c'était de marier deux recettes, deux visions qui divisent généralement les fans de la première heure plus habitués à un cadre huit clos avec plans fixes où les munitions se compte avec la minutie d'un horloger et les nouveaux venus plus habitués à des Resident Evil très orientés sur l'action en vue à la troisième personne.
Dans les deux cas, le challenge a été relevé haut la main, et ce Resident Evil 2 "remake" posera sans doute les futures bases de leur licence, entre tradition savamment respectée et modernité maîtrisée.
Mais doit-on réellement parler de remake ? Il faut à mon sens le considérer davantage comme une relecture ou comme un "reboot" plus que comme un remake; là où le Rebirth reprenait le jeu de 1996 en collant de très près à sa structure, en proposant une expérience similaire à hauteur de 80%, mais en offrant une refonte graphique spectaculaire, ouvrant de nouvelles pistes narratives, et réorganisant quelques éléments de gameplay pour dynamiser l'expérience, le Rebirth 2 (vous m'autoriserez cette commodité) se distancie fondamentalement du grand jeu de 1998.
Il en reprend un esprit (très) général, avec une aventure en trois temps, d'abord dans un commissariat, dans des égouts et enfin dans le fameux laboratoire d'Umbrella. Si certaines pièces et certaines énigmes sont assez proches de celles d'origines, elles s'en distinguent par un nouvel agencement des lieux, une configuration nouvelle qui colle à un lore légèrement remanié et légèrement revisité et par un certains nombres de feature héritées de Resident Evil 7. Mais il gardera de RE2 98 (et par extension, des RE "classiques") son système de clés, son jeu de renvoi entre différentes salles, l'une permettant d'obtenir l'objet permettant de résoudre l'énigme de l'autre, pour une progression qui se fait à petits pas, toujours dans une optique de survie.
Car la prudence sera de mise : là encore, ce Rebirth 2 fait davantage corps avec l'idée des Resident Evil de tradition, les zombies ne doivent pas tous être tués sous peine de manquer de munitions, et il faudra parfois et même souvent ruser pour les contourner et garder de précieuses balles. Mais il n'aura échappé à personne que l'approche n'est plus en caméras fixes, mais en vue à la troisième personne, caméra épaule. La dimension action prend donc davantage le pas dans cette version, et c'est l'un des éléments majeurs qui le distingue du jeu d'origine : très concrètement, on y gagne en souplesse, peut-être en immersion diront certains ou encore en lisibilité.
Si remake il y'a, il ne faut donc pas y voir un calque de ce qu'a été celui de 2003 par rapport à celui de 96, mais très probablement la volonté pour Capcom, comme dit plus haut, de faire la synthèse entre deux visions de jeu, pour une expérience qui fera date.
Retenez simplement que l'expérience mérite d'être vécue plus que d'être décrite. C'est tout simplement un grand jeu. Un grand jeu dans ses situations, dans sa difficulté exemplaire qui n'est jamais frustrante, dans la qualité de la relecture de certains moments, de certaines phases d'actions, dans son final qui se veut sobre mais avec ce qu'il faut de mise en scène épurée pour garder en mémoire l'affrontement ultime et une première partie entre l'ombre et la lumière, entre fausse sérénité et vraie panique (vous comprendrez...)
En 1998, Capcom nous a offert l'un des meilleurs survival horror. En 2019, il s'appelle toujours Resident Evil 2.