Le dos d'une jaquette de jeu est parfois porteur de nombreuses révélations… Sur celle de Resident Evil 4, la menace est très claire, on peut y lire textuellement : "Oubliez tout ce que vous savez à propos de Resident Evil !! OUBLIEZ LE SURVIVAL-HORROR !!". Cette déclaration -on ne peut plus vraie- résonne encore en moi comme un vrai coup de poignard. Pas le coup qu'on se prendrait lors d'un face-à-face à la loyale hein, mais plutôt un coup de lâche, perpétré dans le dos…
Quand on voit le développement chaotique du jeu, qui aurait pu déboucher sur des trucs vraiment sympas, on (je) est doublement déçu… Je pense à l'intrigante version avec des fantômes, dans un esprit (^_ ^) très similaire à Project Zero, ou encore à une autre version versant dans la peur plus "psychologique", jugée par Capcom un peu trop proche de son concurrent d'alors (Silent Hill, pour ne pas le nommer)… Ils ont tellement tâtonné qu'une bifurcation extrême a donné naissance à la saga Devil May Cry !!!
Et finalement, on aboutit au bout de 4 ans de développement à ce TPS sans saveur...qui plus est, acclamé par la masse, volatile à souhait, pour qui le "bô" et le "pan pan boum boum" sont une religion… Ce qui ne m'aurait pas dérangé si, à l'instar de DMC justement, c'était devenu une série annexe…
Car malgré de réelles qualités, celui qui s'attend à jouer à un survival-horror va bien vite déchanter, l'essentiel de la "peur" se résumant à de vulgaires jump scares un poil abusifs… Resident Evil n'aura jamais plus mal porté son nom…(enfin jusqu'à RE 6, qui lui est un gros doigt levé à plus ou moins tous les joueurs…). Autant le préciser tout de suite, cette review aura pour certains fan(atique?)s des airs de procès à charge(s)…
Pour s'affranchir des codes du genre dits "vieillissants", Resident Evil 4 se mue donc en un -banal- shooter. Le début commence plutôt bien, lorsqu'on fait face aux premiers ennemis, des villageois à l'air pas très net armés de torches, de haches et d'autres trucs contondants, qu'ils n'hésitent d'ailleurs pas à nous envoyer à la tronche, occasionnant moults dégâts… Pour ne pas risquer de polémique, ces villageois sont blancs, car, c'est bien connu, seuls les blancs méritent d'être tués dans un jeu vidéo, tout le reste, c'est du racisme.
Ces premiers pas dans le jeu sont l'occasion de voir que Resident Evil 4 gère une localisation des dégâts fort précise, et que le niveau de difficulté est globalement au dessus de la moyenne. Je l'avoue sans honte, je suis mort ici la première fois, le temps de m'habituer à un gameplay et des commandes largement remaniés. En même temps, si le jeu m'autorisait à pouvoir reculer tout en tirant, je m'en sortirais peut-être mieux, les ennemis étant désormais plus nombreux, et surtout plus véloces…
Il y a incontestablement de bonnes idées dans ce Resident Evil 4, comme par exemple cette excellente gestion de l'inventaire, très inspirée de hack'n'slashs comme Diablo II. Fini les coffres concomitants magiques qui permettaient de retrouver tous ses items dans chaque coffre disséminés dans tout le jeu, et bonjour les choix cornéliens à faire pour que l'essentiel tienne dans la "valise".
On apprécie également l'intégration d'un mouvement au corps-à-corps parfois salvateur, très utile quand un ennemi se montre un peu trop câlin… Ok, ça c'est pas totalement nouveau, puisque le principe existait déjà dans "Rebirth"…
Enfin, le concept des plagas -et la manière de les éliminer- est aussi une vraie bonne trouvaille. Le revers de la médaille, c'est qu'on se demande où est passé le bestiaire plus "classique", comme les zombis, les lickers, les araignées, ou encore les hunters… C'est plus ou moins "justifié" dans le scénario, mais bizarrement, ça ne m'a pas tellement convaincu plus que ça…
À propos du scénar', qu'est-ce que c'est que cette bouse interstellaro-cosmique que nous a pondu Capcom ? Le background instauré par les opus précédents n'était certes pas la qualité première de la saga, mais était-ce une raison pour chier complètement dessus ? En plus pour le "substituer" par cette histoire de série -Z ? Et après, on critique (à raison) les films…
Sans trop en dévoiler, on incarne Leon S. (comme Super agent secret au service du président des USA) Kennedy, qui doit aller sauver la fille du-dit président retenue en otage par de mystérieux religieux tendance sectaires (pléonasme) planqués au fin fond de la campagne espagnole. Les intervenants sont tous plus insipides les uns que les autres : Ada, trop effacée pour être intéressante, Krauser, pseudo bad guy servant surtout à mettre Leon en "valeur", Ashley, le pnj le plus irritant et handicapant de l'Histoire du jeu vidéo, ou encore Wesker, plus super saiyajin que jamais…
Ashley ? C'est la fille du président (suivez un peu), et le modèle du boulet par excellence, qui ne sert qu'à deux choses : se mettre devant la ligne de tir, et irriter les tympans avec les multiples "Leeeeoooonnnn" qu'elle poussera chaque fois qu'elle se fera attraper, ce qui arrivera environ 10 fois par minute… Elle incarne selon mes critères persos l'antipathie à son niveau le plus haut. En fait, à part le nain de jardin dont j'ai oublié jusqu'au nom (Salazar je crois ? c'est dire si le jeu m'a marqué), il n'y a vraiment rien à sauver de tous ces guguss…
Après quelques heures de jeu, on en vient à se demander si on est encore en train de jouer à un Resident Evil. Les mécaniques-mêmes de la série, comme les puzzles pas toujours logiques (^^) sont aux abonnés absents, tout comme la peur, car non, ponctuer le jeu de jump scares et mettre des monstres relativement dangereux dans un environnement nocturne ne font pas un survival-horror…
Surtout quand les quelques moments sensés être flippants sont atténués par le fait qu'il est quasiment impossible d'être à court de balles -en tout cas, ça ne m'est jamais arrivé- et qu'il est même possible d'améliorer ses armes auprès des marchands… Oui oui, des "marchands", dans un Resident Evil…
Enfin, je ne parlerai pas des QTE parfois très limites dans les cinématiques -sinon je vais m'énerver- mais plutôt démontrer en une seule idée que même en temps que TPS, Resident Evil 4 est loin de tout reproche : qu'on ne puisse pas tirer tout en reculant, soit, il faudra attendre des softs comme Gears of War pour que ça se démocratise…mais ne pas pouvoir straffer, dans un jeu où la réactivité est on ne peut plus importante, c'est carrément un défaut de premier ordre… Mais bon, comme le jeu est "trô bô"…
Enfin, trop beau… oui et non. Alors oui, la réalisation du jeu est bluffante, faisant honneur aux capacités de la bête. Les décors sont grandiloquents, les jeux de lumière sont sublimes…la version PS2 a d'ailleurs du mal à tenir la distance... Mais il y a une différence entre BEAU et ESTHÉTIQUE. Où sont donc passés ces bonnes vieilles demeures anciennes perdues au milieu de nulle part, avec leurs tapisseries crasseuses et leurs tableaux douteux, ou encore ces labos souterrains froids comme la mort, qui offraient un fort sentiment de claustrophobie, faisant craindre un danger qui pouvait subvenir de n'importe où ? Il ne suffit de mettre des plantes de soin et des machines à écrire "comme à l'époque" pour se revendiquer "Resident Evil"… Le château intervenant au milieu de l'aventure limite un peu la débandade, et encore…
On dit souvent que les joueurs gueulent pour un rien : ça se plaint quand on leur sert toujours la même recette, et ça se plaint aussi quand on tente la nouveauté. Reste qu'il y a un gouffre entre proposer du nouveau et renier totalement un genre. Ça plairait aux fans de Mega Man si la série se transformait tout à coup en shmup ? Et si le futur Street Fighter devenait un FPS ? Ou encore que Dante se mue en une tafiole émo-gothico-prépubère pour coller aux standards de "classe" d'aujourd'hui ? Tiens, on me chuchote à l'oreille que le dernier cas s'est déjà produit (le jeu est d'ailleurs finalement pas si mauvais…).
Quoi qu'il en soit, si vous adhérez à ce virage pris par la série, tant mieux pour vous. Mieux encore (toujours pour vous), vous en aurez vraiment pour votre argent, Resident Evil 4 étant encore plus long que ne l'était Code Veronica, qui était pourtant déjà très long pour un survival… En plus, il y a plein de trucs à débloquer…
Après le 5 qui poussait le côté action dans ses retranchements, le pseudo retour aux sources du 6 qui était indigeant sur à peu près tous ses aspects (à courir tous les lapins, on en chope aucun, proverbe du jour, offert avec amour), je ne sais pas pour vous, mais moi, je suis super impatient de voir la tronche de Resident Evil 7… À l'heure où la Réalité Virtuelle est sur toutes les lèvres (ou presque), je pencherais pour une nouvelle vue FPS, histoire d'achever une fois pour toute ce qui reste de cette ex-fantastique saga…