Resident Evil 6
5.3
Resident Evil 6

Jeu de Capcom (2012Xbox 360)

C’est une évidence, Resident Evil 6 n’est clairement pas le chef-d’œuvre d’action horrifique qu’a pu être Resident Evil 4 en son temps, dirigé à l’époque par l’irremplaçable Mikami. Quoiqu’on puisse en penser, le cinquième épisode sorti en 2009, très proche, trop proche même, de son modèle au niveau des mécaniques de jeu, n’était pas mauvais, et proposait un cadre en Afrique convaincant, des scènes d’action toujours plus musclées, ainsi qu’un mode coop en ligne solide. Depuis RE4 en 2004, entre Survival Horror et TPS, de nouvelles licences brillantes dans le genre TPS ont fait leur apparition sur consoles HD, Gears of War, Uncharted, Dead Space pour ne citer qu’eux, proposaient un gameplay bien plus dynamique. RE4 est en fait le dernier épisode de la saga qui a dégagé la voie pour installer les futurs TPS. RE5 n’a fait que finalement plagier son grand frère, même si son aventure exotique a provoqué chez certains joueurs (comme moi), beaucoup d’enthousiasme.


RE6 ne compte pas transcender RE4, il ne souhaite pas non plus révolutionner le genre TPS, ni effectuer un retour aux sources et rallier les amateurs de Survival Horror, et c’est ainsi que les développeurs l’ont pensé. Mais il essaiera à l'inverse du 5ème épisode, de s’émanciper. Comment ? Grâce à l’enrichissement du gameplay dans un premier temps. Et oui, ça y’est, c’en est fini d’être cloué sur place quand on tir sur ses ennemis, fini les déplacements dignes d’un tractopelle sur chantier, adieu la maniabilité typique de la série de Mikami ! Certes, cette dernière demandait beaucoup plus de patience et de nerfs, elle était même presque réservée à une élite de joueurs, mais ça ne pouvait définitivement pas durer ainsi... Libre à nous dans ce RE6 à présent, de sprinter, de se propulser en arrière ou sur les côtés tel un Max Payne décomplexé, de ramper, rouler au sol, se plaquer contre des murs tel un Solid Snake furtif, frapper directement son adversaire… La série se met enfin à la page, et même si tout n’est pas maitrisé à la perfection comme dans un Gears par exemple, le fait que les déplacements soient enfin plus libres et coulés, que les mouvements soient plus nombreux, le tout est suffisamment bien fichu pour que l’on progresse plus aisément dans le jeu.


Parallèlement, c’est au niveau contenu que ce sixième opus s’affranchit. Certes, RE4 et 5 proposaient déjà une belle durée de vie située entre 15 et 25 heures pour l’aventure principale… Mais ce RE6 met en place quatre longues campagnes, aux scénarios entrecroisés, comprenant sept personnages jouables, avec une durée de vie d’au moins 30 heures au total. Du délire oui. Cet épisode est d’ailleurs le plus dense de la saga, sans compromis possible. Fonctionnant par binômes, les aventures se jouent dans l’ordre que l’on veut, seul ou en coop. Et c’est finalement ce dernier mode qu’on retiendra, tant le fun est bien plus présent accompagné d’un ami plutôt que par l’IA (même si cette dernière n’est pas aussi chiante que dans RE5, et bénéficie en plus d’une totale invulnérabilité). RE6 est d’ailleurs incroyablement fun, mêlant un gameplay à la fois bourrin et jouissif (très arcade en fait), un bestiaire magnifique et impressionnant (le gros point fort du jeu), et des aires de jeux plutôt vastes. Il manque encore évidemment pas mal d’interactions avec le décor, mais on a vu pire.


L’autre point fort de RE6, hormis la durée de vie colossale, le nouveau gameplay et le bestiaire gigantesque (et très bien fait, les transformations sont géniales), c’est la réalisation des héros. Si dans RE4, Léon avait un peu une tête d’ahuri, il est dans cet opus carrément classe, franchement charismatique, avec une vraie belle gueule. Idem pour Ada Wong, qui est absolument sublime, gracieuse à souhait (mention spéciale aux animations dans les cut scenes) les traits de son nouveau visage sont géniaux (nez aquilin, lèvres plus fines, plus espiègle tu meurs, merci à Ty Brenneman pour le face model).
Quant aux petits nouveaux, c’est la aussi très réussi, avec Helena qui a une bonne tête de baroudeuse (la très belle Natasha Alam pour le face model), Piers, l’acolyte de Chris, est un peu l’ange gardien de ce dernier, et est assez sobre finalement. Quant au fil de Wesker, Jake, on aime ou on n’aime pas son attitude à la Végéta de DBZ, mais le mercenaire solitaire fait quand même du bien à l’équipe… et son duo improbable avec la très attentionnée Sherry est peut être le meilleur du jeu (quel contraste et quelle synergie dans ce couple !). Un dernier mot sur Ada, qui je tiens à dire, m’a réellement fasciné, et c'est à travers sa campagne que l’on se rend vraiment compte de sa supériorité intellectuelle et stratégique sur les autres membres (toujours une nette longueur d’avance sur Léon par exemple, et même sur les différents boss). Elle est vraiment au top dans cet épisode et sans hésitation, elle est mon perso préféré de la saga.


Pourtant, mêmes avec d’aussi bonnes qualités, il manque des cases à RE6. Que ce soit en Chine ou dans le campus Américain, ou même en Europe de l’Est, le level design est parfois un peu bizarre, pas très inspiré, peu précis, les environnements sont tellement nombreux qu’ils paraissent très souvent sous-exploités. On ne pense finalement qu’à éclater du zombie en profitant du dépaysement, exploser du J’avo (des nouveaux mutants zombifiés crées à partir du virus C, mais qui peuvent communiquer entre eux comme les Gannados de RE4) et des mutants de toutes sortes, tout en brisant les caisses en bois sur sa route pour récupérer plantes vertes ou rouges (à l’ancienne héhéhé) et regagner ainsi de la vie, munitions et points d’habileté (pour améliorer sa force ou sa visée par exemple). Autrement dit, RE6 est un jeu qui défouraille comme il faut, et pas forcément désagréable pour les yeux, mais des détails font tâches et on peut constater des enchevêtrements risibles, ou de belles erreurs de collisions lors des combats. Des bugs pénalisants pour le jeu oui, mais pas non plus insoutenables pour le joueur qui a un minimum de tolérance.


Resident Evil a toujours été une franchise faisant dans le kitsch, et presque toujours dans la surenchère d’explosions et de mutations. Et ce n’est pas ce sixième opus qui dérogera à la règle, au contraire, c’est toujours plus wtf et grand-guignolesque, pour le plus grand plaisir des fans. On aura surtout le plaisir de retrouver et de jouer avec une bonne partie des anciens personnages de la saga, à savoir le très balourd Chris Redfield, le charmeur héroïque Leon S.Kennedy, la malicieuse et sulfureuse Ada Wong, et même Sherry Birkin, qu’on a pu sauver dans le deuxième opus de la série lorsqu’elle n’était qu’une enfant. Depuis elle a bien grandit et est devenue… plutôt avenante vous en conviendrez.


Si le scénario de Léon est décevant vers la fin, avec un boss fatiguant car il ressuscite tout le temps, il part quand même très bien, rappelant de temps en temps les grandes heures de RE2 à Racoon City. Dommage que l’action, les transformations et les explosions prennent largement le pas, particulièrement sur la fin, alors qu’il était convenu que la campagne de Léon serait justement une sorte de retour aux sources. Les combats sont tellement abrutissants qu’on se dit que la campagne de Chris sera pire encore. Pourtant, cette dernière est meilleur quasiment en tous points. Plus difficile, plus tendue, plus éprouvante (dans le bon sens), la campagne de Chris se permet même d’être surprenante, voir grandiose sur le dernier chapitre. Celle de Jake et Sherry propose des moments absolument uniques, pas toujours de très bon goût (la moto mon dieu), mais toujours originales et pas forcément toujours tournée que vers l’action. Une excellente campagne. Quand à celle d’Ada, ma préférée, jongle entre infiltration un peu timide, et énigmes parfois bien fichues (la pièce avec les pendus et le levier, c’est quand même très bon). Mais le côté espionnage, et aventure solo fait respirer le jeu, tandis que certains passages (forcément inspirés de films de SF) sont vraiment inoubliables.


N’oublions pas le côté challenge du jeu, parfaitement découpés en chapitre, avec des médailles à gagner, un mode mercenaire, chasse à l’homme, pas indispensables, mais amusants. Pour ne rien gâcher, préférons largement la VO sous-titrée, car la VF, sans être catastrophique, ne fait clairement pas le poids. Dommage, car je suis sûr que les doubleurs Français sont capables de mieux dans l’interprétation d’un personnage dans un jeu vidéo, du niveau de ce qui peut se faire dans un bon film d’action. En ce qui concerne la BO du jeu, le thème principale est assez réussi, rien n’est vraiment fantastique, mais elle possède une certaine identité.


Dernière petites choses un peu regrettable, il n’y a plus du tout de trésors à trouver pour les revendre comme dans RE4 et 5, le système de monnaie et d’upgrades des armes a tout simplement été remplacé par les points d’habilités, qui serviront à monter de niveau dans les trois aptitudes à s’équiper. Rien d’original. Quant aux armes, même si le jeu ne se veut pas du tout réaliste, toujours plus arcade et bordélique, il est quand même dommage de constater qu’on peut porter autant d’armes que l’on veut sur soit, sans que ça ne pénalise notre perso, et que ça ne se voit même pas sur lui. On peut porter un sniper, un lance grenade et un shootgun, rien à foutre, l’arme apparait comme par magie dans le dos et les mains du héros. L’idée de Max Payne 3 était très bonne par exemple, même si c’est vrai que le titre de Rockstar se veut plus réaliste que RE6.


En conclusion, RE6 est très loin d’être un mauvais jeu d'action. Si pas mal d’évènements sentent le brûlé, si les QTE ne sont pas toujours les bienvenus, si le kitsch de certaines situations peut faire pester, si le design des niveaux peut sembler parfois incohérent et imprécis, on peut quand même féliciter Capcom pour le renouveau de son gameplay, la qualité de son bestiaire, la réussite du chara design, ainsi que pour l'extraordinaire magnificence de son jeu.
Faisant se côtoyer des moments grandioses avec des passages certes médiocres, je soutiendrai RE6, car il est faussement prétentieux, grandement amusant et carrément décomplexé, même si l’on sait pertinemment qu’avec un tel budget, Capcom aurait pu travailler sur un jeu peut être moins fourni, mais certainement plus appliqué.

Addryu
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le 30 juin 2013

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