Si je devais résumer RE VI en une métaphore, je dirais que c'est la lycéenne de votre classe (ou lycéen, soyons inclusifs pour une fois) qui travaillait chaque jour d'arrache-pied, condensait chacun de ses cours dans une fiche, associait chacune de ses fiches à une couleur, et révisait celles-ci du retour de l'école jusqu'à l'épuisement. Pour quels résultats ? Une moyenne de 8/20 à l'année.
Et bien RE VI c'est un peu ça. La qualité de cet opus est inversement proportionnelle au travail fourni.
Je passerai l'aspect graphique du titre. Ça reste plus que correct mais, et ça prévaut pour tous les jeux que j'ai torchés, les graphismes m'en touchent une sans faire bouger l'autre. Une enveloppe, aussi attrayante soit elle, n'a jamais fait l'essence d'un titre, et RE VI ne déroge pas à la règle.
Ironie du sort, les graphismes sont pourtant le seul point positif du jeu. Pour ce qui est du reste, démarrons la tronçonneuse :
Le jeu propose pas moins de quatre campagnes. Oui, quatre. Et ce sont de vraies campagnes qui durent chacune d'entre elles une dizaine d'heures (exceptée la dernière). "Quarante heures de jeu, mais c'est génial !" me direz-vous. Ce à quoi je citerai celui qu'on ne présente plus : "Placez votre main sur un poêle une minute et ça vous semble durer une heure. Asseyez vous auprès d'une jolie fille une heure et ça vous semble durer une minute." RE VI est ce poêle, réglé au maximum de sa température. Jésus a connu la longue marche vers la crucifixion, nous avons connu RE VI. L'opus est un supplice de bout en bout, ou presque.
- Presque, car la première campagne de Léon se parcourt sans trop de douleur, avec un début d'ambiance à certains moments. CAPCOM vient de faire là sa première erreur (et évidemment pas la dernière) : l'entièreté du travail aurait du être consacrée à cette première partie, car, le cas échéant, il y avait largement de quoi faire un bon jeu. A y réfléchir, c'est plutôt les premières heures de ce premier pan qui sont à garder : une université infestée de zombies, des chiens un peu trop tactiles dans un cimetière, une sinistre église cachant un laboratoire sous-terrain, un voyage en avion mouvementé (comment ne pas penser à World War Z).. pour un final provoquant un fou-rire nerveux. Le boss final est un T-Rex, oui un T-Rex qui se transforme ensuite en mouche de la taille d'une Tour Eiffel. Oui ce titre s'appelle Resident Evil, non vous ne rêvez pas. Nous avons donc un jeu de quarante heures dont trente-cinq sont à jeter car..
- .. la campagne de Chris est un Gears of War de Wish. On bourrine, on bourrine et encore on bourrine, et ce, pendant dix putains d'heures. Sauf que nos armes ont tellement peu d'impact sur les ennemis (le bruit à la détonation s'apparente à celui d'un pistolet à eau; c'est peut être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup), que l'on a qu'une seule envie, terminer le niveau au plus vite. Je me suis donc surpris à courir jusqu'au prochain checkpoint sans toucher un seul "'J'avos" (ouais les zombies c'était au début, maintenant, et pour le reste du jeu, ce sont des espèces de mi-hommes masqués armés de kalash qui se transforment en cire une fois vaincus.. en cire d'abeille oui). On finit alors cette campagne épuisés par autant de vide devant nos yeux, ces mêmes yeux dont les larmes couleront en pensant aux précédents opus qui étaient pourtant très orientés actions (RE IV et même RE V pour ne citer qu'eux). Ah oui, le boss final de cette partie est un Grotadmorv, parce que le T-Rex ne suffisait pas, autant rendre hommage à Pokémon.
- Je tairai les deux scénarios restants, ceux de Jake et Ada, qui parachèvent une longue descente vers l'agonie. "Pourquoi avoir continué à jouer alors que tu te faisais chier ?" diront les plus provocateurs. Je répondrais alors que ma grand-mère m'a toujours obligé à finir mon assiette, et que la plupart de nos habitudes d'adulte prennent naissance au moment de l'enfance (c'était l'instant Marcel Rufo, me remerciez pas).
Scénaristiquement, RE VI est un nanar. Sauf que contrairement à RE IV, il n'assume pas. Les tentatives de nous arracher un début d'émotion sont autant de coups dans l'eau (on en revient au pistolet à eau, la boucle est bouclée). Les dialogues ont été écrits par un collégien du fond de la classe, à croire que les séances de brainstorming ont été concluantes chez CAPCOM. Imaginez que les gars se sont posés autour d'une table et se sont dits "Putain les gars ça en jette". L'histoire ne nous dit pas si le PQ des locaux était remplacé par un sac de "farine" (les guillemets sont univoques), mais la forte suspicion est de mise. Ils ont quand même osé appeler l'entreprise antagoniste "Néo-Umbrella" ; on applaudit des deux mains et des deux pieds pour l'originalité. RE IV n'était pas fin dans l'écriture, mais le second degré était de mise, et la pilule passait bizarrement plus facilement.
En outre, le jeu fait dans la surenchère constante. Ca pète de partout, c'est presque illisible, c'est du Michael Bay en raté (j'suis pourtant pas fan de Michael Bay). On sent la volonté (vaine) des développeurs de nous en mettre plein la vue, mais la magie ne prend terriblement pas. Il y autant d'hélicos qui se crashent, que de poils sur un portugais (on salue nos amis lusitaniens). Ceci est un exemple parmi tant d'autres, mais ma mémoire est sélective et ne s'attarde pas sur de l'oubliable.
Ah, un passage savoureux me vient, sans aucun doute le climax du titre : vers le milieu du jeu, des dizaines de zombies sont littéralement parachutés d'un hélico. Je répète, les méchants font sauter en parachute des zombies pour nous attaquer. Je me prends d'un fou rire rien qu'en écrivant ces lignes, alors imaginez ma réaction au moment de contempler cette merveille.
Au final, on se demande encore comment tant d'efforts, tant d'heures supplémentaires non payées, tant de gouttes de sueurs versées, ont bu aboutir à un étron pareil. Pour en revenir à ma métaphore initiale, les développeurs de chez CAPCOM ont rendu une copie d'une centaine de pages, mais comment avoir la moyenne lorsque le devoir est hors-sujet ?