Après des adieux explosifs à la PlayStation, Resident Evil passe à la nouvelle génération avec un opus non numéroté, et pourtant ô combien important pour la licence : Code Veronica.
Généralement considéré comme un des plus durs, et ironiquement un des plus faiblards, jeux de la série, que vaut la killer-app de la Dreamcast 20 ans après ?



4 fois plus de bits



Claire nous avait promis qu'elle continuerait de chercher son frère à la fin de Resident Evil 2, on la retrouve donc au début de Code Veronica en train de...fuir un hélicoptère, faire des mouvements à la Matrix pour niquer une troupe de soldats, et finalement se faire capturer par l'homme de ménage qui passait par là. Ah. (bon, techniquement c'est un soldat surentraîné, mais il en a pas vraiment la carrure)


Parlons donc du scénario. En fait, malgré ce début discutable, je l'aime énormément.
Non content de faire la liaison entre Resident Evil 1 et 2, Code Veronica est le premier jeu de la série à développer le lore et à donner des visages aux dirigeants d'Umbrella, la diabolique compagnie qui tirait les ficelles des précédents jeux. On y apprend des détails sur le T-virus, les expériences qui ont été menées dessus ces 15 dernières années et on rencontre les descendants d'un des fondateurs du groupe. Sans surprise, ils sont complètement fous, c'est à se demander comment cette boîte a pu tenir debout aussi longtemps. Enfin bref, c'est la première fois où j'ai eu l'impression que le jeu cherchait à avoir sa propre identité et son propre univers, au lieu de recracher des scénarios éculés par Hollywood depuis des décennies (manoir hanté et ville assaillie par les zombies).
C'est vraiment un scénario agréable à suivre, bien qu'un des personnages (Steve) ait une voix insupportable et quelques moments...discutables avec Claire, il a aussi droit à de bons moments. Il y a même une cinématique optionnelle très touchante avec l'homme de ménage du début. Par contre on restera plus dubitatif sur le retour d'un certain personnage laissé pour mort dans le premier jeu, surtout qu'il n'y a absolument aucune explication sur sa survie (il me semble qu'il faudra attendre 2008 pour en avoir une). C'est con (et assez gratuit, admettons-le), parce que le jeu a déjà d'excellents antagonistes avec les dérangeants Alfred et Alexia Ashford, le premier offrant d'ailleurs une magnifique référence à Psychose d'Hitchcock. Ces deux bonnes gens font un joli parallèle avec la fratrie Redfield, et si on ajoute Steve à l'équation, l'abandon devient le thème central du récit. Et moi, j'aime bien cette thématique.


Je suis moins fan de la mise en scène de certaines cinématiques par contre. J'ai déjà cité Matrix un peu plus haut, mais il est évident que les développeurs ont vu et adoré le film au vu de toutes les pirouettes en slow-motion qu'un des personnages exécute. Du coup, c'est vite lourd.
Et puis bon, si tu me proposes de remater soit Psychose, soit Matrix, je ne vais pas hésiter 5 secondes.
Notons toutefois la très jolie jaquette du jeu, qui abandonne les gros plans sur des mangeurs de chair ou sur un héros énervé pour nous proposer une photo presque poétique de Claire. Mais regardez attentivement, les zombies ne sont jamais loin.


Graphiquement, le jeu abandonne les décors pré-calculés de la PS1 et propose pour la première fois de vrais environnements en 3D, une technique déjà testée dans Dino Crisis par la même équipe.
Ce changement a des avantages et des inconvénients. Les environnements sont beaucoup moins détaillés et moins mémorables qu'auparavant, d'un autre côté cela permet de jouer avec la caméra et de proposer des plans impossibles jusqu'alors afin de créer une tension nouvelle. Je pense à cet excellent moment où l'on explore une base sous-marine et où la caméra, placée à l'extérieur de la base, nous suit en permanence. Comme si un prédateur surveillait sa proie...
Cette technique sera abandonnée pour Zero et le remake du premier épisode. C'est compréhensible, mais ça donne du coup un charme unique à CV.
C'est d'ailleurs loin d'être moche graphiquement, même si je déplore certains passages trop sombres au début du jeu et un bossfight complètement gâché par le brouillard (et j'arrive pas à savoir si c'est un brouillard fait exprès pour lui donner une ambiance, si la Dreamcast a atteint ses limites d'affichage ou si c'est juste le moteur qui est mal optimisé).



Véro me niqua



Au niveau du gameplay, le jeu évolue peu par rapport à ses prédécesseurs. Il régresse même sur certains points comparé au 3 (développé en parallèle), comme avec l'absence d'esquive ou l'impossibilité d'évoluer librement dans les escaliers. Ca n'est pas un grand malheur notez, car la formule est toujours aussi efficace et profite du gain de puissance de la console pour proposer des zones de jeu immenses.
C'est vraiment le truc qui m'a marqué, le nombre de salles et de lieux disponibles pour le joueur. Mieux, tout cela est accessible très tôt dans l'aventure, donc on est vite largués sur cette île inhospitalière où de nombreuses portes s'offrent à nous. On retrouve clairement la liberté de progression de RE1, qu'on avait un peu perdue par la suite. Surtout que, si le scénario est plus consistant qu'auparavant, les cinématiques sont proportionnellement moins nombreuses que dans RE2 et 3 et coupent donc moins les phases de gameplay.
Ca divisera beaucoup, mais personnellement j'adore garder en tête tous les culs de sac que je rencontre et je trépignais à chaque fois que je trouvais un objet pouvant me débloquer. La carte aurait pu être un peu optimisée pour le backtracking cela dit, le Manoir Spencer était mieux foutu sur ce point.
Et puis l'aventure est longue, ça fait super plaisir ! J'ai mis 12h à terminer ma première run, contre 7 pour DEUX playthroughs de RE2. Et la difficulté est incomparable.


Mais là c'est un point qui me chagrine. C'est cool que le jeu soit dur, mais c'est aussi le premier de la série à ne pas proposer d'options de difficulté. Du coup j'en ai pas mal chié à plusieurs moments : j'étais arrivé à court de soin à la moitié de l'aventure, les Hunters sont aussi redoutables que jamais, les pseudo-Tyran jaunes ont un gimmick excellent, le jeu adore faire revivre des corps quand tu te trouves au milieu d'une pièce, c'est le premier RE où des zombies peuvent réapparaître dans des zones déjà nettoyées... Tout ça à la limite, c'est de la bonne difficulté.
Je suis beaucoup moins fan de certaines décisions de game-design. Te foutre un PUTAIN DE TYRAN à combattre au bout d'à peine un tiers du jeu, c'est criminel, surtout dans un espace aussi petit. Pareil pour ce maudit couloir avec des mites intuables qui peuvent t'empoisonner. C'est tellement mal foutu que les développeurs ont été obligés de foutre des herbes anti-poison juste à côté, parce qu'ils savaient que ça allait faire chier tout le monde.



X-rated



Code Veronica ne souffre pas de gros défauts. Mais à force, ils s'accumulent, entre les pics de difficulté abrupts, le scénario qui part parfois en roue libre ou des décors pas toujours clairs, c'est compliqué de le recommander comme premier RE à un novice, alors que n'importe quel jeu de la trilogie originale est une bonne porte d'entrée.
Ce n'est pas pour autant que c'est un jeu à délaisser, même si l'absence d'un numéro dans son titre lui a sans doute été préjudiciable sur le long terme (c'est le seul des 4 premiers RE + Zero qui n'ait pas eu de version HD et qui ne soit pas disponible sur PC). Outre son scénario qui est nécessaire pour comprendre les épisodes 4 et surtout 5, il ne faut pas non plus oublier son excellente bande-son dont les meilleurs morceaux tiennent la dragée haute à RE2. Citons toutes les variations du thème d'Alexia ou cette musique très Koh-Lantesque qu'on entend juste avant le boss final.


Bref, c'est un jeu qui a beaucoup d'amour à donner, mais il aurait besoin d'un coup de peinture via un remake. J'espère que Capcom va lui en donner un et ne pas le zapper au profit du bien plus populaire épisode 4, mais les rumeurs récentes m'inquiètent un peu.

Sonicvic
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le 25 oct. 2020

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