Un très bon titre, mais qui reste hélas dans l'ombre...
C'est toujours dur de succéder à un épisode qui aura su marquer son genre. Shadow Hearts Covenant était ( et reste) un chef d'oeuvre absolu sur PS2 . Près de deux ans après le Japon, et un an après les États-Unis, le troisième épisode de Shadow Hearts a débarqué en Europe. Avec un défi de taille : succéder et essayer de faire mieux que son prédécesseur tout en mettant en place un nouveau cadre et de nouveaux personnages. Pari gagné ? Réponse dans les lignes qui suivent.
Shadow Hearts FTNW ( ça fait plus court) est sorti fin aout 2007 sur les territoires PAL soit près de deux ans après sa sortie japonaise . On peut se demander pourquoi une telle attente, étant donné qu'en arrivant chez nous et contrairement aux deux autres, les textes sont restés dans la langue de Roosevelt. Pour les voix, ce n'est pas une surprise, on avait déjà les pistes anglaises, mais là, le jeu en laisse plus le choix de la langue pour les textes, c'est English Only. Je vois déjà certains allergiques fuir...
Le titre à rallonge a une bonne raison d'exister : ce troisième épisode se passe aux États-Unis. Pour être plus précis, en 1929. Donc, plus de dix ans après la fin du second épisode . Ce qui implique que nous ne retrouverons pas Yuri dans cet épisode ni Karin . De toute façon les fins de Covenant ne laissaient pas d'espoir de les revoir, et si vous n'avez pas fait cet épisode, je vous incite grandement à le faire. Enfin, je dis ça, je dis rien.
A la place de notre anti-héros désabusé, nous retrouvons ici Johnny Garland, un ado de 16 ans amnésique, ayant perdu son père et sa sœur dans un accident de voiture. Mouais, question charisme, on a vu mieux. Toujours est-il que ce garçon a monté son agence de détective et se contente de menues affaires. Jusqu'au jour où un certain Gilbert , qui ressemble énormément au Pingouin de Batman, le charge de retrouver un homme. Après avoir montré son signalement à quelques badauds, Johnny finit par arriver dans un théâtre à l'abandon. Après quelques bagarres avec les brigands du lieu (et qui font office de tutorial), il retrouve notre homme. A peine a t-il le temps de se présenter qu'une fenêtre dimensionnelle s'ouvre, un monstre apparaît, et mange l'infortuné, sous les yeux horrifiés de Johnny. Mais ce n'est pas fini! Alors que le monstre allait s'en prendre à notre adolescent, une créature ailée brise le plafond vitré et entre en combat avec lui.
Le jeu démarre ainsi, et cela va entrainer Johnny non seulement sur les traces de son client, mais aussi à des révélations auxquelles il n'était pas préparé . Il visitera tout le continent américain . Oui, une des forces de FNTW c'est de nous faire visiter de chouettes coins. Même si on passe du temps aux États-Unis, le jeu saura sortir de ces frontières. Et de prouver que les Amériques ont une culture riche . Non, cela n'a pas commencé à l'arrivée des conquistadores qui ont massacré les populations indigènes. Bon, OK, le coup des Ninjas Brésiliens, c'est un peu too much...
Cela n'empêche pas le jeu de jouer sur certains clichés. Reprenant le système uchronique des deux autres volets, vous rencontrerez des personnages ayant réellement existé, comme Al Capone, par exemple.
Globalement, le scénario tient la route. On aurait aimé toutefois une ambiance horrifique un peu plus présente. Elle s'était déjà un peu estompée au profit de l'humour dans Covenant, ici, on a l'impression que les ressorts comiques ont pris un peu le pas sur l'horreur.
Il faut dire aussi que le casting présent dans cet épisode est complètement barré . Laissez-moi faire les présentations.
Le duo de cet épisode sera composé de Johnny, que j'ai décrit plus haut. Doté d'un caractère plutôt enthousiaste, dévoré par ses hormones à certains moments, il reste quelqu'un d'attachant. Son majordome, Lenny Curtis, tout droit revenu de Covenant ( si, si, c'est le même) est aux petits soins pour lui. En combat, c'est quelqu'un d'équilibré se battant avec un poignard et il possède un appareil photo permettant de prendre les pouvoirs des ennemis et d'avoir des renseignements sur eux.
Vient ensuite Shania . Amérindienne ( en anglais native American) de 21 ans, elle est plutôt court-vêtue mais cela ne semble choquer personne. Elle possède le pouvoir de fusion. Elle n'en a pas autant que Yuri et il s'obtiennent en passant des épreuves. Peu loquace, elle recherche les assassins de sa tribu. Elle combat en utilisant deux tomahawks et fait assez mal. Ses fusions peuvent acquérir d'autres pouvoirs en utilisant l'énergie récoltée au combat, permettant aux fétiches de gagner des niveaux. Sa transformation donne lieu à un petit strip-tease.
Nathan est son garde du corps. Entièrement dévoué à Shania, il se bat avec deux pistolets et a développé une technique, le Gun-fu, et acquiert ses pouvoirs en trouvant des UMA, des créatures rares. En combat, il est résistant. On aimerait toutefois que ses deux pistolets fassent un peu plus mal, parfois...
Frank Goldfinger, c'est le perso qui apporte la touche de ridicule au jeu. Il rejoint le groupe en tant que ninja et ayant appris ses techniques dans une tribu du Brésil (!). Ses armes sont fabriquées à partir d'objets du décors, un peu comme celles de Joachim dans Covenant. Parfois le résultat est... surprenant ( doux euphémisme...) Il n'en reste pas moins excentrique et fait assez mal en combat.
Mao se remarque car c'est un chat géant qui parle. Et c'est une femme en plus. Amie d'Al Capone, elle a de plus un gros penchant pour l'alcool, ce qui lui permet d'utiliser en combat les techniques de l'homme euh, du chat saoul. Son rêve, c'est de devenir vedette de cinéma...En combat, elle dispose de la plus forte puissance de frappe. A ne pas négliger dans une équipe, donc...
Hildegarde Valentine, c 'est la soeur de Keith et Joachim, présents dans les deux premiers SH. Elle s'est retrouvée ici suite au crash d'un appareil volant expérimental mis au point par Roger Bacon (ceux qui ont joué aux deux premiers SH doivent le connaître) qui a eu lieu sur la commune de Roswell. Bien entendu, c'est une vampire, comme ses frères. Elle aussi dispose de deux transformations en plus de son état normal. En chauve-souris rose ( elle veut faire concurrence à Batman ou quoi ?) et en « fat » Hilda. La façon de jouer varie selon la forme qu'elle revêt: en normal, elle est plus portée sur la magie, obèse, sur les attaques physiques. La forme de chauve-souris dispose de la meilleure attaque... Mais résiste le moins bien et peut se faire tuer en deux coups. Évitez de l'aligner contre un boss sous cette forme...
Ricardo Gomez. Ce Mexicain est amoureux d'Edna, la soeur cadette d'Al Capone. La force des choses fera qu'il sera contraint de la tuer, à ses dépens. Il se sert de sa guitare pour combattre. Il peut la transformer en fusil, lance-roquettes, et même en lance-flammes. Ses sérénades permettent de donner un boost à ses alliés ( mais pas à lui même, attention). Un combattant polyvalent.
Un brin loufoque ce casting, tout de même... Mais pourquoi pas...
Du côté des méchants, cette fois, nous avons droit à un couple mystérieux composé d'un homme et d'une femme. Se faisant appeler Killer, l'homme fut sauvé de la police par la jeune femme, qui répond au nom de Lady mais qui est étrangement muette. Cette dernière le sauvera de la police et guérira ses blessures. Elle dispose d'étranges pouvoirs...
Bref, les programmeurs n'avaient pas envie de se fouler pour donner un nom aux méchants...
On retrouve quelques persos issus des épisodes précédents , comme Gérard Magimel, plus homo que jamais et faisant toujours office de marchant avec son nouveau petit-ami, roule en side-car . Sa boutique s'appelle Just U.S. Guys et vous pouvez soit acheter des armes et des objets, ou améliorer vos tablettes de magie.
Roger Bacon est toujours vivant et revient dans ce SH où il sera pris par erreur pour un alien , mais d'un côté l'erreur est humaine, notamment lorsque l'on voit sa tronche, et une fois de plus, il joue un rôle important dans cet épisode.
Lenny Curtis passe du rôle de faire-valoir des méchants dans Covenant à celui de valet de Johnny qu'il appelle « Young Master » ( Jeune Maître).
Sachez également que l'on retrouve le Grand Gamma ( « great Q » en anglais)... Vous savez, celui qui apprenait le catch à Joachim dans Covenant...
L'esprit de la roue est encore là, et bien sur il faudra fouiller tous les recoins pour le trouver.
Et si cet épisode marque vraiment la fin d'un cycle, sachez qu'il est tout de même lié au second suite à un événement se passant à la fin du premier DVD...
Le jeu se présente comme le plus joli de la saga. Il y avait déjà un fossé entre le premier épisode qui aurait pu tourner sur une PSX en fin de vie côté technique et Covenant, mais là, il y a carrément un gouffre, même avec son prédécesseur! C'est bien simple, FTNW propose des personnages bien modélisés, des décors colorés, fidèles à la réalité, des monstres et des boss énormes, et un habillage de menu très bien fait. Bon, ce n'est pas du Square Enix, mais certains lieux sont tellement bien faits qu'il resteront dans votre mémoire. Les scènes cinématiques sont également très bonne facture mais ça on le savait depuis Covenant. Un grand sens de la mise en scène .
L'animation est très bonne pour un jeu du genre, tout bouge bien, pas de ralentissements, même pendant les combats. Il faudra noter que la fréquence de ceux-ci est moins élevée que dans Covenant. Ils sont cependant plus complexes à prendre en main. J'en profite pour dire que les temps de chargement sont assez courts. Et d'avertir les possesseurs de PS3 60 Go, et donc en théorie rétro-compatible PS2, que le jeu passe très mal. Covenant avait des problèmes de jouabilité, ici, le jeu se bloquera pendant les cinématiques. Seule solution : les passer , mais c'est aussi se priver d'un bout de l'histoire. Mieux vaut rebrancher une bonne vieille PS2 des familles pour éviter tout risque d'autant qu'il n'est pas garanti que les prochaines mises à jour du firmware PS3 améliorent les choses...
Les musiques sont bonnes. Il y a plusieurs thèmes de combats, et j'avoue qu'ils sont tous de très bonne facture. Plus instrumentaux et utilisant moins d'artifices que dans Covenant, ils collent bien à l'action. On retrouve toujours le « gling gling » caractéristique de la série lors d'une victoire. Un titre agréable à écouter.
Les sons sont nombreux. On regrettera que les doublages anglais soient parfois énervants, mais bon...
Le système de combat a encore été modifié depuis Covenant. Bien entendu, c'est toujours à base de roue du jugement et de zones à valider pour pouvoir frapper. Mais cela serait trop simple. Et surtout, pas assez riche. La gestion des combos se fait grâce à la barre de stock qui se remplit selon les coups portés. Il y a d'ailleurs plusieurs sortes de combos. Une barre au dessus de la liste de commandes permet de gérer le type de combo que vous voulez faire. Par défaut, c'est l'option « Normal » qui sera en surbrillance, c'est à dire que votre combattant agira une seule fois. Selon le coup que vous voulez utiliser, cela enlèvera plus ou moins de stock. L'option « double » vous permet de faire deux actions dans un même tour. Mais attention! Vous ne pouvez pas sélectionner deux fois la même option. Par exemple, si vous attaquez au premier coup, vous devrez ensuite enchainer avec une magie par exemple.
L'option « Combo » permet de faire un enchainement avec un autre personnage. Pour valider l'action, vous devrez, comme dans les épisodes précédents, valider la touche qui s'affichera à l'écran avant qu'elle ne s'affiche complètement.
« D.Combo » signifie que deux personnages feront chacun deux actions en un seul tour. C'est l'option la plus couteuse en barre de stock, puisqu'il faudra que le nombre soit au moins à 2 .
Bien entendu, on retrouve les types d'attaque présentes dans Covenant : coup normal, puissant, projection et projection au sol. Selon l'action faite par le premier personnage lors d'un combo, vous n'aurez plus accès à d'autres commandes pour le second.
Bien entendu les ennemis peuvent vous rendre la pareille, avec des coups pouvant vider votre barre de stock, et bien sur infliger des altérations d'état, mais aussi de roue.
Ce système certes contraignant mais bien pensé et voulu par les programmeurs, oblige à faire des choix. Les ennemis étant loin d'être amorphes, une seule erreur peut vous mettre à la merci d'un coup mortel.
D'autant que vous ne pourrez pas les frapper n'importe où. Cette fois, les ennemis, à la manière de Xenosaga , ont trois zones de frappe : basse, intermédiaire ( « mid-range ») et haute. Vos coups sont réglés pour frapper une zone précise. Autrement dit, il ne sert à rien de faire un coup en zone basse sur un ennemi volant, vous le manquerez à coup sur.
Un petit plus bienvenu.
Bien entendu, vous avez toujours les SP, Sanity Points ( Points de santé mentale) à surveiller comme jamais. Si vous en êtes à court, votre personnage deviendra fou et sera incontrôlable. Les combats, notamment contre les boss, peuvent se révéler assez longs, alors à vous de vous équiper en conséquence.
La magie se fait à partir de tablettes de signes astrologiques. Si vous trouviez déjà le système de Covenant complexe, avec les symboles des démons à placer aux bons endroits, celui de FTNW est encore plus dur à comprendre. En gros vous devez placer des symboles sur des tablettes astrologiques. Selon la configuration de la tablette vous pourrez créer des magies plus ou moins puissantes. Pour plus d'explications, vous pouvez demander au nouveau compagnon de Gérard dans le jeu ou dans le tutorial du menu de jeu. Et apprenez à lire l'anglais aussi...
Côté durée de vie, on sait dès le départ que le jeu sera plus court que Covenant. En effet, lorsqu'on ouvre la boîte, il n'y a qu'un seul DVD qui apparaît. Vous me direz cela ne prouve rien, FF XII tient sur un seul disque et est extrêmement long. Certes. Sauf que là, niveau durée de vie, c'est quand même un peu trop court. Jeu terminé en 37 heures, ça fait un peu juste je trouve. Certes, la balade sur le continent américain est fort agréable, assez drôle et il y a peu de temps morts. Mais c'est rageant de voir que l'on met trente heures de moins que Covenant à boucler FTNW. Pourtant, le jeu est sans doute le plus ardu des trois : les monstres font mal, peuvent avoir des coups vicieux comme vous enlever des points de SP ou de stock, système de combat bien pensé... Difficile, plus que les deux premiers, c'est un fait. Mais aussi, plus court. Et ça c'est dommage. Pourquoi ? Parce que partir du Nouveau Monde pour établir de nouvelles bases, je dis oui. Mais je sens aussi que le potentiel du jeu n'a pas été totalement exploité.
Au final que penser du troisième opus de Shadow Hearts ? Qu'il reste un très bon RPG sur PS2 et qu'il vaut le coup d'être fait, et surtout à petit prix. Doté d'une réalisation supérieure à ses deux aînés, et bourré de clin d'oeils à ceux-ci, il reste toutefois dans l' ombre de Covenant. La faute à une durée de vie amputée de moitié, et un côté dark laissant plus de place à l'humour. Ce n'est pas forcément un mal, mais j'aurais aimé retrouver ce qui a fait le charme du cycle Yuri. Heureusement, le casting bien barré et le système de combat encore plus stratégique font de ce jeu un très bon élément. Court, mais bon et difficile, en somme. On pourrait penser que ce jeu était le point de départ d'un nouveau cycle ( le « cycle Johnny » par exemple). Malheureusement le studio Nautilus a été dissous...
Point positifs :
Très bien réalisé techniquement
Le casting complètement barré
On revisite l'histoire d'un continent entier
Système de combat encore amélioré
Bonnes musiques et voix
Offre un certain challenge
Points négatifs :
Uniquement en anglais
Passe mal sur PS3
Durée de vie assez courte
Où est passé le côté sombre ?
Nom : Shadow hearts From The New World
Développeur : Nautilus
Éditeur : Ghostlight
Genre : RPG