Par une chaude après-midi de printemps, il est possible de découvrir une pépite vidéoludique.
Confiné, mais toujours résolu à ne pas broyer du noir, je découvre Shannara, un jeu d'aventure inconnu dans notre pays (et par Sens Critique) au fond d'une bibliothèque.
Après avoir terminé le titre, deux sentiments ont surgi : la satisfaction et la surprise.
La satisfaction d'abord parce que j'ai pris un plaisir fou à parcourir l'aventure et à découvrir une adaptation parallèle de la saga littéraire du même nom, créé par le controversé Terry Books.
Books garde la réputation de n'être qu'un simulacre de Tolkien, ses univers partageant beaucoup de points communs avec le Seigneur des Anneaux.
Je n'ai lu aucun des livres de Books et finalement peu importe : si le jeu est réussi, je me moque bien de savoir si l'univers est original.
D'où mon deuxième point sur la surprise. Après avoir terminé l'histoire de Shannara, une seule question m'a paru fondamentale au moment d'écrire cette critique.
Comment est-il possible que personne ne connaisse ce jeu ?
I- Le début de l'aventure
Le postulat de départ de Shannara n'a rien d'original. Vous incarnez Jak Ohmsford, fils du roi Shea qui a détruit il y a bien des années le sorcier maléfique Brona. Las de la vie de château, Jak n'a qu'une idée en tête : embrasser les pas de son père et devenir un héros.
L'aventure commence dans la Vallée Ombragée. Parti pêcher, Jak s'endort près d'une cascade et fait un rêve étrange : un gnome au milieu d'un temple perdu invoque par la magie noire, une créature surnaturelle. L'apparition change alors son invocateur en humain et le somme de se rendre dans les royaumes des Four Lands pour commettre des sombres desseins. Jak se réveille en sursaut.
La cinématique pour un jeu sorti en 1995 est de très bonne facture et d'entrée le voice-acting nous laisse présager que le jeu dispose d'un certain budget. Rien de surprenant quand on sait que le jeu développée par Legend Entertainment était une priorité du studio.
De retour au jeu, je découvre le premier tableau du jeu. Je suis au départ circonspect, car je découvre que Shannara, est un point and click, un genre risqué s'il n'est pas bien maîtrisé. Mais rapidement, je perçois le principal avantage du titre : privilégier l'histoire à la résolution d’énigme.
Selon moi, le principal inconvénient du point and click réside dans l'interprétation des attentions des scénaristes. Si vous avez joué comme moi à des merveilles comme The Secret of Monkey Island, vous savez qu'à un moment vous allez devoir faire face à une énigme qui va vous gâcher votre aventure à cause de son incohérence.
Franchement donner 5 fois une banane pour qu'un singe vous suive vous trouvez ça cohérent et amusant ? Le jeu reste fantastique, mais je vais m'en souvenir de ce satané singe !
Dans Shannara, les énigmes restent tout à fait abordables, car vous disposez de peu de tableaux à découvrir par zone et il n'y a pas de temps limité. Ce qui a pu faire enrager les puriste du genre au moment de la sortie du jeu, est pour moi un point positif.
Pour en revenir à l'histoire, alors que notre héros essaye vainement d'attraper quelque chose, il aperçoit un médaillon dans les griffes d'un oiseau. Réussissant à récupérer le pendentif, Jak aperçoit une forme menaçante derrière la végétation. Un combat s'engage alors. Pas de taille, Jak est sur le point d'être submergé lorsqu'il est sauvé par Allanon, le druide légendaire qui a aidé le père de Jak dans son périple pour détruire Brona. Il indique à Jak que Brona est de retour et qu'il s'apprête à envahir tous les royaumes des Four Lands !
Jak doit prendre la route pour avertir les royaumes voisins. Durant son voyage il fera la rencontre de multiples personnages qui l'aideront dans sa quête (le groupe pourra être composé de 6 personnages maximum).
II- Système de jeu
Shannara n'est pas un RPG, il n'est pas question de faire gagner de l'expérience à vos personnages. Des combats sont possibles mais ils apparaissent pour faire progresser l'histoire. Les phases de combat restent le point faible du titre, car elles cassent complètement l'immersion dans le jeu et se révèlent particulièrement molles. Tout comme le déplacement sur la carte du jeu qui ressemble à une jolie bouillie de pixels. Cependant ces phases ne représentent qu'un faible temps de jeu et ne gâche pas la découverte de l'histoire.
Pour le reste vous avez affaire à un point and click : vous devrez faire avancer l'aventure en résolvant des énigmes et en découvrant des objets. Comme les objets sont plutôt limités, il est difficile de pouvoir se tromper, mais il est quand même conseillé de prendre un petit morceau de papier pour noter les informations importantes.
Shannara n'est pas sorti en France et ne dispose pas à l'heure actuelle d'une traduction. Vous allez donc devoir découvrir l'histoire avec de l'anglais.
Mais rien d'insurmontable, car le champ lexical tourne autour de l'héroic fantasy (ne vous attendez pas à des envolées littéraires comme dans Hamlet !) et j'ai réussi avec mon niveau de langue (très faible) à terminer l'aventure.
Et si la langue vous rebute, sachez que le titre dispose de formidables qualités qui permettront de passez outre ce détail.
III- Les graphismes
Honnêtement les tableaux sont magnifiques et l'animation des personnages durant les dialogues n'a pas pris une ride. Pour vous en convaincre voici le premier tableau du jeu et votre rencontre avec Allanon.
https://www.freegameempire.com/Img/Cache/Games/Shannara/Screenshot-1.png
https://shannara.fandom.com/wiki/Shannara_(video_game)?file=Allanon.png
Le premier tableau par exemple parait assez fade par rapport au reste de votre aventure qui vous proposera une direction artistique magnifique.
Ajoutez à cela une diversité des environnements et vous tombez sur l'un des plus beaux point and click des années 90 !
IV- L'histoire : le plus gros point fort du titre
Bien sûr on reste dans un univers d'héroic fantasy. Si vous connaissez le genre, les pérégrinations des aventuriers ne vous surprendront pas, mais le jeu prend à contre pied beaucoup de clichés du genre.
Shannara ne vous prend pas pour un enfant naïf, et montre qu'à l'époque les scénaristes n'essayaient pas de faire plaisir à leurs clients, préférant assumer leurs propos et leurs visions quitte à surprendre le joueur.
La fin restera notamment dans ma mémoire pour sa conclusion et la maturité de ces propos. On est bien loin d'une fin lisse à la Disney et franchement je suis resté plusieurs minutes devant mon ordinateur en me demandant ce qu'il venait de se passer devant mon écran.
V- La prise de risque des développeurs
À une certaine époque, le jeu vidéo était un laboratoire géant pour les développeurs qui n'hésitaient pas à tester de nouvelles choses. Dans Shannara, la prise de risque fût l'utilisation de la 3D dans certaines cinématiques. Bien qu'elles paraissent aujourd'hui ridicules, elles n'avaient qu'un seul objectif : faire croire au joueur qu'il était lui même en train de vivre l'aventure de son héros. L'attention est louable et certaines sections méritent votre attention et votre clémence.
VI- Conclusion
Terminé au bout d'une dizaines d'heures, Shannara restera pour moi une excellente découverte : sa direction artistique, son histoire et ses personnages lui permettront de rester dans mon esprit lorsque je parlerai des point and click indispensables à découvrir.
Il n'est pas parfait, mais remis dans son contexte il reste un excellent point and click et permet de découvrir le genre pour les joueurs qui ne sont pas friands d'énigmes difficiles.
Après la fin de l'aventure je me pencherai sur les livres pour me forger mon propre avis sur la saga de Terry Books, ce qui prouve que le jeu a réussi son pari en ce qui me concerne. Le jeu peut être fait sans connaître les livres et c'est une excellente chose.
Inconnu en France, le titre est aujourd'hui disponible gratuitement sur le site Abandonware France.
Alors n’hésitez pas à arpenter les contrées des Four Lands pour tenter de déjouer les plans de Brona !