Plus qu'un jeu vidéo, c'est une expérience à vivre. Rien d'autre ne ressemble à Soma tant sur le fond que sur la forme, à part les autres titres de Frictional Games, a ceci près que le minimalisme a été poussé à son paroxysme. Les mécanismes sont élémentaires : ni collecte ni réel moyen de défense. Et l'interactivité physique avec le décor, véritable marque de fabrique du studio dont ils avaient tiré l'inspiration originelle, ne subsiste dorénavant qu'à l'état résiduel, comme le témoin atrophié d'un passé lointain. Finis les grands casse-têtes exploitant cette technologie qui segmentaient l'histoire en autant de parties distinctes. L'univers de Soma s'affranchit d'un certain aspect ludique pour laisser place à l'immersion plus qu'à l'action, à l'existence plus qu'au jeu. Un pari osé qui contraint le joueur à plonger en son sein pour une mémorable fuite, au cours de laquelle il découvre la nature de son voyage et de son être. Soma est un genre de rêve lucide abandonné à lui-même : une pause au milieu d'un espace-temps impossible où l'on se retrouve confronté à la solitude de l'existence. Un genre de tableau vivant qui n'a rien à envier aux plus grandes œuvres mystiques de la science-fiction, tant il parvient peu à peu à stimuler l'imagination du joueur sur un plan irrationnel et philosophique, avec la faculté d'hanter l'esprit à long terme. En cela, l'isolement glaçant qu'il propose finit par en devenir fascinant et c'est avec une délectation étrange qu'on s'imbibe progressivement de son atmosphère hors norme. Semé d'épreuves folles, énigmatiques, parfois surréalistes ou terrifiantes, mais surtout propulsé par une histoire incroyablement créative, de bout en bout Soma impressionne par sa maîtrise narrative et sa profondeur.