Que dire ?
C'est un déluge émotionnel qui me traverse lorsque je pense à Steep. J'ai tellement de sensations à vous partager que me trouver au sommet de cette critique me donne le vertige !
Steep est une expérience unique.
Avant tout, c'est une ode à la montagne, une véritable déclaration d'amour. C'est une incitation à l'évasion, à l'exploration du monde, de la nature et à la découverte de soi. On se sent dans son cocon, on y est complètement libres. Seuls face aux montagnes, en train de vivre nos expériences personnelles qui résonnent au plus profond de notre être, on a le sentiment de prendre du temps pour soi, pour s'aérer l'esprit, pour vivre et pour profiter... Tout simplement.
Et c'est la première fois qu'un jeu me procure ce sentiment.
Celui de vouloir allumer ma console pour m'enfermer dans ma bulle, pour faire le vide et me sentir bien. Ce sentiment, c'est celui qu'offre la montagne dans la vraie vie. La vraie victoire de Steep, c'est de réussir à capturer cette essence, à nous plonger dans cet univers.
Quel bonheur ! Franchement. Se lancer dans une "petite partie" de 20 minutes, et se rendre compte quelques heures plus tard qu'on a largement dépassé l'heure raisonnable d'aller se coucher et qu'on a pris du plaisir à chaque instant passé avec le jeu, n'est-ce pas merveilleux ?
Mais comment ce miracle est-il possible ?
Pour moi, c'est car il s'agit du premier jeu de sport extrême à nous plonger dans une map gigantesque qui nous dépasse... mais que l'on peut apprendre à connaître, à dompter. Steep nous lâche au milieu de sommets immenses et nous invite à les découvrir : pour débloquer les épreuves, il faudra explorer, révéler des nouveaux sommets, parcourir la carte ! Et, ce faisant, il nous invite à descendre toutes les montagnes de ce monde ouvert.
Et des montagnes, il y en a beaucoup ! Le miracle, peut-être, c'est que chaque piste dévalée semble différente. Pas forcément en termes de direction artistique, puisque l'utilisation d'une technologie procédurale (contrôlée évidemment) donne le sentiment de voir un peu trop souvent les mêmes arbres, par exemple. Mais les pistes, elles, en termes de level design, dans la manière dont leurs courbes sont dessinées, dans toutes leurs différences notables en termes de densité d'arbres, de rochers, de bosses, d'intensité de dénivelé, toutes sembleront nouvelles à chaque fois. Et le mieux, peut-être, c'est qu'en les refaisant elles arriveront à sembler nouvelles... encore et encore. Car elles semblent naturelles. Non, elles sont naturelles. Le design très crédible de ces montagnes n'est jamais trahi et des centaines d'embranchements s'ouvrent constamment devant nous lorsque l'on dévale les pistes.
Le résultat, c'est qu'on n'est jamais simplement en train de descendre bêtement. On est constamment en contrôle. Maîtres et libres à la fois.
On est Maîtres, car il faudra être vigilant, apprendre à dompter les passages les plus difficiles et choisir ses directions en fonction de ce que l'on recherche comme sensations. Grâce à cela, on est toujours en train de vivre des "moments".
Ce putain de saut de 90m, tu es en train de le vivre, tu as choisi de le prendre à cette vitesse, de te lancer dans une série de tricks un peu trop ambitieuse ; la réception, périlleuse, c'est toi qui doit apprendre à la réussir, sinon tu t'écrases, tu te fracasses, alors que si tu réussis tu seras empli d'un sentiment de satisfaction énorme. Et, dans les deux cas, peu importe, tu continueras ta route et tu vivras ton prochain moment de gloire et de puissance dans quelques instants.
On est Libres, car Steep offre la perdition. On s'y perd, on s'y égare, on passe notre temps à se lancer d'un sommet et à emprunter divers chemins pour descendre l'intégralité de la montagne. Le fait que les montagnes soient intégralement conceptualisés peut paraître habituel dans un monde où des jeux à monde ouvert sortent très régulièrement. Et pourtant, tout le feeling de Steep passe à travers ce simple fait.
La seule limite, c'est la limite de la carte. Elle se trouve loin, loin devant. Tout en bas, et plus loin encore. Du sommet des montagnes jusqu'à cette limite, il faut parfois descendre pendant plus de vingt minutes. Sans s'arrêter. A toujours trouver des choses à faire, des choses à voir, des choses à vivre. Et ce temps paraît toujours trop court.
Si tous ces sentiments sont possibles, on le doit beaucoup à la musique. Pas celles de licence que l'on entend dans les épreuves, celles là, désolé, mais je m'en fiche et je les désactive autant que possible. Je parle de celle composée, pour le jeu, par le collectif franco-suisse Zikali.
Cette musique est somptueuse. Elle capte toute l'essence de la montagne, elle aide énormément à nous offrir un sentiment de plénitude, de zen, de décontraction. De grâce. D'euphorie. Tout ça quoi.
Les instruments sonnent comme la montagne, les partitions résonnent en fonction de la couleur musicale de chaque sommet, et l'on y trouvera autant d'envolées orchestrales que de riffs électriques très nerveux. Je tiens vraiment à les féliciter car je crois que, sans eux, ce jeu aurait été impossible. On aurait vécu et ressenti des choses en y jouant mais probablement pas avec la même intensité. Ubisoft Annecy et Zikali se sont parfaitement trouvés, assemblés, et ont trouvé écho l'un avec l'autre. Chacun permettant à l'autre de faire ressortir le meilleur de son talent.
Et le plus intéressant dans tout ce que je raconte actuellement, c'est qu'au fond tout ceci est parfaitement annexe. En vérité, je pense sincèrement qu'il s'agit de l'âme du jeu, de l'intention que les développeurs y ont mis : celle de transférer le sentiment naturel de la montagne et des sensations fortes sur le corps humain... à travers sa petite manette et son (pas si petit) écran.
Mais au delà de cela, Steep reste un jeu de sport extrême comme les autres, et permettra aux joueurs du monde entier de faire tout ce qu'ils aiment faire dans ces jeux là.
Plus d'une centaine d'épreuves sont présentes dans le jeu et comprennent tant de choses classiques (des courses, des challenges de scoring) que de petites choses pleines de l'identité naturelle de Steep. On y évolue au sein d'une progression (non scénarisée) plutôt bien rodée, qui pousse le joueur à jouer de différentes manière, à tester les différents sports mis à sa disposition, à maîtriser le multiplicateur, le système de figures, la précision et l'élégance que le gameplay permet, et offre du défi à ne plus en savoir qu'en faire... sans jamais tolérer l'ennui.
Car en plus du sentiment d'exploration, de liberté, et de bonheur naturel que j'ai longuement décrit, Steep est également un gros délire de sport extrême et s'évertuera à nous faire ressentir l'extrême à chaque instant. A ce titre, on trouvera dans le jeu des épreuves complètement folles où le but sera de frôler le plus possibles les rochers en wingsuit pour marquer le plus de point. L'adrénaline parcourt alors le corps, on retient son souffle, on est en fusion avec notre propre concentration, et le niveau de catharsis atteint parfois des sommets.
De nombreuses épreuves sont habitée par cette idée, et cela fait clairement partie de l'identité du jeu d'Ubisoft.
Steep est inspiré de tout cela. Il offre aux joueurs une expérience riche et laisse le joueur libre d'accepter celles qui lui plairont. Au final, il s'agit d'un jeu où l'on fera toujours ce que l'on souhaite faire. Si l'on souhaite juste dévaler tranquillement et prendre du plaisir, on se placera au sommet d'une montagne que l'on sait belle et douce et on se laissera porter. Si on recherche des sensations extrêmes, de l'adrénaline, si l'on veut être traversé par une sensation de folie furieuse, on se placera sur les montagnes les plus dangereuses, comme le merveilleux Cervin, et l'on essayera de rester en vie jusqu'à l'arrivée. Si l'on cherche du défi, de la maîtrise, si l'on cherche le skill, on se mettra à faire le plus d'épreuves possibles, on visera les médailles d'or, et là encore on choisira toujours quel est le sport auquel on a le plus envie de jouer, lequel nous fera le plus vibrer. Si l'on veut une expérience sociale, si l'on veut vivre des choses avec des amis ou avec des inconnus, alors on cherchera à s'associer avec d'autres joueurs, on dévalera des pistes ensembles, on vivra des moments ensembles comme on pouvait en vivre dans des jeux comme Journey, ou alors on se lancera dans des compétitions au sein de défis.
Et parfois, comme dans la vie : l'inattendu salvateur. Le moment que l'on attendait pas. Cet embranchement dantesque qui survient quand on voulait du calme ; ce paysage sublime que l'on contemple après avoir survécu à l'enfer ; ce joueur lambda avec qui on a vécu un truc de fou alors qu'on a accepté par erreur son invitation (on s'est gouré dans l'heure on s'est planté dans la saison).
Et cette dimension inconnue à l'équation ajoute tout le piment nécessaire pour rendre l'expérience exceptionnelle. On ne saura jamais à l'avance de quoi nos parties seront faites, mais on sait qu'on y trouvera toujours ce que l'on y cherche.
Et ça, c'est ce que j'appelle du jeu vidéo splendide.
Une ode au bonheur, à la liberté, aux sensations fortes. Merci. On avait besoin de cela.