Street Fighter : The Movie : The Game : The Critic

Mauvaise foi : Malhonnêteté. Indécence caractérisée par une volonté d’affirmer un propos que l’on sait foncièrement faux ou injustifié, mais que l’on continue à clamer comme la vérité.
Exemple : J’ai jamais joué à Street Fighter – The Movie, mais comme il est tiré d’un étron filmique complètement à chier, c’est forcément de la merde. J’lui mets 2 car j’me sens d’humeur généreuse.

Moui, après le mal-aimé DB Final Bout, je vais aujourd’hui encore jouer l’avocat de la défense d’un VS Fighting conspué par la vaste majorité des gamers. Ce qui est rigolo (ou triste, selon le point de vue), c’est que le motif de cette hostilité est plus ou moins le même pour les deux jeux : le délit de sale gueule…

Mais tout d’abord, parlons (très) brièvement du "film" Street Fighter, si tant est qu’on puisse vraiment le qualifier ainsi. C’est en effet une bonne grosse daube, malgré toute la sympathie que je peux avoir pour "The Muscles from Brussels", aka JCVD. Une espèce d’actioner bourrin décérébré très irrespectueux du matériau de base, là où tous les gosses (j’étais pile dans la tranche d’âge adéquate avec mes 10 ans) voulaient juste voir un tournoi où leurs persos favoris se mettraient sur la tronche dans la joie et la bonne humeur… L’ironie quand on y pense, c’est que Van Damme a finalement joué dans deux très bons "Street Fighter filmiques", autrement plus intéressants à mater : Bloodsport et The Quest.

Cet aparté terminé, revenons-en donc au jeu. En toute honnêteté, je suis d’accord pour dire qu’il s’agit d’un "mauvais" Street Fighter…mais certainement pas d’un mauvais jeu. Il apparaît effectivement "mauvais" à côté des cadors de la franchise, tels Super Street Fighter II Turbo, Street Fighter III 3rd Strike ou Street Fighter Alpha 3, mais il n’est clairement pas "injouable" comme le prétendent beaucoup de ses détracteurs, le gameplay étant même sa principale "qualité" (par rapport au reste). Et puis merde, dans quel autre jeu que celui-ci peut-on incarner l’ultra charismatique Captain Sawada (si ça ce n’est pas de l’argument en béton armé…) ?

Alors oui, la réalisation est franchement dégueulasse. Moi non plus je n’ai jamais été très fan du procédé de digitalisation des personnages, qui n’a jamais rien apporté de bon au JV, et encore moins le "photo-réalisme" tant recherché à une certaine époque. Et il est clair que j’aurais largement préféré un choix similaire à celui de Technos, lorsque celui-ci décida d’adapter le tout aussi mauvais film Double Dragon en VS Fighting sur la Neo Geo. Car si on peut bien sûr critiquer le résultat final (que je trouve perso très moyen), il n’empêche que le jeu a sa propre patte artistique, contrairement à ce SF – The Movie dénué de tout sens esthétique. Rien que de me rappeler de la tronche d’Akuma ou de celle de Blanka, j’ai envie de rigoler…

Pour info, il s’avère que le sieur Van Damme avait déjà été digitalisé dans la franchise concurrente (autoproclamée) de l’époque, puisque le fameux Johnny Cage est directement inspiré de lui (pour sa bio), et de son personnage de Frank Dux dans Bloodsport (pour son apparence)…la boucle est bouclée comme on dit. Oh et pour l’anecdote, Frank Dux est un "artiste martial" qui existe véritablement. Prenez donc le temps de vous renseigner un minimum sur lui, ce gars est fascinant. On a en effet tous dans notre entourage un gros relou un peu mytho qui sait tout et a tout vécu…ben Frank Dux c’est pareil, mais puissance 9000…

Mais bref, ce qui nous intéresse le plus ici, c’est le gameplay. Et je suis désolé mais le rendu digitalisé n’affecte en rien sa technicité, dont le feeling reste très proche de SSFII Turbo, ce qui est somme toute normal en fait puisqu’il lui "pique" toutes ses mécaniques. On a certes effectivement une impression de "rigidité" visuellement parlant (les animations sont logiquement moins bien décomposées) mais la fluidité des coups et des combos reste exemplaire. En fait, cette animosité me rappelle un peu le fa(me)ux débat sur la série dérivée EX et sa 3D (qui, ô crime suprême de lèse-majesté, n’était même pas développée par Capcom mais par Takara!), qui elle aussi était sensée dénaturer le gameplay par son manque de punch (la 3D paraissant intrinsèquement toujours plus lente que la 2D)… Curieusement, hors remasterisations, tous les SF sortis depuis 10 ans ont adopté la 3D… Précisons d’ailleurs que le développeur de cette supposée "immondice gameplay-esque" de SF – The Movie n’est autre que Capcom lui-même…

Mais si on veut être totalement objectif, il faut bien avouer que les super ont parfois un peu de mal à sortir (ou alors c’est moi qui m’y prend comme un manche, au choix), et que certaines techniques (au hasard, le tatsumaki) apparaissent assez dissonantes lorsqu’elles sont pratiquées par des combattants à l’allure pseudo-réaliste (les premiers Mortal Kombat ont d’ailleurs le même "défaut"), mais pour le reste, les commandes répondent globalement très bien.

Côté contenu, on a un roster honnête de 15 lutteurs, qui est en fait celui de SSFII Turbo, amputé de Dhalsim, T. Hawk et Fei Long, ce dernier étant plus ou moins remplacé par l’ultra charismatique (c’est important de le rappeler) Sawada, qui possède peu ou prou son moveset. Côté modes de jeu, on a le traditionnel mode Arcade consistant à taper tout le monde jusqu’à Bison, le mode VS. dont l’intitulé se suffit à lui-même, le mode Trial qui s’apparente à un survival (un KO et c’est game over), et un certain mode Story (avec embranchements scénaristiques!), si jamais vous voulez revivre la passionnante aventure de l’adaptation filmique. Un mode que j’ai personnellement eu beaucoup de mal à terminer car seulement jouable avec Guile (et je hais les persos à charge), d’autant plus que le jeu est assez retors, même en difficulté standard…

Ainsi donc, si Street Fighter – The Movie est évidemment loin du chef d’œuvre, il ne mérite pas autant de haine et de mépris, le résultat s’avérant très honorable. Certes les graphismes sont hideux, certes les musiques sont… sont… enfin elles existent, mais d’un autre côté, on a un gameplay tout à fait décent et un contenu plus que correct pour un VS Fighting de 1995. Et n’est-ce pas là finalement le plus important ?