Y jouer à l'époque m'aurait surement beaucoup plus convaincu

Je l'avoue, écrire la critique de Suikoden me pose un petit cas de conscience.


Je me suis lancé dans cette aventure dans une optique un peu "patrimonial" du point de vue du jeu vidéo. Globalement apprécié par les joueurs et premier épisode d'une série phare du genre RPG, j'ai profité de la sortie des épisodes 1 et 2 sur le PS Store pour les acheter sur ma petite Vita en vue de faire plus ample connaissance avec cette saga que je ne connais qu'à travers l'épisode 5 auquel j'ai joué sur PlayStation 2.


Bien que sorti sur PSOne, une console 32-Bits, Suikoden reste dans sa structuration comme dans son volet technique un RPG symptomatique de l'ère 16-Bits. Et quand je dis ça, c'est plutôt un gage de qualité à travers mes mots. Suikoden fait partie de ces titres qui nous rappelle la capacité qu'avaient les développeurs de l'époque à faire transpirer de la sympathie et de l'émotion de petits sprites qui n'avaient pas encore passé le cap de la 3D. A ce titre, Suikoden pourrait être comparé sur ce point avec Final Fantasy VI sans parvenir à l'excellence de celui-ci en la matière.


Car c'est avant tout une histoire de "gens" que va nous raconter ce jeu. Des personnages attachants, à découvrir, à recruter, et qui vont nous accompagner dans une aventure au scénario finalement assez classique et un brin manichéen. Un peu prévisible pour tout dire.


Mais c'est pas grave. La recette est un peu ancienne et souvent déclinée, mais elle fonctionne. Comme je le disais plus haut, les héros de cette aventure transpirent l'émotion et sont plutôt bien travaillés, même si je ne suis pas vraiment fan des petites illustrations de leur visage lors des phases de dialogues, qui sont assez inégales dans leur contenu. Autre aspect symbolique de l'époque 16-Bits, la musique, sans bénéficier d'un volet technique incroyable, sonne particulièrement juste et certains thèmes sont particulièrement inspirés et restent bien en tête (je pense notamment à la musique du château lorsqu'il se développe un peu).


Ce premier opus de la série introduit de nombreux éléments de gameplay qui seront ensuite repris dans l'ensemble de la série, avec notamment la possibilité de recruter un grand nombre de camarades suivant des motivations plus ou moins approfondies : certains vous demanderont d'accomplir pour eux moults actions parfois bien chiantes alors que certains vous rejoindront au seul son de votre voix ... Niveau combat, Suikoden rompt un peu avec la tradition de l'époque en nous offrant pas moins de 6 personnages sur le champs de bataille, qui pourront être agencés de façon différentes, tout en tenant compte de leur "allonge" d'attaque. Si des personnages avec une courte portée devront forcément être mis en première ligne, à l'inverse de ceux bénéficiant d'une longue portée, certains pourront s'adapter à toutes les situations.


Qui dit RPG dit magie, et nos héros pourront également en faire usage grâce à des runes. Sur ce point, je trouve que le titre montre rapidement ses limites en raison d'un système de magie pas forcément hyper compliqué mais pas lisible pour deux sous. On ne sait jamais à quoi sert une rune avant de l'avoir équipée, et ça ne peut pas se faire partout mais uniquement dans certaines boutiques. Bref, une gestion un peu lourde pour un résultat pas toujours à la hauteur.


Là où Suikoden m'a le plus frustré, voire saoulé, c'est dans certaines mécaniques de jeu - que j'ai pourtant bien connues à l'époque - mais qui viennent heurter les évolutions qu'on a connu depuis. C'est toujours le risque quand on se lance dans un trip un peu retro ... Il y a tout d'abord certaines lourdeurs d'interface ou de design qui rendent l'expérience un peu pénible par moment. A titre d'exemple, lorsqu'un personnage nouveau doit intégrer votre équipe parce que la prochaine quête le concerne directement (et qu'on ne connaît rien de lui), il est impossible de connaître ses caractéristiques de combat, et donc on enlève en contre-partie un compagnon un peu aléatoirement en espérant que notre formation finale soit cohérente. Si elle ne l'est pas, on est reparti pour changer de compagnons en repartant au chateau (sauf dans certains cas précis). Lourd ...


Mais le plus gros défaut actuel de ce jeu tient à la répartition des points de sauvegarde. En effet, sauf cas un peu exceptionnel, vous ne pourrez sauvegarder l'aventure que dans les auberges assez présentes sur le jeu mais parfois trop espacé, notamment lorsqu'on arrive à un donjon. Et quand vous perdez contre le boss et que vous devez vous retaper 1 heure d'aventure et de leveling, on atteint une frustration que je n'ai plus la patience de gérer aujourd'hui.


D'autant plus que ce leveling est particulièrement limité. La courbe de progression d'expérience de nos héros est en effet assez singulière : si elle augmente particulièrement si un personnage est en retard de développement, dès qu'on rejoint le niveau globalement acceptable, l'EXP plafonne et n'augmente plus que par toutes petites touches. "Un peu comme dans tous les RPG" me répondront certains ! Oui, mais là c'est particulièrement marqué ! Le jeu n'est globalement plutôt facile mais un ou deux boss vous donneront du fil à retordre. Et là, c'est la frustration, le retour à la dernière sauvegarde, voire parfois la démotivation.


Ce premier opus de Suikoden reste néanmoins un classique. Dans tous les sens du terme. Classique dans sa structure narrative, dans les concepts qu'il décline, dans le déroulement de l'aventure, il apporte néanmoins des éléments d'innovation pour le genre qui resteront ensuite la marque de fabrique de la série. Plutôt court pour un RPG, il nous procure derrière son habillage 16-Bits des émotions certaines et finalement on se laisse assez facilement porter par le flot des évènements. Mais un certain manque de dramaturgie dans l'aventure, associé à un déroulement parfois convenu et à des grosses lourdeurs de design en font une expérience forte d'un point de vue historique, mais qui peine à correspondre à certaines attentes que je peux avoir aujourd'hui en matière de RPG.


Ainsi, et au moment de la rédaction de cette critique, je lui décerne un 6/10 avec une recommandation (ce qui peut paraître un peu contradictoire). Je verrai avec le recul si je fais évoluer la note ...

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le 8 avr. 2015

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Red13

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