Traité de Mariologie (trad. de Etienne Frantillon)

J'adresse cette critique à mon ami Mario : ton prénom, cher et tendre, est le même que celui du protagoniste ! c'est curieux, imagine toi aller en classe avec cet petit moustachu bedonnant, vos prénoms semblables, la maitresse confuse...qu'est ce que l'on aurait pu rire !

Mario. Mario. Mario.
Mario. Mario. Mario.
Mario ?
Luigi

Abusif, jouissif, frisant une grisante folie, Mario évite le divorce dans un fracas des plus rafraichissant !
Communiqué AFP

De tout temps, les hommes ont été effrayés des tortues vertes. Des petits champignons marrons. Des poissons. Des tortues rouges. Des calamars. Des missiles. Des tortues ailées. Des monsieurs dans les nuages. De la lave. Des tortues avec des marteaux. Du vide. Des tortues bien plus grosses crachant du feu et disposant d'un nom leur étant propre. "Super Mario Bros" ( titre original : "Sūpā Mario Burazāzu", connu sous nos latitudes sous le titre : "Mario a un Excellent Frère") se propose donc d'opérer une véritable conjuration, quasi-psychanalytique, de nos terreurs innommables, éternelles, et flippantes. Aristote n'a rien à en redire : la catharsis est respectée, l'unité de lieu un peu moins, mais il s'en fiche de ça c'est bon il est passé à autre chose, la catharsis il aime toujours bien. On pourrait donc se demander : Mario fait il vraiment pleurer le public grec ? Pour répondre à cette interrogation, on traitera en première partie le mouvement, la vitesse, selon les postulats physiques de l'époque. Cela nous conduira à traiter, en deuxième partie, la tempête et la fureur, Mario comme violence esthétique radicale. Le train fera ensuite son arrêt ( pas pour de vrai ) près de la question de la fraternité universelle, bien mise en tension. Enfin, on se demandera si la ludo-narrativité, face à la mort de l'auteur, permet elle une mise en équilibre entre le screamer et la difficulté.

N'est t'il cependant le propre du travail révolutionnaire que de briser les conventions ? Je ne respecterais donc pas ce plan de merde. Chiant de dingue. Dans la préface de mon édition Pleiade, mentionnez s'il vous plait que je démonte Rimbaud.
S’assoit dans son fauteuil : Hissons nous sur nos petits chevaux, et suivons, si vous le voulez bien, la trajectoire de notre héros. Un monsieur bien déterminé, on le remarque de suite. Moustache lustrée, casquette engoncée sur son front : il traverse l'espace de gauche à droite ( espace en quelque sorte temporalisée : monodirectionnel, pas de regrets, ni de remords, le Mario avance vers le futur, sauf quand des fois il retourne vers la gauche afin d'éviter un ennemi, ou retenter un saut, ou quand il perd là il doit recommencer le niveau c'est les moments que je n'aime pas je considère qu'ils sont donc inconséquents ) écrivant son histoire d'un stylo plume à la rigoureusité exemplaire, une géodésique sur surface plane d'un royaume Champignon dont on peut bien douter de sa qualité bidimensionnelle : ce doute doit être écarté, le jeu est en 2D.

Si son monde est en 2D ( c'est une transition ), pouvons nous en dire autant de ce plombier ? On a dit qu'il était déterminé, mais encore, il est amoureux. Force du désir, qui écrase, écrabouille, réduit en poussière et en score les terrifiants némésis et archnémésis se dressant sur la voie d'une humanité passionnée qui se refuse à la satisfaction d'amitiés fongiques. L'homme ne veut pas la Reine, il veut la Fifty Anchois/Orientale, élément latent illustré brillamment par Lacan dans son ouvrage "Anthologie de Mr.Pizz ". On comprend bien alors que le joueur ne peut qu'être ému par la volonté de fer de Mario à surmonter épreuves sur épreuves sur épreuves sur épreuves, qu'il soit hélène ou non, le joueur, pas Mario.
Le ludiciel n'a rien ici à envier au cinéma ou à la sculpture : parangon de profondeur, celui qui sera bientôt connu sous le nom de "Mario-Ressort" donne avec générosité ses joysticks de noblesse aux divertissement sur écrans bleues : entre Ulysse et Frédéric Moreau, Mario, s'il est parfois ébranlé, n'est certainement pas branlant. Une mère de famille regardant son bambin chéri ( lui aussi, il l'aime. Peut être pas comme elle voudrait qu'il l'aime. Mais il l'aime. Elle doit apprendre à l'accepter. On n'a jamais dit que ce serait facile. Mais ils s'aiment, vraiment ) battre le niveau 2-4 ne pourrait pas ne pas percevoir cette richesse moderne de l'anti-héros gris mais quand même tendant vers le blanc.

Beaucoup de sentiment : mais combien de Luigi ? Luigi est le petit frère, à tout les niveaux, dans tout les sens, à l'envers et à l'endroit, tape dans tes mains et fais le petit tour : il est le frère de Mario comme substance accidentelle, il est dirigé par le frère cadet du frère ainé qui joue sur la télévision benjamine, il est le quarante-huitard ( cf. Miyamoto ). Si il n'y a qu'un Luigi dans le jeu lui même, moi je pense que on est tous le Luigi de quelqu'un d'autre. Il est vert, on est tous vert pour un synetheste au moins : Pour tout homme (x), il existe au moins un synesthete (y) qui perçoit x comme vert (prédicat vert). Par conséquent, tu es Luigi, cher liseur.
Tu es Luigi, mais peut être quand tu joue à Super Mario Bros. sur NES sorti en 1985, tu es tout de même Mario. Ton essence est bi-double. Chanmé. Tu es le Luigi du Mario, et pas le Mario du Luigi : un auteur postérieur nous montrera bien que c'est pareil. La relation duale est triale : tu es le Luigi du Mario dont le petit frère est peut être le Luigi du Luigi. Moment de Luigi. Le jeu ne manque donc pas de Luigi. C'est bien ça.

Musique : 14/20
Les bip-boup font de ces bop ! La bande son enrobe l'expérience d'une ambiance tip-top, déjà culte pour beaucoup, pas encore culte pour un peu, pas culte du tout pour trois mec. Je pense pas j'aurais fait mieux...

Du point de vue de la plateforme : il y en a beaucoup. Celles qui tombent sont compensées par celle qui ne tombe pas, le résultat est alors des plus acceptables. Si vous comprenez ce qu'est le plateformisme, je vous invite à écrire dans votre exemplaire de l'ouvrage une petite remarque truculente à ce sujet : [

]. Je ne crois pas cependant qu'aucun d'entre nous, excepté peut être Javier Sotomayor, pourrions considérer les prouesses athlétiques de Mar-io comme réalistes : sans nous épancher sur la dimension métaphysique de l'acte du "saut", nous pouvons nous accorder sur le fait que Mario saut haut et bien. yahoo. Les sensass sont loin d'être déplaisantes, et tant que notre crédulité est ok, nous sommes satisfaits.
Comme dans tout bon neketsu, les niveaux et ennemis croissent en force, dans la direction moins fort -> plus fort, et il revient à nos petites "mimines" de sauver, de maintenir en vie le citoyen, tâche loin d'être impossible ! "soupir de soulagement"

Il me semble que nous avons ici tracé les contours préliminaires pour une saine critique de Mario 1 sur console. Si vous voulez vous abreuver à la source et non pas au pichet, vous pouvez acheter le Traité en lui même, il suffit de le trouver.
A bon entendeur,

PS : a+