Mon avis après avoir terminé mon premier parcours présidentiel aux mains du pays fictif de Sordland, en tant que réformateur modéré, socialement progressiste, capitaliste mais contre l'oligarchie. Je me suis plutôt bien débrouillé pour une première partie mais mon attitude conciliatrice tant à l'international qu'envers les minorités de mon territoire a été une erreur fatale qui m'a coûté cher... trop cher.
Même si je peux donner dès maintenant un avis relativement informé, il est clair que Suzerain ne s'appréciera pleinement qu'après avoir tenté différentes approches et se mettre dans la peau d'un candidat communiste, ultranationaliste, opportuniste, idéaliste, ou autres encore...
Ces différentes possibilités sont envisageables grâce à un jeu bien pensé et des conséquences réfléchies. Ce jeu basé sur un récit narratif à choix multiples possède un contenu dense, plutôt complexe, qui nous demande de naviguer avec intelligence à travers la corruption, les différents courants politiques, les factions de son parti, les religions et idéologies contraires, ainsi que la ploutocratie environnante et la loyauté parfois vacillante de son propre cabinet, le tout dans une situation géopolitique instable.
Sans un bon jugement de ces facteurs ou sans bien jauger sa marge de manoeuvre, assez restreinte, le joueur risque fortement de voir tous ses efforts réduits à néant même avec les meilleurs intentions du monde. Mais avec une lecture attentive des dialogues, des codex (que j'ai volontairement négligé pour ma première partie), un peu d'adresse, et une certaine dose de malice, nous pouvons tirer notre épingle d'un jeu punitif. Il est alors particulièrement jubilatoire de voir ses longues démarches et négociations aboutir à des victoires, et pousser tout un pays vers une nouvelle direction.
Suzerain ne se résume pas à un QCM vidéoludique. C'est aussi une aventure bien écrite, ce qui est essentiel quand on se veut aussi verbeux. Au-delà du nombre incalculable de réunions avec ses conseillers où l'on expose les différentes problématiques à régler, les scénarios possibles proposent des scènes très prenantes, parfois intenses, et des dilemmes qui nous forcent à la réflexion pendant plusieurs minutes sur notre siège tant nous sommes investis dans les enjeux. En prime, le jeu propose aussi des choix de dialogue forts amusants qui donnent envie de recommencer une partie en tant que beau salopard. Plus encore, le monde fictif (mais fort proche de notre 20e siècle) qui a été créé pour ce projet s'inspire avec beaucoup de justesse de différentes réalités contemporaines, qui rendent l'expérience vraisemblable tout en restant abordable.
En bref, j'ai été convaincu par Suzerain. Les jeux de simulation politique sont rares, et plus rares encore sont ceux réussis comme celui-ci. Je suis certain d'y rejouer dans un futur relativement proche.
PS : le jeu n'est disponible qu'en anglais il me semble.