J’adore Syberia ! J’adore l’univers, j’adore la musique, j’adore Kate Walker, j’adore les personnages atypiques que l’on rencontre… Oui, j’adore ! Cela fait maintenant plus d’une décennie que l’univers de Syberia m’accompagne en souvenirs. J’ai découvert le jeu enfant, dans sa version Nintendo DS, seule console moderne que je possédais alors. Et quelle belle découverte ce fut que Syberia ! Il s’agissait peut-être du premier jeu que je faisais qui n’était pas centré sur l’action, mais bien davantage sur l’atmosphère, sur l’immersion.
Je me rappelle encore ces longs moments passés à arpenter Valadilène, ignorant totalement comment progresser mais malgré tout véritablement fasciné par l’univers du jeu. Déjà petit, cette mélancolie du passé me parlait, cette ville autrefois glorieuse, maintenant oubliée et abandonnée, m’intriguait au plus haut point. Ces maisons à l’architecture si particulière, ces automates, l’usine Voralberg, sont autant de vestiges d’un passé révolu qui ne peuvent manquer de provoquer des émotions chez le joueur. Comment ne pas parler également de ces personnages, derniers habitants de Valadilène, derniers témoins de la grandeur passée de la ville ! Je me rappelle encore de l’aubergiste, du notaire…! Le jeu gagne à n’avoir que peu de personnages, car tous en deviennent attachants, uniques, et donc mémorables.
Puis, vint un moment où j’avais envie d’en voir plus, d’aller plus loin dans l’aventure. Valadilène était magnifique, mais je souhaitais découvrir ce que le jeu avait à offrir au-delà. J’ai donc été voir une solution sur le net, j’ai découvert Oscar, redémarré le train, et ça y est, l’aventure s’offrait à moi ! Et quelle claque, jusqu’au bout, Syberia m’a scotché ! Chaque tableau de jeu possède son aura particulière, chaque tableau de jeu est marquant. Oui, cela fait plus d’une décennie, et pourtant je me rappelle encore de l’université de Barrockstadt avec sa serre, de Komkolzgrad avec son dirigeable gigantesque que l’on prend pour se rendre à la belle station balnéaire d’Aralbad ! Tous ces lieux partagent cette même nostalgie, cette même évocation d’un monde révolu, et tous possèdent leur charme particulier… Je jouais déjà à pas mal de jeux, gamin, mais Syberia est l’un des rares d’entre eux à m’avoir marqué durablement. Le monde de Benoît Sokal est resté gravé dans un coin de ma tête pendant toutes ces années, et ce n’est pas pour rien.
Voilà donc qu’en Juin dernier, j’ai décidé de replonger dans cet univers qui m’avait tant fasciné. C’était l’occasion pour moi de découvrir la trilogie dans son intégralité, et de m’affranchir des restrictions de la version Nintendo DS. Et d’emblée, la petite séquence d’ouverture fait toujours son effet et établit intelligemment le ton, l’ambiance du jeu. Ce cortège funèbre d’automates sous la pluie, suivi de cette scène où Kate Walker se voit saluée par un automate à l’entrée de l’auberge, constituent encore aujourd’hui une des plus belles cinématiques du jeu vidéo. Le jeu a maintenant dix-huit ans, et pourtant il n’a pas pris une ride. Les décors sont toujours aussi somptueux, aussi fascinants, et se balader dans cet univers est un vrai plaisir. Comment ne pas écarquiller les yeux lors de l’arrivée à Barrockstadt, face à ces deux statues gigantesques de mammouths qui «gardent» l’entrée de l’université ? Comment ne pas s’arrêter un moment pour contempler la beauté de l’architecture style Art déco de la station balnéaire d’Aralbad ? pour contempler la désolation de la mer d’Aral desséchée ? Rien que par la beauté de ses tableaux, Syberia parvient à transmettre des émotions au joueur, à le faire rêver et voyager…!
Et bien sûr, les personnages que l’on rencontre au cours de notre aventure participent tout autant au charme de Syberia. Ces personnages sont tous aussi atypiques les uns que les autres, tous ont une personnalité particulière qui les rend si uniques et attachants, tous participent à l’histoire de chaque tableau. De par sa justesse et sa simplicité d’écriture, Syberia est un modèle d’écriture vidéoludique et parvient à rendre vivant chacun de ses personnages. Après avoir fini le jeu, il est impossible de ne pas se rappeler de la plupart des personnages. Comment oublier cet aubergiste, premier personnage que l’on rencontre et qui nous accueille chaleureusement après ce cortège funèbre d’automates ? Comment oublier le notaire, qui nous apprend que Hans Voralberg n’est pas mort et enclenche ainsi tout notre périple ? Comment oublier Oscar, bien sûr, ce gentil automate, un peu froussard et pourtant si courtois, qui va nous accompagner pendant le voyage ? La cantatrice Helena Romanski, ou encore le cosmonaute Boris Charov ? Ah, j’aurais envie de rendre hommage à tous les personnages, tant ils sont géniaux…!
La grande force de l’écriture de Syberia repose à la fois dans sa simplicité, qui rend le tout crédible, mais également par son ingéniosité dans la structure même de la progression en jeu. Pour résoudre les énigmes, vous serez régulièrement amené à faire des allers et retours dans les tableaux du jeu, mais jamais ce n’est ennuyant, car en progressant vous découvrez petit à petit l’histoire du lieu, les mystères se lèvent, et vous apprenez à connaître les personnages qui habitent chaque tableau. Le jeu distille intelligemment des informations, des révélations au cours de l’histoire, afin de garder l’attention du joueur. Le système de dialogue est également très bien fichu et donne du sens à ces allers-retours : au fur et à mesure de vos découvertes, vous pouvez revenir parler à un personnage qui aura alors de nouvelles lignes de dialogues à propos de l’objet de votre découverte. Les discussions avec les personnages sont donc dynamiques, vivantes, et jouent pour beaucoup à l’attachement qu’on leur porte.
Au départ, chaque nouveau tableau, chaque nouveau personnage paraît mystérieux, plein de secrets qu’il reste à dévoiler. Puis on progresse, on se familiarise avec le lieu, on discute avec les personnages qui délivrent leur histoire petit à petit… Et de cette manière, même un personnage qui peut paraître lambda de prime abord finira par devenir intéressant et comme un membre à part entière de notre aventure. Le jeu est également aidé par de très bons doublages, notamment celui de Kate Walker fait par Françoise Cadol, à la voix magnifique ! Notre Kate Walker si naturelle, si attachante, si emblématique aussi !
Les énigmes, quant à elle, sont toujours très logiques, et si certaines sont assez évidentes, d’autres demandent une certaine réflexion et nécessitent de s’investir pour progresser. Syberia repose sur des mécaniques de Point’n’Click assez classiques mais très efficaces, et le jeu n’a pas à rougir face à d’autres grands noms du genre. Les énigmes sont d’ailleurs très bien intégrées dans l’univers du jeu, afin de rendre le tout cohérent et plausible.
Enfin, la musique du jeu est tout bonnement sublime et participe à l’aura si particulière de Syberia. Tout ceci fait du jeu une expérience unique, reposant sur une notion propre au jeu vidéo : l’immersion. Syberia, c’est une aventure qui se vit, c’est une poésie vivante. Je suis bien content d’avoir redécouvert le jeu ; arpenter le monde de Benoît Sokal est toujours aussi envoûtant, et j’ai pu ressentir les mêmes émotions qui m’avaient touchées, déjà enfant. Si vous n’y avez jamais joué, je ne peux que vous recommander de vous lancer et découvrir par vous-même cette belle aventure. Syberia est, à n’en pas douter, un des jeux les plus importants dans mon parcours de joueur…!