Premier Zelda sorti sur consoles portables, Link's Awakening est encore aujourd'hui considéré comme l'un des meilleurs épisodes de la série, et comme le meilleur en 2D, avec (ou après, c'est selon) A Link To The Past, jeu dont il semble pourtant être l'antithèse.
Et cela s'explique facilement : Link's Awakening était à l'origine un projet personnel de Tezuka sur lequel il travaillait en dehors de ses heures de bureau, puis qui prit une telle importance que Nintendo EAD (principal studio de développement de l'éditeur nippon) s'en mêla. Historique, car rares furent les jeux portables développés (même les grosses licences telles que Mario) par le studio mythique de Nintendo.
Tezuka dit aussi s'être inspiré d'oeuvres telles que Twin Peaks pour le jeu, car il souhaitait enrichir les scénarios de la série, et c'est effectivement avec Link's Awakening qu'une histoire développée prend place dans l'univers de Zelda, ainsi qu'un univers vraiment vivant et attachant.
Forcément plus court que son ainé, et ne disposant "que" de huit donjons, Link's Awakening reste aujourd'hui encore un modèle de rythme et de variété. L'ile de Cocolint n'est pas bien grande, et on peut aller très vite d'un point à l'autre de la carte. Celle-ci est d'ailleurs moins "hachée" que celles des autres épisodes, moins divisée, et on a d'ailleurs très vite accès à une grande partie de l'aire de jeu. Et là commence l'aventure : l'ile est pleine de mystères, les divers lieux sont dotés de musiques géniales (la meilleure OST portable) et l'on rencontre des personnages farfelus, entre hommages à d'autres séries de Nintendo (Chomp, le fameux prince Richard) et protagonistes marquants qui auront marqué des millions de joueurs (Pépé le ramollo, Tarkin).
Mais s'il est un personnage que nul joueur n'oubliera, c'est bien Marine, la fraiche jeune fille qui viendra cueillir Link sur la plage dès son réveil. A ce jour, et c'est bien triste, aucun Zelda n'a proposé une relation aussi "profonde" entre le Hylien et le personnage féminin principal. Parce que Marine est à la fois sidekick, élément scénaristique majeur et une sorte de but majeur dans la quête de Link, partagé cette fois par le joueur qui veut lui aussi approfondir sa relation avec la jeune fille. Promenades sur la plage, photos entre amoureux, sauvetage en montagne, Marine apporte de l'insouciance à une légende parfois trop sérieuse, austère.
Et le coup de génie, c'est l'incorporation de la Ballade du Poisson-Rêve, qui devient le symbole de toute une quête et démontre (pour la première fois dans un jeu vidéo ?) l'importance que peut avoir une musique dans la narration. (http://www.youtube.com/watch?v=8dhzm7HJiMA ) A la fois musique associée à Marine, thème du Game Over et, forcément, du Poisson-Rêve (autre élément central de l'intrigue), la musique passe donc de symbole de l'espoir, de la joie, quand Link l'associe à sa bien-aimée, à cet hymne de la mélancolie, des beaux jours de l'été passé, qui vous tord les boyaux. Et la réunion des deux, avec le générique de fin parachève le tableau, rendant le jeu plus que mémorable.
Mais Link's Awakening, c'est aussi (avis personnel) le meilleur gameplay et level design 2D de la saga. Malgré la limitation de deux boutons (au lieu de 6 sur SNES !), EAD a trouvé un système ingénieux pour les raccourcis des items, et crée même les combinaisons d'objets (plume + bottes) ! Mais ce qui frappe surtout, c'est la parfaite alternance entre donjons et phases d'exploration. Chacune de celles-ci est notamment scénarisée, et ne consiste pas seulement à aller découvrir une nouvelle zone avec le dernier objet reçu (comme dans ALTTP...). Que ce soit l'attaque du château, la quête du coq ou celle du fantôme, les inter-donjons sont tous soignés et instaurent un peu de folie dans cet univers, qui tranche avec le classicisme des anciens opus.
Et les donjons ne sont pas en reste, entre concepts innovants (la cave aux clefs et son déroulement totalement non-linéaire, puisqu'on ouvre les portes dans l'ordre qu'on souhaite, la tour du vautour et sa structure variable au cours de l'avancée de Link, le donjon "poisson-chat" et son ennemi récurrent) et perles de level-design (Roc de la Tortue), ils démontrent une fois de plus qu'ils sont l'élément central du gameplay zeldaesque. Et pour une fois, j'ai autant apprécié l'exploration du monde extérieur que celle de ces dédales, prouesse en soi.
Au final, Link's Awakening est peut-être le meilleur jeu sorti sur consoles portables de l'histoire, et reste aujourd'hui encore une référence grâce à son univers, son gameplay et son rythme de jeu.