1ere critique publiée en 2017
L’écriture de cette critique va être assez difficile pour moi.
La première fois que j’ai fini Majora’s Mask (téléchargé sur la Wii boutique), j’étais allé très vite. Je ne m’étais pas préoccupé des quêtes annexes, j’étais à fond sur les temples et j’avais fini le jeu au bout de quelques mois (je prends beaucoup de temps à finir un jeu vidéo). Et quand j’ai vu les critiques, j’avais le sentiment d’avoir raté quelque chose avec Majora’s Mask. Parce que quand j’ai fini ma première partie, pour moi, c’était évident. Majora’s Mask est un bon Zelda, mais pas aussi bon qu’un Wind Waker ou Ocarina of Time.
Du coup, j’ai démarré une seconde partie en me disant : « cette fois, je fais tout, et je pourrai écrire une critique concrète de l’ensemble du jeu ». Le fait est que je ne suis pas allé au bout de ma seconde partie. En fait, en parallèle, j’ai démarré plein d’autres jeux, Conker’s Bad Fur Day, Diddy Kong Racing (l’achat de ma N64) Shadow of the Colossus (que j’ai fini y a une semaine). Et j’avais laissé Majora’s Mask de côté (je venais de finir la partie sur la Baie des Zoras qui m’avait bien fait chier). Je m’y suis remis, et j’ai éteint ma console au bout de trente minutes. J’arrivais pas à me remettre à Majora’s Mask.
C’est con, parce que c’est un super jeu ! Et quand je prends du recul, je me rends bien compte que Majora’s Mask, c’est le meilleur Zelda de la saga. Et cela pour une chose : la prise en compte du temps avec les trois jours.
Ce que j’aime dans Zelda, c’est aller défoncer du boss et faire des quêtes annexes pour récolter un max de bonus. Et avec cette prise en compte du temps, les quêtes annexes sont beaucoup plus complexes, beaucoup plus minutieuses. Surtout qu’en récompense, on a souvent des masques avec différents pouvoirs (c’est génial comparé à un pauvre quart de cœur dans les autres épisodes de la saga).
Cependant, si cette histoire du temps permet de nouvelles innovations dans les quêtes annexes, ça n’en fait pas moins un détail ultra chiant du jeu. Tout le temps, je stresse à cause de ce putain de chrono. J’ai recommencé des temples avec une rage immense parce que la Lune venait de m’éclater à la gueule. Un autre problème avec ce chrono, c’est que pour les quêtes annexes, il faut attendre qu’à une heure précise un personnage précis passe à un endroit précis pour l’intercepter et avancer dans cette quête. Et ça peut arriver que j’ai attendu comme un con pendant vingt minutes pour pouvoir poursuivre ma quête annexe (pour au final, devoir la recommencée parce que j’ai raté un élément). Et rien faire sur un jeu vidéo pendant vingt minutes, c’est ultra chiant !
Un autre problème que j’ai avec Majora’s Mask (et ça n’engage que moi), c’est que j’accroche beaucoup moins à la quête principale que dans les autres épisodes. Dans Ocarina of Time, on a une bonne dizaine de donjons dans des mondes différents (forêt, montagne, océan, désert, etc…). Mais là, les quatre/cinq différents mondes (si on prend en compte BourgClocher), bah c’est pas des lieux qui m’enchantent vachement. Quand je joue à Ocarina of Time, j’adore gravir la Montagne des Gorons, j’adore m’enfoncer dans la Forêt Perdue. Dans Majora’s Mask, ça me fait chier de traverser la Montagne Enneigée des Gorons, ça me fait chier de parcourir la Baie des Zoras. Et j’en suis arrivé un stade, où je ne m’amuse plus en jouant à Majora’s Mask. C’est le même cas que pour Diddy Kong Racing, je ne ressens plus le jeu comme un amusement, mais comme une corvée que je dois finir pour faire une critique honnête de l’ensemble du jeu.
Et ça me fait chier parce que dans l’ensemble, Majora’s Mask, c’est un putain de bon jeu. Déjà, l’histoire est géniale et c’est probablement la plus passionnante de la saga (notamment dû à la théorie comme quoi toute cette histoire, c’est la mort de Link, qu’est-ce que c’est bien pensé). Et puis les musiques sont magnifiques (un peu comme tous les Zelda), rien que le thème d’ouverture au piano me fait rêver. Graphiquement, le jeu est bien, pour un rendu N64, je le trouve très beau. Sauf que comme c’est le même style graphique qu’Ocarina of Time, je ne peux m’empêcher de faire la comparaison.
Donc, si je devais juger Majora’s Mask objectivement, je dirai que c’est un grand jeu, un chef d’œuvre, même, qui n’a pas à rougir face aux autres épisodes de la saga, du fait de ses innovations de gameplay et de son histoire. Mais personnellement, j’accroche beaucoup moins à cet épisode qu’aux autres à cause de ce chrono qui me fait stresser sa race.
Bref, c’est un grand jeu, et je suis un peu passé à côté.
Seconde critique publiée en 2020
Bon, une rectification s’impose. Il y a des jeux comme ça, même sans les avoir foncièrement apprécié on ne peut s’empêcher de revenir dessus. Ça peut être de simples plaisirs coupables ou des jeux banals pour lesquels on a de l’affection. Et puis il y a la catégorie dans laquelle se range Majora’s Mask, la catégorie de jeu avec une proposition tellement décalée et en rupture avec nos habitudes (surtout au cœur d’une saga aussi importante que Legend of Zelda) qu’on ne peut que totalement apprécier ou être totalement en dehors. Je suis longtemps resté en dehors avec Majora’s Mask, c’est un des derniers Zelda auquel j’ai joué (bien après avoir découvert Ocarina of Time et Wind Waker) et à l’époque, je me souviens avoir mis beaucoup d’espoirs dans ce volet.
Lors de ma première partie, j’étais…mitigé. A vrai dire, j’avais plus enduré ma partie qu’autre chose, si bien que j’ai vite fait de terminer la trame principale et me casser de ce jeu à l’ambiance lourde et déprimante. La notion du temps était pour moi un calvaire et clairement, j’avais pas envie de m’attarder sur les quêtes secondaires, n’arrivant guère à gérer l’horloge du jeu (alors comment résoudre des quêtes qui demandent d’être présent à tel lieu à telle heure précise). Bref, j’ai quitté Majora’s Mask sans le détester parce qu’au fond de moi, je savais que j’avais apprécié un tant soit peu l’aventure proposée par le jeu.
Quelques années plus tard, je reviens dessus et c’est une horreur. Je bloque sur les temples comme ça n’avait jamais été le cas, je ne comprends jamais où je dois aller et j’ai plus l’impression d’être malmené par le jeu que de véritablement y jouer. Si bien qu’après m’être pris la lune en pleine gueule deux fois d’affilés en bloquant dans un temple, ça commençait clairement à me taper sur les nerfs. Une fois la Grande Baie achevée, j’ai littéralement abandonné le jeu pour n’y revenir que quelques mois après, y jouer trente minutes et le délaisser définitivement. C’est au sortir de cette partie non achevée que j’ai écris ma première critique, celle que vous avez lu plus haut. Et pourtant, même en disant que le jeu avait trop de « prises de position vis-à-vis du gameplay » ruinant le plaisir de jouer, je lui avais mis la note de 8/10. Et mettre un 8 à ce Zelda que je n’aimais pas vraiment, c’était déjà à l’époque montrer les contradictions qui assaillaient mon esprit au sujet de ce jeu. Si bien que je suis longtemps resté fâché avec Majora’s Mask, sachant pertinemment que j’avais face à moi, un grand jeu à la proposition forte mais dont j’étais incapable de profiter pleinement, la faute à ces foutues contraintes temporelles que je n’arrivais pas à maîtriser.
Parce que oui, même en 2017, je voyais bien que l’OST de cet opus était parmi les meilleures jamais composée dans la licence ; que l’histoire était pleine de non-dit et sous-entendus qui offraient au tout, un mysticisme rare dans les jeux vidéo ; que jamais on avait eu un Zelda avec des quêtes annexes aussi riches en histoire et en émotion et que dans l’ensemble…bah c’était quand même un foutu bon jeu.
En fait, mon erreur a été de chercher dans ce jeu les qualités d’un Zelda traditionnel alors qu’il refusait de me les donner. Au lieu de se retrouver avec une dizaine de donjons comme dans Ocarina of Time, Majora’s Mask n’en offrait que quatre et clairement pas les meilleurs de la série (à l’exception de la forteresse de pierre). Pareil pour les boss, seulement cinq et là encore, pas parmi les plus marquants. Au lieu de se retrouver avec un nouvel item à chaque donjon, j’avais juste droit à une nouvelle forme de flèche (de feu, de glace et de lumière). Je ne me sentais jamais récompensé, donc je suis parti.
Mais voilà, comme tout bon jeu qui vous résiste ou qui reste en travers de la gorge, on finit irrémédiablement par y revenir. Et lors de cette troisième partie, je me suis lancé dans cette aventure avec l’idée de trouver les vingt-quatre masques (pas tous les quarts de cœur, ni toutes les bouteilles, juste les masques). Et j’ai découvert grâce à internet, un moyen de me faciliter la tâche et de remédier à cet éternel problème de limite temporelle : le chant du temps inversé. Si je connaissais l’existence d’une chanson permettant de ralentir le temps, je n’avais jamais réussi à trouver comment l’obtenir. Une fois l’astuce obtenue, j’ai pu ralentir le temps par trois, me permettant de m’adonner à ce jeu tel que je l’entends…avec le temps !
Parce que pour moi, un Zelda, ça se savoure, c’est comme un bon vin, hors de question de l’avaler goulument sans en déceler toutes ses saveurs ! Hors de question de passer à côté d’un PNJ et de ne pas lui parler pour connaître son histoire, hors de question de voir une montagne au loin et ne pas m’y rendre, hors de question d’entrer dans les bois perdus d’Ocarina of Time et ne pas y trouver toutes les cachettes. Et jusque-là, ce plaisir de découverte décontractée m’avait toujours été privé par cette limite de temps qui était maintenant bien moins contraignante une fois le chant du temps inversé utilisable à volonté. Et c’est donc beaucoup moins pressé que j’ai pu m’adonner pleinement au cœur de Majora’s Mask, son histoire.
Au contraire d’un Ocarina of Time où un monde immense s’offre à nous et se déroule sous nos yeux, Majora’s Mask est bien plus réservé. Il refuse de nous laisser la porte grande ouverte à son intrigue, c’est à nous de comprendre ce qu’il se passe, de fouiller de fond en comble le moindre indice qui nous permettrait de tisser nous-même l’Histoire de Termina. Termina n’est pas le Hyrule vaste, beau et facile d’accès, Termina, c’est un monde nouveau, plus restreint et sombre qui refuse de tendre la main au visiteur étranger que nous sommes. Et c’est sans doute la plus grande qualité de ce Majora’s Mask, il force le joueur à aller faire des choses inhabituelles dans un jeu vidéo traditionnel mais une fois la tâche accomplie, la récompense n’en est que plus satisfaisante. Non seulement parce qu’en général, la récompense, c’est un masque avec un certain type de pouvoir (plus ou moins cool), mais qu’en plus, résoudre une quête nous offre des éléments de scénario enrichissant l’univers.
L’exemple le plus évident, c’est la quête de Kafei et Anju. La première fois, j’ai totalement délaissé cette quête (pareil pour celle du Ranch Romani). Je ne savais pas que derrière cette quête, se tramait un drame caché. Une mère qui engage n’importe qui pour retrouver son fils ; un maire incapable de résoudre un conflit dans son bureau car totalement obnubilé par l’absence de son enfant ; une fiancée persuadée que son amant a disparu et qui est prête à mourir explosée par la lune pour pouvoir le revoir une dernière fois ; un homme à qui on a volé son honneur, métamorphosé en enfant et incapable de révéler à ceux qu’il aime ce qu’il est devenu. Aussi, le simple fait d’apprendre que Romani est la meilleure amie d’Anju au cours de la quête du Ranch, ça tisse, ça densifie une intrigue qui ne se dévoile que si on se force à aller la résoudre. D’ailleurs, la mission de Link en tant que Bombers (c’est-à-dire tout ce qui se rattache aux quêtes annexes), c’est de rendre les gens heureux, de compatir à la souffrance d’autrui pour mieux l’épauler. Et le fait de résoudre ces quêtes pour voir tout s’annuler par la suite en remontant le temps, ça amplifie le drame constant de Majora’s Mask.
Majora’s Mask est un jeu qui ne laisse jamais son joueur gagner. Et si je disais plus tôt qu’il récompensait avec des masques et des bouts d’intrigue (ce qui a de quoi me rendre content), sa mécanique de remontée dans le temps provoque un sentiment inverse. Le jeu retire au joueur la satisfaction de voir Anju et Kafei réunis longtemps, de voir Lulu profiter de ses enfants ou de voir les Gorons débarrassés de la neige. Majora’s Mask est un jeu qui tiraille son joueur, et parfois…être tiraillé devant sa console de jeu, ça peut avoir du bon, surtout venant de Nintendo. Parce que ça nous met face à notre réel désir lorsqu’on lance un jeu vidéo : se faire surprendre même si quelquefois, ça nous déprime.
Alors voilà, c’est à peu près ce que j’avais à dire sur ce jeu. Je ne reviendrai pas sur sa trame principale ainsi que sur la théorie de la mort de Link (à laquelle j’adhère totalement), beaucoup ont écrit dessus et sans doute mieux que je ne le ferai. Cette critique est à la fois un mea culpa vis-à-vis de la première que j’avais écrite, mais aussi une façon de me réconcilier avec le jeu. Car cette fois, je peux clairement le dire, j’aime Majora’s Mask. Et je pense que même s’il n’est pas mon Zelda préféré, il est indéniablement un immense jeu, à la proposition forte et surtout inattendue, quelque chose que l’on ne retrouve nulle part ailleurs. Ce que Zelda sait faire de meilleur en somme.