Pour un avis plus détaillé sur chacun des quatre épisodes.
Pratiquement 10 ans ont passé depuis que j'ai découvert la saga The Walking Dead par l'entremise de Telltale. L'auteur des comics, Robert Kirkman, ayant clôturé le principal arc de la BD en 2020 et la série TV s'étant terminée l'année dernière, je ne peux m'empêcher de percevoir cette quatrième saison de The Walking Dead par Telltale autrement que comme l'ultime conclusion à la saga toute entière : le studio m'a fait découvrir la licence et c'est avec ce même studio que je l'abandonne, la boucle est ainsi donc bouclée.
Mais que dire alors sur ce The Walking Dead: The Final Season ? Déjà, sans aucune surprise, inutile de s'y plonger sans avoir joué aux trois autres saisons avant. Ça peut paraître évident, mais je pense que cette formalité est encore plus importante ici. En fait, l'adaptation produite par Telltale est l'une des rares licences vidéoludiques à progresser presque en même temps que son personnage principal, Clémentine. Pour le coup, je pense qu'il est indispensable d'avoir parcouru les trois autres jeux avant afin de se lancer dans cette dernière saison, n'ayant, dans mon cas, jamais créé un lien de la sorte avec un personnage de fiction.
Pourtant, je dois bien avouer que je m'attendais à une plus grosse prise en compte de nos choix ainsi qu'à une écriture mieux travaillée. Encore une fois, étant donné que nous avons affaire à la saison finale, et après un Batman The Enemy Within qui m'avait agréablement surpris à ce niveau-là, je m'attendais à quelque chose de plus complet et de plus qualitatif… et puis ce n'est pas comme si les notes dithyrambiques sur SensCritique allaient dans ce sens — une moyenne de 8 à l'heure où j'écris ces lignes, plaçant ainsi cette ultime saison comme second meilleur jeu du studio, juste derrière la première saison et devant d'autres licences comme The Wolf Among Us, Tales from the Borderlands ou encore les Sam & Max (excusez du peu).
Le truc, c'est qu'on retrouve de nos nombreux travers spécifiques au studio qui avaient déjà tendance à m'exaspérer auparavant, et qui m'ont bien évidemment encore plus exaspérés avec ce jeu-ci. Déjà, comme évoqué plus haut, le titre ne prend pratiquement pas en compte nos choix. C'est un point qui m'a particulièrement surpris une fois le titre terminé et après avoir visionné les autres fins sur YouTube. En effet, les fins jouent surtout sur les détails : il n'y a fondamentalement pas de gros changement concernant le dessein du duo Clémentine/AJ, alors que je m'attendais à ce que le studio nous mette enfin face à l'ensemble des choix pris durant l'aventure. Cela donne l'impression, malgré le « Final » dans le titre, que le studio n'a pas réellement voulu clore la saga, qu'il a quand même voulu conserver quelques cartouches « au cas où » (à moins que cela provienne du changement de développeur, mais on y reviendra plus tard). Je dois avouer que ça me fait plus lever les yeux au ciel qu'autre chose puisqu'en cas de énième suite, en cas de nouveau départ avec AJ pour personnage principal, je sais que je ne serais pas autant emballé par le jeu que j'ai pu l'être par le passé.
De surcroît, on retrouve la binarité des choix, le côté « tout ou rien » propre à Telltale. Si ce défaut n'est pas autant exacerbé que ç'a déjà pu l'être par le passé, notamment avec leur effroyable adaptation de Game of Thrones, les ficelles restent tout de même très grosses et certains des choix à effectuer finissent par ne plus avoir aucun impact ici. Forcément, le premier d'entre eux qui me vient en tête est celui présent à la fin du second chapitre, quand nous devons sauver Louis ou Violet, les deux seuls personnages avec qui nous pouvons avoir une relation… mais celui qui m'a vraiment le plus exaspéré, au point d'arriver à me faire enrager (chose plutôt rare je le précise), c'est le choix final du chapitre 3, lorsque nous devons demander à AJ de tirer ou non sur Lilly. Ayant demandé à A.J. de baisser son arme, et donc de ne pas tuer Lilly, je me suis dit que les développeurs n'allaient pas oser nous faire le coup de « la personne qu'on vient d'épargner en profite pour nous donner un coup de couteau dans le dos », ç'aurait été beaucoup trop gros… et ils l'ont fait ! Franchement, c'est l'un des trucs les plus grossiers que j'ai pu voir dans un jeu Telltale (et pourtant il y en a) tant ça ne fonctionne pas en plus d'être un twist éculé.
Pour en finir côté choix, il me semble important de préciser que cette saison possède bien plus de choix qui pourront nous envoyer ad patres. Une spécificité surprenante quand on est encore habitué au classique « tous les chemins mènent à Rome », mantra auquel le studio m'avait habitué jusqu'à présent.
L'autre problème, c'est l'exploitation de cette « communauté sans adultes ». En effet, le lieu dans lequel nous débarquons est une école pour « enfant difficile », et on y retrouve donc uniquement des anciens membres de l'école qui tentent de survivre. Ici, le problème est très simple : on ne croit pas aux dialogues. On a beau avoir affaire à des enfants qui ont dû grandir plus vite que prévu, la plupart des conversations sonnent faux. C'était déjà le cas dans la saison 2, lorsque nous contrôlions Clémentine pour la première fois, mais ce défaut est exacerbé dans cette ultime saison : on sent qu'on a affaire à des dialogues d'enfants écrits par des adultes. Ce qui est paradoxal, c'est que les scénaristes ne se sont pas non plus posés des barrières comme on aurait pu s'y attendre : on voit des enfants certes, mais ils peuvent se faire tuer à un moment ou à un autre, et même de manière plutôt violente vue ce qu'il se passe à la fin du premier chapitre. Très vite, on sent que ce n'est pas parce que nous sommes avec des enfants qu'ils sont protégés par la morale.
Heureusement, dans l'ensemble, le jeu tient quand même plutôt bien la route. Ce n'est pas le titre le mieux écrit auquel vous serez confronté durant votre vie, mais vous n'aurez pas non plus affaire à du David Cage, loin de là. Certaines séquences sont vraiment réussies, et là où ça peut paraître très surprenant, c'est que cela n'est pas dû à l'écriture… mais à la mise en scène !
Oui, il y a de la mise en scène dans ce jeu, et elle se révèle même réussie. C'est un détail qui peut paraître surprenant quand on a joué aux précédents titres du studio, la mise en scène étant généralement (très) sommaire, mais cette Final Season se permet quelques bonnes idées, notamment au niveau de l'utilisation de la caméra. Ces efforts de mis en scène sont d'ailleurs perceptibles dès l'introduction au premier chapitre, lorsque Clémentine et A.J. tentent de s'échapper avec la voiture. Pour le coup, c'est sans nul doute le Telltale le plus réussi à ce niveau-là.
C'est encore plus surprenant quand on sait que nous avons affaire au même moteur graphique que pour les précédentes productions du studio… oui, The Walking Dead Final Season utilise le même moteur que la première saison de Sam & Max ou encore Texas Hold'Em (publié en 2005 pour rappel), à savoir le Telltale Tool. Alors bien sûr, il me semble important de rappeler que, même si ça reste le même moteur, qu'il a connu des évolutions entre temps.
Du coup, d'une certaine manière, The Walking Dead The Final Season est un jeu plutôt moche quand on le compare à ses concurrents… mais plutôt jolie pour du Telltale. Sans déconner, je pense que nous avons affaire ici à l'une des productions Telltale les plus propres. Par contre, on sent que le moteur a du mal par moment, notamment lors des chargements, longuets même si on possède un SSD, ou lorsque nous sommes confrontés à un énième freeze de quelques secondes, mais quifaitpeuretquisurgitdenulpart.
Aussi, ce qui fait que la mise en scène est nettement mieux réussie qu'auparavant, ce sont les nouvelles musiques. Bien qu'aucune des nouvelles compositions de Jared Emerson-Johnson ne soit à la hauteur d'un Alive Inside, les nouvelles sont cependant mieux exploitées, notamment celle employée durant la scène de la grange lors du chapitre 3. Aussi, cette quatrième saison est l'occasion d'entendre quelques musiques, chantées pour le coup, que ce soit lors du générique ou du quatrième chapitre.
Probablement l'une des meilleures compositions conçues pour un jeu Telltale.
Maintenant que j'y pense, maintenant que nous parlons de « son », il me semble important de préciser que cette quatrième saison de The Walking Dead possède… une VF ! Est-elle de qualité ? Difficile à dire, j'ai joué au titre en VOST. Loin de moi la volonté de me la jouer premium-médiocre en crachant gratuitement sur la VF, mais pour le coup, je dois avouer que je suis dubitatif quant à l'intérêt d'inclure des voix françaises alors que les précédents titres n'ont, eux, pas été doublés. Comme beaucoup d'autres, je suppose, je me suis attaché à la voix de Melissa Hutchison, impossible donc pour moi de casser cette habitude en basculant sur un autre doublage. C'est quand même ironique quand on y pense, pour rappel, Telltale avait mis plusieurs mois avant de traduire la première saison de la licence.
Autre surprise, le gameplay. Oui, cet épisode de Walking Dead possède un gameplay plus « poussé » que ses prédécesseurs. Ainsi, certaines séquences nous demanderont d'éliminer les rôdeurs tout autour de nous en faisant bien attention à ce que les autres ne soient pas trop proches car sinon… nous pouvons mourir. Oui ! Il est possible de mourir par moment si nous jouons mal. Il est donc possible de perdre d'une autre manière qu'en ratant un QTE (ce qui, de mémoire, ne m'est jamais arrivé lors des trois précédents épisodes).
Le gameplay s'est donc étoffé. C'est une bonne chose ça, non ? Justement, non, parce qu'on ne va pas se le cacher plus longtemps, c'est au mieux très basique, au pire très mauvais. Pour être plus explicite, au mieux on a droit à un gameplay digne de Frogger ou d'un cover-shooter nul, et au pire des cas, on ne comprends pas comment on doit réussir certaines séquences tant le titre semble utiliser un langage, des codes, qui lui sont propres. Il y a une phase, lors du chapitre 3, il faut le voir pour y croire tant c'est ridicule, dans laquelle il faut avancer en se cachant derrière des rôdeurs pile poil au bon moment afin de ne pas se faire tirer dessus… je ne m'attendais pas à ce qu'il soit possible de tomber aussi bas pour un jeu de cette envergure.
Au moins ils ont essayés, non ? Mouai, étant plus un partisan du less is more, du design par la soustraction, j'aurais préféré m'en passer. Au moins, le titre a le mérite de ne pas trop s'articuler autour de ça.
Autre particularité, bien plus insignifiante cette fois-ci, il est possible de ramasser des objets afin de pouvoir décorer la chambre dans laquelle nous nous trouvons. Si cela peut inciter le joueur à un peu plus explorer, ça reste très anecdotique d'une part… et ça nous divulgâche la suite de l'aventure d'autre part. Bah oui, on se doute bien du coup qu'on ne pas énormément voyager, qu'on ne risque jamais de quitter l'école durant un long moment. Sinon, à quoi tout ce glanage servirait-il ?
Concernant la durée de vie (oui, je ne savais pas où caser cette information), la saison n'a beau durer que 4 épisodes (Telltale nous ayant habitué à 5), il faudra bien compter 2 h 30 de jeu pour terminer chaque épisode. On se retrouve ainsi dans la moyenne haute des productions du studio.
Enfin, il me semble important de préciser que Telltale ayant fermé en plein développement de la saison, que les épisodes 3 et 4 ont été publiés par Skybound Games et non par eux. On pourrait craindre que ce changement de développeur nuise à la qualité de ladite saison, mais il n'en est rien. Il faut dire aussi que les deux derniers épisodes étaient probablement déjà bien avancés avec que le studio du firmament ne reprenne le projet. En fait, mon seul doute concerne la fin de la saison et sa fin ouverte… mais les absents ayant toujours tort (et je ne dis pas ça pour blâmer mon père qui est parti chercher des clopes quand j'avais 3 ans et qui n'est jamais revenu, même si je me suis toujours juré de lui péter la gueule si je le retrouve), on va remettre la faute sur Telltale… et franchement, je pense qu'ils auraient été capables de nous pondre une fin de cet acabit. Quoi qu'il en soit, on ne peut que saluer le studio pour avoir repris le développement du titre.
Par contre, il me semble important de préciser que, bien que Skybound a terminé le jeu, que les serveurs Telltale sont quant à eux définitivement fermés. Ainsi, il ne sera pas possible de comparer ses statistiques avec celles des autres joueurs à la fin de chaque épisode, ni de récupérer ou d'envoyer sa sauvegarde : le jeu nous permet cependant de faire un récapitulatif de nos choix effectués lors des précédentes saisons. Concernant les statistiques de fin de partie, maintenant que j'y pense, je ne sais pas si ça provient de bugs, de problèmes de traductions ou d'un balec' total de la part des développeurs, mais on a souvent droit à des messages contradictoires genre « [Nom du personnage] est énervé contre vous. » alors que tout s'est bien passé avec lui durant l'épisode. Un défaut anecdotique certes, mais surprenant tout de même.
Est-ce que je recommande cette ultime saison de The Walking Dead ? C'est très simple : terminez les deux premières saisons, et si vous en avez déjà marre une fois la seconde terminée, alors abandonnez la licence. Dans le cas inverse, il faudra passer par le moins bon épisode de la série afin de découvrir cette saison 4. À noter que le spin-of centré sur Michonne, bien que très court (environ 4 heures pour tout terminer), est très dispensable et n'a aucun lien avec les autres saisons.
Ainsi, si je devais classer les épisodes de la série dans l'ordre, cette quatrième saison se placerait un cran en dessous de la seconde, qui se positionnait déjà plusieurs crans en dessous de la première (vous suivez ?).
Voilà, c'est ainsi que 10 ans de jeux, 10 ans de Walking Dead, s'achève pour moi.
Je vais reprendre bêtement les mots que j'ai écris pour l'écriture de ma « micro-critique » de l'épisode 4, mais il y a 10 ans de cela, au tout début de l'année 2013 plus exactement, j'ai, d'une certaine manière, enfin pu commencer à vivre… et vu où j'en suis actuellement, cet ultime épisode de Walking Dead a une résonance toute particulière dans ma tête, un goût singulier, doux-amer peut-être… et plus amer que doux malheureusement.