En plus d'avoir un nom à rallonge que ne renieraient sans doute pas certaines vieilles comédies françaises, VideoCart-1 – Tic-Tac-Toe, Shooting Gallery, Doodle, Quadra-Doodle possède un statut un peu particulier : c'est le premier jeu vidéo vendu INDÉPENDAMMENT de son système, autrement dit le premier soft "vendu en boîte".
On entrait ainsi dans ce que l'on appelle désormais l'ère des "Consoles de Deuxième Génération", par opposition à l'ancienne, où les PONG, Coleco Telstar et autres Color TV Game proposaient des jeux intégrés à leur système. L'Odyssey n'était pas très différente, puisque ses "cartouches" ne faisaient qu'indiquer à la console ce qu'il fallait afficher (n'ayant pas de microprocesseur…). Bref, après le cours d'Histoire, le sujet du jour : que vaut la première cartouche interchangeable de JV ?
On dit souvent que quantité rime rarement avec qualité. Comme certains l'auront judicieusement remarqué de par son intitulé, VC-1 propose pas moins de quatre jeux sur une seule et même cartouche !! Mais autant casser le suspense tout de suite, aucun d'entre eux ne laissera de souvenir impérissable à quiconque s'y essaiera…
En même temps, vous en connaissez beaucoup, des compiles vraiment bonnes ? Je ne parle pas des rééditions de jeux à succès comme les Super Mario All-Stars, Street Fighter Anthology ou les nombreuses "Trilogy Remasters HD" d'aujourd'hui, mais bien de jeux -supposément- inédits, comme le très moyen Sega Game Pack 4in1 de la Game Gear, ou encore le catastrophiquement célèbre Action 52…
Bref, comme le dit l'adage : mieux vaut un seul jeu excellent que plein de petits jeux merdiques… Comment ça, c'est pas un vrai adage ? C'est ma critique, je fais ce que je veux, et ma parole est parole d'Ivan-Gilles. Quoique dans les faits, si on prend le réflexe de le replacer dans le contexte de son époque, VC-1 n'est pas foncièrement une daube…
Mais trêve de tergiversations, et parlons (enfin) des jeux. Le premier s'intitule Tic-Tac-Toe. Les plus shakespeariens d'entre nous auront compris qu'on a là une simulation de morpion. Non, pas la petite bête casse-couilles, le jeu de société. On a donc un quadrillage de 3x3 cases, dans lequel on doit aligner trois X ou trois O sur l'horizontale, la verticale ou la diagonale, pour gagner.
Honnêtement, hors erreur d'inattention, il paraît très difficile de perdre, sachant qu'on a toujours l'avantage de jouer le premier coup… Le graphisme est très dépouillé et l'environnement sonore aux abonnés absents. Mais le plus gros défaut de Tic-Tac-Toe, c'est surtout l'impossibilité d'y jouer à deux, ce qui est pourtant l'essence-même de ce type de jeu…quand on sait en plus que la machine est livrée DE BASE avec deux joysticks…
Le deuxième jeu de la compile, Shooting Gallery, est certainement le plus "intéressant" du lot, en tout cas d'un point de vue purement vidéoludique. On contrôle une sorte de tourelle mobile devant détruire des cibles mouvantes qui se déplacent de haut en bas. Elle peut agir sur une certaine zone d'action plutôt restreinte, mais surtout orienter son viseur sur 180°. C'est sans conteste le jeu le plus ardu de la cartouche et, plus bizarrement, le seul à posséder un semblant d'ambiance sonore…
Viennent enfin Doodle et Quadra-Doodle, que je mets volontiers dans le même panier. Ce sont ce qu'on pourrait appeler des "simulations de dessin", permettant de dessiner un peu tout et surtout n'importe quoi, de puiser dans la maigre palette de couleurs de la bécane (au nombre incroyable de…sept!!) ou encore de grossir à l'envie -ou presque- le trait (si ça c'est pas supra important…). Quadra-Doodle se différencie de Doodle de par son effet miroir qui, à la manière d'un bon vieux kaléidoscope des familles, reproduit symétriquement notre "œuvre"…
Oui, c'est bon, je vous vois venir : ces jeux ne présentent aujourd'hui qu'un intérêt infime. Ça s'explique en deux temps. Le premier (le plus évident), c'est la puissance rachitique de la machine, bien qu'elle soit plutôt un "foudre de guerre" pour son époque (1976). Le second est plus complexe : en fait, bien qu'il restait encore tout à inventer, Fairchild s'est raccroché à des concepts déjà éprouvés sur d'autres supports, comme le dessin ou le jeu de société, "simplement" transposés au loisir numérique, comme l'avaient fait avant lui OXO ou DnD, l'adaptation de Dungeons & Dragons sur l'antédiluvien système PLATO…
Regardez le reste de la ludothèque de la Channel F : du black jack, du flipper, une simu' de mastermind…il y a même un semblant d'ancêtre du dr. Kawashima avec un jeu basé sur des maths !! Je vous rassure, il y a aussi de "vrais" jeux vidéo, comme cet excellent titre nommé Dodge-It… En bref, VC-1 – Tic-Tac-Toe, Shooting Gallery, Doodle, Quadra-Doodle semblera peut-être complètement obsolète pour un joueur du XXIème siècle, mais en 1976, pouvoir dire à ses potes : "Regardez, je joue au morpion sur mon jeu électronique", ça avait juste une putain de classe…