Deuxième production du désormais célèbre studio Supergiant games, Transistor n’a peut-être qu’un seul véritable problème, mais il est de taille : c’est un jeu pas clair. Le gameplay n’est pas clair. L’interface non plus. Le contexte, vague ; et les enjeux nébuleux.
Transistor est un jeu obscur dans lequel on ne sait pas ce qu’on doit faire ni comment le faire. Il faut constamment deviner ce qu’on attend de nous. Deviner le fonctionnement des spells que le jeu nous attribue lorsqu’il nous débarque dans les défis d’entrainement ; deviner que l’utilisation des compétences en combat nous débloquera des éléments de lore dans les menus ; deviner que les limiteurs sont des malus qu’on pourra choisir d’équiper pour corser la progression ; deviner ce qui se trame dans cette cité fluorescente en plein délitement ; deviner, toujours deviner… Et on finira par comprendre, bien heureusement, mais pas sans avoir sorti les rames au préalable.
La comparaison avec le récent Hades — autre jeu du studio amputé de son tuto — fait mal. Car si Hades ne nous prend pas non plus par la main, la phase de découverte et d’apprivoisement de ses mécanismes est intelligente, ludique et satisfaisante. Tandis qu’avec Transistor, cette phase de découverte, elle est rêche, pénible. Elle nous noie. Dans Transistor, on n’a moins l’impression d’affronter les méchants mobs que de se battre contre l’interface imbitable, les descriptions imprécises ou le verbiage lunaire du narrateur.
Pourquoi c’est si dommage ? Parce que le jeu est plutôt bon en vérité ; mais on ne le réalise pas tout de suite et Transistor semble tout faire pour user notre patience et notre persévérance. J’ai failli l’abandonner au terme des deux premières heures, et je suis bien convaincu que pas mal de joueurs ont rendu les armes pour ces mêmes raisons.
Pourtant, une fois qu’on l’a fait sien, il est vraiment pas mal ce Transistor. Et c’est en lançant le New Game+ que j’ai commencé à m’éclater. Parce qu’on a enfin compris le système, parce qu’on a enfin déverrouillé suffisamment de compétences pour concevoir de vrais builds à base de combos. Parce qu’on réalise la diversité des combinaisons et la variété des approches possibles. À ce moment-là, on comprend que le jeu est riche, bien conçu et on se met à apprécier ces phases de combat qui nous apparaissaient pourtant si fades et manquant de dynamisme au tout début.
On commence aussi à mieux appréhender le scénario et le background qui ne se dévoilent qu’à mesure qu’on diversifie sa façon de jouer, prenant davantage de plaisir lors de cette seconde run. Donc oui, Transistor est un bon jeu. Mais est-ce que ce n’est pas un peu tard d’attendre le NG+ pour dévoiler tout son potentiel ? Beh je crois bien que si malheureusement, et je ne m’étonne pas des retours critiques assez divisés.
On remerciera finalement les indéniables qualités artistiques du jeu, de la DA cyberpunk faite de décors magnifiquement peints à la bande-son électro-mélancolique de Darren Korb sans lesquels je n’aurais certainement pas poussé plus loin ma découverte du jeu. Au final, j’en suis venu à apprécier mon excursion à Cloudbank, j’ai terminé le NG+ en poussant le gameplay dans ses retranchements, mais je ne peux que regretter ce démarrage aussi… lassant. Transistor est comme un fruit cueilli trop tôt : à peine assez mûr, il se bonifiera si on lui laisse le temps, mais on est quand même tenté de le jeter pour en cueillir un autre.