Le film d'aventure est un genre en totale désuétude. Aussi triste soit ce constat, ce ne sont pas les Benjamin Gates et autres Indiana Jones 4 (qui n'a jamais existé) qui contrediront cet état de fait. Et tandis qu'on nous balance ds GI Joe à n'en plus finir, l'Aventure, celle avec un grand A qui fait s'extasier devant un décors naturaliste tout droit sorti du Tombeau Indou ou palpiter devant un rocher poursuivant un héros au fouet célèbre passe de mode.
Triste constat. Alors quand, au milieu de cette morosité ambiante, surgit non pas un cavalier hors de la nuit mais un héros mal rasé, grande gueule et tombeur de ces dames dans le but de faire son trou sur une console en mal de gros hits, c'est l'attention de toute une génération de joueur qui est mise en alerte...

Dire qu'Uncharted 2 était attendu est un doux euphémisme. Au gré de trailers tous plus beaux et alléchants les uns que les autres et de previews enjouées, l'envie fit place au besoin. Besoin de voir le premier Uncharted sublimé. Car oui, la précédente aventure de Nathan était perfectible. IA bourrine, environnement qui ne se renouvelait pas assez, action bien trop présente pour une durée de vie pas folichonne... Bref, cette suite est-elle conforme aux attentes ?

L'aventure, cette fois-ci, nous mène sur les traces de Marco Polo. Une mystérieuse phrase prononcée sur son lit de mort (en gros il n'aurait pas tout raconté de ces découvertes), et c'est l'occasion pour les scénaristes de s'en donner à coeur joie. Car oui, le scénario se suit sans anicroches, étonnante symbiose entre dialogues bien sentis, drôles, mise en scène clairement hollywoodienne (dans le bon sens du terme), et situations spectaculaires de hautes volées.
Car ce qui surprend tout d'abord, c'est le bond qualitatif de ces dernières. Bien plus variées, très justement rythmées, n'ayons pas peur des mots : certains passages resteront gravées sur la roche comme étant les plus agréables à vivre. Ou plutôt subir, pour notre pauvre Nathan qui s'en prend décidément plein la tronche du début à la fin, sorte de Bruce Willis croisé à Harrison ford au final. Autant prévenir tout de suite, la tension ressentie dans le trailer montrant le tout début du jeu et cette séquence d'escalade vertigineuse d'un train suspendu au dessus d'un vide étendu n'est qu'un léger avant-goût. L'ouverture d'un crescendo sans failles.

Si l'action et l'aventure sont bien au rendez-vous scénaristiquement, fallait-il encore que le jeu soit agréable à suivre pad en mains. Uncharted proposait, à ce niveau, une base solide. Croisement réussi entre la couverture à l'ordre du jour et phases d'exploration à la Tomb Raider (le dernier, pas de sauts au millimètre près ici), restait un feeling des armes pas top et surtout une IA des ennemis qui avait tendance à rendre le tout un peu bourrin.
Malheureusement, l'avancée sur ce dernier point n'est visiblement pas la priorité de Naughty Dog. Toujours aussi butés et plus proches des kamikaze qu'autre chose, les badauds ne font pas de quartiers quand ils ont repérés le joueur peu silencieux.
Car voilà la grande nouveauté de game design du jeu. Cette fois-ci, les scènes d'action sont clairement mises à disposition pour que le joueur choisisse entre rentrer dans le lard en hurlant banzai et la jouer en finesse à la MGS. Seulement voilà, l'IA est problèmatique même dans ce cas de figure. Tantôt affublés d'une vision de rat d'égout, tantôt capable de vous voir à mille mètres faon faucon, bien négocier un passage en se prenant pour Sam Fisher tient plus du par coeur que de la finesse. Dommage, l'idée est bonne et reste cependant agréable, voir indispensable dans les niveaux de difficulté élevés.
On notera aussi les armes légèrement plus nombreuses, et toujours cette sensation de pouvoir gunfighter dans toutes les positions possibles, un régal que de combattre dans des environnements aussi grandioses.

Ces décors sont aussi propices à l'exploration. Cette dernière était un peu l'oubliée du précédent épisode. Le fait d'être très clairement dans un couloir se ressentait trop, et l'omniprésence de l'action n'arrangeait rien. Dans cette suite, ce sont des chapitres entiers qui se passent suspendus à des vieilles pierres. Les développeurs ont compris qu'ils tenaient là le moyen le plus naturel de mettre en valeur leur travail technique d'orfèvre, comme la déjà culte séquence d'escalade de l'hôtel en ruine pour débucher sur un panorama grandiose.
Seulement, on pourra toujours regretter la relative facilité de ces passages. Le chemin est tracé, dicté au joueur à l'image d'un Mirrors Edge, ne laissant toujours pas une seule alternative. Plus agréable tout de même (fini les lianes trompe-l'oeil), plus poussée dans la mise en scène et jonglant à la perfection avec des cut-scene diablement bien intégrées, la progression se fait tout de même avec le plus grand plaisir.
Les énigmes sont toujours présentes, le carnet de route de Nathan fait son grand retour (feuilletez le, quelques perles s'y trouvent). Plus aisées et plus directives que par le passé, mais suivant bien le cahier des charges artistiques de cette suite, elles se comptent seulement sur les doigts d'une main.

Mais le morceau de bravoure, la grande avancée de ce jeu, c'est surtout côté technique qu'on le trouve. Uncharted 2 le plus beau jeu sur console ? Oui, sans aucun doute. Peut-être moins benchmark qu'un certain Killzone 2, mais tellement plus maîtrisé, tellement plus détaillé mais aussi tellement plus agréable à l'oeil. Uncharted 2 est la nouvelle référence sur ce point, et c'est assez jouissif que d'enfin abandonner cette mode du brun-gris si présente sur cette génération de console.
L'amateur de belle neige sera ravi, tout comme le grand fan d'égouts (il en faut pour tous), et le naturaliste en prendra plein les mirettes. Sans trop spoiler, le crescendo débouche sur un décors inoubliable, carrément.

Ajoutons à ce solo d'une efficacité redoutable, un mode multi qui aura le mérite d'exister. Sans être original une seule seconde, mais tout aussi fun à jouer de par cette sensation de pouvoir tirer dans n'importe quelles circonstances, un deathmatch remplit son rôle honnêtement.
Tout comme la coop, qui propose de jouer des missions originales ou bien de se défaire de vagues déferlantes d'ennemis. Classique mais agréable et sans lag.

Rythme haletant, infiniment plus spectaculaire et jouissif que le dernier Indy (qui n'a jamais existé, faut-il le rappeler), beau à en crever et aussi agréable à l'écoute, le rôle de blockbuster réussi est largement tenu. Sans doute même mieux qu'espéré. Une belle suite oui, mais un masterpiece trônant au sommet de cette génération ce n'était pas couru d'avance...
Bavaria
9
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le 9 mai 2010

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