C'est en cette fin de mois de juillet 2022, durant lequel les températures chaudes ont su attiser mon envie de perenigration oxygénante dans la nature...saison estivale propice aux visionnages de documentaires en tout genre, ayant furieusement nourri mon envie d'évasion lointaines...en pleine période de vacances scolaires, vidant Paris de sa population et rendant un brin ennuyeux mon activité professionnelle, me donnant l'envie m'engager corps et âmes dans une grande aventure ludique...tout un programme donc...finalement brisé au vu du manque de nouveautés ludiques alléchantes, de la monotonie des productions actuelles...et puis voilà...une idée un peu saugrenue, un coup de tête un peu irréfléchi, une possibilité...un remaster, une compilation disponible sur PS5 en ce début d'année, soit via une simple update numérique pour tout processeur des versions originales ou en boite physique...je me convaincs, je cherche, je trouve une occasion à 30 balles et j'achète ce "Uncharted Legacy Of Thieves"...qui me promettait de revivre un titre qui m'avait enchanté, que je considérais comme essentiel à sa sortie en 2016 sur PS4...de me confronter à mes souvenirs d'antan, 6 ans ça passe vite...et de voir si ceux-ci étaient encore d'actualité...

C'est donc à peine les premiers logos déroulés, une sonorité rappelant une lointaine émotion, un simple menu empreint de lumières et de couleurs, le pad de PS5 à la main, une léger appui sur la touche X, une vibration haptique, une fond au noir...que l'on se retrouve plongé, sans une once d'explication, de pédagogie...sur un vulgaire bateau de pêche, en pleine mer agité, sous une nuit pleine de brouillard, les lumières de la lune révélant une île, un archipel, mystérieux, étrange et onirique...nous hypnotisant, nous montrant élégamment notre voie...un second personnage à bord, nous indiquant clairement ce qu'il faut faire, sorte de mentor, visiblement plus âgé, plus aguerrie, nôtre grand frère...quelques rencontres inhospitalieres, une immense vague, un rocher mortel...le bateau coule...nous laissant aveuglé, léthargique, inconscient...un rêve, une bride mémorielle, un souvenir d'enfance...nous voici dans un orphelinat, catholique, de style victorien, en briques rouges...toujours de nuits...quelques lumières de villes laissant apparaître au fond une mégalopole qui nous semble être américaine...une remontrance, une réprimande...un sentiment de solitude et d'ennui...un flash apparaît, une lumière nous appelle...on fugue à travers les toits, on escalade la moindre poutre, on se suspend à la moindre fenêtre, on cours, on glisse, on s'infiltre, on esquive...une rencontre...un retour salvateur...nôtre cher frère...plus jeune...adolescent rebelle...on le suit, on lui fait confiance...il nous apprend quelques ficelles, il nous offre un présent, il nous vend un futur...un pédagogue que l'on quitte un peu déçu...on se réveille bien des années plus tard...au sein d'un pénitencier au Panama, sous une chaleur écrasante, une humidité étouffante...on fait la bagarre...on se fait menotter, on traverse de sordide couloirs...laissant entrevoir une réalité que l'on préfère esquiver...on marche...on nous libére...une tour en ruine, visiblement l'usufruit de la colonisation espagnole...un objectif clair...on saute, on grimpe, on résout une énigme, on trouve un objet clé, un crucifix...on sent une piste, on espère un périple, on ment...afin de retrouver encore une fois notre éternel partenaire...qui devient ici un protecteur...on se bat, une émeute éclate, une évasion se prépare...on fil à toute berzingue, on esquive les balles...une issue se dévoile, une forêt tropicale s'offre à nous...un ultime saut à effectuer...on réussit...on attend notre compagnon...un tir...une chute...un traumatisme...un deuil...on fuit un peu obligé...on laisse tomber un peu forcé par la main...on regrette...et puis une musique mélancolique, une couleur sépia, un crayonnage et un encrage dévoilant des brides scenaristiques offrant un générique dans un style B.D...créant chez nous une folle envie de retrouver une grande aventure...un titre confirmant ce ressenti...mais une ellipse brute et nous voilà solidement vêtu d'une combinaison sous-marine, recherchant une épave, un simple conteneur industriel, une vulgaire tache...visiblement la routine, le taff...faut bien se nourrir et payer les factures...on discute ça et là...un collègue nous évoque un énième contrat lambda...un document récupéré...on le range au fond d'un tiroir, dans notre grenier, au sein de notre propre maison, bien installé dans le sud des États-Unis, on fouille un peu, on retrace notre glorieux passé, on joue du pistolet...une voix nous invite à dîner, quelques interactions, une exploration de notre quotidien...une petite bière, une salade thaï, on fait semblant d'écouter notre chère et tendre, on fait un peu de rétro gaming, on tente de se divertir...une lassitude et une monotonie se fait ressentir, un train-train réconfortant mais usant...et puis un matin au bureau, un bruit, une retrouvaille inespérée...une longue conversation la clope au bec et quelques cannettes de bières...on parle...on évoque notre vie...la nuit défile...une ancienne piste se fait vive...une occasion à saisir...un job qui nous tends les bras...un récit qui nous touche...on se lance bien assuré, follement animé par se retour vers l'aventure...on ment encore...et puis là c'est un aller sans retour, une course vers l'avant, un marathon continu...nous faisant traverser rapidement la côte italienne, les highlands écossais...et puis Madagascar et son archipel, principal théâtre organique de notre parcours, avec ses volcans aux roches noires et ses plages de sable blanc, ses eaux turquoises poissonneuses et ses forêts luxuriantes vertes, ses villes a l'architecture coloniale colorée et ses plaines de baobabs orangées, sa faune endémique et malicieuse, sa population cosmopolite et accueillante, sa culture et son artisanat traditionnel, son climat et sa géographie changeant...nous immergeant immédiatement dans un voyage enivrant, empreint de fantasme et de romantisme, de magnifiques panoramas et instants hypnotisants, laissant peu de place à l'ennui et nourrissant notre imagination...sublimé par ces graphismes chatoyants, ces lumières envoûtantes, ces couleurs vives, ces textures cartoonesques, ces musiques orchestrales, ces sonorités environnementales immersives, ce chara-design rondouillet, ces voix iconiques, ces jeux de caméra cinématographique, ce grain d'image photographique et ces arrières plans picturaux...magnifié ici par cette remasterisation, notamment sur les cinématiques, certains points techniques et la fluidité de l'ensemble...mettant en avant l'intemporalité de cette vision artistique et m'offrant une relecture et une redécouverte de celle-ci...

C'est donc au sein de ce premier tableau aux teintes crépusculaires et obscures, pris à partie par une mer mouvementée et des opposants un tantinet collant, et tentant vainement atteindre une île mystérieuse à peine dévoilée, guidé et secondé par notre grand frère plutôt débrouillard...que nôtre improbable périple s'introduit...permettant une immersion totale et immédiate, présentant intelligemment les prémices de son gameplay tout en laissant le flou sur notre futur parcours...et qui au fur et à mesure de son développement, à travers le temps et l'espace, à travers les différentes situations et péripéties...dévoilera progressivement les multiples possibilités offertes par ce volet...entre escalade, natation, spéléologie, tyrolienne, marche méditative...entre pilotage de jeep, bateau, motocross, camion...entre archéologie, infiltration, cambriolage, chapardage, espionnage, enquête, naturalisme et destruction du patrimoine...entre bagarre à mains nues, session de tirs, esquives minutieuses et pacifisme volontaire...entre simple interaction du quotidien, énigme environnementale plus complexe, conversation usuelle, petite tranche de vie...entre solitude subie, collaboration souhaitée, opposition recherchée...entre contemplation passive, exploration volontaire, narration choisie, omission permise...nous plongeant dans la peau d'un véritable aventurier, de nôtre conception de l'aventurier, de nôtre perception de celui-ci...nous laissant suffisamment libre de choisir notre voix, nos activités, notre relation à l'environnement...jouant constamment avec nos plaisirs ludiques, notre engagement et notre volonté...et sans jamais nous juger...où chacun y trouve son compte...mais qui par certain instant se voit plus linéaire, limité, codifié, indexé à la narration...s'amusant constamment avec nos sensations mais misant sur notre intelligence, notre sens de l'analyse, notre capacité d'adaptation, notre dextérité, notre instinct...parfaitement mise en lumière par ce level-design permissif et ouvert, composé de petits biome à taille humaine, cette affordance visuelle et sonore, cette maniabilité accessible et instinctive, ce codex evolutif, servant de système d'aide, cette courbe de difficulté progressive, cette intelligence artificielle à la fois conne et efficiente, cette pédagogie douce et progressive...sans surenchère...pas de carte, de GPS, de HUD, de gain d'expérience, de quête secondaire, d'inventaire et de menu extra-diégétique...évitant toute indigestion et lourdeur...retravaillé légèrement ici par cette remasterisation, notamment sur les possibilités offertes par la Dual-sense, quelques retouches techniques...mettant en avant l'intemporalité de cette vision ludique et m'offrant une relecture et une redécouverte de celle-ci...

C'est donc dans la peau usée d'un aventurier cleptomane à la retraite, installé dans une confortable demeure dans le sud des États-Unis, travaillant tranquillement dans une entreprise de collecte industrielle, profitant allègrement de ces compétences naturelles, donc bien encré dans un quotidien routinier et tranquille...mais frustrant et lassant pour cet amoureux de la découverte de l'inconnu, de l'imprévisible du mystère, du dépassement de soi, de l'enrichissement personnel, de la quête de l'impossible...qui pour des raisons qui le dépasse, qu'il ne maîtrise pas, qu'il fantasme, qu'il croit comprendre qui le touche au plus profond de lui...bien vendu et narré par un grand frère, un peu cupide et égoïste, ayant toujours été un modèle, un guide, un protecteur pour lui...jouant allègrement avec ses émotions et sa sensibilité...lui imposant d'entreprendre bon nombre de choses qu'il s'était promis d'arrêter, qu'il n'avait pas forcément envisagé, qui finiront par le fragilisé...traversant différents environnements, destinations...mais se posant plus longuement au sein de cet archipel de l'océan indien...Madagascar...île multi-culturelle, ancien bastion économique, éden de la biodiversité, autel fantasmé d'émancipation sociétale, trésor naturel tant convoité, victime malheureuse de la colonisation, terreau fertile à bon nombre d'expérimentation, cimetière d'un passé glorieux, territoire vierge idéal à toute utopie, haut lieu de la piraterie...que nôtre métaphore vidéo-ludique se dévoile...traitant avec légerté et tendresse, humour et simplicité...des thématiques profondes et matures...autour de nôtre rapport à un quotidien ordinaire, à l'usure du metro-boulot-dodo, à l'envie de briser un cycle qui semble infini, au besoin de se trouver un autre but ou une autre vie, à l'entêtement, à la détermination, l'engagement, l'obsession et les risques qu'il provoque...à un patrimoine, à une culture, qu'elle nous soit propre ou étrangère, à l'appropriation, l'héritage, à la revendication de celui-ci et l'économie qui en découle...mais surtout la famille et les liens du sang, l'abandon et la perte d'un proche, la confiance et l'aveuglement envers un proche, les hauts et les bas relationnels et les mensonges qu'ils imposent...le tout se racontant à travers le scénario, l'environnement, les cinématiques, les écrits, les paroles, les visages, le game-design, la direction artistique...nous touchant immédiatement, nous parlant directement, nous questionnant constamment...une cohérence ludo-narrative, qui pour le coup n'a point été retouché par cette remasterisation, pour son bien et mettant en avant l'intemporalité de celle-ci...et m'offrant une relecture et redécouverte plus suprenante que j'espérais...

C'est donc après un retour à un quotidien bien différent et plus insulaire, une nouvelle partie sur une bonne vieille Psone, quelques croquettes offertes à un magnifique labrador, une petite marche les pieds dans les eaux turquoises du pacifique, un peu de fouille dans un vieux placard, des souvenirs bien exposés, un père et une mère retrouvé, un récit plein d'aventure fraîchement entamé, une porte qui se referme...conclusion merveilleuse à ces 15 heures bien consommées sur deux jours, le temps du week-end, l'instant d'un retour dans le passé, à travers un rafraîchissement de celui-ci, me permettant une relecture et une redécouverte d'un titre que je pensais bien connaître, m'ayant surpris et étonné par son intemporalité, m'ayant davantage touché et parlé qu'à son époque, m'ayant diverti et amusé comme peu savent le faire, m'ayant fait voyager loin de mon quotidien redondant et monotone, m'ayant permis de réincarner une icône de mon imaginaire, que je ne pensais pas si proche de ma propre identité et histoire personnelle, m'ayant apporté une satisfaction et un plaisir qui justifie son achat...que je quitte "Uncharted A Thief's End" et cette remasterisation, cette compilation, ce "Uncharted Legacy Of Thieves"...véritable lettre d'amour aux récits d'aventure...à travers deux héros, l'un masculin, l'autre féminin...à travers deux identités, l'un un étranger, l'autre une autochtone...à travers deux territoires l'un Malgache, l'autre Indien...à travers deux visions, l'un la fraternité, l'autre la camaraderie...à travers deux allégories, l'un l'acquisition d'un patrimoine, l'autre la préservation d'un héritage...à travers deux métaphores, l'un un adieu, l'autre un début...l'un baigné de mensonge, l'autre de vérité....à travers d'eux titres que je considère toujours aujourd'hui comme chef-d'œuvre...offerte ici autant aux initiés qu'aux novices, qui ne sont au final qu'un seul et même bloc...prouvant tout le savoir-faire de Naughty Dog et mon amour pour eux...mais provoquant chez moi l'envie de les revoir à travers une nouvelle franchise......

AlMomoSan87

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