Tout le monde connaît l'expression : "C'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes". Mmm mm ! A l'heure des consoles HD et de l'éternelle révolution technologique amenant nos jeux vidéos à nous transporter toujours plus loin dans l'expérience vidéo-ludique, ce proverbe, à la limite du sermon, semble sonner uniquement comme une ode au conservatisme, voire à l'immobilisme. Les "vieux pots", c'est quoi ??? On va quand même pas tous se remettre à jouer à des Zeldas en 2D avec 16 couleurs qui se battent sur l'écran, ou à des Final Fantasy au système de combat et d'exploration aujourd'hui dépassé.

Certes non ... Mais à l'inverse, les immenses capacités technologiques de nos machines d'aujourd'hui ne doivent pas uniquement nous amener à considérer le jeu comme un outil à impressionner. Beau, c'est bien. Mais bien, c'est mieux. Et à trop traiter la surface, ce que nos consoles HD savent faire à force de nouvelles prouesses graphiques, on en oublie de regarder l'intérieur. Car ce n'est pas là affaire de technique, même si elle peut y contribuer grandement, mais affaire de gameplay, et donc de développeurs ou de producteurs de jeu. Ceux qui ont les idées, la vista.

Xenoblade Chronicles se situe au confluent de ce merveilleux débat, même si je sens que j'ai perdu quelques lecteurs au fil des deux premiers paragraphes de ce texte. A l'heure des RPG clinquant, à l'ère des Freedom-RPG grandement inspirés des jeux à l'occidentale - et plus particulièrement à l'américaine - , à la date où The Elder Scroll V Skyrim sort sur PS3 et X360, XC nous convie - nous convoque - pour une aventure "à l'ancienne", un J-RPG, mais qui lorgne sur le gameplay de ses cousins, une aventure d'apparence simple, mais réussie et prenant place dans un environnement aussi profond que gigantesque. Bref, pas uniquement un jeu bon car à contre-courant, mais tout simplement un Jeu : travaillé, cohérent, réussi, et démarrant, comme le veut la tradition, par une bataille légendaire (entre le Bien et le Mal ???) entre deux Titan : le Bionis et le Mecanis. L'Homme contre la Machine ...

C'est la première scène de cette histoire, et finalement elle est très représentative de deux aspects de l'aventure. Tout d'abord le gigantisme. Les colosses que nous avons sous les yeux lors de cette introduction vont constituer la base des environnements que nous allons parcourir. Et autant vous dire qu'en matière de gigantisme, vous allez être servis car les contrées que vous allez traverser en long en large et en travers sont vastes, diverses, inspirée et chargées d'énergie et de mysticisme. Du grand art.

Oui, mais du grand art porté par les entrailles de la Wii. Et celle-ci crache ses tripes ! C'est le deuxième aspect de cette introduction. Dès les premières secondes du jeu, on se rappelle soudainement - et ce n'est pas une surprise - que nous sommes sur la console de Nintendo, bien loin techniquement parlant des PS3 et X360. Ca n'est pas HD, c'est assez loin de Final Fantasy XIII et ça apprendra aux plus néophytes des joueurs ce que aliasing veut dire. Mais malgré cela ... ça fonctionne. Car, pour de la Wii, Xenoblade Chronicles est un jeu techniquement très correct. Juste les capacités de la machine sont elles poussées dans leurs derniers retranchements pour suivre l'ambition des environnements de jeu.

C'est au sein de ce théâtre grandiose que le joueur va faire connaissance des différents héros qu'il va accompagner tout au long du jeu. Là encore, on retrouve un traitement des personnages assez traditionnel des J-RPG. Le jeune héros élu, bien jeune, bien innocent en début de partie (ça me rappelle les glousseries d'un collègue qui parle souvent des héros androgines des jeux vidéos japonais ...). Et comme tout bon héros de J-RPG, il a un passé bien trouble qu'il ne connaît d'ailleurs pas entièrement ... Pour contre-balancer la relative fragilité du héros, celui-ci se voit affubler d'un sidekick bien bourrin et un peu balourd, qui lui même s'attachera à l'une des héroïnes de notre communauté. Ajouter à cela une seconde jeune femme qui se rapprochera de notre héros principal, un grand et illustre guerrier qui sera un peu la caution morale et historique du groupe et un personnage fantoche à la Jar Jar Bings, et vous avez l'équipe Benetton classique du jeu de rôle japonais sur console.

Certes, mais ... ça fonctionne. Les personnages, sans être d'une exceptionnelle originalité sont attachants. Les méchants du jeu, des machines avec des visages, sont globalement réussi. Et l'on se plaît à voir les différents acteurs évoluer au fil de l'histoire, ceux-ci étant servi par des doublages globalement réussi. Effort notable à notre époque, XC s'offre le luxe de laisser le choix au joueur entre un doublage anglais et un doublage japonais, sans doute moins accessible mais d'origine. Bravo !

La quête de nos aventuriers les amènera à parcourir le Bionis, qui au-delà d'être un colosse de légende, sert également de lieu d'habitation pour toute une civilisation composée de plusieurs espèces. Et plus que de le parcourir, il va falloir en atteindre les plus hautes extrémités. Et quand on sait que vous êtes originaires de la Colonie 9, située dans les pieds du géant, on se dit que le voyage va être long. Et dans les faits, plus que long, il est beau. Praires verdoyantes et peuplées de multitudes d'animaux sauvages et de bêtes féroces, jungle à la végétation particulièrement dense, marécages mystérieux et baignés d'une lumière intrigante, entrailles du Bionis, arbre millénaire abritant tout un village, civilisation perdue de la tête du colosse, les lieux visités sont globalement très réussi et sont - c'est là l'une des grandes forces du jeu - très cohérents dans leur articulation. Bref, on s'y croit vraiment et l'on prend un plaisir particulier à parcourir les différentes aires de jeu.

Malgré cette immensité, Monolith Software a néanmoins décidé de placer le plaisir de jeu au centre du titre. Je m'explique.

Outre la quête principale, notre communauté sera amener à croiser, RPG oblige, de nombreux personnages non joueurs. Ces derniers nous brancheront notamment sur un nombre incroyable de quêtes annexes plus ou moins importantes et plus ou moins difficiles, allant de la recherche de matériaux à la libération de compagnons retenus par des hordes d'ennemis, en passant par la recherche de créatures mythiques qu'il faudra bien entendu occire de sa lame. L'accomplissement de ces différentes quêtes annexes vous permettra d'amasser des sousous et des trésors, mais vous permettra également de cumuler de l'expérience et d'augmenter les liens entre vos personnages, ce qui est une donnée particulièrement importante (mais nous y reviendrons plus tard).

Et qui dit nombreuses quêtes et immensité des territoire, dit nécessairement "Ben putain ! On va se taper des sacrés allez-retours !!!". Et bien non. Le choix de MS va sûrement faire crier au scandale les plus hardcores de nos lecteurs, mais XC offre au joueur une capacité utile : la télétransportation. En clair, il est possible à tout moment (sauf durant les combats et à certains passages spécifiques du jeu) de se transporter instantanément à l'endroit des "repères", c'est à dire certains lieux stratégiques sur les différentes cartes. Cette capacité rend bien entendu le jeu plus abordable, car il est possible à tout moment de revenir dans la première ville du jeu pour faire de la synthèse de matériaux ou de se rendre au plus près de l'endroit où vous devez vous rendre pour accomplir une quête. Mais quand on la met en relation avec la foutitude de choses à faire dans le titre, je trouve que ce n'est pas une mauvaise chose.

Dans le même registre, XC offre plusieurs options qui semblent rendre le jeu beaucoup plus facile (et c'est parfois le cas). Par exemple, sur le Bionis, pas de points de sauvegarde, et il est possible d'enregistrer sa progression à peu près à tout moment. Autre cas, vous mourrez ... On revient à la dernière sauvegarde pour se retaper tout ce qu'on a fait depuis le dernier enregistrement ? Et non ! On revient simplement au dernier repère traversé tout en gardant le bénéfice de tout ce qui avait été gagné auparavant, qu'il s'agisse de trésors, d'expérience ou de quêtes complétées. Dernier exemple de cette tendance du titre, le déroulement des quêtes. René, vieil habitants du village de Vieuville (les noms ont bien entendu été changés ...) vous confie la mission de retrouver son sonotone dans les Cavernes du Phonographe. Vous le retrouvez, mais inutile d'aller revoir à contre-coeur René qui va encore vous taper la discute pendant trois plombes avant que vous ne puissiez repartir sauver le monde. Car les quêtes se valident globalement dès l'objectif atteint, sans qu'il soit nécessaire de retourner voir la personne à l'origine.

Sur tout ces points, XC semble orienter le joueur vers une déconcertante facilité. Mais en fait, le challenge est ailleurs, et encore une fois il se loge dans l'immensité. Outre le déroulement de la trame principale du jeu, vous serez amené à accomplir un nombre très élevé de quêtes annexes, mais également de parcourir l'ensemble du Bionis (la découverte de chaque repère ou site étant récompensé par de l'expérience), récolter une tonne d'objets plus ou moins utiles et d'en regrouper certains au sein d'une collection d'objets (vous serez également récompensé pour cela par des pierres magiques), tenter d'assister aux différents têtes-à-têtes disponibles pour les différents personnages (mais qui ne se débloqueront que sous certaines conditions et qui vous permettront de renforcer les liens entre les personnages), reconstruire une colonie rayée de la carte dès les premières heures de l'histoire (mais pour cela, il va encore falloir accumuler des objets et cracher au bassinet pour financer la reconstruction), ou encore faire augmenter votre notoriété au sein des différentes zones du Bionis, cette notoriété vous permettant d'accéder à de nouveaux objets ou de nouvelles quêtes vous entraînant vers de nouvelles découvertes, etc ... etc ...

C'est ici le coeur de Xenoblade Chronicles. Ici, pas de difficulté ou de durée de vie artificiellement gonflée par des temps morts car rien que le fait de vouloir compléter le jeu de manière substantielle est un défi en soi.

Mais qui dit J-RPG (et quêtes annexes) dit également combats. Sur ce point, XC est encore une fois ambitieux car il se veut proche de ses cousins les MMO-RPG en proposant, comme Final Fantasy XII l'avait initié avant lui, des combats sans transition avec la partie exploration du titre. Pas d'effet de caméra, pas de transition vidéo, on passe directement du parcours à la joute armée. Le système de combat est assez dynamique. Il vous paraîtra au départ assez, voire trop simple, mais il recèle également pas mal de subtilités.

Pour faire simple, les personnages à l'écran sont au nombre de 3. Vous configurez pour chaque combattant l'équipement ainsi que les "Arts" qui sont les capacités propres à chaque personnage. Chaque combattant dispose également d'une capacité spéciale. Alors que les Arts se régénèrent tout seul, avec le temps, la capacité spéciale devient disponible à force de coups sur l'adversaire. Lors des combats, vous ne contrôlez véritablement qu'un combattant, les autres étant gérés par l'IA. Votre combattant effectue tout seul des auto-attaque, c'est à dire des coups classiques. Vous influez principalement sur son placement et sur l'utilisation des Arts et de la capacité spéciale. Mais il va falloir le faire au bon moment, car deux aspects seront particulièrement important pour remporter la victoire : le placement pour l'exécution de certains Arts (sur le côté ou par derrière) et l'ordre dans lequel les Arts ou capacité sont joués. Un bon enchaînement, et vous pourrez, après avoir déséquilibré l'ennemi, le faire chuter. Encore un Art bien placé, et il sera hébété, incapable de répliquer à vos attaques.

Mais ce n'est pas tout ! Le moral des troupes durant le combat, symbolisé par la mou de vos combattants à l'écran, devra être scruté de près. Si un combattant s'endort suite à un sort ou s'évanoui, voire même s'il perd le goût du combat à force de foirer ses attaques, il faudra aller le booster en se plaçant à ses cotés et en appuyant sur le bouton B. De même, la réalisation de certaines attaques ou prouesses défensives lancera un petit QTE permettant de booster le moral des troupes, mais également de renforcer (encore une fois) le lien entre les personnages.

Autre joyeuseté, le remplissage d'une jauge de formation qui vous permettra de réanimer les coéquipiers mal en point, mais également, une fois celle-ci intégralement remplie, de lancer une attaque combinée entre les trois personnages participant au combat. Là encore, si les liens entre vos compagnons est assez fort (d'où l'intérêt de les entretenir), vous pourrez multiplier le nombre d'attaque successives pour infliger un grand nombre de points de blessure à l'adversaire).

Mais on en oublie un point essentiel de Xenoblade Chronicles ... Un élément au coeur de l'histoire et du gameplay ... Vous vous souvenez de notre héros jeune et innocent. Et bien dès le début de l'aventure, il fera l'acquisition - appelons ça comme ça - d'une épée mystérieuse : la Monado. Sa capacité est dans commune mesure : elle permet tout simplement de prédire l'avenir. Mais malheureusement, notre héros ne parviendra pas à maîtriser totalement cette capacité qui interviendra ça et là durant l'aventure.

Mais durant les combats, lorsqu'un ennemis particulièrement coriace sera sur le point de laminer un des combattants, la Monado nous offrira une vision du coup avec un compte à rebours. Avant la fin de celui-ci, il faudra essayer de contrecarré la mise en oeuvre de cette attaque, soit en se la jouant défense à fond, soit en faisant chuter l'adversaire, soit en détournant son attention vers un autre personnage.

Du contenu en pagaille qu'on vous a dit ...

Et comme l'immensité du jeu, j'ai l'impression que je pourrais disserter pendant des heures de Xenoblade Chronicles. Malgré certaines limitations, le titre est d'une grande inspiration et particulièrement immersif. Les musiques, assez hétéroclite, et variant entre le sympathique et le très bon, contribuent à l'ambiance générale du titre.

On en vient tout simplement à rêver de ce qu'aurait pu être le contenu et le gameplay de ce titre avec la technique colossale d'un Final Fantasy XIII qui lui se faisait grandement critiquer pour son manque de profondeur et sa linéarité. Entre les deux, le colosse technique est défait par le petit jeunot qui se la joue plus ambitieux et plus profond.

Est-il pour autant exempt de tout défaut ? Certes non ... L'on pourra citer pèle-mêle une interface plutôt réussie mais parfois lourde dans la gestion de certains aspects (genre l'équipement), l'intérêt limité de la création de cristaux qui vous permettront de booster certaines capacité de vos personnages, une histoire bien menée mais finalement assez classique, et cet éternel scintillement à l'écran pour un jeu pas toujours adapter à l'exigence de nos écrans HD.

Mais rien de tout ceci ne vient diminuer notre plaisir de jeu et la fierté d'avoir face à soi un titre qui joue enfin la profondeur et qui assume le parti-pris d'une certaine facilité en contre-partie d'un contenu pléthorique. Xenoblade Chronicles est un titre majeur de la ludothèque de la Wii, sans doute le meilleur RPG de la console (il faut dire que les bons représentants du genre n'étaient pas nombreux) et le meilleur J-RPG de l'époque.

Pour être parfait, il aurait fallu soit qu'il sorte un peu plus tôt (ce qui a été le cas au Japon où il est sorti un an plus tôt qu'en Europe) où qu'il tourne sur une machine un peu plus solide. Mais XC tient bien la route, met dans le vent de nombreux titres HD. Old is good ! Les fondamentaux sont maîtrisés et c'est ce qui fait la marque des grands jeux.

Et en matière de savoir ce qui est grand, Xonoblade s'y connaît ...

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le 24 mars 2013

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Red13

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