Ce Black Metal apaise mon âme

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Tout l'art de Lustre concentré dans cette dizaine, soustraite à la gravité, au grave, à la pesanteur. Un splendide hommage à la nature, à son caractère mystérieux, impénétrablement.


Il y a d'abord ce retrait des vocaux agressifs n'agissant plus que comme une lointaine rafale suggestive, sur une scène forestière un 25 décembre 2018 en Suède, où floconnent de glaciales notes éléctro-impressionnistes, jouées en boucle et venant se déposer comme la neige sur des nappes de synthés mélanco et purgatifs. L'estomac retourné, l'écoute en est facile, mais profonde et, ce tube, puisqu'il en est un, est probablement un des rares morceaux de Black Metal qui rendent la méditation possible. Bref, la classe.

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Alpenpässe (‘Col des Alpes’) du groupe américain de Black Metal Minenwerfer, s’empare du thème de la première guerre mondiale, par le prisme d’une troupe d’élite – les chasseurs alpins ou leur équivalent allemand, au contact de cette nature grandiose… traduisant ses montées d’adrénaline suivies de chutes vertigineuses.
Les Alpes, autant symboles de défis pour l’aspirant à la verticalité, que montagnes russes d’espoir au désespoir bien humains. Les vocaux sont très très très sombres, même pour les canons du genre, voix étouffée, éructante, jamais ridicule. Des morceaux d’hantologie également, quelqu’épar enregistrement de chant militaire allemand, en extradiégétique, ou, avec Tiroler Edelweiss, diégétique. Discrètement progressif, indéniablement. Et quand survient Withered Tombs, la martialité, d’une noirceur absolue, écran final.

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Pivot de la scène cascadienne, Wolves In the Throne Room frappe fort avec Diadem of 12 Stars. En départ de côte, ça reste du Black Metal, donc il ne faut pas s’attendre à des structures hyper-complexes, WITTR parvient cependant, à s'engouffrer dans la fissure. Depuis cette fragile allégeance à un metal corsé, il propose une recette innovante, équilibrée entre complexité progressive et répétition folk. Tout l’album Diadem n’est que noirceur frénétique, plus on s’approche de la fin, plus les battements deviennent erratiques, comme arythmiques, plus ça patine dans des sables mouvants, hormis à un moment, capital, puisqu’il s’agit de la toute fin de l’outro, le chanteur se livre alors à une ultime lutte avec la chanteuse, avant délivrance, la féminité ainsi mise en exergue, est perspective de salut, et ouverture vers la transcendance.

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Atropos de l’américaine Vouna ne fait rien comme les autres : les blackeux cantonnant les voix féminines à la cuisine peuvent partir, Vouna ne recourt à une voix mâle – d’ailleurs très screech - qu’au début du second titre, le reste étant entièrement placé sous le signe de la sorcellerie. Cet album exhale un parfum de douce désuétude, qu’on le classe dans la case Doom, ou par chipotage : Black-Doom féminin. Apparemment assez cérébral, et jouant sur les textures sonores, la deuxième piste atteint le comble du désespoir. La performance lyrique de sa chanteuse, m'envoute un peu plus à chaque écoute. Ô chant des dryades !

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Bergtatt de Ulver, Ulver de manière générale, sont sans doute le Black Metal qu’il faut à ceux qui n’aiment pas le Black Metal. Black de facture assez générique, hormis le chant clair, mais pas nul, Bergtatt pose les jalons, amorçant la quête de styles des norvégiens d’Ulver, en le matinant d’accents folk, les mêmes qu’on retrouvera sur Kveldssanger. Je trouve cet album, immature, et sous le standard imposé par la période de la maturité, lorsqu’Ulver trouvera son style avec Shadows of the Sun.

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Si j’étais mauvaise langue, et s’il y avait un bémol à émettre à Kveldssanger, je dirais que, dès le premier titre, Ulver se retranche derrière ses limites, incapable de trouver mieux qu’un « Aaah» poussif qui traîne en longueur en guise de lyrics, d’autant que le norvégien est une langue imbitable qui sonne couleur locale, adéquatement au genre folk dans lequel s’inscrit l’album, mais pas très attrayant. N’empêche, Kveldssanger demeure un album touchant, subtil et sensible, qui mérite qu’on l’écoute.

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Certes, SOTS n'est pas un album de Black Metal à proprement parler. Mais l'influence est évidente.
Long de son étalement sur 40 minutes, mais sans lenteur inutile, Shadows of the Sun permet à Ulver de synthétiser tous les styles du passé, dans une nouvelle formule, à la particularité explicite, entre folk, electronica et ambient, pur moment de grâce et de poésie, contraignant ma volonté à son pouvoir cathartique, l'annihilation est totale.

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Un an est passé, et j’écoute toujours lhum'ad'sejja, dans une veine résolument plus punkoïde que ses autres projets, un des plus longs et cohérents soit-dit en passant.


La mélancolie laisse place à un cocktail explosif, dont l’énergie folle, loin de s’essouffler sur la longueur, monte crescendo. Presque pas de synthétiseurs, des vocaux plus emo que jamais, et cette énergie enthousiasmante, avec laquelle l’artiste décharge sa rage, une rage positive, quasi-euphorique et survitaminée, là où les cris sont réduits à une ou deux onomatopées, jusqu’à la hachure, un peu comme si on étendait le Uw des premiers Celtic Frost à tout un morceau. Alors que des riffs jouent en boucle quelques accords colorés, des compos plutôt sophistiquées donnent le change. Et pour la première fois, ce qui ressemble à des vocaux féminins sur qilahhqhja... En revanche, je zappe le dernier titre.

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Det Som En Gang Var pose les fondements, de ce qui sera le meilleur album de Burzum, à mon sens. Un groove terriblement efficace, presque dark folk, ne se révélant que successivement, comme un chemin de forêt plongé dans l’obscurité. Il n’y a pourtant que quatre morceaux, les plus intéressants étant l’intro et l’outro, la dernière piste fait un peu beaucoup penser à de l’ambient cosmique.

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Si j’étais mauvaise langue, bis, je dirais que Filosofem de Burzum est légèrement surcôté en raison des frasques de l’auteur, ça reste un grand moment pour le Black Metal des années 90, un pionnier du Black atmosphérique, je ne remets pas cela en cause. Mais il manque des textures plus épaisses, l’approche en est trop minimaliste, palpable, le jeune âge de son auteur, palpable sa rage adolescente. En revanche du point de vue de la composition pure, ma considération est plutôt la suivante : mais quel colossal talent !

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Le growl faisant place nette au chant clair, sur Fallen, Burzum réalise un de ses derniers grands albums. Dynamique des premiers albums oblige, Fallen suit la courbe de la vie de Varg Vikernes, sa sortie de prison. Elégiaque, résolument, comme l’illustre la peinture de Bouguereau, empreinte de paganisme et de romantisme. Difficile de ne pas faire un parallèle entre la thématique de la chute d’un homme vers le bas, et la vie de l’auteur. Les compositions, toujours aux petits oignons, Varg semble avoir mûri, l’âge aidant. Passionnant ! Piste favorite : Jeg Faller, bien sûr.

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Avec Algleymi, Misþyrming fait un Black Metal parsifalien, exaltant puissance et vélocité, des riffs addictifs, plus évidents que sur le précédent, plus épiques, des compositions maximalistes et entraînantes, au départ, plus brouillamineuses, par la suite. La guitare y retrouve ses lettres de noblesse, puisque pas de synthés. Forte d’une véritable personnalité, singulièrement, la voix chante en icelandic, et ça sonne plutôt bien. Toutefois, je préfère la première moitié au reste.

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Autre production islandaise à la retorsité ? retorsitude ?… sans équivalent, les chenilles écaillées de Naðra déchargent énergiquement leur acide caustique. Les titres des morceaux jouent, à ce qu’il semblerait, sur les assonances de Fjallið Sál Falið Sár Fallið, plutôt original… Les mélodies sont, comme je l’affirmai, tordues, et en guise de chant, il n’y a plus que moult hurlements des tripes, nerveux as punk.

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Guitare-batterie-voix. Une heure absolument claustrophobe. D’une touffeur totale méphitique et raw. Vite, de l’air... même la voix essoufflée, encrasse l'atmosphère empuantie,… in extremis, une lucarne qu’ouvrent les synthés, comme un rayon de lune à travers l’issue de la grotte où nous suffoquions l'heure durant... ouf.

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Transilvanian Hunger agresse les formes au présent, de ses formes agressives, dépassant la temporalité des formes, vers des formes intemporelles de représentation. Sens aigu de l’approximation, science exacte de la laideur, calcul balistique de ses effets, fondent l'excellence de cet album et l'inscrivent parmi les modèles du genre.

Deux weirdos dans un shithole scandinave, des rituels de nuit, la nuit en Norvège, dans une forêt sombre, où la neige tombe. Magistralement, tout sauf évident et capillotracté, qui pourtant, s’impose dans sa simplicité crue et cruelle. Œuvre profonde, capable de parler à l’âme humaine, malséante, de bouleverser les sens, évocatrice, sans forcer l’émotion brute, accomplie, mais en accentuant l’expression personnelle jusqu’à la folie. Noircissant du parchemin, abîmant les cordes vocales. Réussite abyssale.

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Il était une fois, dans une terre lointaine, un monde merveilleux de dragons de glace, où la saison de gel, éternelle… Le fantastique avec cette perle d’album, qu’est At the Heart of Winter, c’est son brio à rendre épique un sujet aussi trivial que l’hiver. Je sais qu’accorder de l’attention au temps qu’il fait, fait toujours partie des sujets de préoccupations, mais bon, l’hiver, quoi… c’est du black atmosphérique, assez compact, rude et rigoureux comme la saison froide, il faut le signaler, mais qui s’aère par moments, contrairement à Pure Holocaust par exemple, chaque morceau participe de la cohésion du tout, sans filers à noter, et l’enchaînement fait partie des plus réussis en la matière, le superbe morceau-titre, arrivant dans le dernier quart, dose bien l’équilibre power violence – ambient. Quant au dernier titre, il est des plus engageants.

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L’ouverture, mélodique, immortalise Dissection, posant le cadre funèbre où guerroient les options philosophiques du frontman. Judicieusement, le parallèle avec sa santé psychique fragile est fait. Quel génie de composition ! En dépit du mépris qu’inspire sa misanthropie partagée par nombre pairs, y a pas dix albums de ce calibre dans tout le Black Metal.

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Peut-on écrire l’histoire en écrivant son récit ? Je songe à cette question tandis que je communie une fois encore à l’introduction de ‘Blood In Our Wells’. Au tour de Furrows of Gods, au son saturé, même pour du Black Metal, dont les accents épiques tendraient à me faire répondre à la question initiale par l’affirmative. Oui, la musique des Ukrainiens derrière Drudkh marque les esprits, visuellement même, elle donne envie de croire aux sentiments les plus nobles et louables, il n’y a pas de travail sur les pulsions basses, que la rage d'en découdre, l'esprit guerrier, le sang. La construction de Drudkh serait-elle du sentimentalisme national ?

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Pénitence du monde moderne. Eternel retour d’une nature animale. Hommage à la tradition poétique. Mis en scène par Famine et sa bande. Maldoror n’est jamais loin, hurlant arraché, l’angoisse d’être, à cœur de dire la vie qui brûle.

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Poésie insurrectionnelle de Gilets Jaunes mentaux, qui cassent des trucs, embrasent la ville dans leur tête. Tributaire d’un héritage rock, chansonnier et poète, Famine du KPN, a plusieurs cordes à son arc. L’ordure à l’état pur multiplie les moments de bravoure, le contenu n’en est pas moins délictuel. Les sonorités en sont plus "urbaines". Haineusement attaché au terroir. Eloge de la bassesse. Viscéral.

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Dornenreich est un groupe autrichien de Black avant d’être un groupe de Folk, pourtant il apparaît que, loin d'être un groupe de Black traditionnel, il propose une musique hétéroclite. Cela se sent à l’écoute du second titre, Der Hexe flammend’ Blick, aux arpèges magnifiques de ses parties folk. Lorsque le band durcit sa musique, il propose une formule délicate, parfaitement équilibrée entre rudoiement et flatterie auditives. Trois modalités au chant : chuchoté, chanté, crié. Cette variété de chants fait la réussite du morceau.

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Dissonant Black dont les cordes ne sont pas sans évoquer une sitar. Úpal n’est jamais gratuitement expérimental, comme l’usage d’un vocoder sur Opàl, justifié par son psychédélisme, comme des volutes mystiques.

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Rôdé à sa manière singulière, De Mysteriis… jouit d’un chant de gargouille, grotesque et marginal... Une cathédrale burlesque, inversant tous les repères sens dessus dessous. Chaque morceau sert d’écrin à la gerbe d’Atilla. Ainsi qu’un jeu frénétique de batterie (‘Funeral Fog’). Apostasie parfaite.

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Enfant épris de punk, sa tension entre quête d'absolu et économie de moyens se retrouve chez Quorthon. Ce dernier voulut faire la musique la plus radicale jamais conçue, avant de revenir à des fondamentaux comme le thème viking exploité dans Hammerheart. D’une architecture plus classique, la grandiloquence de Hammerheart a des reflets wagnériens, plus maximaliste que jamais. Son amplitude réconcilie Bathory avec l’épopée.

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Winterkälte invite au silence et au calme de l'esprit, comme la neige repose les yeux, qui se déposent, comme la neige, la neige dans les yeux, sur la neige, quand il neige, la neige, comme la neige, la neige, neige