Cover Junichirō Tanizaki au cinéma

Junichirō Tanizaki au cinéma

Tanizaki homme de lettres et de scandales attire le cinéma. Les studios mettent en avant les tragiques histoires d'amour dans des mélodrames épurés de "l'esthétisme décadent qui fait l'apologie de la beauté dans le mal"* des œuvres originales pour ne pas heurter le public et la censure. Puis en perte ...

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34 films

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Okoto et Sasuke
7.4

Okoto et Sasuke (1935)

Okoto to Sasuke

1 h 40 min. Sortie : 15 juin 1935 (Japon). Drame

Film de Yasujirô Shimazu

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

Shunkin, 1933. L'approche de studio. Le titre donne le ton et met en avant l'humain par les noms des personnages plutôt que le "pseudonyme" de Professeur du roman. L'apparition de l'aveugle Okoto/Shunkin, au début du parlant, précédée de sa voix autoritaire impressionne mais le personnage s'adoucit rapidement jusqu'à exprimer ses sentiments.
Le scénario tempère toute la relation sadomasochiste maître-élève et met l'emphase sur le mélodrame. La forme du roman, à la recherche d'un effet de vérité en mêlant visite de lieux et témoignages oraux centrés sur le "couple", se normalise en un film linéaire. Un voile pudique est posé sur le quotidien (des WC au bain) et les personnages satellites sont platement épaissis pour compenser. S'ajoutent des lieux de carte postale (cerisiers en fleurs, auberge en fête avec geisha et danses) qui insistent artificiellement sur le romanesque. Le film conclut en un geste romantique quand le livre prolongeait la banalité du quotidien.

Tanizaki au moment de la production du film : "Si je me chargeais d'en faire l'adaptation cinématographique, je pense qu'à travers Sasuke devenu aveugle en se crevant les yeux, je dépeindrais joliment Shunkin dans le monde d'illusions qui est le sien. Et si j'essayais de faire progresser l'histoire en mêlant ce que j'aurais joliment dépeint avec la réalité, je ne sais si ça marcherait vraiment, mais si je réussissais, je suis sûr que cela donnerait quelque chose d'intéressant."
Ce film propose bien une vue subjective du nouvel aveugle, mais montrant à l'inverse sa course dans un couloir à travers ses yeux comme s'il voyait encore... J'ai rarement vu une idée aussi con.

Okoto et Sasuke

Okoto et Sasuke (1961)

Okoto to Sasuke

1 h 34 min. Sortie : 1961 (Japon).

Film de Teinosuke Kinugasa

Homdepaille a mis 3/10.

Annotation :

Un remake académique et atone du film de 1935 avec sa sur-utilisation des recadrages par les portes coulissantes, ses plans d'ensemble au ras du sol et une interprétation sans prises de risque de Yamamoto. Les grandes scènes du livre sont ternes et aplaties au niveau du quotidien.

Sanka

Sanka (1972)

1 h 52 min. Sortie : 29 décembre 1972 (Japon). Drame

Film de Kaneto Shindō

Homdepaille a mis 7/10.

Annotation :

Shunkin. Bonne adaptation même si l'histoire commence à l'âge adulte et perd l'opposition enfant gâtée, adolescent gauche et soumis. Quelques dialogues surlignent l'état d'esprit du dominé. Une séquence d'amour douce et rêvée casse la distance du roman, elle correspond à l'idée qu'expose Tanizaki dans la citation au-dessus. Le sadisme physique est atténué ou maladroit.

Bref ce n'est pas comme le livre mais ça reste bien. Shindō cadre parfaitement les rapports de domination. Laisse le temps à l'étrange de s'installer sans en faire trop. La bonne, "nouveau" personnage, prend une importance intéressante dans les rapports de domination (mix du couple : la condition sociale faible de l'homme et la sexualité affirmée menant les hommes comme Shunkin). Et le réalisateur se met en scène comme dans son docu sur Mizoguchi renouvelant ainsi l'approche "réelle" de la narration du roman qui présente témoignages et documents écrits.
Seul petit défaut l'actrice. Elle a bien une tête d'enfant gâtée mais il lui manque quelque chose, un air plus hautain ou du charisme dans sa violence sereine.

A Portrait of Shunkin

A Portrait of Shunkin (1976)

Shunkinsho

1 h 37 min. Sortie : 25 décembre 1976 (Japon).

Film de Katsumi Nishikawa

Homdepaille a mis 4/10.

Annotation :

Après la parenthèse violente et sexuée des années 60, les studios sont revenus à des adaptations très sages.
Dans la lignée de l'adaptation de 1935, ce Portrait de Shunkin a des angles encore plus arrondis. Le rôle éponyme n'est plus une enfant gâtée, capricieuse et autoritaire et est jouée par une pop star à la voix douce. Les amants se prennent dans les bras et s'échangent des mots doux dès les 15 premières minutes. Et il n'y a plus que la voix off pour évoquer la "fierté" de Shunkin.

Un amour insensé

Un amour insensé (1949)

Chijin no ai

1 h 29 min. Sortie : 16 octobre 1949 (Japon).

Film de Keigo Kimura

Homdepaille a mis 3/10.

Annotation :

Les débuts fracassants de Machiko Kyō dans ses premiers rôles à Daiei. Provocatrice, peu vêtue, et roublarde, elle joue impeccablement la fille moderne de Tanizaki. Cette fois-ci, la normalisation va au rôle masculin moins dominé, plus digne il refuse les humiliations subies dans le roman, l'impuissance gommée : son amour pour Naomi n’est pas que fétichiste et est consommé.
Après 1h fidèle, bien que moins dépravée, la fin extrêmement normative : repentance de la chatte sauvage soumise à son mari, s'oppose complètement au déroulé rigolard du roman.

La Chatte japonaise
6.5

La Chatte japonaise (1967)

Chijin no ai

1 h 32 min. Sortie : 29 juillet 1967 (Japon). Drame

Film de Yasuzō Masumura

Homdepaille a mis 7/10.

Annotation :

Un amour insensé, 1928. Titre génial, il me semble qu'il a eu un petit succès dans les salles de quartier françaises. Pas étonnant, de la nudité assez franche pour du film de gros studio japonais et un rapport de domination joyeusement traité entre un esclave impuissant du capitalisme et sa jeune chatte pleine de vitalité.

Naomi

Naomi (1980)

1 h 43 min. Sortie : 15 mars 1980 (Japon). Érotique

Film de Yoichi Takabayashi

Homdepaille a mis 5/10.

Annotation :

Un amour insensé. Ici renommé d'après le personnage de jeune fille moderne devenu culte. Fidèle dans les rebondissements. Malheureusement les personnages et surtout la fin heureuse, sans rapport de dominé-dominante, sont modifiés pour plus de platitude.
Un cas particulier d'érotique friqué paralysé par les enjeux financiers et la peur d'une censure désastreuse. Les scènes de sexe sont peu osées et très prudemment floutées. Ce sont deux longues scènes de danse par Mizuhara qui retiennent l'attention.

Irezumi, du même réalisateur en 1984, a bien entendu quelques similitudes thématiques avec Tanizaki.

Miss Oyu
7.3

Miss Oyu (1951)

Oyû-sama

1 h 35 min. Sortie : 16 mars 2016 (France). Drame

Film de Kenji Mizoguchi

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

Le Coupeur de roseaux, 1932. Typiquement l'adaptation de studio (avec talent). De la retenue sur le masochisme des personnages et une emphase sur le sirupeux qui découle en mélodrame (ce que l'auteur évitait).
Comme d'autres, il gomme la narration imbriquée de récit dans le récit. Dans Souvenirs de Mizoguchi, le scénariste Yoda rejette la faute sur le patron de Daiei Kyoto qui trouvait l'idée de flash-backs superposés trop compliquée.
De mémoire floue, à 40 ans passés Kinuyo Tanaka joue mieux l'autorité séductrice que dans Shunkin.

Okuni et Gohei

Okuni et Gohei (1952)

Okuni to Gohei

1 h 31 min. Sortie : 10 avril 1952 (Japon). Drame

Film de Mikio Naruse

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

Tiré d’une courte pièce de théâtre de moins de 20 pages. Allongé, le film respecte l’histoire en reconstituant les allusions au passé. Comme les autres films, cette pièce conçue pour moquer l’hypocrisie chevaleresque devient surtout une histoire d’amour entre une veuve et son serviteur. Malgré les ajouts sentimentaux, l'impertinence de Tanizaki ressurgit habilement à la toute fin et donne une belle touche d'amertume à la romance et ramène Okuni à une manipulatrice Tanizakienne.
Belle scène de théâtre de marionnettes où Okuni se retient de lancer des regards à son serviteur, sinon c'est un peu filmé en gros plan permanents.

Le Chat, Shozo et ses deux maîtresses

Le Chat, Shozo et ses deux maîtresses (1956)

Neko to shōzō to futari no onna

1 h 46 min. Sortie : 9 octobre 1956 (Japon). Comédie dramatique

Film de Shirô Toyoda

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

1956 et une adaptation qui ne lisse pas les méchantes manières de l'auteur comme l'amour des femmes modernes, l'homme dominé et le fétichisme. Plage, maillot de bain, petites tenues, léchage de pieds... Probablement tourné après le scandale de La Clef et le succès de Passions juvéniles, le film en rajoute même un peu dans la sensualité et l'opposition femme traditionnelle et moderne moins présentes dans ce roman humoristique que dans d'autres Tanizaki.
Dommage que la partie entre la première épouse seule avec la chatte soit réduite. Le parallèle domestication du chat et celle de la seconde épouse fonctionne moins. Et la fin fait un peu trop cinéma : musique à fond, ajoute une scène de bagarre et des cris au lieu du simple final sur la solitude et le malheur conjugal.

L'Étrange Obsession
6.6

L'Étrange Obsession (1959)

Kagi

1 h 47 min. Sortie : 23 juin 1959 (Japon). Drame

Film de Kon Ichikawa

Homdepaille a mis 5/10.

Annotation :

La Clef, 1956. Une femme pudique impose la pénombre pour cacher son corps nu à son mari. Ce dernier profite de ses évanouissements (peut-être simulé) pour l'inonder de lumière. La narration, souvent constituée des journaux intimes des protagonistes, nous place en voyeurs (d'autant plus qu'ils sont centrés sur leur sexualité). Sentiment que les adaptations n'arrivent pas vraiment à reproduire.
Astucieusement, L'Étrange obsession supprime cet élément central mais peu cinématographique du journal tout en restant fidèle (bien qu'épuré de l'érotisme frontal). Fidèle, sauf la fin qui ajoute une séquence morale pour punir les personnages manipulateurs. Peut-être un pas de côté pour éviter tout scandale après les récents remous causés par le roman accusé de pornographie dans les milieux littéraires et son interdiction discutée à l'assemblée nationale.

Ichikawa et Miyagawa éclairent avec contraste le film entre des intérieurs bourgeois, ternes et sombres et le corps d'un blanc éclatant. Cette esthétique s'impose aux adaptations suivantes de l'auteur à la fois de L'Éloge de l'ombre mais aussi de descriptions précises des peaux blanches de femmes fatales.

The Key

The Key (1974)

Kagi

1 h 30 min. Sortie : 4 mai 1974 (Japon). Érotique

Film de Tatsumi Kumashiro

Homdepaille a mis 4/10.

Annotation :

Décevant pour Kumashiro, trublion du cinéma érotique, qui semble écrasé par le roman qu'il suit à la lettre et par la première adaptation dont il reproduit sagement l'esthétique.

La Clé
6.1

La Clé (1983)

La chiave

1 h 50 min. Sortie : 6 juin 1984 (France). Érotique, Drame

Film de Tinto Brass

Homdepaille a mis 5/10.

Annotation :

Déplacer le roman de Tanizaki dans l'Italie fasciste est plutôt malin pour ce personnage masculin se repliant dans le sexe (comme Tanaka et Oshima l'on fait) et sa femme pudibonde tient sa place dans l'Italie catho et fasciste. Mais c'est peu creusé et Brass fait ce qu'il a l'air de savoir-faire : un hédonisme déconnecté du reste. La mère change très vite de mentalité pour ce balader cul-nu, laissant peu de place à une lutte interne et jetant à la poubelle le jeu de dupes. Pareil pour la fille fasciste et froide qui manque d'une profondeur qui la rendrait plus inquiétante.

Une adaptation qui prend de grosses libertés mais a sa propre cohérence et reste fidèle à l'idée générale et à la trame.

The Key

The Key (1997)

Kagi

1 h 35 min. Sortie : 18 octobre 1997 (Japon). Drame

Film de Toshiharu Ikeda

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

Excellente idée d'imager la femme à "organe exceptionnel" du roman pour le premier film profitant du (léger) relâchement de la censure japonaise. Ikeda n'explore pas en profondeur cet organe mais la révélation fait la blague au climax du film et "on se poile bien".

The Key

The Key (2015)

1 h 25 min. Sortie : 1 janvier 2015 (France). Drame

Film de Jefery Levy

Homdepaille a mis 1/10.

Annotation :

Le roman de Tanizaki croise deux journaux intimes de mari et femme et le film reprend cette forme par la voix off le tout illustré de court plans vaguement illustratifs des situations et complètement bidouillés numériquement pour donner le sentiment du... euh rêve mêlé au film de famille peut-être. Flashs, filtres couleurs, tremblotements et mention spéciale aux effets "vieille pellicule : poussières + rayures" complètement foireux (surement pris d'un effet basique d'un logiciel de montage pour vous dire le niveau général).

Le texte lu avec morne est catastrophique. Il suit la trame du Tanizaki mais réduisant au strict minimum tout ce qui n'a pas trait aux coucheries qui sont décrites comme le pire roman rose. Par exemple les petits détails comme la coquetterie des boucles d’oreilles du livre deviennent “une tenue chaude et peut-être inappropriée”

Passion
6.7

Passion (1964)

Manji

1 h 30 min. Sortie : 25 juillet 1964 (Japon). Drame

Film de Yasuzō Masumura

Homdepaille a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Svatiska, 1928. Un film déplaisant au 1er abord car verbeux et à l'interprétation affectée de Wakao. Cette dernière déstabilise et pourtant colle parfaitement à l'un des plus mystérieux personnages de Tanizaki. Alternant moue, sourire peu naturel, fausse crise de larmes... Mitsuko manipule le monde entier à des fins prétextes. Elle devient gourou d'une secte vouée à la vénération de son corps en forçant ses victimes à se soumettre et à s'entredévorer dans une passion vampirique. Wakao transmet aussi quelques subtilités (par le regard notamment) suggérant une personnalité pas si assurée que ça. Nuance qui manque cruellement aux interprétations suivantes du personnage.
Dans la morgue du film aux couleurs ternes, des décors aux vêtements, où seule ressort la peau de Wakao divinité toc et étincelante (un contraste moins marqué mais dans l'idée de L'Étrange obsession).

On retrouve l'ironie de l'auteur à suivre avec plaisir ce gourou démoniaque et hédoniste. Son grotesque, par exemple un alignement de pieds à l'avant-plan dans un passage tragique. Et une belle illustration de l'enfermement passant d'un amour au grand jour (avec plusieurs personnes à l'écran, des extérieurs) au repli sur soi, sans plans larges, la caméra fixée aux personnages, l'environnement s'efface pour des chambres sombres et dépouillées à la manière du peu de descriptions matérielles du roman. Il conserve aussi l'idée d'un récit rapporté oralement et donc soumis à caution.

Manji

Manji (1983)

1 h 35 min. Sortie : 12 février 1983 (Japon). Drame

Film de Hiroto Yokoyama

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

Adaptation libre de Svatiska. Plutôt un jeu post-moderne et méta sur l'œuvre en la renversant et jetant quelques références pour souligner les variations. Tout cela donne lieu à des comparaisons malheureuses pour le film tombant dans un triangle amoureux banal et un questionnement des relations de couple (sur ce point, la fin a une sacrée gueule de théâtre d'avant-garde où le triangle amoureux se la joue interrogatoire de police), loin d'avoir l'originalité de Tanizaki. Au final le discours est le même (l'ennui se jetant aveuglement dans la passion), enrobé dans une intrigue d'adultère plus fade.
Pourtant cet érotique luxueux et intello tient debout avec de bonnes scènes : au cimetière où la femme au foyer dialogue au futur avec sa jeune amante, négation du réel à tenter d'ensevelir la mer.

Berlin Affair
5.2

Berlin Affair (1985)

The Berlin affair

2 h 01 min. Sortie : 23 avril 1986 (France). Drame

Film de Liliana Cavani

Homdepaille a mis 3/10.

Annotation :

Svastika. L'européanisation du roman inverse l'attrait pour la jeune femme moderne à une Japonaise plus traditionnelle. Pourquoi pas, mais l'on tombe vite dans les tropes de la représentation asiatique et le côté vénéneux en souffre (l'actrice est médiocre en plus). La transposition dans l'Allemagne nazie aurait pu être une bonne idée de parralèle entre la passion dévorante et l'idéologie aveugle mais ça ne semble pas l'intention du film qui se sert plutôt de ce contexte pour appuyer la stigmatisation des homosexuels (alors qu'un article de journal suffit dans le roman). Le problème vient de cette contextualisation permanente qui normalise les personnages, retire beaucoup de mystère et ignore complètement la mécanique de repli sectaire que Masumura illustrait parfaitement. Ne reste qu'un banal trio amoureux sagement illustré et un peu ridicule dans ses tentatives d'érotisme.

Manji

Manji (2006)

1 h 20 min. Sortie : 25 mars 2006 (France). Drame

Film de Noboru Iguchi

Homdepaille a mis 3/10.

Annotation :

Plate et sage adaptation érotique.

Tatouage
7.2

Tatouage (1966)

Irezumi

1 h 26 min. Sortie : 22 décembre 2004 (France). Drame, Thriller

Film de Yasuzō Masumura

Homdepaille a mis 10/10, l'a mis dans ses coups de cœur et a écrit une critique.

Annotation :

Le Meurtre d'Otsuya 1915. L'adaptation la plus intelligente, surtout dans son intégration de la courte nouvelle Tatouage (1910). Les autres films échouent à créer une position de voyeur, celui-ci y arrive par l'intermédiaire du tatoueur à la fois réalisateur et spectateur du drame. Et en déplaçant une séquence de milieu de film en introduction, les paroles orgueilleuses d'Otsuya et le tatouage douloureux sur son dos qui lui arrache des gémissements de jouissance rendent impossible de la considérer "femme-enfant" quand la narration reprend chronologiquement. Il transforme le récit contre-initiatique du Meurtre d'Otsuya qui devient, sous l'influence de Tatouage, un accomplissement dans la luxure contre le monde encore féodal et déjà bourgeois.

Miyagawa, directeur photo de L'Étrange obsession, reprend la même idée de contraste entre un monde sombre et décrépit et la protagoniste moderne, force vitale et lumineuse de l'image. Il y ajoute cette fois une couleur : le rouge, donnant encore plus de présence à Otsuya.

Le Journal d'un vieux fou

Le Journal d'un vieux fou (1962)

Fûten Rôjin nikki

1 h 38 min. Sortie : 20 octobre 1962 (Japon). Comédie dramatique

Film de Keigo Kimura

Homdepaille a mis 3/10.

Annotation :

1961. Comme La Clef, le récit de pulsions érotiques sous la forme d'un journal intime nous plonge à l'écrit dans une situation de voyeur. Et un film fidèle mais médiocre peut difficilement transmettre cette sensation. Plutôt que le point du vue de l'égoïste vieillard libidineux la mise en scène plate produit une fausse neutralité qui, j'imagine pour la plupart, nous conduit a une empathie naturelle pour la belle-fille. Beaucoup moins original, l'on s'ennuie avec elle lorsque le vieux fou tripote son corps alors que le roman nous plongeait dans l'excitation troublante d'un égoïste impotent.

Ayako Wakao et son insouciance dans sa façon de jouer la manipulatrice donne à ses personnages Tanizakien la nuance nécessaire. Dans ses rôles les plus troubles un intéressant vice naturel et enjoué se dégage d'elle.
Ce mauvais film souffre de la comparaison avec d'autres rôles similaires. Comme La Bête élégante sorti la même année, visage public de la femme vénale quand Le Journal d'un vieux fou serait celui de l'intime. Ou les films de Masumura incomparables de maîtrise. Cela saute aux yeux dès la première utilisation de doublure peu crédible. Deux plans, le bas du corps ou la tête, soulignant la séparation bien distincte là où Masumura détourne l'attention de la substitution de l'actrice par de nombreux gros plans du corps érotisé.

Daydream
6.5

Daydream (1964)

Hakujitsumu

1 h 33 min. Sortie : 21 juin 1964. Drame, Fantastique, Épouvante-Horreur

Film de Tetsuji Takechi et Joseph Green

Homdepaille a mis 3/10.

Annotation :

1er film purement érotique. Carton d'intro avec un message de Tanizaki pour dire sur la base du scénario que sans la censure en 1926 c'est ce qu'il aurait écrit. Il ajoute (je paraphrase) que l'actrice est baisable. Il a vite déchanté devant le résultat d'après Donald Richie dans Le cinéma japonais.
Le film fait 1h30 et tout dure incroyablement longtemps. 1 minutes de crachat de fluides en gros plan. 1 minute pour tout en fait. Et ce tortionnaire rajoute des ralentis en plus. Je suis curieux de comparer la nouvelle car l'histoire ne correspond pas aux habitudes de Tanizaki. Au contraire des femmes fatales et hommes masochistes, il s'agit d'un jeune homme qui fantasme les sévices que peut subir en couple la femme qu'il vient de croiser.
Toute la symbolique de la soumission de la femme par l'homme est tellement surlignée que je soupçonne une exagération pour masquer la misogynie globale. Les tortures sont complaisantes, ce qui ne me dérange pas dans l'exploitation mais rend la malhonnêteté du discours par-dessus difficilement acceptable.

An Empty Dream

An Empty Dream (1965)

Chunmong

1 h 11 min. Sortie : 3 juillet 1965 (Corée du Sud). Drame, Épouvante-Horreur

Film de Yoo Hyun-Mok

Homdepaille a mis 5/10.

Annotation :

Remake de Daydream plus qu’une autre adaptation de Tanizaki, mais soyons exhaustif. Toujours la même association d’idées sur les fluides, à noter que les outils du dentiste deviennent mécaniques aliénante du prolétariat à l’usine et la fin dans un magasin est moins marquée dans cette version. Cela s’explique peut-être par le fait que l’économie de la Corée n’ai pas encore connu la même évolution consumériste. Plus de talent à la réalisation qui vire à l’expressionnisme avec plus de réussite que son modèle. Et moins de complaisance dans la torture de la femme mariée maintenue en cage par le diabolique époux.
La censure Coréenne semble plus dure qu’au Japon, la nudité étant couverte d’une nuisette et un jump cut résout le problème d’apparition involontaire de tétons.

Day Dream

Day Dream (1981)

Hakujitsumu

1 h 50 min. Sortie : 12 septembre 1981 (Japon). Drame, Fantastique, Épouvante-Horreur

Film de Tetsuji Takechi

Homdepaille a mis 2/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Takechi, pionnier du cinéma érotique des années 60, déjà par l'intermédiaire de Tanizaki, revient dans les années 80 en pionnier du cinéma pornographique par ce remake. Après 20 ans de cinéma érotique désormais confortablement installé dans le pays, cette approche peut s'avérer un renouveau judicieux des adaptations de l'auteur du sulfureux La Clef.
Ce n'est malheureusement qu'un remake à l'identique. Toujours aussi long avec moins d'idées et moins de vêtements.

Daydream

Daydream (2009)

Hakujitsumu

1 h 20 min. Sortie : 5 septembre 2009 (Japon). Drame, Érotique

Film de Kyôko Aizome et Shinji Imaoka

Homdepaille a mis 2/10.

Annotation :

L'actrice du film porno de 1981 fait une énième adaptation de la nouvelle. Très soft. Le changement principal transforme le voyeur en policier et donnant des airs de polar noir. Des figures plutôt, tant c'est filmé à la japonaise des années 2000, moche et amateur, et qu'il est impossible d'y trouver une ambiance.

L'Empire du Vice

L'Empire du Vice (1983)

Oiran

1 h 43 min. Sortie : 19 février 1983 (Japon). Romance, Érotique

Film de Tetsuji Takechi

Homdepaille a mis 5/10.

Annotation :

Dans la continuité pornographique de Day dream. Deux nouvelles, Tatouage et La Tumeur à face humaine sont la base d'une adaptation libre.
La première partie, reconstitution historique chatoyante et décadente, ressemble un peu à l'adaptation de Masumura en 1966 avec ses contrastes entre la pénombre, la lumière et le rouge vif et son combat au clair de lune.
Sans cet étalage de pognon, la 2de partie dans deux chambres vides ne fait plus illusion sur le réalisateur médiocre qu'est Takechi. Acteurs occidentaux en gros porcs poilus, des décors laids et une mise en scène digne du 1er porno venu, le floutage en plus (je passe sur la parodie de L'Exorciste).
Hormis donc "l'esthétisme décadent" de la première partie, la force des textes est ignorée. De Tatouage plus grand chose de la force obsessive. Et Takechi reprend l'élément mineur de La Tumeur, soit une banale histoire de fantôme vengeur, laissant de côté toute l'intrigue plus originale sur le pouvoir de suggestion des images.

Le Temple du diable
7.1

Le Temple du diable (1969)

Oni no sumu yakata

1 h 16 min. Sortie : 31 mai 1969 (Japon). Drame

Film de Kenji Misumi

Homdepaille a mis 6/10.

Annotation :

Mumyō et Aizen, courte pièce de théâtre. Kaneto Shindō est le scénariste qui comprend le mieux Tanizaki. Cela se remarque par petites touches discrètes, comme le fait que Kaede marche sur la pointe des pieds en révélant sa voûte plantaire. Pourtant il change le texte où la femme-"démon" part en riant tandis que l'homme se fait moine, la pièce se termine sur cette fin ambigüe et la promesse d'une répétition cyclique de la victoire de la femme sur la religion à chaque rencontre. Dans le film, Mumyō tranche la gorge de son amante avant sa conversion empêchant ce cycle, une fin plus morale. Peut-être que le studio (ou les auteurs) a considéré que laisser la meurtrière démoniaque vivante serait peu satisfaisant.

Les Quatre sœurs Makioka

Les Quatre sœurs Makioka (1983)

Sasameyuki

2 h 20 min. Sortie : 21 mai 1983 (Japon). Drame, Romance

Film de Kon Ichikawa

Homdepaille a mis 4/10.

Annotation :

L'adaptation de ce roman fleuve à la temporalité longue et délicate, construit en cycles, demande probablement des choix forts. Ichikawa concentre le film en quelques mois et sur le contraste Yukiko/Taeko, les deux dernières des quatre sœurs aux caractères différents. La 1ère traditionnelle subit timidement les propositions de mariage, la 2de indépendante et moderne passe d'amants en amants. Malheureusement les nuances du roman par détours, discrètes réactions, ellipses et scènes rapportées ultérieurement deviennent balourdement frontales pour nuancer les deux filles. Dès le début, la réservée Yukiko se montre sexuellement provocante envers son beau-frère. Un ajout bizarre en contradiction avec sa personnalité du livre, sûrement une référence à Tanizaki et sa 1ère belle-sœur. Le parcours de Taeko, femme moderne calme et indépendante du livre, est résumé en bête crise d'adolescente "Je voulais attirer l'attention". L'une des aînée Sachiko, point de vue central de l'histoire, s'efface faute "d'arc narratif" (un truc de cinéma minable), alors que l'on vivait les émotions à travers elle. Pas grave il n'y a plus d'émotions, tout se déroule en ligne droite laissant les tracas de côté (les nombreuses séparations familiales, deux grossesses et des désastres naturels...).

Les scènes bavardes s'enchaînent, alors que le roman n'est pas si dialogué. Peu de vie, tous les enfants disparaissent par exemple. Volontairement mortifère mais grossier comparé à la délicatesse du roman qui réussit à montrer la déliquescence dans la profusion. Les trop rares sorties du cocons sont mal amenées et le final ressemble à un happy-end pour rassurer les vieilles dames dans la salle, en contre-sens au roman. Seul l'érotisme larvé (bien qu'exagéré et ridicule dans certains cas : les jambes de Yukiko) correspond bien.

Le Roman de Genji

Le Roman de Genji (1951)

Genji Monogatari

2 h 32 min. Sortie : 2 novembre 1951 (Japon). Drame

Film de Kōzaburō Yoshimura

Homdepaille a mis 7/10.

Annotation :

Tanizaki passe des années à traduire le Dit du Genji en japonais moderne, et je crois qu’on peut considérer que tous les films après cela sont basés sur son travail. Il a un statut de superviseur sur cette luxueuse adaptation, aucune idée si le titre est honorifique ou sérieux. Quelques trucs rappellent l’auteur comme l’apparition en divinité d'une séductrice.

Tattoo

Tattoo (1984)

Irezumi

1 h 17 min. Sortie : 22 décembre 1984 (Japon). Érotique

Film de Chûsei Sone

Homdepaille a mis 5/10.

Annotation :

Peu de rapport, la nouvelle de quelques pages n'est qu'un prête-nom prestigieux pour ce roman-porno. On sent un vague rapprochement comme dans la version 1966 avec le Meurtre d'Otsuya, la tatouée se complait à faire tourner les têtes de ses proxénètes et clients, mais de manière bien imprécise et sans intérêt.
Bonne idée de transposer la courtisane obsédante en chanteuse pop. Et d'étendre son tatouage dorsal aux fesses et cuisses, ainsi visible dans toutes les positions (même allongée sur le dos grâce à l'obligée pose du bassin de biais pour cacher le pubis).

Homdepaille

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