Opéras : les incontournables

Une liste qui recense les opéras qui ont fait date. Liste à la fois personnelle et fondée aussi sur plusieurs articles sur le sujet, notamment un article paru dans la revue L'Eléphant, recensant les 10 opéras les plus importants. Cette liste est aussi l'occasion de s'intéresser aux formes de l'opéra ...

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12 albums

créée il y a plus de 7 ans · modifiée il y a plus de 3 ans
L'Orfeo
8.6

L'Orfeo (1985)

Sortie : 1985 (France).

Album de Claudio Monteverdi, Concentus Musicus Wien et Nikolaus Harnoncourt

Annotation :

1607

Castor & Pollux
8.8

Castor & Pollux (1993)

Sortie : 1993 (France).

Album de Jean‐Philippe Rameau, Les Arts Florissants et William Christie

Annotation :

1737

Le nozze di Figaro: Highlights
8.4

Le nozze di Figaro: Highlights (1985)

Sortie : août 1985 (France).

Album de Wolfgang Amadeus Mozart, Academy of St Martin in the Fields et Sir Neville Marriner

Annotation :

Probablement le plus célèbre opéra du compositeur. Composé avec le librettiste Lorenzo Da Ponte qui collaborera encore plusieurs fois avec Mozart, cet opéra s'inspire librement du Mariage de Figaro de Beaumarchais, pièce sulfureuse à la critique sociale acerbe. D'autant plus sulfureuse qu'elle était une pièce de commande pour l'opéra de Vienne, théâtre national. Mais l'empereur d'Autriche approuva et apprécia grandement l'oeuvre, contrairement à la légende véhiculée par le film Amadeus, notamment.

En effet, le Nozze di Figaro est une pièce largement comique (opéra buffa), dans la plus pure tradition de l'opéra italien. On y retrouve les personnages de nobles et de valets, et Chérubin, personnage androgyne, adapté pour être chanté par des castrats, comme cela se faisait au 17ème siècle (Farinelli fut le plus célèbre).

Mais derrière le ton léger de cet opéra au aspect de vaudeville où Mozart moque les tromperies du comte, la malice de Figaro et de Suzanne, il y a le génie musical. L'opéra est plein d'une créativité presque écoeurante. Les personnages se croisent formant duo, trio, quatuor, tutti infinis et délicieux, développés de longues minutes. La musique est un pur délice. Elle effacerait presque l'intrigue. Elle va même jusqu'à devenir un ballet, un spectacle chorégraphié et dansant, dans la pure tradition cette fois de l'opéra français qui raffolait de ce genre de fantaisie, preuve que Mozart casse progressivement les codes classiques. Pour ces raisons, Mozart révolutionne même le genre de l'opéra buffa car tout y est naturel, ample, musical. Il laisse libre court à son imagination musical, la musique devenant supérieure à tout le reste, même aux propos de la pièce.

Bien que très bien payé pour cette oeuvre de commande et un certain succès, Mozart ne parvint pas avec cette pièce à s'émanciper financièrement. Il faut dire qu'il était extrêmement dépensier.

Les passages les plus connus sont l'ouverture et le Voi Che Sapete de Chérubin, morceau d'une beauté cristalline, l'art lyrique le plus abouti. Tout est virtuosité chez Mozart. L'oeuvre est étourdissante. Mais pour ma part je lui préfère des moments plus intimistes comme le sublime Contessa Perdonno, morceau final de la pièce et de réconciliation où le comte demande pardon à sa femme dans un moment émouvant et grâcieux.

Don Giovanni: Highlights
8.7

Don Giovanni: Highlights (1987)

Sortie : 1987 (France). Classical, Opera

Album de Wolfgang Amadeus Mozart, Eberhard Wächter, Elisabeth Schwarzkopf, Joan Sutherland, Graziella Sciutti, Giuseppe Taddei, Luigi Alva et Gottlob Frick

Tom_Ab a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Cet opéra (1787) est le second que Mozart compose avec le librettiste Lorenzo Da Ponte, avec lequel il avait déjà fait le Mariage de Figaro et avec lequel il composera Cosi fan Tutte.

L'opéra est un mélange de ce qu'on appelle l'opéra seria (dramatique) et l'opéra buffa (comique). C'est au 18ème siècle et sous la musique de Mozart que la fusion de ces deux genres est définitivement assurée. Il en résulte un opéra complet, total, passant de la comédie à la tragédie en un rien de temps. L'histoire, évidemment, de Don Giovanni, ne fait que renforcer l'atmosphère douce-amère.

Don Giovanni est probablement l'opéra de Mozart le plus influent dans la musique classique. Wagner le qualifiera "d'opéra des opéras". Et pour cause, Mozart est l'un des premiers à exacerber le sentiment à ce point dans un opéra. Nous sommes pourtant encore loin de Wagner, l'opéra de Mozart comportant une part non négligeable de composantes de l'opéra napolitain, à commencer par la langue, le comique et laissant une large place à l'aria et une moindre au récital (partie parlée de l'opéra). C'est néanmoins l'oeuvre la plus sombre de Mozart qui se rapproche le plus de ce que deviendra par la suite l'opéra allemand, un opéra sérieux entièrement mis en musique.

La thématique de l'adultère, de la frivolité qui conduit à la mort est ainsi amplement développée mais le propos est aussi ironique car les libertins préfèrent mourrir que de céder à l'ordre moral. Lorenzo da Ponte était lui-même libertin, ami de Casanova, qui aurait selon la légende suggéré une partie de l'intrigue du livret.

En termes musicaux, l'opéra commence par un andante grave, lourd et sombre, un thème célèbre qui place d'ailleurs l'opéra sous le signe de la gravité puisque c'est le thème du commandeur, ce vieillard assassiné par Don Giovanni au début de la pièce qui viendra hanter Don Giovanni tout le long de la pièce jusqu'à le conduire en enfer. L'air du commandeur, pour voix de basse est un des aria pour basse les plus prodigieux jamais composé, d'une noirceur et d'une puissance infinie. Les hommes occupent une large part de l'opéra. Les femmes, considérées comme des objets par Don Giovanni, sont ainsi secondaires, se succèdent, défilent sans occuper le devant de la scène.

Tout le génie de Mozart est là : les airs magnifiques s'enchainent 3 heures durant. Mention spéciale : Acte I, "Ah Soccorso", mort du commandeur, assassiné par Don Giovanni lâchement. Trio de voix d'hommes splendide.

Die Zauberflöte
8.9

Die Zauberflöte (1964)

Sortie : 1964 (France). Classical, Opera

Album de Wolfgang Amadeus Mozart, Berliner Philharmoniker et Karl Böhm

Tom_Ab a mis 9/10.

Annotation :

Contrairement à l'idée reçue cet opéra n'est pas le dernier composé par Mozart même s'il l'a été quelques mois seulement avant sa mort.

On est d'ailleurs étonné de voir que 1791 est une année de compositions sérieuses pour Mozart, plusieurs oeuvres religieuses dont l'Ave Verum et le Requiem, un opéra seria intitulé La Clémenzia de Tito, considéré comme un des opéras les plus aboutis de ce genre et largement méconnu. Mozart rencontre d'ailleurs de grandes difficultés à l'époque, et seule la fantaisie de la Flûte Enchantée semble échapper à la règle.

Conçu pour son ami le librettiste et propriétaire de théâtre, Schikaneder, cet opéra est en rupture avec les commandes sérieuses faites par le passé. Le style est populaire, la langue est l'allemand. Il s'agit d'un singspiel, pièce de théâtre chantée en allemand avec une forte dimension comique (pendant de l'opéra-comique français). L'oeuvre est cependant, comme beaucoup de Mozart, nimbée de mystère. On lui prête des allusions francs-maçonnes, les deux amis (Schikaneder et Mozart étant francs-maçons). L'oeuvre est probablement le résultat aussi d'un travail collectif puisque d'autres musiciens travaillaient pour Schikaneder qui associait tout le monde.

Plus encore l'opéra exalte l'esprit germanique. Wagner et Goethe en était admiratif à ce titre.

Le succès est considérable. Même si Mozart n'assiste qu'à quelques représentations puisqu'il s'éteint quelques mois plus tard.

Mozart parvient ici a inscrire un opéra féerique dont les personnages sont issus du folklore. On y trouve des oiseleurs, une reine de la nuit, et tout un bestiaire populaire. Mais tout est sublimé par la musique d'une grande virtuosité, en témoigne l'air de la reine de la nuit, d'une difficulté technique absolue. En y joignant là encore la technicité du genre sérieux de l'opéra et les arias virtuoses caractéristiques, Mozart encore une fois achève de détricoter les codes de l'opéra classique pour ouvrir la voie au 19ème siècle avec l'opéra totale.

Musicalement donc, légereté, virtuosité et une sucession d'airs et de thèmes connus dans le monde entier. L'oeuvre est douce mais son point d'acmé reste l'air de la reine de la nuit, irréel dans ses sonorités puisque la soprano doit atteindre le contre fa, note quasiment la plus aigue que peuvent physiologiquement produire les cordes vocales. Mais l'ouverture est également un morceau magnifique, doux, délicat et fantastique.

Rienzi
7.1

Rienzi (1999)

Sortie : 1999 (France).

Album de Richard Wagner, Staatskapelle Dresden et Heinrich Hollreiser

Annotation :

Dernier opéra de "jeunesse" de Richard Wagner, il a eu un destin funeste qu'il fait qu'on ne le joue presque plus aujourd'hui. Il a été renié par Wagner, on ne comprend pas pourquoi tant cet opéra est abouti. La partition originale a disparu dans les cendres du IIIème Reich (cadeau offert à Hitler pour ses 50 ans) en 1945. Une sorte de malédiction pèse donc. On joue l'oeuvre rarement.

Tout au plus on exécute la célèbre ouverture qui est déjà toute wagnérienne. Nous sommes en effet en 1842, Wagner est encore ici influencé par Meyerbeer, un compositeur allemand extrêmement célèbre à l'époque qui notamment révolutionna l'opéra à Paris alliant le style italien, allemand et français. Il est l'un des utilisateurs d'une orchestration imposante, de leitmotiv, d'histoires héroiques...Tout ce que Wagner va par la suite sublimer.

Revenons sur deux clichés concernant su Wagner. Son modèle (Meyerbeer) fut un juif, ce qui relativise son antisémitisme ultérieur, quoique palpable comme chez beaucoup de ses contemporains, mais à replacer dans le contexte de l'époque, nationaliste. Le nationalisme va par la suite imprégner l'oeuvre de Wagner, puisque l'époque va voir les nations rivaliser sur tous les plans. Mais à l'époque, en 1842, ce n'est encore que balbutiant. Le livret ici est une histoire italienne, médiévale, déjà certes héroique et romantique, mais loin des histoires rhénanes et nordiques. Pour comprendre donc l'évolution que suivra Wagner par la suite, il faut comprendre les évolutions intellectuelles de l'époque dont finalement Wagner n'est que l'illustration. L'antisémitisme nait d'ailleurs du nationalisme. Le judaisme se confond aisément avec le sionisme à l'époque : religion et nation sont mêlées par les adversaires du judaisme. Un juif ne peut être allemand parce qu'il est attaché au peuple juif par nature et non au peuple allemand. Pour être un juif allemand il faudrait renier jusqu'à sa religion. A l'inverse du nazisme qui prône l'extermination des juifs, l'antisémitisme de l'époque réclame davantage une assimiliation qu'une disparition.

Rienzi est une histoire romantique. Deux puissantes familles romaines s'affrontent avec comme arrière-plan Rome et les Borgia. L'ouverture est somptueuse, sombre puis lumineuse, enlevée par un thème d'un romantisme absolu. On est loin du Wagner décrit comme "bourrin". Les cordes chantent l'héroisme et l'amour. La fin se termine par la montée des cuivres, puissante, à la Wagner, avec des contrastes puissants.

Lohengrin
8.6

Lohengrin (1964)

Sortie : 1964 (France). Classical, Opera, Romantic

Album de Richard Wagner, Jess Thomas, Elisabeth Grümmer, Dietrich Fischer‐Dieskau, Christa Ludwig, Gottlob Frick, Otto Wiener et Chor der Wiener Staatsoper

Annotation :

Un des premiers opéras majeurs de Wagner. Il s'agit d'un opéra romantique en trois actes où la musique est omniprésente. Le récital s'efface au profit d'une musique continue. L'orchestre devient aussi important que le chant. Ainsi, les moments symphoniques, par rapport à Mozart par exemple, sont très nombreux.

L'ambiance est immédiatement féérique et immédiatement celte, fondée sur une légende allemande. On ne peut pas dire à l'écoute de l'ouverture de cet opéra que c'est "bourrin". Je ne veux plus entendre ce mot. Wagner c'est certes la chevauchée des Walkyries mais c'est mal le connaitre que de l'associer et aux nazis et aux bourrins (ce qui est un pléonasme). Pour preuve, l'ouverture sur Youtube (par Karajan, en plus, cadeau ) :
https://www.youtube.com/watch?time_continue=230&v=s4ENNyKtnwQ

C'est juste du sucre pour les oreilles, d'un romantisme, d'un lyrisme rarement atteint. Encore une fois écoutez Wagner. Wagner mérite d'être davantage entendu ! Un petit article de blog rédigé par un type qui a l'air d'être assez pointu sur ce bon vieux Richard :
http://vissidarte.over-blog.com/pourquoi-tant-de-prejuges-sur-wagner

Sur ce, allez écouter Wagner !

Tristan und Isolde
8.8

Tristan und Isolde (1985)

Sortie : 1985 (France). Classical, Opera, Romantic

Album de Richard Wagner, Ludwig Suthaus, Kirsten Flagstad, Blanche Thebom, Josef Greindl, Dietrich Fischer‐Dieskau, Rudolf Schock et Edgar Evans

Tom_Ab a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

« Mais aujourd'hui encore, je cherche en vain une œuvre qui ait la même dangereuse fascination, la même effrayante et suave infinitude que Tristan et Isolde. Le monde est pauvre pour celui qui n'a jamais été assez malade pour goûter cette “volupté de l'enfer”. » Nietzsche

Wagner compose l'opéra (1865) et le livret en s'inspirant d'une légende arthurienne et celte, Tristan et Iseult. Histoire d'un amour impossible, elle lui permet de livrer un opéra dont la thématique centrale est la passion irrémédiablement tournée vers la mort. Il y ajoute aussi sa propre histoire d'amour, impossible, avec la poétesse Mathilde Wesendonck.

Ici, l'opéra est entièrement dramatique. Le comique est abandonné. Plus encore, la pièce gagne encore de l'ampleur. Elle dure en moyenne 4 heures. On peut qualifier l'oeuvre de drame musical. L'aria y est central. Les personnages ne parlent plus, ils chantent en permanence. Wagner se permet aussi de développer les airs symphoniques, sans parole, des morceaux très longs et ininterrompus de musiques, là où les contraintes scéniques, autrefois, empêchaient à un orchestre de jouer sans discontinuer.

Pour illustrer cette exagération dramatique, on peut citer le célèbre lieder entre Iseult et Tristan (le liebestod, chant d'amour et de mort) qui dure plus de 3/4 d'heures, le plus long duo jamais écrit dans la musique occidentale. Moment somptueux, exalté, presque délirant. Seul Wagner a osé ça.

Musicalement l'opéra wagnérien se caractérise par l'utilisation de leitmotiv, thèmes musicaux qui reviennent en permanence, de manière entêtante, dans tout l'opéra. Ces thèmes racontent déjà l'histoire sans même les paroles. On trouve un thème sur l'aveu, le désir, le renoncement, deux thèmes sur les philtres d'amour et de mort, qui se font écho, comme les deux revers d'une même médaille, le thème de l'aveu est associé parfois à Tristan, parfois à Iseult, parfois aux deux, avec des motifs musicaux propres et tout cela est mêlé d'une manière lumineuse et évidente tout en étant d'une érudition extrême.

L'oeuvre est d'une puissance imcomparable. Wagner utilise toute l'ampleur de l'orchestre. Mais on aurait tort de l'associer à un style poussif sans grâce. La délicatesse de certains moments cotoient la puissance de la passion. Tout le panel des sentiments y est évoqué. L'aria finale où Yseult pleure Tristan, pleure l'amour, est une merveille, pleine de douleur, de passion, de romantisme, une danse folle et macabre, un mariage de mort et d'amour.

Der Ring des Nibelungen
8.8

Der Ring des Nibelungen (1989)

Sortie : 1989 (France). Romantic, Classical, Opera

Album de Richard Wagner, Wiener Philharmoniker et Sir Georg Solti

Annotation :

Comment ne pas évoquer la fameuse tétralogie de Wagner, oeuvre ultime du compositeur. Elle est composée de 4 opéras (1 "prologue + 3 opéras complets), rassemble plus de 80 thèmes musicaux, plus de 30 personnages, 800 vers, et dure plus de 15 heures quand elle est exécutée en plusieurs jours, notamment lors du fameux festival de Bayreuth, dédié au compositeur.

L'oeuvre est donc d'une telle richesse, une prouesse d'une cohérence si incroyable que je suis bien incapable de la décrire, n'ayant pu, faute de temps, encore l'écouter entièrement. Se faire le grand chelem (4 opéras) en 3 jours à Bayreuth est tentant mais c'est un sacré défi pour les oreilles.

Car les oreilles en prennent plein la tête, l'orchestration est puissante, épanouie, capable des pianissimo comme des fortissimo les plus étourdissants, les pauses sont rares, le spectacle est total, l'histoire complexe. Tout s'entremêle à partir de thèmes simples et reconnaissables. On y trouve des thèmes parmi les plus célèbres du compositeur : la fameuse chevauchée des Walkyrie (cf. Apocalypse Now) dans le second Opéra nommé la Walkyrie, le voyage de Siegfried sur le Rhin et la mort de Siegfried dans le dernier opéra, Le crépuscule des dieux.

Revenons sur le dernier opéra. Il conclue au terme d'un marathon musical une grande fresque centrée autour de la chanson de Nibelungen, un poème médiéval allemand qui met en scène Siegfried, qui possède les reliques des dieux de la terre (dont un fameux anneau qui a inspiré outre-manche), dieux nommés les Nibelungs, des nains aux pouvoirs magiques. S'ensuit une épopée fantastique, nationaliste (contexte de l'époque), épique et mystique comme Wagner sait les faire. Lors du dernier acte du dernier opéra, Siegfried meurt, trahi. Sa tendre épouse le brûle sur un bucher et meurt à ses côtés avant de mourir noyée dans les eaux du Rhin qui lave le monde détruit et consumé suite aux guerres sanglantes de l'histoire pour que de nouveaux jours se lève. Le chant d'amour et de desespoir de Brunhelilde envers son époux est d'une beauté extraordinaire. Il nécessite une tessiture prodigieuse et se ponctue d'une douceur élégiaque comme d'une gravité puissante et émotive.

Le final s'achève par le thème de la rédemption par l'amour (sublime), thème entendu plusieurs fois au cours de l'oeuvre. La terre, lavée de ses crimes, renait. Le temps des dieux est achevé. L'anneau disparait dans les eaux du Rhin avec tous les trésors divins. Vous avez dit Seigneur des Anneaux ?

Carmen
8.3

Carmen (2012)

Sortie : août 2012 (France).

Album de Georges Bizet, Magdalena Kožená, Jonas Kaufmann, Genia Kühmeier, Kostas Smoriginas, Berliner Philharmoniker et Simon Rattle

Tom_Ab a mis 9/10.

Annotation :

Opéra comique, Carmen de Bizet est l'oeuvre française la plus jouée au monde, un des opéras les plus célèbres aussi, composé en 1875.

Georges Bizet n'en verra pas pourtant le succès, jamais démenti puisqu'il meurt quelques semaines plus tard, après une première représentation désastreuse et mal reçue par le public à cause de sa thématique sulfureuse de la femme fatale. Il est ainsi auréolé de gloire à sa mort à 36 ans. Ironie suprême, il fait une rupture d'anévrisme en pleine représentation de la pièce alors que sur scène un des personnages tire les cartes pour la divination et retourne celle de la mort.

L'opéra est français par essence, admiré par Wagner, Nietzsche, Brahms et Tchaikovsky : cocorico !. L'opéra français se caractérise par un style limpide, des passages parlés et dansés. Le livret est de Ludovic Halévy, d'après une nouvelle de Prosper Mérimée. La légereté est toujours le pendant cependant du tragique à l'instar de la structure de l'oeuvre qui commence par un thème enjoué, celui de corrida pour enchainer avec le thème de la mort à venir de Carmen, femme fatale, femme méditerannéenne et donc par nature tragique. Bienvenue dans l'Andalousie et ses beautés. Et pourtant parmi les critiques on reprochera d'une part à Bizet de ne pas placer son action en France et d'imiter le style de Wagner, ce qui, après la défaite française contre l'empire allemand était une insulte, dans un contexte nationaliste.

Le génie mélodique de Georges Bizet n'a pourtant que peu de comparaison ici : le thème de la corrida est un air que tout le monde connait, le thème de la mort de Carmen est touchant, dessinant des contrastes dont l'oeuvre est émaillée. Ces contrastes sont visibles dès l'ouverture de la pièce où se succèdent les deux facettes de l'opéra : enjoué et tragique. Les thématiques de la femme libre, de l'amour passionné jusqu'à la mort sont omniprésentes. Cette ouverture est l'une des plus célèbres de l'histoire de la musique classique. On peut aussi parler des airs : l'air des toreadors, l'air de "l'amour est enfant de bohème". L'orchestre est ici très ample, l'usage des cuivres et des percussions, et de musiques très rythmées est omniprésent. On notera aussi la présence des choeurs et des tutti. La voix de Carmen est une gagueure, car réclamant une large tessiture et une puissance dans les aigues. Interprétée par toutes les grandes cantatrices, notamment La Callas. Un classique.

Samson et Dalila
7.7

Samson et Dalila (1992)

Sortie : 16 janvier 1992 (France).

Album de Camille Saint‐Saëns, Plácido Domingo, Elena Obraztsova, Robert Lloyd, Chœur de l'Orchestre de Paris, Orchestre de Paris et Daniel Barenboim

Annotation :

Qui n'a pas entendu Maria Callas chanter "Mon coeur s'ouvre à ta voix", célèbre air de l'opéra de Camille Saint-Saens => https://www.youtube.com/watch?v=3T899yAHgDI. L'oeuvre composée en 1877 est l'une des plus célèbres du répertoire, une oeuvre française qui a une caractéristique, un thème biblique, ce qui lui donne des allures mystiques et torturées.

En témoigne l'ouverture, très grave, un choeur à l'antique, amené par des contrebasses somptueuses, théâtralité très classique mais avec un orchestre très puissant. Saint-Saens reprend à son compte le style wagnérien. Tout y est grandiose. L'histoire s'y prête, avec la mystique propre du romantisme et la thématique mystique. Samson est le héros juif qui libère son peuple des philistins. La volupteuse Dalila, philistienne, vient le séduire pour percer le secret de sa force légendaire. Il cède, dans un duo amoureux somptueux mais cruel. Elle comprend que sa chevelure lui donne sa force et les philistins lui coupent et lui crèvent les yeux pour se venger. Mais Samson, élu de Dieu, trouve la foi et détruit le temps paien des philistins dans un accès de rage.

Pelléas et Mélisande
6.7

Pelléas et Mélisande (1987)

Sortie : octobre 1987 (France).

Album de Claude Debussy, Frederica von Stade, Richard Stilwell, José van Dam, Ruggero Raimondi, Nadine Denize, Berliner Philharmoniker et Herbert von Karajan

Annotation :

"Une oeuvre après Wagner et non pas d'après Wagner" Il s'agit de la forme la plus absolue de drame lyrique dans la droite lignée de Wagner, d'autant plus que le livret de Maeterlinck en français, célèbre dramaturge, est lui aussi inspiré de Tristan et Iseult et du mythe antique. Ce rattachement à l'héritage de Wagner et l'héritage antique est tout à fait l'illustration de ce que cherche Debussy dans cette pièce.

Il accouche ainsi d'un mélange entre théâtre et opéra, où les passages à demi parlés s'enchainent aux longs morceaux musicaux. La musique est entièrement au service du drame. Quand elle doit s'effacer, elle s'efface, quand elle doit s'exprimer, elle s'exprime. Le texte de Maeterlinck est plus visible. Ainsi, l'oeuvre est un flot musical ininterrompu, fait unique dans l'histoire de l'opéra.

Seul opéra du compositeur, fruit de 10 ans de travail, l'opéra reste une exception dans l'art lyrique. Debussy est totalement libre et affranchi de tous les codes et corsets de l'opéra classique : s'il faut 10 minutes de dialogue il les met, s'il faut 10 minutes sans parole il les met.

« J'ai voulu que l'action ne s'arrêtât jamais, qu'elle fût continue, ininterrompue. La mélodie est antilyrique. Elle est impuissante à traduire la mobilité des âmes et de la vie. Je n'ai jamais consenti à ce que ma musique brusquât ou retardât, par suite d'exigences techniques, le mouvement des sentiments et des passions de mes personnages. Elle s'efface dès qu'il convient qu'elle leur laisse l'entière liberté de leurs gestes, de leurs cris, de leur joie ou de leur douleur. » Voici ce que Debussy explique sur son oeuvre.

Lorsque l'opéra sort en 1902, c'est un tollé pour une partie de la critique. L'oeuvre n'est déjà plus classique mais résolument moderne car affranchie de toute contrainte et codification de genre. La déconstruction musicale n'est déjà pas loin. Musicalement, l'irréalité domine la pièce avec une forte symbolique (motifs musicaux sylvestres ou de la nature), flot ininterrompu de musique où se mêlent diverses interprétations et thématiques. Les morceaux, en français, sont nimbés d'une atmosphère mystérieuse. L'écoute est plus exigente.

Tom_Ab

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