Séries TV Turques - Vues et notées

Annotation :

Belle mise en image de la névrose que traverse la culture Turque et les turcs eux-mêmes. Déchirés entre modernité et traditions, cette série chorale arrive à faire avancer tous ses personnages de façon lente mais cohérente, tout en restant intéressante et sensible. Les interprètes sont magnifiquement dirigés et la caméra capture à quelques instants précis des regards et des émotions d'une justesse émouvante. Les musiques de fins d'épisodes toutes teintées d'une touche rétro replongeant le spectateurs dans les années 1970 met encore plus l'accent entre un pays qui en 2020 semble encore plus crispé sur ses valeurs identitaires que 50 ans auparavant (les photos du générique de fin du tout dernier épisode soulignent la modernité aujourd'hui rediscutée)
Ayant grandi une partie de mon enfance dans ce pays dans les années 70 pour ne plus jamais y remettre les pieds, la Turquie reste mon ailleurs adoré, haïs et à jamais vertigineux. Mon avis est forcément d'une partialité dangereuse.
Très joliment filmé, avec une caméra qui rend ses cadrages statiques efficacement narratifs, misant sur ses couleurs passés et une lumière douce, le visuel de la série est à la hauteur du scénario qui ne misant jamais sur le spectaculaire étudie assez librement le morcellement de ses quelques personnages qui se perdent, se révèlent ou se reconstruisent.
L'émotion est belle. L'écriture sans voyeurisme éhontée. Le final ne pose aucune morale culpabilisatrice et n'apporte aucune réponse vaine ou pré-mâchée. Ou alors si : un évanouissement à nouveau pour boucler la boucler d'un pays qui se dérobe à lui-même... ou presque.

Annotation :

Je surnote probablement parce que j'en ai marre de mettre des 5 et des 6 qui reviennent trop souvent dans mes notations. J'ai envie d'être gentille. Ca ne vous aide pas à vous faire une idée, je le sais. Pour être plus utile je dirais que le principal intérêt de la série repose essentiellement sur son sujet central : une épidémie touchant toute l'humanité et qui se transmettrait par la parole. Le sujet contaminée par la simple audition d'un patient atteint se met instantanément à produire une logorrhée incessante ou les mots dénuées de leur sens s'entrechoquent dans des discours continus et sans fin déconnectant la personne atteinte de la réalité qui l'entoure. Evidemment, on est dans une pure dystopie. Evidemment, les gouvernants sont les ennemis, ils cachent des choses, ils contrôlent parquent et isolent plus qu'ils ne soignent... Et évidemment, il y a un "élu", il est immunisé et évidemment tout ceux qui ont un intérêt quelconque dans cette histoire sont à ses trousses. Et comme on peut s'y attendre "l'élu" se braque, résiste et refuse son statut de clef du problème... bref les clichés sont réunis. Mais malgré cela et malgré des passages un peu forcés et écrit à la truelle : la série est une jolie surprise pour sa saison1. Les effets spéciaux sont bons, le casting (qui fait la part belle à la pilosité) offre de belles "gueules" et plutôt la narration est plutôt fluide et poétique dans ces parenthèses oniriques. La curiosité devant cet Istanbul post appocalytique et ce peuple turc opprimé parqué et dont la parole n'a plus aucun sens est relativement accrocheur. Ici rien n'est glamour, la colorimétrie est délavée et même si je regrette déjà l'idée de voir cette série se corrodée en cavalant vers une saison 2, je ne regrette pas les 8h de la saison 1 que je vous recommande sans plus de babillages inutiles...ou presque !

Annotation :

Malgré une première scène en flashforward inutile et une scène de clôture en fin de l'épisode 6 mal amenée, ce thriller suit avec une belle intensité le parcours violent d'une femme qui sombre. On assiste à son réveil après un premier coup de feu qui va faire ressurgir les démons d'un passé qu'elle ne contrôle plus. La série suit l'urgence d'un présent qu'elle tisse un peu trop grossièrement avec des pièces du volontairement occultés (pourquoi son mari est en prison, comment son fils est mort, pourquoi tout son entourage l'exhorte à oublier son mari disparu ?) Entre invisibilité et infantilisation, le personnage féminin principal incarne une certaine vision de la femme turque qui semble n'exister que par son statut d'épouse ou de mère. Ici Fatma en l'espace de très peu de temps n'est plus ni l'une, ni l'autre. Donc elle semble ne plus être personne. La réussite de la série tient sur le fait de réussir très facilement à dépeindre ce phénomène d'une façon aussi violente et spectaculaire dans ce thriller où l'insignifiance ou est acculé l'héroïne la rend invisible aux yeux de tous et même à ses propres yeux qui occultent volontairement de se voir telle qu'elle est : à la fois victime et bourreau donnant aussi bien la vie que la mort. Une série imparfaite mais forte et bien menée dans sa narration, son casting et son énergie visuel d'une clarté aussi aveuglante que sa lumière... ou presque.