Cover Spike Lee - Commentaires

Spike Lee - Commentaires

Coloré et politique, tendre et incisif, communautaire et revendicatif : tel est le style de celui qui, au tournant des années 80-90, offrit un visage neuf au jeune cinéma indépendant américain. Si sa filmographie comporte notoirement nombre d’œuvrettes mineures que je n’ai pas vu, ce que j’en connais ...

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10 films

créée il y a plus de 12 ans · modifiée il y a plus de 5 ans
Nola Darling n'en fait qu'à sa tête
6.7

Nola Darling n'en fait qu'à sa tête (1986)

She's Gotta Have It

1 h 24 min. Sortie : 7 janvier 1987 (France). Comédie, Romance

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Nola n’a qu’un lit mais trois prétendants : un romantique qui croit aux valeurs de la fidélité, un cycliste hip-hop qui la fait rire, un macho narcissique et bodybuildé. Outsider : la bonne copine lesbienne ne désespérant pas elle non plus de la croquer. Et pour raconter ce désordre sentimental, le cinéaste demande à chacun de faire face caméra le récit de sa rencontre avec la belle, de justifier choix de vie, gestes et comportements. L’énoncé minimal fonctionne à plusieurs niveaux : d’abord comme un gag à répétitions, ensuite comme une signature, enfin comme l’appartenance à l’école du cinéma indépendant new-yorkais. Tel un La Bruyère de Brooklyn (ascendant Woody Allen black et branché), Lee réussit là un premier long-métrage mordant, sexy, inventif, dont le charme séduit autant que les accents de vérité.

Do the Right Thing
7.5

Do the Right Thing (1989)

2 h. Sortie : 14 juin 1989 (France). Drame

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Brooklyn, un jour de canicule. Dans un climat électrique où les tensions communautaires s’exacerbent, Lee déroule une tragi-comédie colorée et rythmée comme un vidéo-clip. La mise en scène organise une partie de ping-pong scénographique entre les lieux, les personnages, les récits, prend le pouls et la température du macadam new-yorkais, agence les points de vue autour du racisme ordinaire (du pacifisme hérité de Luther King à la virulence plus offensive) avec une équité démocratique qui n’exclut pas l’engagement. Gorgé d’humour, de tendresse, de chaleur, de culture black et hip-hop, le film agit tel une bombe à retardement, jusqu’à l’étincelle qui met le feu au poudre. Face à elle, le cinéaste exige de ses semblables le triomphe de la lucidité, préambule indispensable à toute forme d’action future.
Top 10 Année 1989 :
http://lc.cx/UVV

Mo' Better Blues
6.9

Mo' Better Blues (1990)

2 h 09 min. Sortie : 21 novembre 1990 (France). Drame, Comédie musicale, Romance

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Lee semble faire muter son imagerie de la "blackitude" en la décapant, en lui donnant une dignité hollywoodienne. Tout ici respire son plaisir de filmer, sa virtuosité de styliste, son bonheur à s’ébrouer dans le glamour du spectacle : volupté tactile de la photographie, série de tons allant de l’orange au beige en passant par le rouge, jeu d’oppositions entre les couleurs chaudes (hot) et les couleurs froides (cool), transitions mélodieuses à la fluidité de poulpe. En résulte une ballade inondée de truculence et de sensualité, une chronique musicale faite d’ardeurs, de vitalité et de sentiments, tissée dans la chaleur douce des clubs, le cuivre doré des instruments et la carnation noire des peaux. Les deux heures fusent avec grâce, jusqu’à l’accélération assez folle d’une conclusion en forme de coda romanesque.
Top 10 Année 1990 :
http://lc.cx/UuE

Jungle Fever
6.7

Jungle Fever (1991)

2 h 11 min. Sortie : 5 juin 1991. Comédie dramatique

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Les films de Spike Lee ont beau prendre le pouls de l’opinion publique sur des thèmes d’actualité sociale, ils agissent comme des tests pas du tout neutres et même consciemment provocateurs de révoltes imprévisibles contre le statu quo. La preuve avec ce tourbillon coloré qui remélange mille stéréotypes ethniques, enfonce le clou de la croissance chorale, des ruées horizontales ou verticales de la caméra, des insultes en slang truffant les dialogues comme des salves, logorrhées contre l’ennemi par laquelle chacun affirme son identité et fixe son territoire individuel. C’est le problème de l’incompatibilité et des préjugés interraciaux qui intéresse l’auteur, non son accommodement, et si son propos est parfois brouillon et schématique, le pessimisme de son constat s’exprime avec une séduisante combativité.

Malcolm X
7.1

Malcolm X (1992)

3 h 22 min. Sortie : 24 février 1993 (France). Biopic, Drame, Historique

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

La vigueur offensive et l’engagement des films précédents fermentent de toute évidence cette biographie ambitieuse du controversé leader de l’émancipation black des sixties. Ne cachant rien de sa profonde admiration pour son personnage, frisant parfois la complaisance hagiographique y compris dans ses côtés les plus problématiques (ultra-communautarisme et radicalisme proche du racisme), le cinéaste met sa sensibilité électrique au profit d’un récit ample et coloré. J’aime beaucoup la première heure, pleine de fraîcheur, de drôlerie et d’énergie (que l’on pense seulement à cette étourdissante séquence de comédie musicale qui prouve que l’auteur n’a rien perdu de sa verve) ; puis quand le récit gagne en gravité, qu’il se fait plus signifiant, il rentre un peu dans le rang.

Clockers
6.8

Clockers (1995)

2 h 08 min. Sortie : 22 novembre 1995 (France). Drame, Policier

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Comme toujours chez Lee, la rue est à la fois le monde, son théâtre sa justification : les conflits les plus intimes y sont exposés aux yeux de tous, abolissant la barrière fictive entre privé et public. Précipités dans cet univers rassemblant en mosaïque le bien et le mal, la réussite sociale et la déchéance, l’argent propre et l’argent sale, les vieux et les jeunes, les Noirs et les Blancs, les individus se dépouillent de leur singularité pour devenir les rouages d’un mécanisme collectif implacable. Et l’auteur de livrer une analyse en bonne et due forme de certains points de tension endémique, d’associer avec sûreté un style éclaté à une écriture ferme tout en respectant les codes du genre criminel, de troubler la perception des personnages par des révélations inattendues qui ne brisent jamais la cohérence de l’histoire.

Summer of Sam
6.7

Summer of Sam (1999)

2 h 22 min. Sortie : 5 janvier 2000 (France). Thriller, Policier, Comédie dramatique

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Juillet 1977, dans le Bronx. Le disco affronte le punk, l’été est torride, et un labrador noir, agent d’un démon millénaire nommé Sam, intime l’ordre à Richard David Falco de tuer, en préférence les jeunes femmes brunes. La fièvre atteint son comble lorsqu’une énorme panne d’électricité plonge la ville dans le noir et le chaos. Climat d’apocalypse urbaine dépeint avec une énergique délectation par le cinéaste, qui brosse une fresque clinquante, séduisante, survitaminée, où la violence se mêle à la marginalité et le puritanisme à la débauche. Par-delà une matière romanesque à plusieurs étages, autour de laquelle il déploie deux heures de style glamour et de récits parallèles, il analyse les mécanismes de la peur et du désordre, le rapport de la norme et de la marge, l’exaspération sociale portée à son point de rupture.
La bande-annonce incendiaire, sexy et survoltée m'a longtemps fait de l'oeil... (je ne sais pas combien de fois j'ai pu la regarder, celle-ci) :
https://urlz.fr/87h4

La 25ème heure
7.4

La 25ème heure (2002)

25th Hour

2 h 15 min. Sortie : 12 mars 2003 (France). Drame, Policier

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

New York est à terre, meurtrie dans une hébétude crépusculaire, exhibant les plaies ouvertes de Ground Zero. Le spleen chevillé au corps, Monty décide néanmoins de faire de sa dernière nuit avant la taule une tournée d’adieux portée par l’espoir. S’il n’est pas complètement abouti (je me serais bien passé du dernier quart d’heure interminable et violoneux), le film accroche et ne lâche plus. Lee suit l’ultime parcours crépusculaire mais rédempteur d’un homme confronté aux échecs de son existence. L’occasion d’un portrait complexe, fort, nuancé, d’une galerie de personnages vibrants d’humanité, qui confère à ce conte moral sur la force de l’amitié, la foi en la communauté et la fin de l’innocence, parachevé par quatre formidables acteurs, une photo et une musiques superbes, une belle amplitude émotionnelle.

Inside Man - L'Homme de l'intérieur
6.9

Inside Man - L'Homme de l'intérieur (2006)

Inside Man

2 h 09 min. Sortie : 12 avril 2006 (France). Policier, Gangster

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Délaissant ses grands sujets sociaux et psychologiques (si ce n’est quelques allusions discrètes au détour des dialogues), le cinéaste s’attelle à un pur film de genre et emballe la mécanique maline et alambiquée de son polar avec le savoir-faire classieux d’un artisan rompu à ce genre d’exercice. Il tente donc de faire sauter la caisse en filant le coup millimétré, exécuté au pas cadencé par un super-pro, pièce montée qui débarque au dessert triomphante sous ses feux de Bengale : le plan parfait. Sur un scénario blindé de fausses pistes et de rebondissements, au gré d’une mise en scène fluide qui fait la part belle à trois acteurs rivalisant de charisme (un vrai plaisir), le film s’impose comme un thriller grand luxe, dense, élégant, qui tient brillamment sa place dans la longue généalogie du film de braquage.

BlacKkKlansman - J'ai infiltré le Ku Klux Klan
7

BlacKkKlansman - J'ai infiltré le Ku Klux Klan (2018)

BlacKkKlansman

2 h 16 min. Sortie : 22 août 2018 (France). Comédie, Policier, Biopic

Film de Spike Lee

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Qu’il soit désormais désormais sexagénaire n’empêche pas Spike Lee de se montrer toujours aussi énervé. Sa verve de polémiste semble pourtant s’être légèrement affadie : tantôt tenu en laisse par les conventions du "buddy movie" policier, tantôt aspiré par la tendance farceuse de la satire sociale, genres pour lesquels il ne prend jamais totalement parti, le film donne parfois l’impression de rester planté au milieu du gué. Mais sa facture relativement consensuelle n’enlève rien à la pertinence, à la drôlerie et à la colère d’un propos qui interroge l’Amérique d’hier et d’aujourd’hui, le poids de ses images, de ses fictions, de ses paroles sermonnantes, et qui réaffirme avec une ardente conviction la nécessité de la vigilance dans un pays toujours gangrené par le poison séculaire du racisme et de la discrimination.

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