Nouvel enchantement de Djian. Il reste le meilleur pour la dissection complexe des rapports humains.
Comme certains vieux cinéastes toujours en activité, il produit une œuvre par an parmi lesquelles se trouve un chef d’œuvre par lustre. Ce 2030 en est du nombre.
C'est toujours une affaire d'ambiance, de psychologie et de véracité des dialogues. Ce saint triptyque Djiannien est ici à la hauteur, le plus éclatant que peut fournir l'auteur.
Auteur météorologique s'il en est, qui aime nous renseigner régulièrement sur l'état du climat, de l'agencement des nuages, de la pluviométrie ou du degré d'ensoleillement ; 2030 trouve un écho supérieur à cette manie littéraire où le dérèglement climatique affichant ses premiers symptômes est la vitrine idéale pour de telles indications.
Ces personnages qui désormais tous accumulés pourraient former une petite ville de province où ils nageraient tous entre monotonie quotidienne et folie subreptice. Ceux de 2030 n'échappent pas à cette règle, ils nous sont familiers et attachants par leur profonde humanité, barrés juste ce qu'il faut, torturés légèrement juste ce qui est supportable, à l'image des héros de la série Six feet under dont je suis à peu près certain que Djian s'en est délecté.
Si l'histoire n'est qu'un prétexte à l'élaboration des personnages, à leur épanouissement dans la ligne du temps, elle se trouve être, dans 2030, passionnante, ce qui additionné au style en fait un livre quasiment parfait.
Pour conclure, si Djian nous déçoit parfois par les attentes non comblées que laissait espérer sa production, cette fois il répond présent et offre la quintessence de son génie créatif à ses admirateurs les plus dévoués.
La courte anticipation qui sépare la sortie du livre du déroulement fictif de son contenu, ces dix années d'écart sont un élément en plus qui vient comme une technique scripturale enrichir définitivement un roman pulvérisateur d'étincelles.
Samuel d'Halescourt