Rarement une quatrième de couverture n'aura été aussi honnête sur la marchandise. Vous voulez un récit truffés de combats, sans prise de tête ? Balafrée est fait pour vous ! Il est l'équivalent des blockbusters dans son domaine, pur enchaînement de péripéties simplistes dans un univers fantasy des plus classiques.
Ce livre n'innove en rien le genre bien qu'il se révèle efficace. L'héroïne est une tantième femme fort dont l'unique motivation réside en la vengeance. Malken s'adapte vite à son environnement après des années de captivité et la perte de sa mère. Outre ses pensées simplistes, elle aime le sexe, la baston et l'alcool et on en est servi à toutes les sauces, si je puis dire. Elle se plaint souvent de sa condition et de l'antipathie d'autrui à son égard, mais d'un autre côté, elle se montre souvent impulsive et égocentrique. C'est simple, dans ce livre, il n'y en a que pour sa pomme. Elle a beau faire des efforts, elle évolue peu au cours du temps. Tantôt compréhensible, tantôt insupportable, cette petite Malken devient finalement attachante, parce qu'elle correspond à l'atmosphère du bouquin.
Les autres personnages, en revanche, c'est un autre histoire. Un constat suffit à les résumer : l'auteur a essayé d'empiler tous les clichés possibles. Cela devient un formidable concours que de chercher le nom le plus tarabiscoté et typé fantasy, mais je crois que j'offrirai la palme d'or à Xxy'shkish. Pour obtenir un nom aussi improbable, l'auteur a sûrement écrasé sa tête sur son clavier, je n'ai pas d'autres explications. Pour le reste, au-delà de l'image classique de la "free independant woman", préparez-vous à voir des Bannis tous plus caricaturaux et non attachants les uns que les autres affronter le terrible empire. Chaque race, chaque personnage semble tout droit sorti d'une fanfiction de World of Warcraft.
Enfin, je ne vais pas jeter inutilement la pierre, car Michel Robert détient quand même un univers sympathique dont l'allure classique est pleinement assumé quoique exacerbé. C'est juste dommage qu'il dégage vite tous les éléments profiteurs au profit d'une succession de batailles qui se ressemblent. Exit les Soeurs du Silence jusqu'à la fin du bouquin qui n'est qu'un cliffhanger basique, place à une troupe stéréotypée où on nous apprendre, oh surprise, qu'une femme peut se battre aussi bien qu'un homme, après avoir volontairement écarté toutes les femmes combattantes à l'exclusion de l'héroïne, bien sûr. Le tout est entrecoupé par des séquences assez superflues avec le chef guerrier le plus basique qu'il m'ait été donné de voir, et l'Elfe Valéna d'Aubépine, peut-être le meilleur personnage secondaire du livre, par ailleurs.
Dans un style inégal se suivent avec rythme et intensité moult batailles, rapines, duels, massacres. Promesse tenue pour Balafrée, mais j'ai surtout ressenti du plaisir lors de la première partie du tome, notamment lors du passage à la cité. Là, Malken se découvre totalement : elle aime boire, elle adore se battre jusqu'à la sueur, l'épuisement et le ruissellement d'hémoglobine, et dominer au lit constitue l'un de ses passes-temps, jusqu'au moment où cette séquence intéressante s'achève pour nous décrire une confrontation auprès des Bannis, "enfoirés au cœur d'or", pour combattre le méchant Empire des Humains.
Néanmoins, malgré tous ces défauts ostentatoires voire assumés, le divertissement est complet. Les amateurs de fantasy aboutie, de récits intimistes et d'intrigues géo-politiques complexes seront sûrement déçus. En revanche, les férus de fantasy plus simpliste, efficace, et sanglante apprécieront la fougue de l'héroïne, l'univers au service de bataille rythmées, ils s'offriront totalement au divertissement, alors que se succéderont des scènes de baston et de sexe sous leurs yeux ébahis.
Balafrée se goûte comme un plat simpliste préparé avec amour : on sait que ce n'est pas de la gastronomie mais on le mange quand même avec plaisir, entre d'autres récits plus ambitieux.