Tout commence et tout finit avec Elizabeth. Beth. Celle qui, enfant aimait à se voir en Petite Bébeth, la modeleuse de possibles. Elle a bien grandi, car nous retrouvons une adolescente dans cette nouvelle Petite Bulle d’Univers de chez Organic qui est sortie en 2013. Beth est dorénavant Boboth la machine à rêver, car c’est par le rêve que le dehors se modèle.
Le principe des Petites Bulles d’Univers est toujours le même. Et c’est une nouvelle fois Laura Vicédo qui prépare la trace avec ses sculptures composées d’objets de récupération. Pour cette nouvelle graphique, ce sont des machines qu’elle nous propose. Oh, pas les gigantesques machines de Jean Tinguely. Non. Des machines constituées des petits objets du quotidien. Des machines sans intérêt économique, mais pas inutiles pour autant, car elles parlent à l’âme. Elles parlent à nos âmes, étant issues des rêves de l’artiste et deviennent dans un bel ensemble les machines à rêver de Boboth. Il était un petit prince qui voulait qu’on lui dessine un mouton. Il est dorénavant Boboth qui veut qu’on lui dessine un rêve.
Les œuvres de Laura parlent à nos âmes, car elles matérialisent d’une certaine façon l’imaginaire en réunissant des objets qu’il serait incongru de voir ensemble dans notre monde où l’utilité prime sur toute autre valeur. Et Philippe Aureille réussit à merveille à les mettre en scène, au travers de prises de vue qui donnent une impression de mouvement, de vie intérieure qui leur est propre. Au demeurant, les dessins de Marion Aureille sont aussi de belles illustrations – commentées – en deux dimensions de ces belles machines.
Li-Cam nous permet de retrouver Beth. Cette dernière est maintenant au collège. Brillante, elle est entourée d’autres ados. Certains la raillent, d’autres l’utilisent, mais il en est qui l’aiment pour de vrai. Elle n’est pas dans le plaire, ce n’est pas son truc. Elle reste autiste et vit essentiellement dans l’en-soi, mais elle a appris à s’accommoder de l’extérieur et à apprécier certains aspects de ce dehors si peu naturel pour elle. Ce n’est pas pour autant qu’elle s’ouvre aux autres, c’est elle qui décide. Elle n’aime rien tant que de se retrouver seule le soir dans sa chambre et de replonger en elle, en tournant tel un derviche. L’autisme n’est pas une prison quand on en apprend les clés. Nous sommes tous autistes, dans nos habitudes, nos contraintes matérialistes et pourtant il suffirait de laisser plus de place aux rêves en chacun de nous pour que la vie s’illumine et prenne des saveurs inespérées.
Parce que le rêve est le carburant des espoirs et des projets, c’est la vie qui s’y exprime. Certes, c’est trop souvent spontané, en dehors des codes que la société nous impose, que s’exprime Beth. Il ne faut pas y voir de maladresse, mais juste l’expression d’une liberté que nous nous refusons pour des convenances sans réel intérêt. Les valeurs, voilà bien une thématique que les artistes exploreront encore longtemps tout comme c’est le cas dans cette superbe œuvre. Il n’est pas question de juger, juste de se laisser porter par ce que l’on voit, ce que l’on ressent. Sans analyse. Et vivre tout simplement, en se sachant vivant avant tout.
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